MHD/LD
ARRET N° 439
N° RG 19/02564
N° Portalis
DBV5-V-B7D-FZY2
S.A.S.U. [3]
C/
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA CREUSE
CARSAT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 23 JUIN 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 juin 2019 rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de GUERET
APPELANTE :
S.A.S.U. [3]
N° SIRET : 307 390 104
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentée par Me Franck DREMAUX, substitué par Me Florence BOYER, tous deux de la SCP PRK & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS
INTIMÉE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA CREUSE
Service contentieux
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Mme [I] [S] de la CPAM de la Vienne, munie d'un pouvoir
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
CARSAT
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Mme [R] [G], munie d'un pouvoir à l'audience du 12 octobre 2021 et non comparante à l'audience 04 avril 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article
945-1 du Code de Procédure Civile, les parties ou leurs conseils ne s'y étant pas opposés, l'affaire a été débattue le 04 Avril 2022, en audience publique, devant :
Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente qui a présenté son rapport
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente
Madame Anne-Sophie DE BRIER, Conseiller
Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
GREFFIER, lors des débats : Madame Patricia RIVIERE
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du Code de procédure civile,
- Signé par Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente, et par Monsieur Lionel DUCASSE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 25 octobre 2017 Monsieur [U] [N], salarié de la Société [3] en qualité de cariste, a déclaré auprès de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Creuse une maladie professionnelle suivant un certificat médical initial du 23 octobre 2017 faisant état d'une « sciatique itérative hyperalgique gauche discarthrose étagée L.5-S.1 ».
Par courrier du 26 février 2018, après instruction du dossier et recours à un délai complémentaire, la CPAM de la Creuse a notifié à l'employeur sa décision de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle.
La Société [3] a contesté cette décision en saisissant :
- par courrier du 27 avril 2018, la commission de recours amiable laquelle, par décision du 19 juillet 2018, a rejeté sa demande ;
- par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 septembre 2018, le tribunal de sécurité sociale de la Creuse, lequel, devenu le Pôle Social du tribunal de grande instance de Guéret, a par jugement du 12 juin 2019 :
° constaté que la demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par Monsieur [N] [U] n'est pas prescrite ;
° débouté la Société [3] de l'ensemble de ses demandes ;
° confirmé la décision de la commission de recours amiable du 19 juillet 2018 ;
° déclaré opposable à la Société [3] la décision de prise en charge de la maladie professionnelle notifiée le 26 février 2018.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 11 juillet 2019, la Société [3] a interjeté appel de tous les chefs du dispositif de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées par les parties.
***
L'affaire, initialement fixée à l'audience du 12 octobre 2021, a fait l'objet d'un renvoi et a été plaidée le 4 avril 2022.
PRÉTENTION DES PARTIES
Par conclusions du 7 octobre 2021 reprises oralement à l'audience et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, la Société [3] demande à la Cour de :
- infirmer le jugement attaqué,
* In limine litis
- dire et juger que l'action en reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie déclarée par Monsieur [N] [U] est prescrite de telle sorte que la caisse aurait dû rejeter sa demande,
- par conséquent, lui déclarer la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie inopposable.
* A titre principal,
- dire et juger que la CPAM de la Creuse n'a pas respecté ses obligations telles qu'elles résultent des articles R.441-10 et suivants du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable aux faits d'espèce, et a porté atteinte au principe du contradictoire lors de la procédure d'instruction,
- par conséquent, lui déclarer la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie inopposable.
- dire et juger que les conditions du tableau n°97 des maladies professionnelles ne sont pas réunies,
- dire et juger que la CPAM de la Creuse ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du caractère professionnel de la maladie,
- par conséquent, lui déclarer la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie inopposable.
* A titre subsidiaire,
- ordonner avant dire droit une expertise médicale judiciaire.
* En tout état de cause,
- débouter la CPAM et la CARSAT de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions.
Par conclusions du 12 octobre 2021, reprises oralement à l'audience, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, la caisse primaire d'assurance maladie de la Creuse demande à la Cour de :
- déclarer la Société [3] irrecevable en son appel,
- constater la péremption de l'instance en cause d'appel,
- dire et juger que le jugement attaqué bénéficie de l'autorité de la chose jugée.
* A défaut,
- déclarer la Société [3] mal fondée en son appel,
- confirmer le jugement attaqué,
- dire et juger que la demande de reconnaissance de maladie professionnelle de Monsieur [N] [U] était recevable,
- constater que les conditions du tableau n°97 des maladies professionnelles sont remplies de sorte qu'est établie la présomption d'imputabilité au travail,
- dire et juger que le principe du contradictoire a été respecté,
- dire et juger que la décision de prise en charge de la maladie professionnelle est opposable à la Société [3],
- rejeter la demande d'expertise médicale,
- rejeter la demande d'imputation de la maladie professionnelle au compte spécial pour cause d'irrecevabilité,
- se déclarer incompétente pour statuer sur la demande d'inscription sur le compte spécial et, à défaut, dire et juger irrecevable cette demande,
- condamner la Société [3] au paiement de la somme de 500 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
- condamner la Société [3] aux dépens.
Par conclusions d'intervention volontaire auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) du Centre-Ouest Creuse, intervenant volontairement à l'instance, qui avait donné pouvoir à la CPAM de la Haute Vienne le 6 octobre 2021 pour la représenter à l'audience du 12 octobre 2021 à laquelle le dossier était appelé pour la première fois, demande à la cour de :
* A titre principal,
- recevoir son intervention volontaire,
- constater que la décision d'imputer sur le compte employeur de la Société [3] les incidences financières de la maladie professionnelle relève de sa seule compétence, sous le contrôle des juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale,
- se déclarer incompétente pour connaître de la demande de la Société [3] tendant à contester l'imputation sur son compte employeur des incidences financières de la maladie professionnelle,
* A titre subsidiaire,
- constater que les CARSAT ont une compétence exclusive pour statuer sur les demandes d'inscription sur le compte spécial,
- dire et juger irrecevable la demande d'inscription sur le compte spécial.
SUR QUOI,
I - SUR LES EXCEPTIONS DE PROCÉDURE :
A - Sur la péremption :
Les articles R.142-22 et R.142-30 ont été abrogés par le décret 2018-928 du 29 octobre 2018, applicable aux procédures en cours, laissant place, à compter du 1er janvier 2019, au régime de la péremption de droit commun de l'article
386 du code civil selon lequel l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans.
Il est cependant constant qu'en procédure orale, une fois l'appel effectué, les parties n'ont pas d'autre diligence à faire que d'attendre la convocation à l'audience de sorte que la direction de la procédure échappe aux parties et que le délai ne court pas.
En l'espèce, la CPAM de la Creuse soutient que la péremption est acquise dans la mesure où la société qui a interjeté appel le 11 juillet 2019 et qui n'a conclu que le 7 octobre 2021 n'a accompli aucune diligence dans les deux ans suivants l'appel et où l'article
R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale n'est applicable qu'en première instance.
Cela étant, la société [3] a régulièrement interjeté appel le 11 juillet 2019 et les parties ont été convoquées par courrier du 16 août 2021 par le greffe pour comparaître à l'audience du 12 octobre 2021.
Si effectivement, l'appelante n'a accompli aucune diligence de nature à faire progresser l'affaire, il n'en demeure pas moins que s'agissant d'une procédure orale, elle n'avait aucune diligence particulière à accomplir, le fait qu'elle n'ait conclu qu'en octobre 2021 étant indifférent puisque le délai de deux ans n'a jamais commencé à courir.
En conséquence, la cour rejette l'exception de péremption soulevée par la CPAM de la Haute Vienne.
B - Sur la prescription de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle :
Il résulte de la combinaison des articles
L431-2,
L461-1 et
L461-5 du code de la sécurité sociale que les droits de la victime aux prestations et indemnités prévue par la législation sur les maladies professionnelles se prescrivent par deux ans à compter de la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.
En l'espèce, la Société [3] fait valoir :
- que la date de première constatation médicale est en date de 1999,
- que de ce fait, la prescription des droits du salarié est acquise depuis 2001, en application du délai de prescription biennale visé par l'article
L. 431-2 du code de la sécurité sociale,
- que le jugement attaqué a indiqué que le fait pour le salarié de ressentir les mêmes symptômes depuis 1999 ne permet pas de caractériser la connaissance par celui-ci du lien possible entre ses douleurs et son activité professionnelle,
- que ce faisant, le tribunal a ajouté une condition aux articles
L. 461-5,
L. 431-2 et
D. 461-1-1 du code de la sécurité sociale, dénaturant ainsi leurs dispositions.
En réponse, la CPAM soutient :
- que c'est le 23 octobre 2017, date du certificat médicale joint par le salarié à la déclaration de maladie professionnelle, que celui-ci a été informé du possible lien entre sa maladie et le travail,
- qu'en tout état de cause, le médecin-conseil retient quant à lui comme date de première constatation médicale la date du 11 juillet 2017 correspondant à la radiographie,
- que la demande de reconnaissance a donc été faite dans le délai de deux ans, que le point de départ soit fixé au 23 octobre 2017 ou au 11 juillet 2017.
Cela étant, il n'est pas contesté :
- que la date de la première constatation médicale a été fixée par le médecin-conseil au 11 juillet 2017, date correspondant à une radiographie du rachis subie par le salarié,
- que le 23 octobre 2017, le docteur [O] a établi un certificat médical initial - maladie professionnelle rédigé de la façon suivante : 'Sciatique itérative hyperalgique gauche discarthrose étagée L5-S1'.
Il en résulte que contrairement à ce que soutient la société, même si à compter de 1999, Monsieur [N], profane en matière médicale, a souffert de douleurs dans le dos, a été placé régulièrement en arrêt maladie à compter de cette date et avait déclaré avoir effectué de la manutention manuelle de charges lourdes depuis 1979, ce n'est que le 23 octobre 2017 que le lien entre la pathologie que recouvrait ses douleurs et ses conditions de travail a été clairement et expressément porté à sa connaissance.
Le certificat médical initial du 23 octobre 2017 constitue donc le point de départ du délai de prescription de l'action de Monsieur [N] ; étant précisé que la date du 11 juillet 2017 constitue la date de la première constatation médicale qui permet de vérifier la condition liée au délai de prise en charge mais qui présentement n'établit pas - à défaut de tout autre élément - que le lien entre les douleurs subies par le salarié et son travail avait été porté à la connaissance de celui-là.
En conséquence, la fin de non-recevoir tirée de l'article
L 432-1 du code de la sécurité sociale doit être rejetée.
II - SUR LE RESPECT DU PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE :
A - Sur la mise à disposition de l'employeur des pièces du dossier :
Afin de garantir le principe du contradictoire au cours de la procédure d'instruction de la demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle, la CPAM est tenue notamment d'informer les parties à la fin de l'instruction d'une demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle de la mise à leur disposition du dossier.
La communication du dossier n'est soumise à aucune forme particulière.
La caisse n'est pas tenue de délivrer copie du dossier sans avoir reçu une demande préalable de l'employeur.
Cependant, par l'information qu'elle donne à celui-ci, elle doit lui permettre d'en solliciter la communication en temps opportun afin de le mettre en mesure de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief et de faire valoir ses observations avant la décision.
À défaut d'un accès effectif de l'employeur à l'entier dossier, la décision de prise en charge peut lui être déclarée inopposable dès lors notamment :
- que la CPAM refuse de manière injustifiée de faire droit à la demande de consultation du dossier intervenant dans le délai de 10 jours (Cass. 2e civ., 25 oct. 2006, n° 05-10.950 : JurisData n° 2006-035534 ; JCP S 2007, 1010, note D. Asquinazi-Bailleux. ' Cass. 2e civ., 14 janv. 2010, n° 08-21.847 : JurisData n° 2010-051247) ;
- que toutes les pièces recueillies par la CPAM ne figurent pas au dossier consulté par l'employeur (Cass. 2e civ., 16 sept. 2010, n° 09-67.727) ;
- que l'avis du médecin-conseil de la CPAM ne figure pas parmi les pièces mises à la disposition de l'employeur (Cass. 2e civ., 21 juin 2012, n° 11-17.772 : JurisData n° 2012-013587. ' Cass. 2e civ., 14 févr. 2013, n° 11-28.568).
En application de l'article
R441-13 du code de la sécurité sociale :
'Le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre ;
1°) la déclaration d'accident ;
2°) les divers certificats médicaux détenus par la caisse ;
3°) les constats faits par la caisse primaire ;
4°) les informations parvenues à la caisse de chacune des parties ;
5°) les éléments communiqués par la caisse régionale.
Il peut, à leur demande, être communiqué à l'assuré, ses ayants droit et à l'employeur, ou à leurs mandataires....'
Parmi les éléments faisant grief à l'employeur, figure au dossier constitué par la caisse l'avis du médecin-conseil transmis au service administratif de la caisse qui porte sur le caractère professionnel de la maladie (2e Civ., 14 janv. 2010, n° 08-21.556) et qui, en général, résulte de la fiche médico- administrative de liaison entre le service du contrôle médical et les services administratifs de la caisse (2e Civ., 28 mai 2015, n° 14- 15.175 ; 19 janv. 2017, n° 15- 28.819).
En revanche, la caisse n'a pas à communiquer :
- les pièces médicales éventuellement détenues par le médecin-conseil (2e Civ., 4 mai 2016, n° 15-23.233 ; dans le même sens, 2e Civ., 30 mars 2017, n° 16-14.674),
- les documents portant sur la fixation du taux d'incapacité permanente partielle susceptible d'être reconnu à la victime,
- les examens médicaux dont le résultat sert à caractériser la maladie visée au tableau,
- la pièce caractérisant la première constatation médicale d'une maladie professionnelle dont la date est antérieure à celle du certificat médical initial (2e Civ., 12 nov. 2020, n° 19-20.145) dans la mesure où elle est en effet couverte par le secret médical.
***
En l'espèce, la société soutient en substance :
- que la caisse ne démontre pas l'avoir associée aux différentes étapes de l'instruction comme elle en a l'obligation,
- qu'elle n'a pas eu accès au dossier complet dans un délai suffisant dans la mesure où il manquait l'avis motivé du médecin-conseil, le compte-rendu de l'enquête administrative, les conclusions du médecin agréé, l'attestation de salaire et les divers certificats médicaux,
- qu'elle a sollicité un rendez-vous sur place pour consulter le dossier,
- que sous le prétexte qu'il n'aurait pas réussi à prendre contact avec elle, l'organisme social a décidé unilatéralement de lui envoyer partiellement les pièces du dossier par voie postale alors qu'elle ne lui avait jamais demandé,
- que dès lors, la caisse qui décide par elle-même d'envoyer les pièces par voie postale devait le faire de manière complète.
En réponse, la CPAM fait valoir :
- qu'elle a associé la société à chaque étape de la procédure,
- qu'ainsi, elle lui a transmis la déclaration de maladie professionnelle, la demande de renseignement complémentaire, lui a notifié le recours à un délai complémentaire d'instruction, l'a informée de la clôture de l'instruction et de la possibilité de venir consulter les pièces du dossier,
- qu'elle lui a envoyé, par courrier, les éléments du dossier faute pour la société de reprendre contact avec elle après avoir pourtant sollicité un rendez-vous pour consulter le dossier,
- qu'enfin, elle a transmis tous les éléments qu'elle avait en sa possession, que l'avis du médecin-conseil figurait dans la fiche colloque médico administrative, contrairement à ce qui est soutenu par la Société et qu'elle ne pouvait pas communiquer des éléments qu'elle n'avait pas ou qui étaient soumis au secret médical.
Cela étant, il n'est pas contesté :
- que le 6 février 2018, la CPAM a avisé l'employeur de la clôture de l'instruction et de la possibilité pour lui de venir consulter les pièces constitutives du dossier en lui indiquant qu'avant de se déplacer et afin de l'accueillir dans les meilleures conditions, elle l'invitait à prendre un rendez-vous auprès de ses services,
- que sur la capture d'écran informatique versée par la CPAM, il est indiqué : 'détail de la demande : l'employeur voudrait prendre un rendez-vous pour venir consulter les pièces d'un dossier..' ; 'suite donnée : suite favorable donnée', et rajoutée de façon manuscrite : 'rappel le 19/02 + 21/02 ' aucun contact NRP ' envoi des pièces par AR',
- que le 21 février 2018, par courrier, la CPAM a indiqué à l'employeur qu'elle lui transmettait une copie des pièces constitutives du dossier, ' à savoir : la déclaration de maladie professionnelle, le certificat médical initial, les informations parvenues à la caisse par chacune des parties (questionnaires), la fiche de colloque médico administratif maladie professionnelle ' et que le bordereau d'envoi qui était joint au courrier devait lui être retourné courrier après signature, par retour de courrier.
Il en résulte que la société n'établit pas ni même n'allègue :
- qu'elle a vainement tenté de prendre rendez-vous avec la CPAM pour venir consulter les pièces du dossier,
- qu'elle l'a tout aussi vainement relancée pour obtenir ce rendez - vous sur site,
- qu'elle a signé et renvoyé le bordereau de pièces joint au courrier de transmission desdites pièces du 15 février 2018.
Il en résulte donc qu'elle ne rapporte aucune preuve ou commencement de preuve que la CPAM ne lui a pas assuré un accès effectif au dossier.
Cela étant, l'organisme social ne peut lui transmettre :
- ni un compte-rendu d'enquête administrative qui n'existe pas dès lors qu'il a seulement adressé des questionnaires à l'employeur et au salarié et n'a réalisé aucune synthèse ou investigations complémentaires ayant donné lieu à un rapport d'enquête,
- ni les conclusions du médecin agréé dès lors qu'aucun médecin n'a été spécialement désigné dans ce dossier,
- ni des certificats médicaux autres que le certificat médical initial dès lors qu'ils sont couverts par le secret médical,
- ni l'attestation de salaire dès lors que l'obligation de communication de celle-ci a été abrogée par le décret du 7 juin 2016,
- ni l'avis motivé du médecin conseil dans la mesure où celui-ci en remplissant la fiche du colloque médico administratif ' et en indiquant très clairement la date de la première constatation médicale qu'il avait retenue au vu d'une radiographie du rachis, le libellé du syndrome, la proposition d'orientation vers un accord de prise en charge au titre de la législation professionnelle ' y a nécessairement repris son avis.
En conséquence, la société doit être déboutée de sa demande d'inopposabilité formée de ce chef.
B - Sur le délai de consultation du dossier :
En application de l'article
R. 441-14 alinéa 3 du code de la sécurité sociale, 'la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article
R. 441-13.'
En l'espèce, la société reproche à la CPAM de lui avoir laissé un délai de consultation du dossier insuffisant dans la mesure où elle a réceptionné les pièces le vendredi 23 février 2018 pour une prise de décision le lundi 26 février 2018.
En réponse, l'organisme social fait valoir :
- que le jugement de première instance a justement retenu qu'elle avait informé l'employeur le 9 février 2018 de la possibilité de consulter le dossier et du prononcé de la décision le 26 février 2018,
- que de ce fait, la société a bénéficié d'un délai de 17 jours pour consulter le dossier,
- qu'il ne peut pas être tenu responsable de la demande de communication des pièces du dossier seulement 11 jours avant la prise de décision.
Cela étant, la société ne peut venir légitimement reprocher à la CPAM de lui lui avoir laissé un délai insuffisant dès lors qu'elle a bénéficié de plus de 10 jours francs pour ce faire et que l'organisme social ne peut être tenu responsable d'un envoi le 21 février 2018 des pièces du dossier alors qu'elle - en qualité d'employeur - ne justifie pas qu'elle a relancé la CPAM pour obtenir un rendez - vous .
En conséquence, la société doit être déboutée de sa demande d'inopposabilité formée de ce chef.
III - SUR LE FOND :
A - Sur la maladie professionnelle :
En application des dispositions de l'article
L461-1 du code de la sécurité sociale ' est présumée d'origine professionnelle, toute maladie désignée dans un tableau et contractée dans les conditions qui y sont décrites'.
À ce titre, la maladie telle qu'elle est désignée dans les tableaux des maladies professionnelles est celle définie par les éléments de description et les critères d'appréciation fixés par chacun de ces tableaux.
Le tableau 97, s'agissant exclusivement des dispositions relatives au litige, est le suivant :
'Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par des vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier'
Désignation des maladies
Délai de prise en charge
Liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies
Sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante. Radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5, avec atteinte radiculaire de topographie concordante.
6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans)
Travaux exposant habituellement aux vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier :
- par l'utilisation ou la conduite des engins et véhicules tout terrain : chargeuse, pelleteuse, chargeuse-pelleteuse, niveleuse, rouleau vibrant, camion tombereau, décapeuse, chariot élévateur, chargeuse sur pneus ou chenilleuse, bouteur, tracteur agricole ou forestier ;
- par l'utilisation ou la conduite des engins et matériels industriels : chariot automoteur à conducteur porté, portique, pont roulant, grue de chantier, crible, concasseur, broyeur ;
- par la conduite de tracteur routier et de camion monobloc.
1 - Sur la désignation de la maladie :
Il est acquis que lorsque le certificat médical désignant la maladie est rédigé dans des termes qui ne reprennent pas exactement ceux du tableau, les juges du fond doivent rechercher si l'affection déclarée correspond à la pathologie désignée par le tableau sans s'arrêter à la désignation de la maladie telle que retenue par le certificat médical initial.
De même, lorsque le certificat médical est imprécis, les juges doivent rechercher si d'autres éléments ne permettent pas d'affirmer que la pathologie déclarée correspond à celle désignée par le tableau.
Dans cette hypothèse là, l'avis du médecin-conseil, dès lors qu'il est suffisamment étayé et qu'il mentionne les éléments médicaux sur lesquels il s'appuie peut constituer une pièce décisive.
Enfin, dès lors que le certificat médical renvoie sans contestation possible à la maladie désignée par le tableau et même s'il n'en reprend pas littéralement les termes, l'employeur ne peut se méprendre sur la nature de la maladie déclarée.
En l'espèce, la maladie professionnelle retenue par l'organisme social et désignée par le tableau numéro 97 relatif aux 'affections chroniques du rachis lombaire provoqués par des vibrations basses et moyennes fréquences transmises au corps entier' est décrite dans le certificat médical initial comme étant une 'sciatique itérative hyperalgique gauche discarthrose étagée L.5-S.1 + ébauche de .. bilatérale'.
L'employeur soutient :
- que la désignation de la maladie dans le tableau ne correspond pas à la désignation du certificat médical,
- que de ce fait, la caisse aurait dû saisir le CRRMP,
- que le jugement attaqué ne justifie d'ailleurs à aucun moment d'une « atteinte radiculaire de topographie concordante » ni d'une « hernie discale » alors même que ces caractérisations sont exigées par le tableau n°97 des maladies professionnelles.
En défense, l'organisme social fait valoir :
- que le tableau désigne la maladie comme « sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante », et le certificat médical constate bien une « sciatique itérative hyperalgique gauche discarthrose étagée L.5-S.1 ».
- que les deux termes utilisés dans le certificat médical initial pour caractériser l'état de Monsieur [N], à savoir 'discarthrose' et 'hernie discale' désignent une atteinte lésionnaire des disques intervertébraux, caractérisant la maladie désignée par le tableau 97.
***
Cela étant, il n'est pas contesté :
- que la déclaration de maladie professionnelle mentionne : 'Sciatique hyperalgique gauche L5-S1',
- que le certificat médical initial indique : 'Sciatique itérative hyperalgique Gauche [xxxx] etagée L5-51 + ébauche de [xxxx] bilatérale',
- que le tableau 97 vise : une sciatique par hernie discale L4-L5 ou L5-S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante. Radiculalgie crurale par hernie discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5, avec atteinte radiculaire de topographie concordante.
Si effectivement, les termes utilisés dans la déclaration de maladie professionnelle et le certificat médical initial sont différents de ceux repris par le tableau, il n'en demeure pas moins :
- que d'une part, les termes de 'hernie discale' et 'discarthrose' se rejoignent en désignant tous les deux une atteinte lésionnelle des disques intervertébraux.
- que d'autre part, le terme de 'topographie concordante' désigne le moyen par lequel la maladie est objectivée, en l'espèce par la radiographie du rachis, réalisée le 11 juillet 2017,
- que pour caractériser la maladie litigieuse, le médecin-conseil s'est appuyé sur un élément extrinsèque constitué par la radiographie du rachis effectuée le 11 juillet 2017.
Il en résulte donc qu'en dépit des différences de rédaction entre le certificat médical et la maladie décrite dans le tableau, compte tenu de l'élément extrinsèque figurant au dossier de Monsieur [N], il convient de rejeter la contestation développée par la société du chef de l'absence de la condition relative à la désignation de la maladie.
2 - Sur le délai d'exposition au risque et de prise en charge :
Le délai d'exposition au risque correspond au temps pendant lequel le salarié a été exposé au risque.
La fin d'exposition au risque correspond au point de départ du délai de prise en charge qui correspond donc à la période maximale séparant la fin de l'exposition au risque de la première constatation médicale de la pathologie.
Ces deux délais représentent des périodes dont les durées sont fixées par le tableau de maladie professionnelle applicable à la pathologie dont le salarié est victime.
En application de l'article
L. 461-2, alinéa 5 du code de la sécurité sociale, la première constatation médicale de la pathologie du salarié doit intervenir avant la fin de l'exposition au risque ou durant le délai de prise en charge pour que le salarié puisse être considéré comme étant atteint d'une maladie professionnelle.
En l'espèce, il n'est pas contesté :
- que la date de la première constatation médicale a été fixée par le médecin conseil au 11 juillet 2017,
- que c'est à compter de cette date ' qui correspond à la réalisation de la radiographie du rachis que le salarié a subie ' que celui-ci a été placé en arrêt de travail,
- qu'il a occupé le poste de cariste à compter de 1982, date de son entrée dans la société.
Il en résulte donc que les délais d'exposition au risque et de prise en charge ont été respectés dans la mesure où le tableau les fixe respectivement à 5 ans et 6 mois.
3 - Sur la liste des travaux susceptibles de provoquer la maladie déclarée :
La présomption d'imputabilité de la maladie présentée par le salarié au travail qu'il effectue n'est pas subordonnée à l'exposition continue et permanente de celui-ci au risque pendant son activité professionnelle.
En l'espèce, l'employeur fait valoir que la caisse s'est fondée sur les seules déclarations du salarié et qu'elle n'a fait procéder à la réalisation d'aucun relevé d'exposition vibratoire et de défectuosités du sol.
En réponse, la CPAM soutient qu'en qualité de cariste sur chariot élévateur, le salarié était exposé en continu et de manière permanente à des vibrations de basses et moyennes fréquences en dépit du matériel éventuellement mis à sa disposition par l'employeur et que lorsque Monsieur [N] a indiqué que le sol sur lequel il travaillait était défectueux, l'employeur n'a pas remis en cause ses affirmations ni apporté la preuve contraire.
Cela étant, Monsieur [N] a exercé à compter de 1982 les fonctions de cariste, le conduisant à utiliser de façon habituelle un chariot élévateur afin de gérer les stocks et l'approvisionnement de lignes de production.
Les questionnaires remplis respectivement par l'employeur et le salarié indiquent :
- pour le salarié que le sol était défectueux, qu'il subissait des 'secousses importantes sur tout le corps, surtout le corps, le torce, les cervicales et l'abdomen,( sic ) ' que ces secousses étaient présentes '8 heures par jour sans arrêt, 'de temps en temps 20 mn par jour de repos', qu'il roulait 8 heures par jour et se retournait pour regarder derrière lui,
- pour l'employeur que le salarié travaille sur un 'chariot élévateur neuf de moins d'un an, fermé, à pneus gonflés avec amortisseurs et sièges pivotants, mis en place en juin 2016", qu'il travaille en atelier (local fermé) + 'passages en extérieur pour transfert sur les quais', qu'il n'effectue pas de manutention manuelle de charges.
Contrairement à ce que soutient la société, le tableau 97 exige :
- des vibrations mais ne fixe aucune valeur pour leur seuil,
- une utilisation habituelle du chariot élévateur sans en fixer une durée minimum d'utilisation.
En déclarant - sans être contredit par l'employeur travailler 8 heures par jour sur un chariot élévateur, sur un sol défectueux avec des secousses importantes - le salarié justifie que la condition tenant aux travaux susceptibles de provoquer la maladie est remplie.
Il est inopérant pour l'employeur de soutenir qu'à compter de juin 2016, le salarié a disposé d'un chariot - élévateur neuf, doté de pneus gonflés et d'amortisseurs dès lors qu' il n'en justifie pas, qu'il n' établit pas par ailleurs que tous les chariots - élévateurs utilisés par Monsieur [N] durant à tout le moins les 5 ans qui ont précédé la première constatation médicale de la maladie - ont toujours rempli les conditions utiles pour lui éviter de ressentir les vibrations.
De même, il est tout aussi inopérant pour lui de soutenir que le matériel utilisé est conforme et régulièrement entretenu dès lors qu'il n'en rapporte aucune preuve et qu'il ne démontre pas que ce matériel préserve le salarié de toutes vibrations.
En conséquence, la société, si ce n'est par ses seules dénégations, n'apporte aucun élément de nature à établir que les chariots élévateurs utilisés par le salarié au sein de l'entreprise, n'exposait celui-ci à aucune vibration de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier.
La condition visée par le tableau numéro 97, relative à l'exécution de travaux exposant habituellement aux vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier, par la conduite de tracteur routier et de camion monobloc est ainsi établie.
***
Comme les trois conditions du tableau 97 sont remplies, la présomption d'imputabilité de la maladie professionnelle aux conditions de travail est acquise sans que l'employeur n'apporte un quelconque élément permettant de la renverser.
Le jugement doit être confirmé de ce chef.
B - Sur la continuité des soins et symptômes :
En application de l'article
L 411-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident au travail s'étend aux soins et arrêts de travail prescrits à la victime jusqu'à la date de consolidation de son état de santé ou celle de sa guérison dès lors qu'il y a continuité de symptômes et de soins.
Il incombe alors à l'employeur de renverser cette présomption en démontrant l'existence d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec la maladie ou d'une cause postérieure totalement étrangère, auxquels se rattacheraient exclusivement les soins et arrêts de travail postérieurs.
En l'espèce, la société fait valoir :
- qu'elle s'interroge sur la réalité et le bien-fondé des arrêts de travail pris en charge dans la mesure où leur durée est anormalement longue,
- que ne disposant pas de l'intégralité des certificats médicaux renseignés, ni d'ailleurs de l'ensemble des éléments détenus par la CPAM de la Creuse, elle n'a d'autre choix que de solliciter une expertise,
- que lui refuser une expertise médicale, c'est la priver de son droit à un débat contradictoire.
En réponse, la CPAM soutient que dès le premier arrêt de travail du salarié, la Société a eu connaissance de l'ensemble des arrêts de travail, que les arrêts et soins ont continué jusqu'au 1er février 2019 et que leur imputabilité au travail est justifiée.
Elle ajoute que la demande d'expertise médicale n'est étayée par aucun élément sérieux et que la Société n'apporte pas de motif suffisant pour justifier sa demande.
Cela étant, Monsieur [N] a été placé en arrêt de travail pour la maladie professionnelle le 23 octobre 2017 jusqu'à la date de consolidation de son état le 01 février 2019.
La continuité de soins et symptômes - établie par les arrêts de travail et les certificats de poursuite de soins - existe et est couverte par la présomption d'imputabilité.
Il incombe dès lors à l'employeur d'apporter des éléments permettant de remettre en cause celle-ci.
Or à ce titre, il convient de relever :
- que la société, pourtant informée de la prolongation des arrêts de travail, n'a pas diligenté de contre-visite médicale, n'a pas contesté la date de consolidation fixée au 1er février 2019 avant la saisine de la commission de recours amiable et n'a pas demandé à la caisse de diligenter une expertise technique,
- qu'elle se borne à invoquer le caractère disproportionné de la durée des soins et des arrêts de travail mais ne démontre l'existence d'aucune cause totalement étrangère au travail permettant d'exclure tout lien de causalité entre les arrêts de travail et la lésion accidentelle ou d'une pathologie antérieure évoluant pour son propre compte permettant de renverser la présomption d'imputabilité.
De surcroît, la longueur de la durée de l'incapacité de travail prise en charge prétendument excessive ne constitue pas en soi un différend d'ordre médical justifiant de recourir à une mesure d'expertise dans la mesure où les durées considérées comme 'normales' ne prennent nullement en compte les spécificités de chaque patient ni la nécessité de subir une rééducation plus ou moins longue selon les individus.
Comme en application de l'article
146 du code de procédure civile, une mesure d'instruction ne peut en aucun cas être ordonnée pour suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve qui lui incombe, il en résulte qu'en l'absence d'un commencement de preuve susceptible de constituer un motif légitime fondant la demande d'expertise médicale judiciaire, celle-ci sera rejetée.
En conclusion, l'ensemble des prestations, arrêts et soins prescrits à Monsieur [N] relatifs à la maladie professionnelle dont il est atteint doit être déclaré opposable à la société [3].
IV - SUR L' IMPUTATION AU COMPTE SPÉCIAL DES CONSÉQUENCES DE LA MALADIE PROFESSIONNELLE DE MONSIEUR [N] :
L'intervention volontaire de la CARSAT doit être déclarée recevable.
***
Il est relevé que si la société [3] a interjeté appel du chef de décision l'ayant déboutée de l'ensemble de ses demandes, si ce rejet incluait la demande qu'elle avait formée à titre très subsidiaire 'de dire et juger que l'exposition antérieure chez les précédents employeurs est à l'origine de la pathologie sans qu'il soit possible de déterminer un rôle causal au cours de l'activité réalisée pour son compte' et si dans le dispositif de ses conclusions, elle sollicite le débouté de la CPAM et de la CARSAT de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, il n'en demeure pas moins qu'elle ne formule aucun moyen à l'appui de cette demande de débouté et notamment, qu'elle ne répond pas aux exceptions d'incompétence soulevées par la CARSAT et la CPAM.
Cela étant, en application de l'article
L. 215-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, il revient aux seules CARSAT de mettre en 'uvre les règles de tarification de l'assurance accidents du travail et maladies professionnelles et de décider qui se verra imputer les conséquences financières de la maladie professionnelle, ceci sous le contrôle depuis le 1er janvier 2019 de la cour d'appel d'Amiens.
Il en résulte qu'en première instance le Pôle social du tribunal judiciaire de Guéret et en appel la chambre sociale de la cour d'appel de Poitiers sont incompétents pour connaître de la demande formée par la société.
Il y a donc lieu de faire droit à l'exception d'incompétence soulevée par la CARSAT et la CPAM de ce chef.
Le jugement attaqué qui a débouté la société de sa demande formée à ce titre doit donc être réformé.
V - SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES :
La société [3] doit être condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Rejette l'incident de péremption d'instance soulevée par la CPAM de la Creuse,
Déclare recevable l'appel formée par la SASU [3],
Confirme le jugement prononcé le 12 juin 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Guéret sauf en ce qu'il a débouté la SASU [3] de sa demande 'de dire et juger que l'exposition antérieure chez les précédents employeurs est à l'origine de la pathologie sans qu'il soit possible de déterminer un rôle causal au cours de l'activité réalisée pour son compte',
Statuant à nouveau,
Fait droit à l'exception d'incompétence ratione materiae soulevée par la CARSAT et par la CPAM,
Déclare incompétents le pôle social du tribunal de grande instance de Guéret et la chambre sociale de la cour d'appel de Poitiers pour statuer sur la demande d'inscription sur le compte spécial des incidences financières de la maladie professionnelle déclarée le 25 octobre 2017 par Monsieur [N],
Y ajoutant,
Condamne la SASU [3] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,