Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème Chambre, 10 décembre 2015, 14NC01501

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
  • Numéro d'affaire :
    14NC01501
  • Type de recours : Autres
  • Décision précédente :tribunal administratif de Besançon, 27 mai 2014
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000031674851
  • Rapporteur : M. Franck ETIENVRE
  • Rapporteur public :
    M. GOUJON-FISCHER
  • Président : M. MARTINEZ
  • Avocat(s) : BAROCHE
Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Nancy
2015-12-10
tribunal administratif de Besançon
2014-05-27

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Procédure contentieuse antérieure : M. et Mme C...B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon de leur accorder la décharge du supplément d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2008 en conséquence de la remise en cause par l'administration du prix auquel M. B... a acquis les titres non cotés en bourse de la Sarl DPH international. Par un jugement n° 1201329-1300143 du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 25 juillet 2014, M. et MmeB..., représentés par MeA..., demandent à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de leur accorder cette décharge. Ils soutiennent que : - les impositions ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence d'un débat oral et contradictoire ; - l'administration n'apporte pas la preuve de l'existence d'un écart de prix significatif entre le prix convenu et la valeur vénale des titres ; - l'administration n'apporte pas davantage la preuve de l'intention de la société SMP d'octroyer à M. B...une libéralité et de l'intention de celui-ci d'en recevoir une ; Par un mémoire en défense enregistré le 4 novembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - aucun débat oral et contradictoire n'est prévu dans le cadre, comme c'est le cas dans le présent litige, d'un contrôle sur pièces ; - la procédure suivie a été menée contradictoirement ; - l'écart entre le prix convenu et la valeur vénale des titres calculé grâce à la combinaison de deux méthodes demeure significatif ; - l'administration justifie par le contexte dans lequel la cession litigieuse a été effectuée de l'intention de la société SMP d'octroyer à M. B...une libéralité et de l'intention de M. B...de recevoir une telle libéralité.

Vu :

- les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Etienvre, président-assesseur, - et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public. 1. Considérant que la société anonyme (SA) " Société Moules Précision Maradan Mathieu " (SMP), dont le capital était alors détenu par la société par actions simplifiée (SAS) Developpement Techniques Plastiques Holding (DTP Holding) à hauteur de 50%, par M. C... B...à hauteur de 25 % et par M. D...à hauteur également de 25 %, a fait l'objet en 2011 d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a notamment estimé que la cession, le 18 juillet 2008, à M.B..., son directeur général délégué, de l'ensemble des 2 998 titres que la société SMP détenait dans le capital de la société à responsabilité limitée (Sarl) DPH International, avait été effectuée à un prix, de 10 euros le titre, minoré par rapport à la valeur vénale réelle du titre fixée dans la proposition de rectification du 31 janvier 2011 à 81 euros ; qu'après la présentation, le 1er avril 2011, des observations de la société SMP et l'introduction de son recours hiérarchique, cette valeur a été ramenée à 72 euros le 31 mai 2011, à 42 euros le 20 octobre 2011 et, enfin, à 33 euros le 2 novembre 2011 ; que, par ailleurs, par proposition de rectification du 15 février 2011, M. et Mme B...ont été également informés que cette cession à un prix minoré constituait un avantage occulte reçu par M. B...constitutif d'une distribution imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ainsi qu'aux prélèvements sociaux ; que le rehaussement des capitaux mobiliers a été calculé sur la base d'une valeur vénale du titre de 81 euros ; qu'après les observations présentées par les intéressés le 15 avril 2011 et celles présentées par la société SMP, cette valeur a été ramenée à 72 euros le 14 juin 2011, 42 euros le 21 octobre 2011 et 33 euros le 2 novembre 2011 ; que M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont ainsi été assujettis au titre de l'année 2008 ; que, par jugement du 27 mai 2014, le tribunal a rejeté leurs demandes ; que M. et Mme B...relèvent appel de ce jugement ;

Sur la

procédure d'imposition : 2. Considérant, d'une part, que dès lors que les impositions en litige résultent non pas de la mise en oeuvre d'un examen de sa situation fiscale personnelle ou d'une vérification de comptabilité mais d'un contrôle sur pièces, M. et Mme B...ne peuvent utilement soutenir qu'ils ont été privés d'un débat oral et contradictoire qui est une garantie accordée uniquement aux contribuables ayant fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle ou d'une vérification de comptabilité ; qu'il résulte, d'autre part, de l'instruction que le rehaussement des revenus de capitaux mobiliers des requérants leur a été notifié, selon la procédure contradictoire, par proposition de rectification du 15 février 2011 ; que M. et Mme B...ont ainsi pu présenter des observations le 15 avril 2011 auxquelles l'administration a répondu le 14 juin 2011 en faisant savoir aux intéressés que la valeur vénale unitaire des titres était ramenée à 72 euros ; qu'enfin, M. et Mme B...ont été informés les 21 octobre 2011 et 2 novembre 2011 de ce que, à la suite des observations formulées par la société SMP, en particulier, dans le cadre de son recours hiérarchique, cette valeur vénale unitaire était fixée à 42 euros puis finalement à 33 euros ; qu'à ces occasions, les requérants ont été également informés des conséquences de cette diminution en ce qui concerne le montant du rehaussement de leurs revenus de capitaux mobiliers et de toutes les conséquences financières en découlant ; que, dans ces conditions, M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que les impositions litigieuses ont été établies à l'issue d'une procédure non contradictoire ; Sur le bien-fondé de l'impôt : 3. Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes " ; qu'en cas d'acquisition de titres d'une société à un prix que les parties ont délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie pour le cédant, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du cocontractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé et, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession, sans que cet avantage ne soit assorti d'une contrepartie ; En ce qui concerne l'existence d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale des titres cédés : 4. Considérant que la valeur vénale de titres non admis à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ; qu'en l'absence de toute transaction ou de transaction équivalente, l'appréciation de la valeur vénale est faite en utilisant les méthodes d'évaluation qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l' offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ; 5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour apprécier la valeur vénale des titres cédés par la société SMP à M.B..., l'administration fiscale a utilisé deux méthodes qu'elle a combinées pour déterminer une valeur unitaire moyenne ; qu'elle a, d'une part, employé la méthode de la valeur de productivité, avec une pondération de 1, qui a été calculée à partir de la capitalisation du bénéfice moyen de la Sarl DPH International ; que le taux de capitalisation de 17,86 % retenu a été déterminé à partir d'un taux de rendement de base de 2,86 %, d'une prime de risque de 5 % et d'un coefficient de risque de 3 ; qu'elle a, d'autre part, recouru à la méthode de la valeur mathématique, avec une pondération de 3, qui a consisté à calculer l'actif réel et le passif réel de la Sarl DPH International ; 6. Considérant, en premier lieu, que si M. et Mme B...soutiennent que le prix de 10 euros, auquel la cession litigieuse a été effectuée, est parfaitement justifié compte tenu de la création récente de la Sarl DPH International, qui n'avait clôturé que deux exercices à la date de cette cession, de la dépendance de la Sarl DPH International envers la société SMP qui lui confiait, en sous-traitance, l'essentiel de son activité, du caractère concurrentiel de son secteur d'activité et des difficultés rencontrées par plusieurs entreprises dans ce secteur, ces circonstances ne suffisent pas à établir que la méthode employée par l'administration ait été viciée et à remettre en cause la pertinence de la valeur vénale de 33 euros telle qu'elle a été calculée par l'administration, laquelle a pris en considération, comme cela a été dit précédemment, dans la détermination du taux de capitalisation utilisé dans le cadre de la méthode de la valeur de productivité, le risque lié au secteur d'activité de la Sarl DPH International ; 7. Considérant, en second lieu, que les requérants se prévalent de ce que la valeur vénale des titres retenue dans la proposition de rectification du 15 février 2011 a été revue sensiblement à la baisse par l'administration fiscale pour être fixée le 2 novembre 2011 à 33 euros contre 81 euros initialement ; que, toutefois, l'écart entre le prix convenu de 10 euros et la valeur de 33 euros demeure d'au moins 20 % et reste en conséquence significatif ; En ce qui concerne l'élément intentionnel : 8. Considérant qu'il résulte de l'instruction, en particulier, des observations présentées tant par la société SMP que par M. et Mme B...aux propositions de rectification qui leur ont été notifiées, et n'est d'ailleurs pas contesté par les requérants, que la cession en cause s'est accompagnée de la cession concomittante à M. D...des parts détenues par M. B...dans le capital de la société SMP pour 30 000 euros ; qu'en raison, en effet, d'un désaccord survenu à la fin de l'année 2007 entre ces deux associés de la société SMP sur les orientations stratégiques de l'entreprise, ceux-ci ont convenu de mettre fin à leur collaboration en réorganisant la détention du capital des sociétés SMP et DPH International ; que M. B... a ainsi quitté le capital de la société SMP ; que la cession de ses parts a été accompagnée de la cessation de ses fonctions de directeur général délégué ; qu'au vu de ces éléments ainsi que du rapprochement du prix de cession des parts de la société SMP détenues par M. B...avec le prix convenu pour la cession par la société SMP à M. B...des 2 998 parts détenues dans le capital de la Sarl DPH International, l'administration fiscale doit être regardée, alors même que M. D...était un associé minoritaire de la société SMP, qu'il n'est devenu à la suite de cette cession qu'un associé égalitaire et que M. B...a cédé 10 % du capital de la Sarl DPH International à la SAS DTP Holding, comme justifiant tant de l'intention de la société SMP d'octroyer à M. B... une libéralité que de l'intention de ce dernier de recevoir une telle libéralité ; que les requérants, qui n'établissent ni même n'allèguent que cet avantage ait été assorti d'une contrepartie en faveur de la société SMP, ne sont en conséquence pas fondés à soutenir que c'est à tort que le service a estimé que cette cession à un prix minoré constituait un avantage occulte reçu par M. B...constitutif d'une distribution imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; 9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C...B...et au ministre des finances et des comptes publics. '' '' '' '' 2 N° 14NC01501