Cour d'appel d'Orléans, Chambre commerciale, 7 septembre 2023, 21/01777

Mots clés
Contrats • Prêt d'argent, crédit-bail (ou leasing), cautionnement • Prêt - Demande en nullité du contrat ou d'une clause du contrat • prêt • contrat • déchéance • société • nullité • prescription

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel d'Orléans
  • Numéro de pourvoi :
    21/01777
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Nature : Arrêt
  • Identifiant Judilibre :64faba2f0f624005e653f756
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Résumé

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Texte intégral

COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE GROSSES + EXPÉDITIONS : le 07/09/2023 la SCP LAVAL - FIRKOWSKI la SCP PETIT

ARRÊT

du : 07 SEPTEMBRE 2023 N° : 144 - 23 N° RG 21/01777 N° Portalis DBVN-V-B7F-GMPD DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 14 Juin 2021 PARTIES EN CAUSE APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265269824688244 S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE LOIRE-CENTRE Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 5] [Localité 4] Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Julien BERBIGIER, membre de la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS D'UNE PART INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265267191074903 Monsieur [O] [M] né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 7] désormais Les [Adresse 8] [Adresse 8] [Localité 2] Ayant pour avocat postulant Me Sabine PETIT, membre de la SCP PETIT, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE, membre de la SELARL BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI Madame [P] [L] épouse [M], divorcée [C] née le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 6] désormais Les [Adresse 8] [Adresse 8] [Localité 2] Ayant pour avocat postulant Me Sabine PETIT, membre de la SCP PETIT, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Jérémie BOULAIRE, membre de la SELARL BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI D'AUTRE PART DÉCLARATION D'APPEL en date du : 28 Juin 2021 ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 Mai 2023 COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats à l'audience publique du JEUDI 08 JUIN 2023, à 14 heures, Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, en charge du rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 805 et 907 du code de procédure civile. Après délibéré au cours duquel Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de : Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, Madame Fanny CHENOT, Conseiller, Madame Ferréole DELONS, Conseiller, Greffier : Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé, ARRÊT : Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le JEUDI 07 SEPTEMBRE 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. EXPOSE DU LITIGE : Selon offre préalable acceptée le 24 juillet 2012, la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre (ci-après la Caisse d'épargne) a consenti à M. [O] [M] et Mme [P] [L], son épouse, un prêt immobilier d'un montant de 138 998 euros, remboursable en 240 mensualités de 885,07 euros incluant les intérêts au taux conventionnel de 3,47 % l'an. Par avenant en date du 10 juin 2015, les parties sont convenues de ramener le taux des intérêts de ce prêt à 2,85 % l'an, et de ramener en conséquence le montant des 209 échéances mensuelles échues à compter du 5 avril 2015 et restant à échoir à 779,18 euros (860,26 euros en incluant les primes d'assurance). M. et Mme [M] ont soldé cet emprunt par anticipation le 11 septembre 2019. Reprochant au prêteur d'avoir calculé les intérêts périodiques du prêt sur la base d'une année bancaire de 360 jours, plutôt que sur celle d'une année civile de 365 jours, puis d'avoir commis une erreur dans le calcul du taux effectif global (TEG), en omettant d'intégrer les frais de la période de préfinancement, M. et Mme [M] ont fait assigner la Caisse d'épargne devant le tribunal de commerce d'Orléans par acte du 14 mars 2019, aux fins d'entendre ordonner la substitution du taux de l'intérêt légal au taux conventionnel depuis la date de souscription du prêt, et condamner en conséquence la Caisse d'épargne à leur restituer le montant des intérêts qu'ils estiment avoir trop payés. Par jugement du 14 juin 2021 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce a : - dit que l'action judiciaire de M. [O] [M] et de Mme [P] [C] est recevable et non prescrite, - dit que le TEG de la période de préfinancement est indéterminé, - débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre de l'ensemble de ses demandes à ce titre, - dit que le TEG du prêt et de son avenant est indéterminé, - débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre au paiement de tout intérêt, - condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à rembourser M. [O] [M] et Mme [P] [C] l'ensemble des intérêts payés à compter de la signification du jugement, - débouté les parties de leurs demandes de la signification du jugement, - condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à payer à M. [O] [M] et Mme [P] [C] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples et contraires, - condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre aux entiers dépens de l'instance, y compris les frais de greffe liquidés à la somme de 95,68 euros. La Caisse d'épargne a relevé appel de cette décision par déclaration du 28 juin 2021, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause lui faisant grief. Dans ses dernières conclusions notifiées le 3 mai 2023 par voie électronique, la Caisse d'épargne demande à la cour de : - infirmer le jugement du 14 juin 2021 rendu par le tribunal de commerce d'Orléans, sauf en ce qu'il a débouté les consorts [N] de leur demande de dommages et intérêts, - le réformer en ce qu'il a : ' dit que l'action judiciaire de M. [O] [M] et de Mme [P] [C] est recevable et non prescrite, ' dit que le TEG de la période de préfinancement est indéterminé et débouté la Caisse d'épargne et de Prévoyance Loire Centre de l'ensemble de ses demandes à ce titre, ' dit que le TEG du prêt et de son avenant est indéterminé, ' débouté la Caisse d'épargne et de Prévoyance Loire Centre au paiement de tout intérêt, ' condamné la Caisse d'épargne et de Prévoyance Loire Centre à rembourser à M. [O] [M] et de Mme [P] [C] l'ensemble des intérêts payés à compter de la signification du jugement, ' débouté la Caisse d'épargne de sa demande de dommages et intérêts, ' condamné la Caisse d'épargne et de Prévoyance Loire Centre à payer à M. [O] [M] et de Mme [P] [C] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ' débouté la Caisse d'épargne de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples et contraires, ' condamné la Caisse d'épargne et de Prévoyance Loire Centre aux entiers dépens de l'instance, Et statuant à nouveau, A titre principal, sur l'irrecevabilité des chefs de demande des requérants, Vu les dispositions des articles 1907 et 2224 du code civil, - juger que M. [O] [M] et de Mme [P] [C] sont prescrits en leurs demandes, - déclarer par voie de conséquence M. [O] [M] et de Mme [P] [C] irrecevables en leurs chefs de demandes à l'encontre de la S.A. Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre, A titre subsidiaire, sur le caractère radicalement mal fondé des demandes, Vu les anciennes dispositions de l'article R. 313-1 du code de la consommation, Vu les dispositions ensemble de l'article 9 du code de procédure civile et de l'article 1315 du code civil, - juger que le calcul des intérêts conventionnels du prêt référencé n°8203633 du 12 juillet 2012 et ceux de l'avenant du 21 mai 2015, sur la base d'une année de 360 jours rapportée à 30 jours, revient arithmétiquement à un résultat équivalent au calcul des mêmes intérêts sur la base d'une année civile rapportée au mois normalisé, - juger que le calcul sur la base d'une année civile rapportée au mois normalisé aboutit à un montant d'échéance strictement identique à celui figurant sur les tableaux d'amortissement notifiés aux requérants, - juger par suite que M. [O] [M] et de Mme [P] [C] ne démontrent pas que leur clause d'intérêts conventionnels les amènerait à régler un montant d'intérêts excédant celui prévu par la loi, - juger en outre que M. [O] [M] et de Mme [P] [C] ne démontrent pas l'existence d'une erreur excédant la décimale dans le calcul du TEG mentionné au contrat, - juger qu'ils ne démontrent pas l'existence d'un préjudice indemnisable, - débouter dès lors dans ces circonstances M. [O] [M] et de Mme [P] [C] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions, Enfin, en tout état de cause, sur les frais irrépétibles et les dépens, - condamner solidairement M. [O] [M] et de Mme [P] [C] à payer à la S.A. Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, - condamner solidairement M. [O] [M] et de Mme [P] [C] à prendre à leur charge exclusive les entiers dépens de première instance et d'appel, - rappeler en cas de besoin que conformément aux dispositions de l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution, le débiteur défaillant aura la charge exclusive des frais d'exécution forcée. Dans leurs dernières conclusions notifiées le 10 mai 2023 par voie électronique, M. et Mme [M] demandent à la cour de : Vu l'article 1907 du code civil,

Vu les articles

L. 313-1 et suivants du code de la consommation et les articles R. 313-1 et suivants du même code, Vu l'article L. 312-33 du code de la consommation, désormais codifié à l'article L. 341-34 du même code, Vu l'ancien article 1147 du code civil, ensemble les articles 1231 et suivants nouveau du même code, Vu la jurisprudence applicable, Vu les pièces versées aux débats, - confirmer le jugement entrepris en ce qu'il : ' dit que l'action judiciaire de M. [O] [M] et Mme [P] [C] est recevable et non prescrites, ' débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre de l'ensemble de ses demandes à ce titre, ' débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre au paiement de tout intérêt, ' condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à rembourser à M. [O] [M] et Mme [P] [C] l'ensemble des intérêts payés à compter de la signification du jugement, ' débouté la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre de ses demandes au titre de dommages-intérêts, ' ordonné l'exécution provisoire, ' condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à payer à M. [O] [M] et Mme [P] [C] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ' condamné la Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre aux dépens de la première instance, y compris les frais de greffe liquidés à la somme de 95,68 euros, - l'infirmer pour le surplus, Y ajoutant, - déclarer les demandes de M. [O] [M] et Mme [P] [C] née [L] recevables et bien fondées, - prononcer l'annulation de la stipulation d'intérêts du contrat initial souscrit par M. [O] [M] et Mme [P] [C] née [L], - prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels du prêt 8203633 souscrit auprès de la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre par M. [O] [M] et Mme [P] [C] née [L], - prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels de l'avenant au prêt conclu suivant offre en date du 21 mai 2015 auprès de la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre par M. [O] [M] et Mme [P] [C] née [L], En tout état de cause, - condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à payer à M. [O] [M] et Mme [P] [C] née [L] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de loyauté contractuelle, - condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à payer à M. [O] [M] et Mme [P] [C] née [L] la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - rejeter toutes demandes et prétentions contraires de la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre, - condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre aux entiers dépens de l'instance. Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives. L'instruction a été clôturée par ordonnance du 25 mai 2023, pour l'affaire être plaidée le 8 juin suivant et mise en délibéré à ce jour.

SUR CE,

LA COUR : Sur la demande principale en remboursement des intérêts payés par les emprunteurs: Au soutien de leur demande tendant à voir condamner la Caisse d'épargne, par confirmation du jugement entrepris, à leur rembourser l'ensemble des intérêts payés au titre du prêt litigieux, M. et Mme [M] reprochent à l'appelante d'avoir omis d'intégrer dans le calcul du taux effectif global (TEG) et dans celui du coût total du crédit les intérêts de la phase de préfinancement, puis d'avoir institué un calcul des intérêts périodiques sur la base d'un diviseur de 360 jours. A titre de sanction des irrégularités ainsi invoquées, M. et Mme [M] sollicitent tout à la fois l'annulation de la stipulation d'intérêts et la déchéance totale des intérêts conventionnels, puis ajoutent que la Caisse d'épargne ne peut leur opposer une fin de non-recevoir tirée de la prescription alors qu'une telle prescription nuirait à l'effectivité de leurs droits, et que la clause de l'offre de prêt qui prévoit que les intérêts périodiques sont calculés sur la base d'une année de 360 jours, comme la clause qui exclut le coût du préfinancement de la liquidation du coût total du crédit et du calcul du taux effectif global, sont des clauses abusives dont l'action tendant à faire écarter l'application n'est pas soumise à la prescription. - sur la ou les sanctions applicables La mention erronée du taux effectif global figurant dans l'offre de crédit immobilier en méconnaissance de l'article L. 312-8, devenu L. 313-25 du code de la consommation, n'est pas sanctionnée par la nullité de la clause de stipulation d'intérêts, mais exclusivement par la déchéance éventuelle du droit aux intérêts prévue à l'article L. 312-33 du même code, devenu l'article L. 341-34 (v. par ex. Civ. 1, 6 juin 2018, n° 17-16.300), en raison du caractère d'ordre public des règles spécifiques édictées pour la protection du consommateur, qui prévalent sur les règles générales posées par l'article 1907 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Si l'article L. 312-33 du code de la consommation, pris dans sa rédaction applicable à la cause, ne sanctionne expressément que les modalités de fixation du taux effectif global, il est acquis depuis un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 11 mars 2020 (n° 19-10.875) que la mention, dans l'offre de prêt, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que civile, telle l'année bancaire dite lombarde de trois-cent-soixante jours, est exclusivement sanctionnée elle aussi par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l'article L. 312-33. Les irrégularités dont se prévalent M. et Mme [M] étant exclusivement sanctionnées par la déchéance des intérêts, leur demande de nullité de la stipulation des intérêts ne peut être examinée sur le fondement commun de l'article 1907, ancien, du code civil, mais devra cependant être examinée en tant qu'elle est formée en conséquence de leur demande tendant à voir réputer non écrites, comme abusives, les clauses de l'offre de prêt qui prévoient que les intérêts périodiques sont calculés sur la base d'une année de 360 jours et qui excluent le coût du préfinancement du coût total du crédit et du calcul du taux effectif global -clauses dont les intimés soutiennent à l'appui de leur demande de nullité qu'elles sont indivisibles de la clause de stipulation des intérêts. - sur la demande de nullité de la stipulation des intérêts tirée du caractère abusif de deux clauses de l'offre de prêt La cour de justice de l'Union a dit pour droit que l'article 6, § 1, et l'article 7, § 1, de la directive 93/13 CEE du 5 avril 1993, lus à la lumière du principe d'effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale soumettant l'introduction d'une demande par un consommateur aux fins de constatation du caractère abusif d'une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur à un délai de prescription (CJUE 10 juin 2021, aff. C-776/19). Dès lors que la nullité de la stipulation des intérêts est sollicitée, non pas sur le fondement du droit commun des contrats, mais en tant qu'elle serait la conséquence du retranchement de deux clauses du contrat présentant un caractère abusif, dont il est soutenu qu'elles seraient indivisibles de la stipulation des intérêts, l'action en nullité des intimés doit être déclarée recevable afin d'assurer l'effectivité du contrôle et de la sanction des clauses abusives éventuellement contenues au contrat de prêt litigieux. Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Selon le 5e alinéa de l'article L. 132-1, sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 [anciens] du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat [']. L'alinéa 6 du texte prévoit que les clauses abusives sont réputées non écrites. L'alinéa 7 précise que l'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou service offert pour autant que les clauses sont rédigées de façon claire et compréhensible. Enfin les deux derniers alinéas de l'article L. 132-1 énoncent que les dispositions de cet article sont d'ordre public et que le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans de telles clauses. En considération de ces dispositions, il convient d'examiner successivement les deux clauses du contrat de prêt qui, selon les intimés, présenteraient un caractère abusif, devraient en conséquence être réputées non écrites et emporteraient la nullité de la stipulation d'intérêts qu'ils estiment indivisible de ces clauses. - sur l'appréciation du caractère abusif de la clause excluant du calcul du TEG et du coût total du crédit les intérêts dus au titre de la phase de préfinancement La première clause dont il est soutenu qu'elle serait abusive au sens de l'article L. 132-1 précité est celle aux termes de laquelle « le coût total du crédit et le taux effectif global ne tiennent pas compte des intérêts intercalaires, de la prime de raccordement d'assurance et le cas échéant des primes d'assurances de la phase de préfinancement ». A supposer que cette clause, rédigée de manière claire et compréhensible, ne porte pas sur l'objet même du contrat au sens de l'article 7 de l'article L. 132-1 issu de la transposition de l'article 4.2 de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993, et relève donc du contrôle juridictionnel de l'abus, elle ne peut être réputée non écrite que si elle a pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. En l'espèce, l'offre de prêt fixait les dates d'échéances au 5 de chaque mois, et le point de départ de l'amortissement à la première échéance utile suivant le versement des fonds. Le prêt était destiné à financer l'acquisition d'un logement sans travaux et il était prévu, dans cette hypothèse, un déblocage des fonds entre les mains du notaire chargé de recevoir la vente. Les intérêts intercalaires dus au cours de la période de préfinancement, c'est-à-dire entre la date qui serait fixée par le notaire pour recevoir l'acte de vente, et le 5 du mois suivant, point de départ de la phase d'amortissement, n'étaient donc pas déterminables par la Caisse d'épargne au moment de l'émission de l'offre de prêt, antérieure à la fixation, par le notaire, de la date d'authentification de la vente à laquelle était lié le déblocage des fonds prêtés. Dans pareilles circonstances, le droit supplétif n'impose pas la prise en compte dans le calcul du coût total du crédit ou celui du taux effectif global des intérêts dus au titre de la phase de préfinancement, puisque ceux-ci sont impossibles à chiffrer au moment de l'émission de l'offre de prêt. S'il est exact que la Cour de cassation a un temps jugé le contraire, la solution qui conduisait les prêteurs à se livrer à des calculs purement hypothétiques et, par voie de conséquence, dénués d'utilité pour les emprunteurs, a été abandonnée le 31 août 2022 par un arrêt de la première chambre civile publié au bulletin (pourvoi n° 20-21.632). Si la loi n'a pas d'effet rétroactif, et ne dispose que pour l'avenir, il n'en va pas de même de la jurisprudence, purement déclarative. La sécurité juridique qu'invoquent les intimés, sur le fondement du droit à un procès équitable, ne saurait consacrer à leur profit un droit acquis à une jurisprudence figée, dès lors que la solution nouvelle ne les prive pas du droit à l'accès au juge. La clause litigieuse, qui avait finalement le mérite d'attirer l'attention des emprunteurs sur le fait que les intérêts intercalaires dus pendant la période de préfinancement, dont le montant n'était pas déterminable, n'étaient pas intégrés dans le calcul du taux effectif global ni dans le coût total du crédit, n'avait en l'espèce ni pour objet, ni pour effet, de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment des emprunteurs, et ne présente donc pas les caractères d'une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 précité. - sur l'appréciation du caractère abusif de la clause de calcul des intérêts sur la base du diviseur 360 La seconde clause dont il est soutenu qu'elle serait abusive au sens de l'article L. 132-1 est celle qui prévoit que les intérêts seront calculés « sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours » . Cette clause qui porte sur l'objet du contrat (v. par ex. CJUE, 26 janvier 2017, aff. C-421/14), grammaticalement claire, est cependant difficilement compréhensible pour des emprunteurs profanes, en ce que le contrat n'expose pas de manière intelligible pour un consommateur les modalités de calcul des intérêts. Dès lors qu'elle n'est pas rédigée de manière compréhensible au sens de l'article 7 de l'article L. 132-1, cette clause relève du contrôle juridictionnel de l'abus et devra être réputée non écrite si elle entraîne un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. L'appréciation de ce déséquilibre ne doit pas se faire abstraitement, à la seule lecture de la clause, mais suppose d'apprécier quels sont ses effets concrets de cette clause sur le coût du crédit (v. par ex. Civ. 1, 9 septembre 2020, n° 19-14.934). La Caisse d'épargne établit que le recours au diviseur 360 n'a eu aucune incidence sur le coût du crédit durant la période d'amortissement, ce qui n'a rien de surprenant puisque lorsque les dates d'échéance sont fixées, comme en l'espèce, au même jour de chaque mois, le calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours rapportée à 30 jours, soit un douzième d'année par mois, revient arithmétiquement à un résultat équivalent au calcul des intérêts effectué sur la base d'une année civile ramenée au mois normalisé (30,41666 jours ou 1/12e d'année). Sur la période de préfinancement, dont il n'est pas contesté qu'elle n'a duré que trois jours, le coût des intérêts s'est élevé à 40,19 euros avec l'application du diviseur 360, alors qu'il aurait été de 39,64 euros avec le diviseur 365, et le diviseur 360 a fait passer le taux réel du prêt à : 40,19 / (138 998 X 3 / 36500) = 3,51 %, ce qui représente une différence de moins d'une décimale par rapport au taux conventionnel annoncé (3,51 ' 3,47 = 0,04). Il n'apparaît pas, dans ces circonstances, que la clause litigieuse ait eu sur le coût du crédit des effets ayant entraîné, au détriment des intimés, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Dès lors qu'au cas particulier, ni la clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base du diviseur 360, ni la clause excluant les intérêts intercalaires dus pendant la période de préfinancement du calcul du taux effectif global et du coût total du crédit, ne présentent les caractères d'une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 précité, la demande de nullité de la stipulation des intérêts tirée du caractère prétendument abusif de cette clause ne peut qu'être écartée. - sur la demande de déchéance des intérêts Par application des articles L. 110-4 du code de commerce et 2224 du code civil, l'action en déchéance des intérêts se prescrit par cinq ans à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'irrégularité alléguée (v. par ex. Civ. 1, 1er mars 2017, n° 16-10 .142), étant précisé que cette connaissance est acquise au jour de la souscription du prêt uniquement si l'emprunteur était en mesure de se convaincre lui-même, à cette date (v. par ex. Civ. 1, 9 septembre 2020, n°19-15.835). En l'espèce, l'offre de prêt comporte en ses conditions particulières, page 2, deux tableaux : - un premier tableau dans lequel figurent le taux des intérêts, la durée du prêt avec l'indication des phases de préfinancement et d'amortissement, le montant des échéances, prime d'assurance incluse et non incluse ; - un second tableau dans lequel figurent le taux effectif global (TEG), les frais de dossier, l'évaluation des frais de garantie, les frais de courtage, le taux de période puis le coût total du crédit, avec et sans les primes d'assurance et autres accessoires. Sous ces deux tableaux, se trouvent les indications suivantes : « Durant le préfinancement, les intérêts sont calculés sur le montant des sommes débloquées, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. Durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. Le coût total du crédit et le taux effectif global ne tiennent pas compte des intérêts intercalaires, de la prime de raccordement d'assurance et le cas échéant des primes d'assurances de la phase de préfinancement ». Une simple lecture de cette offre permettait à M. et Mme [M] de se convaincre par eux-mêmes que les intérêts étaient calculés sur la base d'une année bancaire dite lombarde. Une telle lecture les mettait pareillement en mesure de déceler par eux-mêmes que ni le coût total du crédit, ni le taux effectif global, n'incluaient les intérêts de la période de préfinancement. Lorsque la simple lecture de l'offre de prêt permet à l'emprunteur de déceler son irrégularité, le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour de l'acceptation de l'offre, sans report possible tiré de la révélation postérieure d'autres irrégularités (v. par ex Civ. 1, 5 janvier 2022, n° 20-16.350). Le point de départ de la prescription n'a pas non plus été reporté par la conclusion de l'avenant du 10 juin 2015 qui, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, n'a produit aucun effet novatoire, et qui ne comporte aucune modification concernant le calcul des intérêts ou l'absence d'intégration des intérêts de la phase préfinancement dans les calculs discutés du taux effectif global et du coût total du crédit. Il en résulte que le délai de prescription de l'action en déchéance des intérêts engagée par M. et Mme [M] a commencé à courir le 24 juillet 2012, date d'acceptation de l'offre de prêt litigieuse, et avait donc largement expiré le 14 mars 2019, date d'introduction de l'action. Les intimés ne peuvent soutenir que la Caisse d'épargne ne peut leur opposer une prescription qui nuirait à l'effectivité de leurs droits, et conduirait à rompre le principe d'égalité des armes en les privant de la possibilité de contester la validité d'un contrat en cours d'exécution, alors qu'ils ont remboursé le prêt litigieux par anticipation et que le prêteur ne peut donc plus agir en exécution du contrat en cause. Partant, M. et Mme [M] ne peuvent qu'être déclarés irrecevables en leur demande, tardive, de déchéance des intérêts. Dès lors que ni la demande de nullité de la stipulation des intérêts, ni la demande de déchéance du droit aux intérêts, ne peuvent prospérer, rien ne justifie de condamner la Caisse d'épargne à rembourser aux intimés les intérêts payés en exécution du prêt litigieux. Sur la demande de dommages et intérêts tirée d'un manquement du prêteur à son obligation de loyauté contractuelle : Il résulte de la combinaison des articles 2224 du code civil et L. 110-4 du code de commerce que les obligations entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Outre que le manquement d'une banque à son obligation d'information et de loyauté prive l'emprunteur d'une chance d'éviter de contracter et qu'au cas particulier, M. et Mme [M] n'invoquent aucune perte de chance, cette perte de chance de ne pas contracter et, selon les termes des intimés, de « confier le dossier de prêt à un établissement concurrent », s'est réalisée dès la conclusion du contrat. Le point de départ de l'action en responsabilité se situe donc à la date d'acception de l'offre de prêt. En l'espèce, l'offre litigieuse a été acceptée, on l'a dit, le 24 juillet 2012. L'action en responsabilité de M. et Mme [M] engagée le 14 mars 2019 ne peut dès lors qu'être déclarée irrecevable, comme prescrite. Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts du prêteur pour procédure abusive : La Caisse d'épargne, qui a critiqué dans sa déclaration d'appel le chef du dispositif du jugement déféré qui l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, ne formule plus aucune demande en ce sens à hauteur d'appel, et ne sollicite d'ailleurs pas, dans le dispositif de ses dernières écritures, l'infirmation de ce chef du jugement qui, par voie de conséquence, ne peut qu'être confirmé. Sur les demandes accessoires : M. et Mme [M], qui succombent au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devront supporter in solidum les dépens de première instance et d'appel et seront déboutés de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Sur ce dernier fondement, M. et Mme [M] seront condamnés in solidum à régler à la Caisse d'épargne, à qui il serait inéquitable de laisser la charge de la totalité des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens, une indemnité de procédure de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision entreprise, seulement en ce qu'elle a débouté la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, L'infirme pour le surplus de ses dispositions critiquées, Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant : Déclare M. [O] [M] et Mme [P] [L] épouse [M] recevables mais mal fondés en leur demande de nullité de la stipulation d'intérêts du prêt tirée de ce que la clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base du diviseur 360, et/ou la clause excluant les intérêts intercalaires dus pendant la période de préfinancement du calcul du taux effectif global et du coût total du crédit, devraient être réputées non écrites, comme abusives, Déclare M. [O] [M] et Mme [P] [L] épouse [M] irrecevables en leur demande de déchéance du droit aux intérêts, Rejette en conséquence la demande de M. [O] [M] et Mme [P] [L] épouse [M] tendant à voir condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à leur rembourser les intérêts payés au titre du prêt litigieux, Déclare M. [O] [M] et Mme [P] [L] épouse [M] irrecevables en leur demande de dommages et intérêts tirée d'un manquement de la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre à ses obligations contractuelles d'information et de loyauté, Condamne in solidum M. [O] [M] et Mme [P] [L] épouse [M] à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, Rejette la demande de M. [O] [M] et Mme [P] [L] épouse [M] formée sur le même fondement, Condamne in solidum M. [O] [M] et Mme [P] [L] épouse [M] aux dépens de première instance et d'appel. Arrêt signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Note...

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