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Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 7 février 2006, 04-17.472

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
7 février 2006
Cour d'appel d'Angers
15 juin 2004
Cour d'appel d'Angers
4 février 2003

Synthèse

  • Juridiction : Cour de cassation
  • Numéro de pourvoi :
    04-17.472
  • Dispositif : Rejet
  • Publication : Inédit au bulletin - Inédit au recueil Lebon
  • Nature : Arrêt
  • Décision précédente :Cour d'appel d'Angers, 4 février 2003
  • Identifiant Légifrance :JURITEXT000007492247
  • Identifiant Judilibre :6137247bcd58014677415da6
  • Président : M. TRICOT
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Résumé

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Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Attendu, selon l'arrêt déféré (Angers, 15 juin 2004), que les époux X..., le Groupement foncier agricole Les Serres de La belle Etoile (le GFA) ainsi que la SCI Le Pré long (la SCI), ont été mis en liquidation judiciaire avec confusion des patrimoines le 2 mars 2000, M. Di Y... étant nommé liquidateur ; que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Anjou et du Maine (la Caisse) a déclaré une créance chirographaire et une créance privilégiée au titre de prêts accordés aux époux X..., au GFA et à la SCI ; que le juge-commissaire a, le 19 février 2001, admis au passif les créances de la Caisse en mentionnant l'existence d'une procédure en cours ; que les époux X..., le GFA et la SCI, ces derniers représentés par leur gérante ont interjeté appel de cette décision ; que la cour d'appel a déclaré irrecevable "l'action" du GFA et de la SCI, représentés par leurs dirigeants sociaux, déclaré prescrite la demande de nullité de la stipulation d'intérêts formée par les époux X... et confirmé l'ordonnance déférée ;

Sur le premier moyen

:

Attendu que les époux X..., le GFA et la SCI font grief à

l'arrêt d'avoir déclaré leur "action" irrecevable, alors, selon le moyen : 1 ) que l'arrêt ayant tranché la question de la recevabilité d'un recours est revêtu de l'autorité de la chose jugée sur ce point ; que le juge ne peut donc ultérieurement accueillir un moyen tiré de l'irrecevabilité du recours ; qu'en l'espèce, il est constant que par arrêt du 4 février 2003, la cour d'appel d'Angers a déclaré recevable l'appel formé par le GFA et la SCI, contre l'ordonnance du juge-commissaire du 19 février 2001 en ce qu'elle a prononcé l'admission de la créance de la Caisse ;

qu'en décidant

néanmoins que l'appel du GFA et de la SCI contre cette ordonnance était irrecevable, la cour d'appel a violé les articles 1351 du code civil et 480 du nouveau code de procédure civile ; 2 ) que le droit à un recours effectif implique que le dirigeant d'une société en liquidation judiciaire puisse exercer seul des recours ouverts à cette société, sans être tenu de demander la désignation d'un liquidateur amiable ou d'un mandataire ad hoc ; d'où il suit qu'en déclarant irrecevables les actions du GFA et de la SCI, représentés par leurs dirigeants sociaux, la cour d'appel a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 1844-7 du code civil ; 3 ) que le recours d'une personne morale en liquidation judiciaire, prise en la personne de ses représentants légaux, est recevable lorsque ces derniers sont également parties à la procédure ; qu'en l'espèce, Mme X... qui était la gérante du GFA et de la SCI, était partie à la procédure ; qu'en déclarant irrecevable le recours formé par le GFA et la SCI, la cour d'appel a violé l'article 1844-7 du code civil ; 4 ) que le juge ne peut déclarer irrecevable le recours d'une personne morale en liquidation, représentée par ses dirigeants sociaux, sans l'avoir préalablement invitée à régulariser la procédure en se faisant représenter par un liquidateur amiable ou un mandataire ad hoc ; qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable le recours du GFA et de la SCI en liquidation judiciaire, la cour d'appel a relevé qu'ils devaient être représentés par le mandataire liquidateur ou un mandataire désigné à cette fin ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir préalablement invité le GFA et la SCI à régulariser la procédure sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; 5 ) que la décision de prononcer la confusion des patrimoines d'une société et de son gérant permet à ce dernier d'agir au nom de la société ; qu'en l'espèce, par jugement du 13 mars 1997, le tribunal a prononcé la confusion des patrimoines de Mme X... et du GFA dont elle était la gérante ; qu'en décidant que Mme X... n'avait pas qualité pour agir au nom du GFA, la cour d'appel a violé l'article 31 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel n'ayant pas déclaré l'appel mais l'action irrecevable, le grief invoqué par la première branche manque en fait ; Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt ayant relevé que le GFA et la SCI avaient pris fin par l'effet de leur mise en liquidation judiciaire en a exactement déduit, peu important que la confusion des patrimoines ait été constatée, que leur dirigeante avait perdu tout pouvoir de les représenter en justice et que seul un liquidateur ou un mandataire spécialement désigné pouvait agir en leur nom ; qu'ainsi la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'inviter les parties à régulariser la procédure avant de se prononcer, a légalement justifié sa décision, sans encourir les griefs du moyen ; D'où il suit qu'irrecevable en sa première branche le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le second moyen

:

Attendu que les époux X..., le GFA et la SCI, font grief à

l'arrêt d'avoir déclaré prescrite la demande de nullité de la stipulation d'intérêts et d'avoir confirmé l'ordonnance alors, selon le moyen : 1 ) que le juge ne peut relever d'office un moyen sans avoir préalablement ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'expliquer sur son bien-fondé ; qu'en l'espèce, pour décider que le juge-commissaire n'était pas tenu de prononcer un sursis à statuer dans l'attente des procédures en cours dirigées contre la Caisse, la cour d'appel a retenu qu'un tel sursis ne pouvait être prononcé sur le fondement de l'article L. 621-104 du Code de commerce et que l'action engagée devant le tribunal de grande instance de Paris était sans influence sur la créance déclarée ; que ces moyens n'avaient pas été invoqués par la Caisse dans ses conclusions d'appel, de sorte qu'en les retenant d'office à l'appui de sa décision, sans avoir préalablement rouvert les débats pour assurer le respect du principe fondamental de la contradiction, la cour d'appel a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 16 du nouveau Code de procédure civile ; 2 ) que le juge qui constate qu'une instance en cours est susceptible d'avoir une incidence sur une créance déclarée est tenu de surseoir à statuer dans l'attente d'un arrêt passé en force de chose jugée rendu dans cette instance ; qu'une action en justice, et notamment une déclaration de créance, formée par une personne morale sans capacité juridique, est nulle et ne peut avoir aucun effet ; qu'il résulte des constatations mêmes de l'arrêt attaqué que les époux X... ont interjeté appel d'un jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris statuant sur la régularité des statuts des caisses de Crédit agricole, et donc sur la validité d'actions en justice formées par ces caisses ;

qu'en décidant

qu'une telle action ne pouvait avoir d'influence sur la créance déclarée, et donc qu'elle n'était pas tenue de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel de Paris, la cour d'appel a violé l'article L. 621-104 du Code de commerce ; 3 ) que la destination professionnelle d'un crédit ne peut résulter que d'une stipulation expresse ; qu'en l'espèce, pour décider que les crédits litigieux devaient être qualifiés de professionnels, la cour d'appel s'est bornée à relever qu'il n'était pas contesté que ces prêts étaient des crédits immobiliers destinés au financement de l'activité professionnelle des époux X... ; qu'en se déterminant par ce seul motif, sans relever l'existence d'une stipulation expresse des crédits permettant d'établir leur destination professionnelle, la cour d'appel a violé l'article L. 311-3 du Code de la consommation ; 4 ) que lorsque le taux effectif global exact n'a pas été mentionné par écrit, la stipulation d'intérêts est nulle et l'emprunteur a droit au remboursement des intérêts illégalement perçus ; que cette action en répétition d'une somme indue est soumise à la prescription trentenaire ; qu'en l'espèce, les époux X... ont soutenu que les différents prêts souscrits ne précisaient pas le taux effectif global calculé en respectant les exigences légales ; que pour écarter ce moyen, la cour d'appel a relevé que les prêts litigieux avaient été signés entre 1987 et 1992, que la première contestation à leur sujet avait été formulée en janvier 2001, et que le délai de prescription quinquennale était alors expiré ; qu'en opposant ainsi la prescription quinquennale à une action en répétition de l'indu, la cour d'appel a violé les articles 1304 et 1907 du Code civil, et L. 313-2 du Code de la consommation ; 5 ) que le prêt est un contrat synallagmatique à exécution successive ; que l'exception de nullité, qui est perpétuelle, peut être invoquée tant que la stipulation contractuelle nulle n'a pas été entièrement exécutée ; qu'enfin, l'absence de mention dans le contrat de prêt d'un taux effectif global calculé conformément à l'article L. 313-1 du Code de la consommation affecte seulement la validité de la stipulation d'intérêts ; qu'il en résulte que la nullité de la stipulation d'un intérêt méconnaissant les exigences de l'article L. 313-1 du Code de la consommation peut être invoquée par voie d'exception tant que l'emprunteur n'a pas remboursé l'intégralité des intérêts stipulés ; qu'en l'espèce, pour contester des déclarations de créance de la Caisse relatives à différents prêts, les époux X... ont soutenu que les contrats ne comportaient pas de mention d'un taux effectif global conforme aux exigences du Code de la consommation ; que cette exception de nullité de la stipulation d'intérêts était recevable tant que les intérêts n'avaient pas été intégralement remboursés, c'est-à-dire jusqu'au terme du contrat ; qu'en opposant néanmoins la prescription quinquennale, sans justifier qu'à la date à laquelle cette exception de nullité a été présentée, les contrats avaient été intégralement exécutés, la cour d'appel a violé l'article 1304 du Code civil et le principe selon lequel l'exception de nullité est perpétuelle ; 6 ) que le taux d'un prêt constitue un élément substantiel du contrat ; qu'en l'espèce, les époux X... ont soutenu que le taux effectif global mentionné sur les différents emprunts contractés auprès de la Caisse était erroné de plusieurs dixièmes de point ; qu'en écartant l'existence d'une erreur au motif qu'il ne s'agissait que de différences de présentation ne modifiant par l'économie des prêts, la cour d'appel a violé les articles 1109, 1110 et 1304 du Code civil ; Mais attendu, en premier lieu, que les époux X... ayant fait valoir dans leurs conclusions que le juge-commissaire ne pouvait tout à la fois constater qu'une procédure était en cours et prononcer une admission définitive et qu'il devait en l'état de ses constatations surseoir à statuer, la cour d'appel n'a pas introduit dans le débat des éléments de fait et de droit dont les parties n'auraient pas été à même de débattre contradictoirement ; Attendu, en deuxième lieu, qu'est une instance en cours au sens des dispositions de l'article L. 621-104 du Code de commerce celle qui vise à obtenir de la juridiction saisie du principal une décision définitive sur l'existence et le montant de la créance litigieuse ; que le juge-commissaire peut seulement en constater l'existence ; qu'ayant constaté que l'instance dont les époux se prévalaient tendait au prononcé de la nullité de la Caisse, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; Attendu, en troisième lieu, qu'il n'apparaît ni des conclusions ni de l'arrêt que les époux X... aient soutenu que la destination professionnelle du crédit devait résulter d'une stipulation expresse de l'acte et que le grief est nouveau et mélangé de fait et de droit ; Attendu, en quatrième lieu, que la cour d'appel ayant relevé que la demande des époux X... avait pour objet de voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels exigés par la Caisse, ou, à défaut, la nullité de la stipulation des intérêts, mettant ainsi en évidence qu'elle ne tendait pas à la nullité du contrat de prêt pour vice du consentement, en a exactement déduit que, fondée sur le caractère erroné du taux effectif global, cette demande était soumise aux dispositions du Code de la consommation relative à ce taux ; Attendu, enfin, que l'exception de nullité peut seulement faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas été exécuté ; qu'étant saisie d'une demande de fixation de la créance des remboursements des prêts et ayant constaté que la nullité de la stipulation d'intérêts avait été soulevée pour la première fois en dehors du délai de prescription, la cour d'appel qui en a exactement déduit que l'exception n'était plus recevable et qui n'avait dès lors pas à se prononcer sur la validité de la stipulation d'intérêts, a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa troisième branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne les époux X..., le GFA Les Serres de La Belle Etoile et la SCI Le Pré long aux dépens ; Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les condamne à payer à la CRCAM de l'Anjou et du Maine la somme globale de 2 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille six.

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