COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N
BAP/ FB
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02904.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGERS, décision attaquée en date du 08 Novembre 2011, enregistrée sous le no 09. 036
assuré : David X...
ARRÊT DU 25 Juin 2013
APPELANTE :
Société EIFFAGE CONSTRUCTION PAYS DE LOIRE
11 route de Gachet
44300 NANTES
représentée par Maître Antony VANHAECKE, avocat au barreau de LYON-No du dossier 08227
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAINE ET LOIRE
32 rue Louis Gain
49937 ANGERS CEDEX 9
représentée par Monsieur Laurent Z..., muni d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article
945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Janvier 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller
Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT :
prononcé le 25 Juin 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
M. X..., ouvrier salarié de la société Eiffage construction Pays de la Loire depuis le 28 mai 1996, a souscrit le 24 avril 2008 une déclaration de maladie professionnelle pour " conflit douloureux et invalidant de l'épaule droite résistants au traitement ", le certificat médical initial du même jour, établi par le docteur Y..., médecin du travail, mentionnant que M. X..." présente une pathologie de l'épaule droite douloureuse et enraidie qui peut relever du tableau 57A des maladies professionnelles après examen du médecin conseil.
Le point de départ se situe le 27 janvier 2008 date de la première consultation chez le médecin généraliste.
L'IRM du 15 février 2008 montre une abrasion du tendon du sus épineux sans lésion transfixiante. Une arthroscopie thérapeutique est programmée ".
La Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse), ensuite de leur dépôt le 13 mai 2008, a accusé réception de cette déclaration et du certificat médical l'accompagnant le 14 mai 2008.
Par courrier du 14 mai 2008, la caisse a adressé à la société Eiffage construction Pays de la Loire une copie de la dite déclaration de maladie professionnelle, lui précisant entre autres, qu'à la suite de cette déclaration, elle procédait à l'instruction du dossier et les délais dont elle disposait à cette fin.
Par courrier du 18 août 2008, reçue par sa destinataire le 20 août suivant, la caisse a informé la société Eiffage construction Pays de la Loire que la procédure d'instruction était close, qu'elle avait la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier et que la décision interviendrait le 29 août 2008.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 août 2008, la caisse a informé la société Eiffage construction Pays de la Loire de la prise en charge de la maladie présentée par M. X..." avec point de départ " au 24 avril 2008 au titre de la législation relative aux risques professionnels, dans le cadre du tableau 57, épaule douloureuse droite, ainsi que les voies et délais de recours qui s'offraient à elle à l'encontre de cette décision de prise en charge.
La société Eiffage construction Pays de la Loire a saisi la Commission de recours amiable (la CRA) le 27 octobre 2008 afin que la décision susvisée lui soit déclarée inopposable, requête que la CRA a rejetée lors de sa séance en date du 18 décembre 2008.
La société Eiffage construction Pays de la Loire a porté son recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers le 23 janvier 2009, qui par jugement du 8 novembre 2011 auquel il est renvoyé pour l'exposé des motifs, a :
- déclaré ce recours recevable mais mal fondé,
- dit que les conditions du tableau no57 sont bien réunies,
- déclaré opposable à la société Eiffage construction Pays de la Loire la décision explicite de la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire, venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, de prise en charge au titre de la législation sur les maladies professionnelles de la maladie de M. X...constatée le 24 avril 2008,
- débouté, en conséquence, la société Eiffage construction Pays de la Loire de l'intégralité de ses demandes.
Cette décision a été notifiée à la société Eiffage construction Pays de la Loire et à la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire le 22 novembre 2011.
La société Eiffage construction Pays de la Loire en a formé régulièrement appel, par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 novembre 2011.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions enregistrés au greffe le 7 juin 2012 reprises et complétées oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, la société Eiffage construction Pays de la Loire sollicite l'infirmation du jugement déféré et, statuant à nouveau, que :
- il soit dit et jugé que la caisse n'a pas respecté ses obligations d'instruction et d'information ni le principe du contradictoire à son égard, en violation des articles
R. 441-10 et suivants du code de la sécurité sociale,
- il soit dit et jugé que les conditions médico-légales du tableau de maladie professionnelle no57A ne sont pas remplies,
En conséquence
-il soit dit et jugé que la décision de la caisse de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie du 24 avril 2008 présentée par M. X...lui est inopposable,
- il soit dit et jugé que l'ensemble des conséquences financières résultant de la prise en charge de la maladie du 24 avril 2008 de M. X...n'est pas à sa charge et ne doit pas, notamment, figurer sur son compte employeur,
En toute hypothèse
-la caisse soit condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile,
- il soit statué ce que de droit quant aux dépens.
Elle fait valoir que, dans la mesure où les dispositions des articles
R. 441-10 et suivants du code de la sécurité sociale sont d'ordre public, leur non-respect est nécessairement sanctionné par l'inopposabilité des décisions faisant grief. Or, la caisse a :
- omis de l'aviser, antérieurement à sa décision de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle, de ce qu'elle recourait au délai complémentaire d'instruction,
- admis la prise en charge au titre de la législation professionnelle d'une maladie sur la base d'une déclaration incomplète, alors que ce caractère incomplet revient à priver l'obligation déclarative de toute portée juridique et de tout intérêt,
- omis de lui communiquer, avec le double de la déclaration de maladie professionnelle souscrite par l'assuré, le double du certificat médical de première constatation de la maladie, ce qui ne lui a pas permis d'apprécier la condition tenant au délai de prise en charge fixé par le tableau no57A des maladies professionnelles, d'autant que, vu le libellé quelque peu obscur de la pathologie dans la déclaration de maladie professionnelle, la communication de la copie de ce certificat médical était encore plus nécessaire à sa connaissance de la nature précise de la pathologie dont se disait affecté le salarié,
- omis de lui laisser un délai de consultation raisonnable et suffisant, et au regard de la période dans laquelle ce délai s'inscrivait, étant au surplus rappelé que le jour de réception de l'avis de clôture de la procédure d'instruction ainsi que le jour de la prise de décision sont exclus du décompte du dit délai ; le but de ce délai est tout de même que l'employeur, quand bien même il a participé à la procédure d'instruction, puisse présenter ses observations, engageant un débat contradictoire préalable avant la prise de décision ; en outre, la rédaction de la lettre par laquelle elle a été avisée de la clôture de la procédure d'instruction démontre qu'elle n'a disposé en réalité que de deux jours effectifs afin de prendre connaissance du dossier et faire valoir ses éventuelles observations ; en tout cas, il ne saurait lui être reproché de ne pas s'être manifestée auprès de la caisse, argument parfaitement inopérant sur l'appréciation du caractère suffisant ou non du délai qui lui a été laissé.
Elle poursuit sur le non-respect par la caisse des conditions de prise en charge de la maladie prévues au tableau no57A des maladies professionnelles.
En effet, alors que la caisse a la charge de la preuve dans ses rapports avec l'employeur, elle ne justifie pas que :
- la maladie déclarée correspond à celle définie au tableau dont s'agit,
- la condition d'exposition au risque, qui doit être certaine et non simplement éventuelle, soit remplie, les travaux exécutés par M. X...n'entrant pas dans les travaux limitativement énumérés par le tableau no57A, étant au surplus précisé que, suivant la charte AT/ MP de la CNAMTS du 4 juillet 2000, la caisse se devait d'effectuer une enquête dans des conditions bien précises et, qu'à défaut d'avoir suivi ces directives, son enquête ne peut qu'être déclarée insuffisante ; par ailleurs, elle-même démontre, qu'avant son entrée dans l'entreprise, M. X...était reconnu travailleur handicapé ensuite des emplois qu'il avait occupés, et que, par conséquent, son état de santé n'est pas imputable aux travaux accomplis à son service mais à celui de ses précédents employeurs,
- la condition du délai de prise en charge soit remplie, puisqu'elle ne lui communique pas le document médical attestant avec exactitude de la date de première constatation de la maladie.
Elle s'oppose à la demande subsidiaire de la caisse sur la saisine du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (le CRRMP) en ce que le jugement déféré à la cour fixe les limites du litige, et que, de toute façon, le salarié concerné ne présente pas d'IPP.
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Par conclusions enregistrés au greffe le 21 juin 2012 reprises et complétées oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire, venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, sollicite, au principal, la confirmation du jugement déféré, et, à titre très subsidiaire, dans l'hypothèse où l'une ou plusieurs des conditions administratives du tableau no57 ne serait pas remplie, que soit ordonnée la saisine du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (le CRRMP) afin que soit tranchée la question du lien de causalité entre la maladie litigieuse et le travail de l'intéressé, outre que la société Eiffage construction Pays de la Loire soit condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile.
Elle réplique, relativement aux irrégularités de procédure soulevées par la société Eiffage construction Pays de la Loire, que :
- ni l'assuré, ni la caisse, ne se sont prévalus d'une décision de prise en charge implicite du fait d'un défaut d'information du recours au délai complémentaire d'instruction ; dès lors, l'absence d'information de la société Eiffage construction Pays de la Loire de ce chef ne peut entraîner, par elle-même, l'inopposabilité à son égard de la décision de prise en charge ultérieurement intervenue et rendue après qu'elle ait bien été informée de la clôture de la procédure d'instruction et de la possibilité de venir consulter le dossier avant la prise de la dite décision ;
- la seule obligation que lui fait le texte du code de la sécurité sociale applicable est celle de transmettre à l'employeur le double de la déclaration de maladie professionnelle telle qu'elle lui est parvenue de l'assuré, peu important donc que celle-ci soit ou non correctement complétée ; pas plus ne peut-elle, sauf à enfreindre le principe du contradictoire, puisque dans l'obligation alors de mener une instruction médico-administrative afin de remplir les cases en rapport, compléter les rubriques de la déclaration quant au fait que la maladie déclarée soit ou non hors tableau des maladies professionnelles,
- aucun texte de l'époque du code de la sécurité sociale ne lui impose, lors de l'ouverture de la procédure d'instruction de la maladie, de transmettre à l'employeur le double du certificat médical initial,
- elle a parfaitement respecté le principe du contradictoire au sens des textes du code de la sécurité sociale alors applicables et de l'interprétation que leur a donnée la Cour de cassation ; d'une part, l'employeur tente de donner au contradictoire un sens exagéré à ce stade de la procédure, d'autre part, le jour de réception du courrier de clôture de l'instruction doit être pris en considération dans le décompte du délai laissé à l'employeur, enfin, le délai qui a été laissé à la société Eiffage construction Pays de la Loire pour venir consulter le dossier et présenter ses observations, et dont l'appréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond, est manifestement suffisant, d'autant que l'entreprise n'a jamais émis la moindre velléité de consultation du dossier comme elle n'a pas fait savoir que, pour telle ou telle raison, le délai de consultation devait être allongé ; en tout cas, la société Eiffage construction Pays de la Loire ne peut donner à l'une des mentions de la lettre de clôture une portée qu'elle n'a pas, d'autant que le courrier ne pouvait induire de confusion de sa part sur le délai qui lui était imparti pour consultation et observations éventuelles.
Pour ce qui est des conditions de fond du tableau no57, elle indique que contrairement à ce que soutient la société Eiffage construction Pays de la Loire, celles-ci ne posent pas difficulté :
- la maladie déclarée est bien celle du tableau considéré au regard du certificat médical initial établi par le médecin du travail, confirmé par le médecin-conseil dans son instruction médicale, la société Eiffage construction Pays de la Loire ne produisant aucun élément médical qui vienne le contredire ; si la cour l'estimait toutefois nécessaire, une expertise technique devra être ordonnée,
- les travaux exécutés par M. X..., selon la description des tâches qu'il a faite, description qui a été confirmée par le questionnaire employeur ainsi que par l'enquête réalisée sur site parfaitement valable, d'autant que l'argument du non-respect d'une circulaire est sans portée, correspondent aux travaux figurant au tableau no57 ; par ailleurs, la reconnaissance du statut de travailleur handicapé évoquée par la société Eiffage construction Pays de la Loire n'est pas de nature à détruire la présomption d'imputabilité ; dès lors, la condition d'exposition aux risques prévue au tableau considéré est acquise,
- la date de première constatation médicale de la maladie ne se confond pas avec celle du certificat médical initial joint à la déclaration de maladie professionnelle, et la Cour de cassation a tout à fait admis que cette date puisse être déterminée à partir d'un faisceau d'indices concordants ; la même juridiction a par ailleurs précisé que la caisse n'était pas tenue de produire la prescription d'arrêt de travail valant date de première constatation médicale de la maladie, notamment lorsque la date du début d'arrêt de travail considérée comme date de première constatation médicale de la maladie est confirmée par l'avis favorable du médecin-conseil, ni les examens médicaux en tenant lieu ; les éléments au dossier démontrent que la date de première constatation médicale de la maladie est le 28 janvier 2008, la date du 27 figurant sur la déclaration de maladie professionnelle ressortant manifestement d'une simple erreur de plume, et, l'assuré ayant travaillé jusqu'au 27 janvier 2008, la condition du délai de prise en charge prévue au tableau no57 est nécessairement respectée.
Subsidiairement, si la cour estimait que la date de première constatation médicale de la maladie doit être fixée au 24 avril 2008, et que, par conséquent, le délai de prise en charge était dépassé, elle devra lui enjoindre de régulariser la procédure en saisissant le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (le CRRMP) qui se prononcera sur le lien de causalité entre la maladie déclarée et le travail de M. X....
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour n'est saisie d'aucune demande ni moyen sur la recevabilité du recours formé par la société Eiffage construction Pays de la Loire contre la décision de la Commission de recours amiable (CRA) du 18 décembre 2008.
Il convient donc de confirmer purement et simplement le jugement déféré sur ce point, en ce qu'il a déclaré recevable le recours de la société Eiffage construction Pays de la Loire, la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale étant bien intervenue dans les deux mois de la notification de cette décision et dans les formes prévues à l'article
R. 142-18 du code de la sécurité sociale.
Sur les irrégularités de forme invoquées
La société Eiffage construction Pays de la Loire vient dire que la décision par laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) a pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels la maladie déclarée par M. X...lui serait inopposable, au motif que la caisse a manifestement eu recours au délai complémentaire d'instruction sans l'en avoir informée.
La caisse reconnaît qu'au regard des articles
R. 441-10 et
R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction en vigueur, elle dispose d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration de maladie professionnelle pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie, et que, lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, elle doit en informer l'employeur par lettre recommandée avec accusé de réception avant l'expiration de ce délai de trois mois, un nouveau délai de trois mois s'ouvrant alors à elle.
En l'espèce, la caisse a accusé réception de la déclaration de maladie professionnelle souscrite par M. X...le 14 mai 2008, et a avisé la société Eiffage construction Pays de la Loire de la clôture de la procédure d'instruction le 18 août 2008, alors que le délai de trois mois dont elle disposait était par conséquent expiré et qu'elle n'avait pas informé l'employeur de ce qu'elle avait recours au délai complémentaire de trois mois.
Il n'empêche que, ainsi que le fait justement observer la caisse, la seule conséquence que tirent les textes susvisés de l'absence de décision de sa part dans le délai initial de trois mois qui lui est imparti est la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.
Or, hormis à ce que la caisse admette elle-même l'existence d'une décision implicite, la seule personne qui ait intérêt à se prévaloir de l'absence de décision explicite et, par voie de conséquence de l'existence d'une décision explicite est l'assuré.
En l'état, M. X...n'a argué d'aucune reconnaissance implicite du caractère professionnel de sa maladie, tout comme elle-même n'a fait état d'aucune décision implicite de sa part de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par M. X....
Dans ces conditions, alors qu'en application de l'article
R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, elle a bien avisé la société Eiffage construction Pays de la Loire, avant de prendre sa décision explicite de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la maladie déclarée par M. X..., que la procédure d'instruction était clôturée et que les pièces constitutives du dossier étaient à sa disposition pour consultation et observations éventuelles, l'employeur ne peut pas exciper d'une quelconque inopposabilité de la décision explicite ainsi rendue, au motif que la caisse ne lui a pas notifié un recours au délai complémentaire.
Ce premier moyen ne peut donc qu'être écarté.
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La société Eiffage construction Pays de la Loire vient dire que la décision par laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) a pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels la maladie déclarée par M. X...lui serait inopposable, au motif que la déclaration de maladie professionnelle, incomplètement renseignée, serait dépourvue de toute portée juridique.
Conformément à l'article
L. 461-5 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur, il appartient à la personne, qui se dit victime d'une maladie dont elle entend voir reconnaître le caractère professionnel, de déclarer à la caisse cette maladie sur l'imprimé prévu à cet effet, dans un certain délai, en y joignant deux exemplaires du certificat que lui a remis le médecin, indiquant la nature de la maladie, notamment les manifestations mentionnées au tableau ainsi que les suites probables.
Il n'est pas contesté que M. X...a transmis à la caisse sa déclaration de maladie professionnelle sur l'imprimé adéquat et dans le délai prévu.
Par application de l'article
R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur, la caisse doit adresser à l'employeur le double de la déclaration de maladie professionnelle ainsi reçu.
La formulation de ces textes est claire, en ce que la caisse n'a pas le pouvoir de modifier la dite déclaration, devant la faire parvenir à l'employeur dans l'état où elle-même la reçoit, ce qui est parfaitement compréhensible au regard du principe du contradictoire que la caisse est tenue de respecter à l'égard des parties, dont l'employeur.
Ce deuxième moyen ne peut donc qu'être écarté.
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La société Eiffage construction Pays de la Loire vient dire que la décision par laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) a pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels la maladie déclarée par M. X...lui serait inopposable, au motif que la caisse ne lui a pas transmis, en même temps que le double de la déclaration de maladie professionnelle, la copie du certificat médical de première constatation de la maladie.
L'article
R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur, qui vient d'être rappelé, impose à la caisse, au reçu de la déclaration de maladie professionnelle et du certificat médical l'accompagnant transmis par la victime, d'adresser à l'employeur le double de cette déclaration de maladie professionnelle.
Le texte ne prévoit pas par conséquent, à ce stade, une obligation pour la caisse de joindre au double de la déclaration de maladie professionnelle envoyé à l'employeur une copie du certificat médical initial.
Ce certificat médical initial doit, en revanche, dans un deuxième temps de la procédure, soit une fois l'avis de clôture de la procédure d'instruction adressé par la caisse à l'employeur, figurer au nombre des pièces constituant le dossier dont l'employeur peut prendre connaissance, ce ainsi que l'indique l'article
R. 441-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur.
La société Eiffage construction Pays de la Loire n'invoque pas que ce certificat médical initial n'ait pas été au nombre des pièces du dossier que la caisse a mis à sa disposition pour consultation et observations éventuelles de sa part.
Ce troisième moyen ne peut donc qu'être écarté.
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La société Eiffage construction Pays de la Loire vient dire que la décision par laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) a pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels la maladie déclarée par M. X...lui serait inopposable, au motif que la caisse ne lui aurait pas laissé un délai raisonnable et suffisant afin de prendre connaissance des pièces du dossier qu'elle a constitué après enquête ensuite de la déclaration de maladie professionnelle de M. X....
L'article
R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur, dispose :
" Hors les cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droit et de l'employeur, préalablement à sa décision de reconnaissance ou pas du caractère professionnel de la maladie, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief ".
La caisse, avant de se prononcer sur le caractère professionnel de la maladie, doit donc informer, notamment, l'employeur de la fin de la procédure
d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision.
Ces prescriptions sont destinées à assurer à l'employeur une forme de débat dans la demande de reconnaissance de maladie professionnelle formulée par l'assuré. Les éléments qu'a pu réunir la caisse sont ainsi portés à sa connaissance, afin qu'il puisse éventuellement les discuter, et ce avant que la caisse ne prenne effectivement sa décision par rapport à une prise en charge ou une non prise en charge.
Le texte ne définit pas le délai qui doit être laissé par la caisse pour la consultation et les possibles observations de l'employeur, mais s'agissant de permettre la contradiction, ce délai doit être, évidemment, un délai suffisant et, par là-même, ne doivent être pris en considération que les jours pouvant permettre les dites consultation et éventuelles observations, qui sont dénommés jours utiles.
Le courrier du 18 août 2008, par lequel la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) a avisé la société Eiffage construction Pays de la Loire de la clôture de la procédure d'instruction menée et de ce qu'elle rendrait sa décision le 29 août 2008, a été reçue par sa destinataire le 20 août précédent.
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La société Eiffage construction Pays de la Loire déclare, en premier lieu, qu'elle n'a disposé que de six jours utiles pour consulter le dossier et déposer ses observations, ce qui ne saurait constituer un délai raisonnable et suffisant.
Le 20 août 2008 était un mercredi. La caisse avait annoncé que sa décision interviendrait le 29 août suivant, qui était un vendredi.
Ne constituent pas des jours utiles pour la société Eiffage construction Pays de la Loire, le jour de prise de décision par la caisse, cette dernière pouvant statuer dès que ses employés sont à leur poste de travail, pas plus que les fins de semaine, la caisse étant alors fermée au public.
Dès lors, et contrairement à ce qu'elle indique, la société Eiffage construction Pays de la Loire a disposé non de six, mais de sept jours utiles, le jour de la réception de l'avis de fin d'instruction devant être pris en compte comme le mentionne justement la caisse, afin de se rendre dans les locaux de la caisse, prendre connaissance du dossier et faire connaître ses observations si elle en avait, à savoir les mercredi 20, jeudi 21, vendredi 22, lundi 25, mardi 26, mercredi 27 et jeudi 28.
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La société Eiffage construction Pays de la Loire déclare, en second lieu, qu'au regard de la rédaction de l'avis de clôture d'instruction, elle n'a, en réalité, disposé que de deux jours effectifs pour prendre connaissance du dossier et faire valoir ses observations éventuelles, ce qui, nécessairement, n'est ni un délai raisonnable, ni un délai suffisant.
La lettre du 18 août 2008 que lui a adressée la caisse est libellée en ces termes :
" Je vous informe qu'à ce jour l'instruction du dossier est terminée. En effet, aucun élément nouveau ne paraît plus devoir intervenir.
Préalablement à la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie
professionnelle qui interviendra le 29/ 08/ 2008 EPAULE DROITE DOULOUREUSE (votre éventuelle demande de consultation doit nous parvenir dans les 48 heures suivant la réception de la présente, y compris par fax au 02 41 81 77 00), vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier ".
Une telle rédaction ne peut cependant prêter à confusion, en ce qu'elle réduirait le délai de consultation et d'observations de la société Eiffage construction Pays de la Loire à deux jours.
Il est clair que la caisse a simplement informé l'entreprise des modalités de prise de rendez-vous pour consultation du dossier, consultation pouvant avoir lieu, quant à elle, jusqu'à la veille de la prise de décision, à savoir le 28 août 2008 inclus.
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La société Eiffage construction Pays de la Loire a donc bien disposé d'un délai de sept jours utiles afin de consulter le dossier et présenter ses éventuelles observations.
Si la société Eiffage construction Pays de la Loire argue du fait que la " lettre de clôture d'instruction intervient en plein mois d'août, à une période de fermeture annuelle habituelle dans le secteur du bâtiment, ce que la CPAM ne peut pas ignorer ", elle ne démontre pas pour autant qu'elle-même ait été fermée, et alors qu'elle a bien réceptionné le courrier d'avis de fin d'instruction, que ses locaux sont proches de ceux de la caisse, puisque situés à Beaucouzé, et qu'elle est une entreprise d'une importance certaine.
Dans ces conditions, sept jours utiles apparaissent un délai suffisant au sens de l'article
R. 441-11 précité relativement au respect du principe du contradictoire, et ce quatrième moyen ne peut donc qu'être écarté.
Sur les irrégularités de fond invoquées
La société Eiffage construction Pays de la Loire vient dire que la décision par laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) a pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels la maladie déclarée par M. X...doit lui être déclarée inopposable, au motif que la maladie déclarée ne correspond pas à celle visée au tableau no57A des maladies professionnelles.
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La Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) a pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels la maladie déclarée par M. X...aux termes d'une lettre du 29 août 2008, adressée en copie à la société Eiffage construction Pays de la Loire.
Ce courrier est rédigé ainsi qu'il suit :
" Vous avez formulé une demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie dont vous souffrez. Votre dossier a été examiné dans le cadre du 2ème alinéa de l'article L. 461. 1 du Code de la sécurité sociale.
Votre maladie, inscrite au tableau " 057- Epaule douloureuse droite " est prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels ".
Le tableau no57 des maladies professionnelles est relatif aux " Affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail ".
Le paragraphe A est relatif aux maladies de l'épaule, et il en vise deux désignées respectivement sous les vocables ci-après :
- " épaule douloureuse simple (tendinopathie de la coiffe des rotateurs) ",
- " épaule enraidie succédant à une épaule douloureuse simple rebelle ".
Il doit être constaté, au regard de cette lettre du 29 août 2008 précitée, confirmée par ses écritures selon lesquelles le délai de prise en charge par elle considéré est le délai de sept jours visé par le tableau no57A pour une épaule douloureuse simple est non celui de quatre-vingt-dix jours relatif à l'épaule enraidie succédant à une épaule douloureuse simple rebelle, que la caisse a pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels l'affection présentée par M. X...en tant qu'épaule douloureuse simple.
La déclaration de maladie professionnelle souscrite le 24 avril 2008 auprès de la caisse par M. X...mentionne, sans autres précisions, un " conflit douloureux et invalidant de l'épaule droite résistants au traitement ".
Nonobstant, il y a lieu d'avoir égard au certificat médical qui doit être établi à l'appui de la déclaration de maladie professionnelle conformément à l'article
L. 461-5 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, qui précise que " Le praticien établit en triple exemplaire et remet à la victime un certificat indiquant la nature de la maladie, notamment les manifestations mentionnées aux tableaux et constatées ainsi que les suites probables. Deux exemplaires du certificat doivent compléter la déclaration mentionnée au premier alinéa... ".
Le certificat médical initial du 24 avril 2008 dressé par le docteur Y..., médecin du travail, indique que M. X..." présente une pathologie de l'épaule droite douloureuse et enraidie qui peut relever du tableau 57A des maladies professionnelles après examen du médecin conseil.
Le point de départ se situe le 27 janvier 2008 date de la première consultation chez le médecin généraliste.
L'IRM du 15 février 2008 montre une abrasion du tendon du sus épineux sans lésion transfixiante. Une arthroscopie thérapeutique est programmée ".
L'article
L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, dispose en la première partie de son deuxième alinéa qu'" Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles ".
Dès lors que le certificat médical du 24 avril 2008 susvisé ne précise pas que M. X...présente une tendinopathie de la coiffe des rotateurs, condition expressément requise par le tableau no57A dans la désignation de la maladie professionnelle épaule douloureuse simple, la société Eiffage construction Pays de la Loire est bien fondée à opposer que la caisse ne rapporte pas la preuve que la maladie déclarée et médicalement constatée aux termes de ce certificat médical du 24 avril 2008, sur la base duquel elle a fondé sa décision de prise en charge, correspond à la maladie désignée au dit tableau no57 A comme étant une " épaule douloureuse simple (tendinopathie de la coiffe des rotateurs) ".
Dans ces conditions, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés, la décision par laquelle la caisse a pris en charge le 29 août 2008 la maladie présentée par M. X...dans le cadre du tableau " 57- Epaule douloureuse droite " des maladies professionnelles doit être déclarée inopposable à la société Eiffage construction Pays de la Loire.
Le jugement déféré est, par voie de conséquence, infirmé à cet égard.
Il n'y a pas lieu d'ordonner une mesure d'expertise médicale technique, cette procédure spécifique n'étant pas applicable à la contestation qui oppose l'employeur à la caisse sur le caractère professionnel ou non d'une affection, en dehors de la présence de l'assuré.
Tout au plus se pose la question de la possible expertise judiciaire prévue aux articles 232 et 263 et suivants du code de procédure civile. Il n'y a pas matière cependant à l'ordonner, la simple lecture du certificat médical initial du 24 avril 2008 ne posant aucune question technique de fait nécessitant l'éclairage d'un expert.
Si la décision du 29 août 2008 est inopposable à la société Eiffage construction Pays de la Loire, la cour ne peut, ainsi que l'entreprise le requiert, dire et juger que l'ensemble des conséquences financières résultant de la prise en charge de la maladie du 24 avril 2008 de M. X...ne doit pas figurer sur son compte employeur.
En effet, il appartient à la Caisse régionale d'assurance maladie des Pays de Loire (la CRAM), aujourd'hui la Caisse d'assurance retraite et de santé au travail des Pays de la Loire (la CARSAT), d'imputer les dépenses résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle au compte employeur de l'entreprise afin de déterminer le taux de ses cotisations accident du travail/ maladie professionnelle, et à l'employeur, en cas de désaccord, de saisir la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail compétente pour trancher.
Sur les frais et dépens
Chaque partie conservera la charge des frais exposés par elle sur la base de l'article
700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Il faut rappeler qu'en matière de contentieux de la sécurité sociale la procédure est gratuite et sans frais, et qu'il n'y a donc pas lieu de statuer sur les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable le recours de la société Eiffage construction Pays de la Loire contre la décision de la Commission de recours amiable,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déclare inopposable à la société Eiffage construction Pays de la Loire la décision en date du 29 août 2008 par laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, aux droits de laquelle vient la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire, a pris en charge au titre de la législation professionnelle la maladie déclarée par M. X...le 24 avril 2008,
Dit n'y avoir lieu à ordonner une mesure d'expertise,
Rejette la demande de la société Eiffage construction Pays de la Loire de voir dire et juger que l'ensemble des conséquences financières résultant de la prise en charge de la maladie du 24 avril 2008 de M. X...ne doit pas figurer sur son compte employeur,
Laisse à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles d'appel,
Rappelle que la procédure est gratuite et sans frais.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL