R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
OPP 20-4073
01/09/2021
DECISION
STATUANT SUR UNE OPPOSITION
LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE ;
Vu le
code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L 411-4, L 411-5, L 712-3 à L
712-5-1, L 712-7, L-713-2, L 713-3, R 411-17, R 712-13 à R 712-19, R 712-21, R 712-26 et R 718-2 à
R 718-5 ;
Vu l'arrêté du 24 avril 2008 modifié, relatif aux redevances de procédure perçues par l'Institut
national de la propriété industrielle ;
Vu la décision modifiée n° 2014-142 bis du Directeur Général de l'Institut National de la
Propriété Industrielle relative aux conditions de présentation et au contenu du dossier des demandes
d'enregistrement de marques ;
Vu la décision n° 2019-158 du Directeur Général de l'Institut National de la Propriété Industrielle
relative aux modalités de la procédure d'opposition à enregistrement d'une marque.
I.-
FAITS ET PROCEDURE
La société BY KILIAN (société par actions simplifiée) a déposé le 3 août 2020, la demande
d'enregistrement n°4 672 013 portant sur le signe verbal L'HEURE VERTE BY KILIAN.
Le 27 octobre 2020, la société GUERLAIN (société par actions simplifiée) a formé opposition
à l'enregistrement de cette marque sur la base de la marque verbale L'HEURE BLEUE déposée le 22
mars 1991, enregistrée sous le n°1 651 912 et dûment renouvelée, sur le fondement du risque de
confusion.
L'opposition a été notifiée au titulaire de la demande d'enregistrement. Cette notification
l'invitait à présenter des observations en réponse à l'opposition dans un délai de deux mois.
Au cours de la phase d'instruction, des observations écrites ont été échangées.
A l'issue des échanges, la phase d'instruction a pris fin, ce dont les parties ont été informées
II.-
DECISION
Siège
15 rue des Minimes - CS 50001
92677 COURBEVOIE Cedex
Téléphone : +33 (0)1 56 65 89 98
Télécopie : +33 (0)1 56 65 86 00
www.inpi.fr -
[email protected]
Établissement public national
créé par la loi n° 51-444 du 19 avril 1951
A. SUR LA RECEVABILITE DE L'OPPOSITION
L'article
R. 712-15 du Code de la propriété intellectuelle dispose qu'« Est déclarée irrecevable toute opposition (…) non conforme aux conditions prévues aux articles R. 712-13 et R. 712-14 et par la décision mentionnée à l'article R. 712-26 ».
Aux termes de l'article R. 712-13 « L'opposition à enregistrement formée dans les conditions prévues aux articles L. 712-4 et L. 712-4-1 peut être présentée par l'opposant agissant personnellement … ».
L'article R. 712-14 deuxième alinéa, 1° du code précité prévoit, à cet égard, que « L'opposition est présentée par écrit dans les conditions prévues par la décision mentionnée à l'article R. 712-26. Elle précise :
1° L'identité de l'opposant, ainsi que les indications propres à établir l'existence, la nature, l'origine et la portée de ses droits… ».
La société déposante conteste la recevabilité de l'opposition au motif que l'opposition « a été signé par Monsieur D P , dont la qualité est indiquée dans le document comme étant « Représentant légal au sein de la personne morale opposante (président, gérant...) » et « qu'à la date du dépôt de l'opposition et à ce jour, aucun document justifiant de la qualité ou du mandat spécifique de Monsieur D P pour intervenir en tant que représentant de la société opposante n'a été fourni ».
En l'espèce, le signataire de l'acte d'opposition s'est identifié comme « représentant légal au sein de la personne morale opposante (président, gérant...) », agissant de fait en tant que représentant de la société opposante.
A cet égard, dans le cadre de la procédure d'opposition, il n'appartient pas à l'Institut de vérifier l'existence ou la teneur des délégations accordées par une société à ses représentants aux fins d'engager la société à l'égard de tiers, rien dans les textes en vigueur ne l'exigeant.
Par ailleurs, le signataire de l'opposition n'ayant pas agi en qualité de mandataire mais au nom de la société opposante, il n'avait pas à fournir de pouvoir.
La société opposante a satisfait aux exigences des textes précités.
En conséquence, que l'opposition est recevable.
B. SUR LE RISQUE DE CONFUSION
Le risque de confusion s'entend du risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement ; Le risque de confusion comprend le risque d'association.
L'existence d'un risque de confusion doit être appréciée globalement en tenant compte de nombreux facteurs qui incluent la similitude des signes, la similitude des produits et services, le caractère distinctif de la marque antérieure, les éléments distinctifs et dominants des signes en litige et le public pertinent.
Sur la comparaison des produits
Pour apprécier la similitude entre les produits et services, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits et services. Les facteurs pertinents concernant la comparaison des produits ou services incluent, en particulier, leur nature, leur fonction, leur destination ainsi que leur caractère complémentaire.
L'opposition est formée contre les produits suivants : « Cosmétiques, parfums à usage personnel, préparations non médicamenteuses pour les soins de la peau ».
La marque antérieure a été enregistrée pour les produits suivants : « Produits de parfumerie, savonnerie et fards ».
La société opposante soutient que les produits de la demande d'enregistrement contestée sont identiques ou similaires aux produits de la marque antérieure invoquée.
Les produits suivants : « Cosmétiques, parfums à usage personnel, préparations non médicamenteuses pour les soins de la peau » de la demande d'enregistrement contestée apparaissent identiques ou similaires aux produits de la marque antérieure invoquée, ce qui n'est pas contesté par la société déposante.
Sur la comparaison des signes
La demande d'enregistrement porte sur le signe verbal L'HEURE VERTE BY KILIAN, ci-dessous reproduit :
La marque antérieure porte sur le signe verbal L'HEURE BLEUE.
La société opposante soutient que les signes en cause sont similaires.
L'appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants.
Il convient également de tenir compte du fait que le consommateur moyen des produits ou services en cause n'a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l'image imparfaite qu'il a gardée en mémoire.
Il résulte d'une comparaison globale et objective, que le signe contesté est composé de cinq éléments verbaux, et que la marque antérieure est constituée de trois éléments verbaux.
Visuellement et phonétiquement les deux signes ont un commun la même construction associant les éléments verbaux L'HEURE suivis d'un adjectif se rapportant à une couleur (respectivement VERTE pour le signe contesté et BLEUE pour la marque antérieure) ce qui leur confère une physionomie très proche.
Intellectuellement, si les couleurs verte et bleue peuvent susciter des évocations différentes, il demeure que les deux signes, pris dans leur ensemble, possèdent un pouvoir évocateur proche résultant de l'association peu commune des éléments verbaux L'HEURE à une couleur pour désigner un moment spécifique.
A cet égard, et contrairement à ce que soutient la société déposante, rien ne permet d'affirmer que le consommateur de référence percevra dans les séquences L'HEURE VERTE / L'HEURE BLEUE l'acception qu'il leur prête (moment où un consommateur s'arrête dans un café pour consommer de l'absinthe dont la couleur est verte pour le signe contesté / période entre le jour et la nuit où le ciel se rempli de la couleur bleue, plus foncée que le ciel du jour, avant que la nuit ne tombe pour la marque antérieure), celles-ci n'étant nullement évidentes et immédiates pour le consommateur pertinent et au regard des produits en cause, à savoir les cosmétiques ; en tout état de cause, cette circonstance ne saurait suffire à écarter les ressemblances résultant de l'association précitée et de la même évocation d'un moment spécifique.
Pris dans leur ensemble, les signes diffèrent également par la présence des éléments verbaux BY KILIAN dans le signe contesté.
Toutefois, la prise en compte des éléments distinctifs et dominants de ces signes conduit à tempérer les différences relevées ci-dessus.
Les séquences L'HEURE VERTE et L'HEURE BLEUE apparaissent distinctives au regard des produits en cause.
En revanche, et contrairement à ce qu'indique la société déposante, au sein du signe contesté, les termes BY KILIAN apparaissent secondaires en ce qu'ils seront perçus comme l'identification du créateur des produits du fait de l'utilisation courante du terme anglais BY signifiant « par » ou « de » en français ; dès lors, ces termes seront perçus comme une simple signature personnalisant la séquence L'HEURE VERTE, ainsi mise en exergue.
Ainsi, les différences de structures relevées par la société déposante dues à la présence des termes BY KILIAN dans le signe contesté ne sont pas déterminantes, dans la mesure où ils présentent un caractère secondaire.
Ainsi, il résulte des ressemblances d'ensemble précitées et de la prise en compte des éléments distinctifs et dominants, un risque de confusion dans l'esprit du public entre les signes en présence.
A cet égard, sont sans incidence sur la présente procédure, les arguments de la société déposante fondés sur des décisions statuant sur des oppositions rendues par l'Institut, dès lors que ces précédents portent sur des espèces différentes de la présente affaire.
Le signe verbal L'HEURE VERTE BY KILIAN est donc similaire à la marque verbale antérieure L'HEURE BLEUE.
Sur l'appréciation globale du risque de confusion
L'appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et notamment la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés ; Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits et services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement.
En l'espèce, en raison de l'identité et de la similarité des produits en cause et de la similarité des signes, il existe globalement un risque de confusion dans l'esprit du public sur l'origine des précités.
CONCLUSION
En conséquence, le signe verbal contesté L'HEURE VERTE BY KILIAN ne peut pas être adopté comme marque pour désigner des produits identiques et similaires, sans porter atteinte au droit antérieur de la société opposante.
PAR CES MOTIFS
DECIDE
Article 1 : L'opposition est reconnue justifiée.
Article 2 : La demande d'enregistrement est rejetée.