Cour de cassation, Chambre sociale, 9 décembre 2009, 08-41.993

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2009-12-09
Cour d'appel de Rennes
2008-03-06

Texte intégral

Donne acte à la société Adrexo du désistement de son pourvoi incident ; Attendu que Mme X... a été engagée le 16 octobre 1995 par la société SDP devenue la société Adrexo en qualité de distributeur de documents publicitaires et de journaux gratuits dans les boites aux lettres et été rattachée au dépôt de Lorient ; qu'elle a été désignée déléguée syndicale et a exercé différents mandats représentatifs ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour voir requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet et pour obtenir un rappel de salaire et de primes d'ancienneté ;

Sur les deuxième et troisième moyens

du pourvoi de Mme X... : Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen

du pourvoi de Mme X... :

Vu

l'article L. 3123-1du code du travail ;

Attendu que pour rejeter

la demande de la salariée en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein la cour d'appel retient que le contrat de travail conclu en 1995 ne prévoyait pas de durée du travail ni d'horaires et stipulait que la salariée se déclarait disponible pour effectuer des distributions les lundi et mercredi et que celles-ci étaient rémunérées au rendement ; que les tableaux produits démontrent que la salariée ne travaillait pas à temps plein ce que d'ailleurs elle admet ; qu'elle n'était nullement tenue de rester à la disposition de l'employeur en permanence puisqu'elle pouvait se présenter au dépôt pour prendre les documents selon ses disponibilités personnelles et que rien n'établit qu'elle ait été soumise à des contraintes d'horaires imposées par l'employeur ; qu'elle était parfaitement en mesure de connaître à l'avance son rythme de travail et d'exercer parallèlement une autre activité professionnelle ;

Qu'en se déterminant ainsi

, sans rechercher si l'employeur justifiait de la durée exacte du travail convenue, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein et l'a déboutée en conséquence de ses demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents, l'arrêt rendu le 6 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ; Condamne la société Adrexo aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Adrexo à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille neuf

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt. Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme X.... PREMIER MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué : D'AVOIR débouté la salariée de sa demande de requalification de son contrat de travail en contrat de travail à temps plein et de ses demandes de rappel de salaire et congés payés afférentes ; AUX MOTIFS QUE « Mademoiselle X... demande la requalification de son contrat de travail en un contrat à temps complet au motif que pendant plusieurs mois elle a été rémunérée sur la base d'un temps plein, que le Tribunal d'instance d'Aix en Provence a consacré le principe d'un temps plein et que ni les horaires de travail, ni la réparation de ceux-ci sur la semaine où le mois n'étaient fixés dans le contrat de travail ; en premier lieu qu'il est constant que Mademoiselle X... était rémunérée au rendement en fonction du nombre de documents distribués et que le salaire dépendait donc de ce nombre de documents, selon un tarif variable, sans pouvoir être inférieur au montant du SMIC horaire rapporté à la durée automatiquement sur la fiche de paye ; qu'autrement dit pour établir les bulletins de salaire la société ADREXO prenait en compte le nombre de documents distribués, appliquait le tarif prévu et divisait cette somme par le montant horaire du SMIC pour obtenir la durée du travail, que ces bulletins de salaire reconstitués fictivement que les distributeurs n'ont eu de cesse de dénoncer ne peuvent valablement être retenus comme fondement de la demande de Mademoiselle X... ; en second lieu que le jugement du Tribunal d'instance d'Aix en Provence n'a aucune autorité de la chose jugée à l'égard de Mademoiselle X... ; en troisième lieu que le contrat de travail conclu en 1995 ne prévoyait pas de durée du travail ni d'horaires et stipulait que la salariée se déclarait disponible pour effectuer des distributions les lundis et mercredi et que les distributions étaient rémunérées au rendement en fonction du nombre de documents distribués dans les boites aux lettres qui lui ont été confiées ou qu'elle accepterait de servir dans le cadre de ses disponibilités, qu'il résulte des éléments fournis que lorsque Mademoiselle X... se présentait au dépôt il lui était remis un certain nombre de documents à distribuer, accompagnés d'une feuille de route et rapport journalier de distribution indiquant le nombre de documents à distribuer, le secteur et éventuellement certaines consignes, que la feuille de route mentionnait le jour et la période de prise en charge, mais ne faisait mention des jours de distribution ou d'un délai maximum de distribution ; qu'au retour ces feuilles étaient consignées par le distributeur et le chef du dépôt puis adressées au service du personnel pour le traitement de la paye, le seul contrôle opéré par l'employeur consistant à vérifier le nombre de documents distribués ; que force est de constater que les tableaux produits démontrent que Mademoiselle X... ne travaillait pas à temps plein ce que d'ailleurs admet l'intéressée ; que la salariée n'était nullement tenue de rester à la disposition de l'employeur en permanence puisqu'elle pouvait se présenter au dépôt pour prendre les documents selon ses disponibilités personnelles et que rien ne permet d'établir qu'elle ait été soumise à des contraintes d'horaires imposées par ADREXO ; qu'il est d'ailleurs symptomatique à cet égard que le contrat mentionne qu'elle se déclarait disponible les lundi et mercredi et que certaines semaines, elle n'a pas travaillé ces jours là et n'a reçu aucune observation ; que dans la mesure où à l'exception des lundi et mercredi, rien ne l'obligeait à procéder à la distribution des documents les autres jours de la semaine elle était parfaitement en mesure de connaître à l'avance son rythme de travail (puisque s'était elle qui prenait la décision), et d'exercer parallèlement une autre activité professionnelle ; qu'il n'y a pas lieu dès lors à requalifier le contrat et que les demandes de rappel de salaire et de participation ne peuvent être accueillies ». ALORS QU'aux termes de l'ancien article L. 212-4-3 du Code du travail, devenu l'article L. 3123-1 du Code du travail, le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine et entre les semaines du mois ; que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; que la Cour d'appel a relevé que le contrat de travail de la salariée ne prévoyait pas de durée de travail, ni d'horaires, que les feuilles de route remises à la salariée lorsqu'elle se présentait au dépôt ne faisaient pas mention des jours de distribution, et que si le contrat de travail mentionnait que la salariée se devait d'être disponible les lundi et mercredi, elle n'avait pas travaillé ces jours là certaines semaines ; que la Cour d'appel aurait du déduire de ses propres énonciations, que depuis le début de la relation de travail, les horaires de travail de la salariée variaient en dehors des prévisions de son contrat de travail, de sorte que l'intéressée, qui avait été mis dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler, se trouvait dans l'obligation de se tenir en permanence à la disposition de l'employeur ; que la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3123-1 du Code du travail (ancien article L. 212-4-3 du Code du travail). DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué : D'AVOIR débouté la salariée de sa demande de rappel de salaire sur la base du SMIC ; AUX MOTIFS QU'« il est constant que Mademoiselle X... était rémunérée au rendement en fonction du nombre de documents distribués et que le salaire dépendait donc de ce nombre de documents, selon un tarif variable, sans pouvoir être inférieur au montant du SMIC horaire rapporté à la durée automatiquement sur la fiche de paye ; qu'autrement dit pour établir les bulletins de salaire la société ADREXO prenait en compte le nombre de documents distribués, appliquait le tarif prévu et divisait cette somme par le montant horaire du SMIC pour obtenir la durée du travail ; que ces bulletins de salaire reconstitués fictivement que les distributeurs n'ont eu de cesse de dénoncer ne peuvent valablement être retenus comme fondement de la demande de Mademoiselle X... ; que les demandes de rappel de salaire et de participation ne peuvent être accueillies ». ALORS QUE sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, et quelque soit le mode rémunération pratiqué, un salarié a droit à une rémunération au moins égale au salaire minimum de croissance pour le nombre d'heures qu'il a effectué ; qu'il appartient aux juges du fond de vérifier que l'employeur a respecté son obligation contractuelle de rémunérer les heures réellement effectuées par le salarié à un niveau au moins égal au SMIC ; que le salaire à prendre en considération est celui qui correspond à une heure de travail effectif ; que pour débouter la salariée de sa demande de rappel de salaire sur la base du SMIC, la Cour d'appel a affirmé qu'il est constant que la salariée était rémunérée au rendement en fonction du nombre de documents distribués et que le salaire dépendait donc de ce nombre de documents, selon un tarif variable, sans pouvoir être inférieur, au montant du SMIC horaire rapporté à la durée du travail figurant automatiquement sur les fiches de paie ; qu'en se bornant à reprendre les stipulations du contrat de travail, sans vérifier si l'employeur avait respecté son obligation contractuelle de rémunérer les heures réellement effectuées par le salarié à un niveau au moins égal au SMIC, lors même qu'elle constatait que les bulletins de salaire avaient été fictivement reconstitués par l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L 3231-1 et suivants (anciens articles L. 141-1 et suivants du Code du travail). TROISIEME MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué : D'AVOIR débouté la salariée de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé ; AUX MOTIFS QU' « il constant que Mademoiselle X... était rémunérée au rendement en fonction du nombre de documents distribués et que le salaire dépendait donc de ce nombre de documents, selon un tarif variable, sans pouvoir être inférieur au montant du SMIC horaire rapporté à la durée de travail figurant automatiquement sur la fiche de paye ; qu'autrement dit pour établir les bulletins de salaire la société ADREXO prenait en compte le nombre de documents distribués, appliquait le tarif prévu et divisait cette somme par le montant horaire du SMIC pour obtenir la durée du travail ; que ces bulletins de salaire reconstitués fictivement que les distributeurs n'ont eu de cesse de dénoncer ne peuvent valablement être retenus ; que la preuve d'une quelconque volonté de dissimuler certaines heures travaillées n'étant pas rapportée, Mademoiselle X... ne peut prétendre à aucune indemnité à ce titre » ; ALORS QUE la dissimulation d'emploi est caractérisée s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la Cour d'appel, qui a relevé que les bulletins de salaire, qui mentionnaient la durée de travail effectuée par la salariée, avaient été fictivement reconstitués par l'employeur, aurait du en déduire que la salariée était fondée à obtenir l'indemnité pour travail dissimulé réclamée ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L. 8221-5 du Code du travail (ancien article L. 324-10 du Code du travail).