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CEDH, Commission, TRIPODI ; FICARA contre l'ITALIE, 8 juillet 1991, 15486/89

Synthèse

  • Juridiction : CEDH
  • Numéro de pourvoi :
    15486/89
  • Dispositif : Recevable
  • Date d'introduction : 13 juin 1989
  • Importance : Faible
  • État défendeur : Italie
  • Nature : Décision
  • Identifiant européen :
    ECLI:CE:ECHR:1991:0708DEC001548689
  • Lien HUDOC :https://hudoc.echr.coe.int/fre?i=001-24641
  • Avocat(s) : MICCOLI, M., avocat, Reggio Calabria
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Texte intégral

SUR LA RECEVABILITE de la requête No 15486/89 présentée par Palma TRIPODI et Francesca FICARA contre l'Italie __________ La Commission européenne des Droits de l'Homme (Première Chambre), siégeant en chambre du conseil le 8 juillet 1991 en présence de MM. J.A. FROWEIN, Président de la Première Chambre F. ERMACORA G. SPERDUTI E. BUSUTTIL A.S. GÖZÜBÜYÜK J.C. SOYER H. DANELIUS Sir Basil HALL MM. C.L. ROZAKIS L. LOUCAIDES B. MARXER M. M. de SALVIA, Secrétaire de la Première Chambre. Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 13 juin 1989 par Palma TRIPODI et Francesca FICARA contre l'Italie et enregistrée le 13 septembre 1989 sous le No de dossier 15486/89 ; Vu les observations présentées par le Gouvernement défendeur le 22 mai 1990 et les observations en réponse présentées par les requérantes le 15 octobre 1990 ; Vu la décision de la Commission du 8 décembre 1990 de renvoyer la requête à la Première Chambre ; Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la Commission. Après avoir délibéré, Rend la décision suivante : EN FAIT Les faits, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit. La première requérante, Palma TRIPODI, est une ressortissante italienne, née en 1909. La seconde requérante, Francesca FICARA, est également une ressortissante italienne, née en 1933. Elle est la fille de la première requérante. Devant la Commission, elles sont représentées par Maître Michele MICCOLI, avocat à Reggio Calabria. Par acte de citation du 17 août 1972, notifié le 1er septembre 1972, déposé auprès du tribunal civil de Reggio Calabria, M. M. revendiqua la propriété d'une parcelle de terrain occupée par la première requérante, requit la démolition du bâtiment édifié sur ladite parcelle et l'affirmation de l'absence totale d'une quelconque servitude en faveur de la première requérante. La première audience eut lieu le 24 octobre 1972. Puis, les audiences prévues pour les 13 février 1973, 17 avril 1973, 22 mai 1973 et 22 octobre 1973 furent reportées à la demande conjointe des parties, sans aucune justification et l'audience du 27 novembre 1973 fut ajournée au 22 janvier 1974 à la demande de la requérante pour lui permettre de conclure. Le 22 janvier 1974, M. M., ayant agi séparément contre la deuxième requérante pour les mêmes faits, demanda à ce que les deux affaires soient réunies. Le 31 janvier 1974, le dossier fut remis au président du tribunal civil de Reggio Calabria qui, le 18 mars 1974, ordonna la comparution immédiate des parties et renvoya les deux affaires devant le juge rapporteur désigné pour l'audience du 23 avril 1974. Le 28 mai 1974, le juge rapporteur réunit les deux affaires et fixa une audience au 25 juin 1974. A cette date, M. M. requit une expertise et l'affaire fut reportée au 9 juillet 1974, date à laquelle le juge rapporteur réserva sa décision. Le 13 juillet 1974, le juge rapporteur rejeta la demande d'ajournement formulée par les requérantes et nomma un expert qui prêta serment le 8 octobre 1974. Le 28 janvier 1975, le rapport d'expertise ayant été déposé, les parties demandèrent conjointement l'octroi d'un délai pour examiner ledit rapport. Le 22 avril 1975, l'avocat des requérantes sollicita le report de l'examen de l'affaire dans l'attente du rapport de leur propre expert. Le juge rapporteur fixa l'audience suivante au 14 octobre 1975. A cette date, les requérantes demandèrent à ce que des témoins soient entendus sur certains points précis concernant la propriété de la parcelle litigieuse. Le 9 décembre 1975, l'affaire fut reportée au 27 février 1976 sur demande de M. M. afin de conclure sur les auditions réclamées. L'audience eut lieu en fait le 9 mars 1976 et fut reportée au 23 mars 1976 dans l'attente des conclusions de M. M. Le 23 mars 1976, les requérantes insistèrent sur la nécessité de procéder aux auditions demandées auxquelles s'opposa fermement M. M. Par ordonnance du 2 avril 1976, le juge rapporteur admit les auditions proposées par les requérantes qui furent prévues pour le 5 octobre 1976. Le 12 octobre 1976, M. M. requit du juge rapporteur le report de l'examen de l'affaire pour présenter sa liste de témoins. L'affaire fut renvoyée au 25 janvier 1977 pour entendre les témoins indiqués par les requérantes. Suite à la mutation du juge rapporteur, les parties furent invitées à comparaître devant le nouveau juge le 9 juin 1977, puis le 23 juin 1977. A compter de cette date et sur demande conjointe des parties, l'affaire connut une série de renvois (les 17 novembre 1977, 9 février 1978, 4 juillet 1978, 12 octobre 1978, 1er février 1979, 19 avril 1979, 4 octobre 1979, 10 janvier 1980, 13 mars 1980, 5 juin 1980, 30 octobre 1980 et le 5 février 1981). Le 28 mai 1981, le premier témoin fut entendu et les parties demandèrent un nouveau report pour poursuivre les auditions. L'audience suivante, fixée au 5 novembre 1981, fut reportée successivement aux 26 novembre 1981, 4 mars 1982, 6 mai 1982, 14 octobre 1982, 10 février 1983, 9 juin 1983, les témoins ne pouvant pas comparaître pour diverses raisons (décès, empêchement, maladie grave). De même, le 9 juin 1983, les requérantes sollicitèrent du juge rapporteur le report des auditions au motif que les témoins n'avaient pu être joints à leurs domiciles. Finalement le 15 décembre 1983, deux témoins furent entendus et le juge d'instruction autorisa à la demande de chacune des parties le remplacement des témoins ne pouvant déposer. A partir du 22 mars 1984, l'affaire fut reportée à trois reprises (les 11 octobre 1984, 22 novembre 1984 et 7 février 1985) toujours en vue de poursuivre les auditions de témoins. Le 7 février 1985, lesdites auditions furent terminées et le juge rapporteur fixa l'audience suivante au 2 mai 1985 en vue de permettre aux parties de préciser leurs conclusions. Le 2 mai 1985, le juge renvoya l'examen de l'affaire au 9 janvier 1986 sur demande des requérantes pour cause d'empêchement de leur représentant légal, puis au 6 février 1986 , toujours pour permettre aux parties de conclure. A cette date, M. M. produisit le rapport d'expertise rédigé par l'expert qu'il avait lui-même désigné et le juge rapporteur renvoya l'affaire en jugement devant la formation collégiale du tribunal de Reggio Calabria. Le 27 novembre 1987, ledit tribunal renvoya d'office l'examen de l'affaire au 9 décembre 1988, puis au 24 novembre 1989, 26 octobre 1990 et 11 octobre 1991. GRIEFS Les requérantes se plaignent de la durée de la procédure et allèguent la violation de l'article 6 par. 1 de la Convention.

PROCEDURE

DEVANT LA COMMISSION La présente requête a été introduite le 13 juin 1989 et enregistrée le 13 septembre 1989. Le 13 février 1990, la Commission a décidé de porter cette requête à la connaissance du Gouvernement défendeur et de l'inviter à lui présenter par écrit ses observations sur la recevabilité et le bien-fondé de la requête. Le Gouvernement a présenté ses observations le 22 mai 1990 et les requérantes y ont répondu le 15 octobre 1990. Après consultation des parties, par décision du 8 décembre 1990, la Commission a renvoyé la requête à la Première Chambre.

EN DROIT

Les requérantes se plaignent de la durée de la procédure et invoquent les dispositions de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention qui garantit à toute personne le droit "à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable". La Commission constate que la procédure a pour objet la revendication par M. M. de la propriété d'une parcelle de terrain occupée par les requérantes, la démolition du bâtiment sis sur ladite parcelle et l'affirmation de l'absence d'une quelconque servitude en faveur des requérantes. En ce qui concerne la période à examiner, la Commission relève que l'acte de citation devant le tribunal de Reggio Calabria du 17 août 1972 a été notifié le 1er septembre 1972. L'affaire a été inscrite au rôle peu après, à une date qui n'a pas été précisée. L'instruction a été clôturée le 6 février 1986 et l'affaire renvoyée en jugement au 27 novembre 1987. Le tribunal de Reggio Calabria a alors reporté d'office l'audience de jugement successivement aux 9 décembre 1988, 24 novembre 1989, 26 octobre 1990 et 11 octobre 1991. A cette dernière date, la procédure litigieuse, qui à ce jour est pendante depuis presque dix-neuf ans, aura donc duré plus de dix-neuf ans. Toutefois, la période à considérer par la Commission ne commence qu'avec la prise d'effet, le 1er août 1973, de la reconnaissance du droit de recours individuel de l'Italie (cf. Cour Eur. D.H., arrêt Foti et autres du 10 décembre 1982, série A n° 56, p. 18, par. 53). Selon les requérantes, la durée de la procédure ne saurait passer pour "raisonnable" au sens de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention. Le Gouvernement combat cette thèse. Selon la jurisprudence constante de la Cour et de la Commission, le caractère raisonnable de la durée d'une procédure relevant de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention s'apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard en particulier aux critères suivants : la complexité de l'affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes (voir par exemple Cour Eur. D.H., arrêt Unión Alimentaria Sanders S.A. du 7 juillet 1989, série A n° 157, p. 13, par. 31). Faisant application de ces critères et tenant compte des circonstances propres à la présente affaire, la Commission estime que la durée de la procédure litigieuse soulève des problèmes complexes de droit et de fait sous l'angle de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention. En conséquence, elle ne saurait déclarer la requête manifestement mal fondée et estime que celle-ci nécessite un examen qui relève du fond de l'affaire. Elle constate d'autre part que la requête ne se heurte à aucun autre motif d'irrecevabilité.

Par ces motifs

, la Commission, à l'unanimité, DECLARE LA REQUETE RECEVABLE, tous moyens de fond réservés. Le Secrétaire de la Le Président de la Première Chambre Première Chambre (M. de SALVIA) (J.A. FROWEIN)