Cour d'appel de Rennes, 22 février 2022, 2019/07262

Mots clés
société • forclusion • qualités • redressement • contrefaçon • publication • statuer • siège • contrat • propriété • relever • subsidiaire • immeuble • principal • recours

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Rennes
22 février 2022
Tribunal de commerce de Rennes
17 septembre 2019

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Rennes
  • Numéro de pourvoi :
    2019/07262
  • Domaine de propriété intellectuelle : BREVET
  • Parties : CM CRÉATION SAS ; SELARL AJIRE (Me M, en qualité d'administrateur de la SAS CM CRÉATION) ; SELARL ATHENA (Me T, en qualité de mandataire judiciaire de la SAS CM CRÉATION) / R
  • Décision précédente :Tribunal de commerce de Rennes, 17 septembre 2019
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Résumé

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Texte intégral

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 22 FEVRIER 2022 3ème Chambre CommercialeARRÊT N°113 N° RG 19/07262 - N° Portalis DBVL-V-B7D-QHEO COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère, Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller, GREFFIER : Mme J R, lors des débats et lors du prononcé DÉBATS : A l'audience publique du 10 janvier 2022 devant Monsieur Alexis CONTAMINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT

: Contradictoire, prononcé publiquement le 22 février 2022 par mise à disposition au greffe **** APPELANTES : SAS CM CREATION, enregistrée au RCS de Rennes sous le numéro 379 485 675, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège, Les Grandes Landes 35580 GUICHEN SELARL AJIRE, prise en la personne de Me E M ès qualités d'administrateur de la Société CM CREATION SAS en redressement judiciaire 6, cours Raphaël Binet 35000 RENNES SELARL ATHENA, prise en la personne de Me C T ès qualités de Mandataire judiciaire de la Société CM CREATION SAS en redressement judiciaire 20 rue d'Isly et 3 place du Gal Giraud Immeuble les 3 soleils $235000 RENNES Représentées par Me Matthieu MERCIER de la SELARL CARCREFF CONTENTIEUX D'AFFAIRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES INTIMÉ : Monsieur P R […] Représenté par Me Gautier KAUFMAN de l'ASSOCIATION HOLLIER- LAROUSSE & Associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS Représenté par Me Arnaud FOUQUAUT, Postulant, avocat au barreau de RENNES FAITS ET PROCÉDURE : Le 6 juin 2018, la société CM Création a été placée en redressement judiciaire, la société AJIRE étant désignée administratrice, et la société Athena mandataire judiciaire. Le jugement d'ouverture a été publié au BODACC le 15 juin 2018. Le 23 juillet 2018, M. R a fait procéder à une saisie-contrefaçon entre les mains de la société CM Création. Le 23 août 2018, il a assigné la société CM Création en contrefaçon de brevet. Le 20 septembre 2018, M. R a déclaré sa créance, pour montant de 697.000 euros. Par ordonnance du 12 mars 2019, le juge commissaire du tribunal de commerce de Rennes a relevé M. R de sa forclusion et l'a invité à déclarer sa créance entre les mains du mandataire judiciaire. La société CM Création a formé opposition le 18 mars 2019. Le 10 avril 2019, M. R a procédé à une nouvelle déclaration de sa créance, pour le même montant (697.000 euros). Par jugement du 17 septembre 2019, le tribunal de commerce de Rennes a : - Confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance, - Débouté la société CM Création de son opposition, - Débouté M. R de sa demande d'admission de créance au passif de la société CM Création en redressement judiciaire, $2- Débouté M. R de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, - Condamné la société CM Création aux dépens. Les sociétés CM Création, AJIRE, ès qualités, et Athena, ès qualités, ont interjeté appel le 31 octobre 2019. Par ailleurs, la société CM Création a contesté la créance déclarée le 10 avril 2019. Par ordonnance du 25 novembre 2020, statuant sur cette contestation, le juge commissaire a notamment sursis à statuer sur l'admission de la créance déclarée par M. R dans l'attente, d'une part, du jugement du tribunal judiciaire de Paris concernant la contrefaçon alléguée et, d'autre part, de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes concernant le relevé de forclusion. Les dernières conclusions des sociétés CM Création, AJIRE, ès qualités, et Athena, ès qualités, sont en date du 30 janvier 2020. Les dernières conclusions de M. R sont en date du 30 mars 2021. L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 décembre 2021.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

: Les sociétés CM Création, AJIRE, ès qualités, et Athena, ès qualités, demandent à la cour de : - Infirmer le jugement en ce qu'il a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance, - Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société CM Création de son opposition, - Débouter M. R de sa demande en relevé de forclusion, - Rejeter la créance de M. R du passif de la société CM Création, À titre subsidiaire : - Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. R de sa demande d'admission de créance au passif de la société CM Création en redressement judiciaire dans l'attente du jugement à intervenir devant le tribunal de grande instance, En tout état de cause : - Condamner M. R à payer à la société CM Création la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, $2- Condamner M. R aux dépens. M. R demande à la cour de : À titre principal : - Confirmer le jugement en ce qu'il a relevé M. R la forclusion encourue de sa déclaration de créance tardive du 28 septembre 2018, - Confirmer en tant que de besoin l'ordonnance en toutes ses dispositions, - Déclarer l'opposition des sociétés CM Création, AJIRE, ès qualités, et Athena, ès qualités, mal fondée, les en débouter intégralement, - Relever de forclusion M. R en sa déclaration de créance de 19 septembre 2018, - Se déclarer incompétent pour statuer sur l'admission au passif de la créance de M. R , - Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. R de sa demande d'admission de sa créance au passif de la société CM Création, - Donner acte de l'admission au passif par le juge commissaire de la créance de M. R pour la somme de 697.000 euros, À titre subsidiaire : - Constater l'existence d'une procédure en cours, et plus subsidiairement ordonner le sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive à intervenir sur la contrefaçon, En tout état de cause : - Condamner in solidum les sociétés AJIRE et Athena, ès qualités, à payer à M. R la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - Condamner in solidum les sociétés AJIRE et Athena, ès qualités, aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra. DISCUSSION :

Sur le

relevé de forclusion : $2Le créancier doit déclarer sa créance dans les deux mois qui suivent la publication du jugement d'ouverture au BODACC : Article R622-24 du code de commerce : Le délai de déclaration fixé en application de l'article L. 622-26 est de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. Le même délai est applicable à l'information prévue par le troisième alinéa de l'article L. 622-24. Lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège sur le territoire de la France métropolitaine, le délai de déclaration est augmenté de deux mois pour les créanciers qui ne demeurent pas sur ce territoire. Lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège dans un département ou une collectivité d'outre-mer, le délai de déclaration est augmenté de deux mois pour les créanciers qui ne demeurent pas dans ce département ou cette collectivité. Lorsque ce délai de forclusion de deux mois est expiré, le créancier peut encore engager une action en relevé de forclusion, dans les six mois de la publication du jugement d'ouverture au BODACC ou, lorsque le créancier a été placé dans l'impossibilité de connaître l'obligation du débiteur, dans les six mois de la date à laquelle il est établi qu'il ne pouvait ignorer l'existence de sa créance : Article L622-26 du code de commerce : A défaut de déclaration dans les délais prévus à l'article L. 622-24, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6. Ils ne peuvent alors concourir que pour les distributions postérieures à leur demande. Les créances non déclarées régulièrement dans ces délais sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus. Pendant l'exécution du plan, elles sont également inopposables aux personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie. L'action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de six mois. Ce délai court à compter de la publication du jugement d'ouverture ou, pour les institutions mentionnées à l'article L. $23253-14 du code du travail, de l'expiration du délai pendant lequel les créances résultant du contrat de travail sont garanties par ces institutions. Pour les créanciers titulaires d'une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié, il court à compter de la réception de l'avis qui leur est donné. Par exception, si le créancier justifie avoir été placé dans l'impossibilité de connaître l'obligation du débiteur avant l'expiration du délai de six mois, le délai court à compter de la date à laquelle il est établi qu'il ne pouvait ignorer l'existence de sa créance. Dès l'ouverture de la procédure, le débiteur est tenu de communiquer au mandataire judiciaire la liste de ses créanciers, du montant de ses dettes et de ses principaux contrats en cours : Article L622-6 al. 1 et 2 du code de commerce : Dès l'ouverture de la procédure, il est dressé un inventaire du patrimoine du débiteur ainsi que des garanties qui le grèvent. Cet inventaire, remis à l'administrateur et au mandataire judiciaire, est complété par le débiteur par la mention des biens qu'il détient susceptibles d'être revendiqués par un tiers. Le débiteur entrepreneur individuel à responsabilité limitée y fait en outre figurer les biens détenus dans le cadre de l'activité à raison de laquelle la procédure a été ouverte qui sont compris dans un autre de ses patrimoines et dont il est susceptible de demander la reprise dans les conditions prévues par l'article L. 624-19. Le débiteur remet à l'administrateur et au mandataire judiciaire la liste de ses créanciers, du montant de ses dettes et des principaux contrats en cours. Il les informe des instances en cours auxquelles il est partie. Il n'appartient pas au juge chargé d'examiner le bien-fondé d'une demande de relevé de forclusion d'apprécier l'existence de la créance alléguée. Lorsque le débiteur a établi la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L622-6 du code de commerce et a omis d'y mentionner un créancier, le créancier omis, qui sollicite un relevé de forclusion, n'est pas tenu d'établir l'existence d'un lien de causalité entre cette omission et la tardiveté de sa déclaration de créance. En l'espèce, la société CM Création a été placée en redressement judiciaire le 6 juin 2018. Le jugement a été publié au BODACC le 15 juin 2018. Il est établi qu'au jour de l'ouverture du redressement judiciaire de la société CM Création, les parties discutaient déjà de l'existence d'une contrefaçon de brevet. Ainsi, M. R démontre que, dès le 26 mars 2018, il avait, par le truchement de la société Cabinet Flechner (le Cabinet $2Flechner), son conseil en propriété industrielle, alerté la société CM Création sur la contrefaçon dont il estimait être victime. Dans une lettre du 5 avril 2018, la société CM Création lui avait indiqué qu'elle souhaitait régler le litige à l'amiable. Par lettre du 29 mai 2018, le conseil de M. R a adressé à la société CM Création une offre d'accord amiable sur la base d'un dédommagement calculé sur un nombre d'affiches triples vendues depuis le 6 avril 2017 x 5.000 euros HT, une libération du stock sur la même base, à savoir 5.000 euros par pièce vendue du stock dans un délai maximum de trois mois, et le paiement de la somme de 4.000 euros HT pour les honoraires du conseil. Il apparaît ainsi qu'avant l'ouverture de la procédure, M. R s'était prévalu d'une créance d'un montant chiffré, dont la somme totale était déterminable par la société CM Création qui détenait les éléments du calcul revendiqué par M. R. Il s'agissait d'une créance au sens des dispositions de l'article L.622-6 du code de commerce et la société CM Création aurait dû la mentionner lors de l'établissement de la liste prévue à cet article. Il est donc faux de dire que la société CM Création n'a eu connaissance de la créance revendiquée par M. R qu'au jour où elle a été assignée en contrefaçon, le 23 août 2018. La discussion entre les parties a d'ailleurs continué postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire. M. R produit en effet une lettre de la société CM Création, datée du 12 juin 2018, aux termes de laquelle la société, sans l'avertir de son placement en redressement judiciaire, conteste certains aspects de la contrefaçon qui lui est reprochée. Ainsi, même à défaut d'accord entre les parties sur le principe ou le montant précis de la créance, il revenait à la société CM Création de faire figurer M. R dans la liste des créanciers remise au mandataire conformément à l'article L622-6 du code de commerce. À ce titre, il importe peu que M. R ait été assisté par un conseil en propriété industrielle durant les discussions avec la société CM Création ou qu'il ait eut recours à un avocat pour la rédaction de sa requête aux fins de saisie-contrefaçon du 5 juillet 2018. Il est constant que M. R ne figurait pas sur la liste des créanciers établie par la société CM Création alors qu'il aurait dû y être mentionné. Il y a donc lieu de relever M. R de sa forclusion. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'opposition de la société CM Création. Sur l'admission de la créance : $2La présente instance a trait au relevé de forclusion de M. R , non à l'admission de sa créance. Cette dernière fait l'objet d'une seconde instance, pendante devant le juge commissaire du tribunal de commerce de Rennes. Ce dernier, constatant son incompétence en matière de brevets d'invention et l'existence d'une instance en relevé de forclusion en cours, a d'ailleurs sursis à statuer dans l'attente du jugement du tribunal judiciaire de Paris et de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes. La demande de fixation de la créance était donc irrecevable dans la présente procédure. Il y aura donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'admission formée par M. R C demande sera déclarée irrecevable. Sur les frais et dépens : Il y a lieu de rejeter les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de dire que les dépens d'appel seront pris en frais privilégiés de procédure.

PAR CES MOTIFS

, La cour : - Infirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de fixation de la créance, - Confirme le jugement pour le surplus, Statuant à nouveau et ajoutant : - Déclare irrecevable la demande de fixation de la créance dont se prévaut M. R , - Rejette les autres demandes des parties, - Dit que les dépens d'appel seront pris en frais privilégiés de la procédure collective. LE GREFFIER LE PRESIDENT $2
Note...

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