TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARISJUGEMENT rendu le 18 Juin 2010
3ème chambre 3ème sectionN°RG: 08/10908
DEMANDERESSESMademoiselle Gabriella C
S.A.S ANTIK BATIK [...]75003 PARISreprésentée par Me Jean-Philippe HUGOT, avocat au barreau de PARIS,vestiaire #C2501
DEFENDERESSES.A.R.L. ATOLL[...]75003 PARISreprésentée par Me Marc BENSIMHON, de la SCP BENSIMHON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire P0410
COMPOSITION DU TRIBUNALAgnès T, Vice-Président, signataire de la décisionAnne CHAPLY, JugeMélanie BESSAUD, Jugeassistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision
DEBATSA l'audience du 04 Mai 2010tenue en audience publique
JUGEMENTPrononcé par remise de la décision au greffeContradictoirementen premier ressortFaits et prétentions des parties:
La société ANTIK BATIK a pour activité la création et la commercialisation de collections de prêt-à-porter et d'accessoires de mode pour femmes, hommes et enfants, distribués sous la dénomination et la marque "ANTIK BATIK".
Mme Gabriella C, qui indique qu'elle est associée et gérante de la société ANTIK BATIK, se présente comme la créatrice des collections commercialisées par la société ANTIK BATIK.
Pour la collection Eté 2007, elle dit avoir crée la série "BEA" composée de kaftans, robes, jupes et hauts tous confectionnés dans le même tissu imprimé, en soie de chiffon 100% et ceinturés à la taille pour les modèles de robe, jupe et tuniques.
Les modèles de la série "BEA" ont fait l'objet d'un dépôt à titre de dessin et modèle à l'INPI en octobre 2006.
Dans la série "BEA" Mme Gabrielle C dit notamment avoir créé les modèles "BEA MINI KAFTAN" et "BEA CROSS DRESS". Le premier modèle est décrit comme "un vêtement de femme de type haut à encolure décorée de boules, à manches courtes, ceinturé à la taille et réalisé en soie de chiffon 100% dans un tissu imprimé se déclinant en trois couleurs : bleu pâle "AQUA", rouge "BERRY" et rosé "PINK". Le second modèle est une robe cache-coeur reprenant les caractéristiques communes aux modèles de la série BEA: la robe cache-coeur est ceinturée à la taille, réalisée en soie de chiffon 100% et dans un tissu imprimé de couleur.
La société ATOLL a pour activité l'achat et la vente en gros ou en détail d'articles de prêt-à-porter qu'elle commercialise sous sa marque PALME. Ont ainsi été commercialisés sous cette marque de nombreux modèles de tuniques vaporeuses ornementées de perles et de broderies.
Or il est venu à la connaissance de Mme Gabriella C et la société ANTIK BATIK que la société ATOLL commercialiserait un modèle de tunique et de djellaba qui reprendraient les caractéristiques essentielles des modèles de la série "BEA" et particulièrement celles du modèle "BEA MINI KAFTAN".
Par ordonnance en date du 24 juin 2008 Mme le vice-président au tribunal de grande instance de Paris a autorisé les demanderesses à faire pratiquer des opérations de saisie-contrefaçon au sein de la boutique de la défenderesse au [...] (75003) et au siège social de la société ATOLL au [...] (75003).
Par acte d'huissier en date du 22 juillet 2008, Mme Gabriella C et la société ANTIK BATIK ont assigné la société ATOLL en contrefaçon et concurrence déloyale devant le tribunal de grande instance de Paris.
Par dernières conclusions signifiées le 16 juin 2009, Mme Gabriella C et la société ANTIK BATIK ont principalement demandé au tribunal, au visa des articles
L. 111-1 et suivants, L. 121-1 et suivants,
L. 335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle et de l'article
1382 du code civil, de:
Dire et juger l'irrecevabilité soulevée par la société ATOLL infondée en droit et en fait et constater la parfaite recevabilité de la société ANTIK BATIK et de Madame Gabriella C;
Dire et juger la société ANTIK BATIK et Madame Gabriella C recevables et bien fondées en leurs demandes, fins et prétentions à l'encontre de la société ATOLL ;
dire et juger que les modèles ANTIK BATIK de la série « BEA » sont originaux au sens du droit d'auteur ;
dire et juger qu'en fabriquant et en commercialisant des modèles de tuniques reproduisant servilement la combinaison originale caractéristique des modèles de la série « BEA » dont notamment le modèle « BEA MINI KAFTAN », la société ATOLL a porté atteinte aux droits patrimoniaux dont la société ANTIK BATIK est titulaire sur ces créations et s'est alors rendue coupable de contrefaçon ;
dire et juger qu'en fabriquant et en commercialisant des modèles de tuniques reproduisant servilement la combinaison originale caractéristique des modèles de la
série «BEA » dont notamment le modèle « BEA MINI KAFTAN », créé par Madame Gabriella C, la société ATOLL a porté atteinte au droit moral, notamment à l'intégrité et à la paternité, dont Madame Gabriella C est titulaire sur ces créations, et s'est alors rendue coupable de contrefaçon ;
débouter la société ATOLL de ses demandes de dommages et intérêts ;
débouter la société ATOLL de l'ensemble de ses demandes ;
En conséquence,
valider les saisies contrefaçon effectuées par Maître P, Huissier de Justice à Paris, le 17 juillet 2008 ;
condamner la société ATOLL à payer la somme de 300.000 € à la société ANTIK BATIK en réparation de son préjudice subi du fait des agissements contrefaisants ;
condamner la société ATOLL à payer la somme de 50.000 € à Madame Gabriella C en réparation de l'atteinte portée à son droit moral du fait des agissements contrefaisants ;
condamner la société ATOLL à payer la somme de 200.000 € à la société ANTIK BATIK en réparation de son préjudice subi du fait des agissements déloyaux ;
faire injonction à la société ATOLL de cesser immédiatement de fabriquer, faire fabriquer et/ou commercialiser quelque reproduction ou imitation que ce soit des créations de Madame Gabriella C commercialisée par la société ANTIK BATIK, et ce sous astreinte de 500 € par infraction constatée à compter du prononcé du jugement à intervenir, le Tribunal restant saisi pour statuer sur l'astreinte définitive ;
ordonner la destruction, aux frais des défenderesses, des articles contrefaisants encore en leur possession en quelque lieu où ils se trouvent, sous astreinte de 150 € par jour de retard, dans les quinze jours à compter du prononcé du jugement à intervenir, le Tribunal restant saisi pour statuer sur l'astreinte définitive ;
ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et constitution de garantie ;
ordonner la publication du jugement à intervenir dans trois journaux choisis par les demanderesses aux frais des sociétés défenderesses, dans la limite de 3.000 € (trois mille euros) par insertion ;
condamner la société ATOLL à payer aux demanderesses la somme de 15.000 € au titre de l'article
700 du code de procédure civile ;
condamner la société ATOLL aux entiers dépens, en ce compris les frais d'huissier etnotamment ceux consécutifs à la saisie contrefaçon.
Ils ont principalement fait valoir :
1 .A titre liminaire sur la recevabilité des demanderesses.
Sur la recevabilité de la société ANTIK BATIK
-que la présomption de titularité de droits d'auteur énoncée à l'article
L.113-1 du code de la propriété intellectuelle s'applique aux personnes morales.-que les catalogues de la société ANTIK BATIK présentant les modèles de lacollection "BEA" et les factures afférentes à ces modèles démontrent que cettesociété a commercialisé ces modèles sous la marque ANTIK BATIK.-que le dépôt des modèles de la collection "BEA" par la société ANTIK BATIK endate du 17 octobre 2006 démontre que la société ANTIK BATIK apporte la preuved'une part de sa titularité des droits sur ce modèle et d'autre part qu'elle bénéficied'une antériorité sur ce modèle,-qu'en conséquence, contrairement à ce que prétend la société ATOLL, la sociétéANTIK BATIK est présumée titulaire des droits patrimoniaux sur les modèles litigieuxet donc recevable à agir.
Sur la recevabilité de Mme Gabriella C.
-que les articles de presse ainsi que les diverses attestations versées aux débats suffisent à démontrer que Mme Gabriella C est la seule créatrice des modèles ANTIK BATIK et notamment de la collection "BEA".-que le dépôt à l'INPI des modèles de la série "BEA" dont le modèle de tunique"BEA MINI KAFTAN" et le modèle "BEA CROSS DRESS" est signé parMme Gabrielle C.-qu'en l'espèce Mme Gabriella C, auteur des modèles, agit sur le fondement de sondroit moral aux côtés de la société ANTIK BATIK qui exploite les modèles etintervient en qualité de titulaire des droits patrimoniaux.-qu'en conséquence, contrairement à ce que prétend la société ATOLL,Mme Gabriella C est recevable à agir sur le fondement de l'article
L 113-1 du codede la propriété intellectuelle dès lors que son nom a été porté à la connaissance dupublic en tant que créatrice desdits modèles.
2. Sur les actes de contrefaçon commis par la société ATOLL.
Sur le caractère protégeable par le droit d'auteur des modèles revendiqués.
-qu'un modèle de vêtement peut constituer une oeuvre de l'esprit éligible à la protection par le droit d'auteur pourvu qu'il soit original, -qu'en l'espèce les modèles de la collection "BEA" sont composés de différents éléments caractéristiques tenant à la forme, aux finitions des encolures, à la matière, au tissu imprimé coloré qui donnent à l'ensemble des modèles une forme originale qui porte l'empreinte de la personnalité de leur auteur.-qu'en conséquence les modèles revendiqués bénéficient de la protection par le droit d'auteur.
Sur la violation des droits patrimoniaux.
-qu'elles n'ont jamais autorisé un tiers à reproduire, dans son ensemble ou partiellement, les modèles litigieux.-que les modèles de hauts et tuniques contrefaisants distribués et commercialiséspar la société défenderesse, reproduisent à l'identique l'ensemble descaractéristiques originales des modèles de la collection "BEA" dont la tunique"BEA MINI KAFTAN" et la robe "BEA CROSS DRESS".-qu'il est possible de noter les similarités suivantes :. même taille et même forme. même utilisation d'une matière "transparente" en l'espèce la soie. même utilisation de perles cousues à l'encolure et d'une ceinture à la taille. même utilisation du même tissu imprimé en couleurs.-que contrairement à ce que prétend la société ATOLL, les demanderesses ne luireprochent pas de commercialiser des tuniques en mousseline d'apparencevaporeuse, avec ou sans manches, qui appartient à un genre en revanche elles luireprochent d'avoir commercialisé des copies serviles des modèles originaux de lacollection "BEA".
Sur la violation du droit moral.-que les modèles de hauts et tuniques contrefaisants violent le droit moral de lacréatrice Mme Gabriella C.-que les modèles contrefaisants comportent des variations mineures d'une qualité etd'un esthétisme contestables: le tissu est synthétique, les perles et pastilles cousuessont de qualité médiocre.-que les modèles contrefaisants ne comportent aucune mention du nom de lacréatrice Mme Gabriella C.
3. Sur les actes de concurrence déloyale commis par la société ATOLL.
-que la ressemblance entre les modèles de la série "BEA" dont notamment la tunique "BEA MINI KAFTAN" et la robe "BEA CROSS DRESS" et les quatre modèles contrefaisants saisis dans la boutique de la société ATOLL est telle qu'elle crée nécessairement une confusion dans l'esprit du client potentiel.-que la commercialisation de ces copies de qualité médiocre déprécie et banalise lesmodèles originaux de la série "BEA" dont notamment la tunique"BEA MINI KAFTAN" et porte ainsi atteinte à la notoriété et à l'image de la marquede la société ANTIK BATIK.-que les modèles ANTIK BATIK et PALME étant destinés à une clientèle féminine, lacommercialisation de hauts et tuniques contrefaisantes cause un préjudice direct à lasociété ANTIK BATIK avec pour effet de détourner la clientèle de celle-ci.-que ce détournement permet à la société ATOLL d'être considérée comme l'uniquecréateur de ces modèles de tuniques, au détriment du travail et de la notoriété de lasociété ANTIK BATIK.-que le caractère déloyal des agissements de la société défenderesse ressortégalement de la vente des modèles contrefaisants à un prix bien inférieur à celui desmodèles ANTIK BATIK.-que contrairement à ce que prétend la défenderesse, ce n'est pas parce que lasociété demanderesse a connu de bons résultats en 2008 que son préjudice neserait pas réel et très important au regard des agissements contrefaisants de lasociété ATOLL.
-que les éléments révélés par la saisie-contrefaçon effectuée dans les locaux de la société ATOLL démontrent que la commercialisation de 1073 modèles contrefaisants.
Par dernières conclusions signifiées le 5 mai 2009, la société ATOLL a principalement demandé au tribunal, au visa des articles
32 et
122 du code de procédure civile, des dispositions des Livres I, III et V du code de la propriété intellectuelle, des articles 1382 et suivants, des articles
1153 et suivants du code civil de :
déclarer la société Atoll recevable et bien fondée, tant en droit qu'en fait, en l'intégralité de ses demandes ;
En conséquence
A TITRE PRINCIPAL
déclarer Mademoiselle Gabriella C et la société ANTIK BATIK irrecevables et mal fondées, tant en droit qu'en fait, en l'intégralité de leurs prétentions ;
A TITRE SUBSIDIAIRE
constater l'absence de toute originalité/nouveauté des créations revendiquées et, en conséquence,
dire qu'elles ne sont pas protégées par le droit d'auteur ni par le droit des dessins et modèles ;
constater l'absence de tout acte de contrefaçon des créations revendiquées en raison du caractère distinct des produits argués de contrefaçon ;
juger que la société ATOLL ne s'est rendue coupable d'aucun acte de concurrence déloyale ou de parasitisme
A TITRE PLUS SUBSIDIAIRE
dire que Mademoiselle Gabriella C et la société ANTIK BATIK ne rapportent pas la preuve du préjudice allégué et, en conséquence, les DEBOUTER de leurs demandes ;
A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE
réduire sensiblement les demandes formulées par Mademoiselle Gabriella C et la société ANTIK BATIK à une condamnation purement symbolique ;
A TITRE RECONVENTIONNEL
condamner solidairement Mademoiselle Gabriella C et la société ANTIK BATIK à verser la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts à la société ATOLL en réparation de ses préjudices matériel, financier et économique ;
condamner solidairement Mademoiselle Gabriella C et la société ANTIK BATIK à verser la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts à la société ATOLL en réparation de son préjudice moral ;
ordonner la publication du jugement à intervenir dans 5 journaux ou magazines au choix de la société ATOLL, aux frais exclusifs et solidaires de Mademoiselle Gabriella C et de la société ANTIK BATIK, dans la limite de 5.000 euros HT par insertion, étant précisé que la TVA sera mise à la charge solidaire des demanderesses ;
condamner solidairement Mademoiselle Gabriella C et la société ANTIK BATIK à la somme de 10.000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile
condamner solidairement Mademoiselle Gabriella C et la société ANTIK BATIK aux entiers dépens de l'instance, y compris aux frais afférents aux opérations de saisie- contrefaçon ;
ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;
assortir l'ensemble des condamnations à intervenir à rencontre de Mademoiselle Gabriella C et de la société ANTIK BATIK de l'intérêt légal avec capitalisation des intérêts.
La société ATOLL a principalement fait valoir :
A titre principal, sur l'irrecevabilité des demanderesses:
Sur l'irrecevabilité de Mme Gabriella C pour défaut d'intérêt à agir.-que ni le fait de se présenter elle-même à la presse comme créatrice des modèlesrevendiqués ni le fait de signer un dépôt de dessin et modèle ne suffisent à rapporterla preuve de sa qualité d'auteur.-que les attestations versées aux débats sont inopérantes.-qu'en conséquence Madame Gabriella C qui ne rapporte pas la preuve de sa qualitéde créatrice des modèles de tunique, robe et jupe devra être déclarée irrecevablepour défaut d'intérêt à agir.
Sur l'irrecevabilité de la société ANTIK BATIK pour défaut d'intérêt à agir.
-que la société ANTIK BATIK ne communique aucun contrat de licence ou de cession de droits susceptibles de rapporter la preuve de sa qualité de cessionnaire.-que la société ANTIK BATIK es qualités de personne morale ne peut bénéficier dela présomption légale de titularité énoncée à l'article
L. 113-1 du code de la propriétéintellectuelle, cette présomption consistant en une présomption de qualité d'auteur etnon en une présomption de titularité de droits patrimoniaux d'auteur.-qu'à titre purement subsidiaire, la société ANTIK BATIK ne rapporte nullement lapreuve d'une diffusion des produits revendiqués sous son nom.
-qu'en conséquence, la société ANTIK BATIK devra être déclarée irrecevable pour défaut d'intérêt à agir
A titre subsidiaire, sur le caractère mal fondé des demandes.
Sur l'absence de tout acte de contrefaçon.-que les caractéristiques essentielles des produits revendiqués, telles que décritesdans l'assignation des demanderesses ne révèlent aucune originalité ni nouveautéde nature à conférer aux produits concernés la protection par le droit d'auteur ou ledroit des dessins et modèles.-que les articles commercialisés par les sociétés ATOLL et ANTIK BATIKappartiennent à un même genre or un genre n'est pas susceptible de monopole-que de surcroît les modèles argués de contrefaçon ne présentent pas un aspectvisuel d'ensemble commun aux modèles revendiqués par les demanderesses.-qu'en conséquence la société ANTIK BATIK ne saurait s'assurer un monopole decommercialisation sur le type de produits concernés, ni voir ses prétentions du chefd'actes de contrefaçon prospérer à l'encontre de la société ATOLL.
Sur l'absence de tout acte de concurrence déloyale.-que les articles de presse versés aux débats par la société ANTIK BATIK deparution très récente ne permettent pas d'asseoir la prétendue notoriété de lasociété ANTIK BATIK et des produits qu'elle commercialise tout au plus depuisquelques mois,-que contrairement à ce que prétend les demanderesses, la société ATOLL n'ajamais cherché à se placer dans leur sillage ni à profiter de leurs investissements. -que la société ANTIK BATIK ne prouve pas que les produits de la société ATOLL seraient de qualité médiocre, ni que la qualité de ceux-ci aurait été de nature à déprécier ses propres articles,-que la société ANTIK BATIK ne produit aucun chiffre, ni attestation d'expert- comptable ou commissaire aux comptes certifiée conforme relatif à son chiffre d'affaire. -que la société ANTIK BATIK ne démontre pas avoir engagé des dépenses au titrede la conception de la fabrication ni même de la promotion de ses produits. -qu'en conséquence, ni le tribunal ni la société ATOLL ne peuvent déterminer l'éventuel préjudice consécutif à la vente par la société ATOLL de ses propresproduits.
A titre plus subsidiaire, sur l'absence de tout préjudice pour les demanderesses.
-que si le tribunal de grande instance considérait les demanderesses recevables et bien fondées en leur action il constaterait le défaut de tout préjudice pour la société ANTIK BATIK.-que la prétendue masse contrefaisante se limite à 1205 exemplaires vendus,répartis sur 4 références de produits litigieux et le bénéfice dégagé par ces ventesest de 8.300,90 euros-qu'en conséquence le tribunal limitera l'indemnisation des demanderesses à unesomme purement symbolique.
A titre reconventionnel, la société ATOLL soutient-que les actions des demanderesses sont abusives tant dans leur principe que dansleurs prétentions.
-que les actions des demanderesses ont injustement porté atteinte à l'image et au sérieux de la société ATOLL à l'égard des clients présents lors des opérations de saisie-contrefaçon mais également à l'égard de son personnel.-qu'en cessant, par précaution, d'assurer la commercialisation des modèles litigieux,la société ATOLL a subi un manque à gagner puisqu'elle n'a pas mis en vente sesstocks.
MOTIFS
Sur la titularité des droits
S'agissant de la société ANTIK BA TIK
II est constant que l'exploitation non équivoque d'une oeuvre fait présumer à l'égard des tiers poursuivis en contrefaçon et en l'absence de toute revendication de droits d'auteur, que la personne morale qui justifie de la réalité de cette exploitation sous son nom et des modalités dans lesquelles elle la réalise, est titulaire des droits patrimoniaux d'auteur correspondants.
En l'espèce, la société ANTIK BATIK verse aux débats une demande d'enregistrement de dessins et modèles, déposée en son nom auprès de l'INPI le 17 octobre 2006, signée de Mme Gabrielle C en qualité de gérante de la société, relative notamment aux modèles 35 (Blouse ceinturée, ainsi décrite "100% mousseline de soie encolure décorée de boules), 36, (Tunique courte ainsi décrite "100% mousseline de soie encolure décorée de boules), 37 (robe cache-coeur "100% mousseline de soie), 38 (jupe longue 100% mousseline de soie) et 39 (Kaftan aux genoux, ceinturé, "100% mousseline de soie encolure décorée de boules).-un extrait de son catalogue intitulé "ANTIK BATIK women's wear collection spring -summer 06/07", sur le quel figurent sur la page intitulée "BEA 100% silk chiffonprinted" sous l'appellation "Beamini kaftan" la photographie d'un modèlecorrespondant à la photographie du modèle déposé numéro 35, sous l'appellation"Bea Tee" la photographie d'un modèle correspondant au modèle déposé 36, sousl'appellation "Bea cross dress " la photographie du modèle déposé 37, sousl'appellation "Bea jupon" la photographie d'un modèle correspondant à laphotographie du modèle déposé 38, sous l'appellation "Bea Kaftan" la photographiedu modèle déposé 39.
La demanderesse, n'agissant pas au titre du livre V mais au titre du Livre I, il importe peu que les modèles déposés n'aient pas été publiés, puisqu'il s'agit en l'espèce de justifier de l'exploitation des modèles par la société ANTIK BATIK pour revendiquer une protection au titre des droits d'auteur.
Dès lors, la preuve est suffisamment rapportée par les éléments sus mentionnés que la société ANTIK BATIK exploite les modèles "Bea mini Kaftan", "Bea cross dress", "Bea Tee", "Bea jupon"et "Bea Kaftan". La société ANTIK BATIK est en conséquence titulaire des droits patrimoniaux d'auteur correspondants, la présomption dont elle bénéficie n'étant pas renversée.
S'agissant de Mme C
L'article
L 113-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que "/a qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée ".
En l'espèce, Mme C se présente comme auteur des modèles de la société ANTIK BATIK dont elle est la présidente s'agissant d'une SAS et notamment des modèles du thème BEA.
Elle produit à l'appui de ses prétentions:-une attestation en date du 1er février 2009, de Mme Danièle B, qui indique qu'elletravaille au sein de la société ANTIK BATIK depuis 1997, et qu'elle a constaté queMme Gabriella C était la créatrice de tous les modèles de collections en particulierpour la collection printemps été 2007, le thème BEA" et en particulier les modèlesCROSS DRESS, JUPON, KAFTAN, MINI KAFTAN, TEE-une attestation en date du 11 février 2009 de M. Jean-Marc F, attaché de presse dela société ANTIK BATIK depuis le 1er novembre 2006, qui indique que Gabriella Cest seule créatrice du thème Bea, comprenant Bea cross dress, Bea jupon, BeaKaftan, Bea mini kaftan et Bea tee appartenant à la collection printemps-été 2007,-une attestation en date du 2 novembre 2009 de M. Etienne M, directeur financier dela société ANTIK BATIK depuis le 16 mars 2007 qui indique de "depuis son entrée(il) a pu constater que Gabriella C était la seule créatrice de tous les modèles descollections ANTIK BATIK,-divers articles de presse relatifs à l'entreprise ANTIK BATIK et à sa fondatrice et dirigeante M. Gabriella C (Libération 8 décembre 2008, Journal du Textile 20 janvier 2009, Elle 27 octobre 2008)
II convient de relever qu'aucun élément du dossier n'établit que les modèles Bea opposés par Mme C ont été divulgués sous le nom de celle-ci. Celle-ci ne produit aux débats aucun croquis ou autres documents relatifs à la création de ces modèles. Aucune conséquence, quant à sa qualité d'auteur des modèles ne peut être tirée du fait qu'elle a procédé au dépôt des modèles, au nom de a société ANTIK BATIK, en sa qualité de gérante, le dépôt n'ayant pas été fait à son nom mais à celui de la société.
La société ATOLL conteste la pertinence des attestations émanant de salariés de la société ANTIK BATIK ainsi que des articles de presse. Il convient d'observer que le lien de subordination fragilise ces moyens de preuve, d'autant, que ces attestations dont le contenu est peu précis, ne sont pas confortées par les parutions dans la presse, aucun des articles susvisés n'étant relatif aux modèles de la gamme Bea .
Dans ces conditions, Mme C n'établit pas qu'elle est l'auteur des modèles opposés et elle ne saurait bénéficier du droit moral sur les créations revendiquées.
Sur l'originalité des modèles opposés
L'article
L 111-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que "l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous".
Les demandeurs revendiquent la protection des modèles suivants:
-modèle de tunique commercialisé sous la dénomination "Bea mini Kaftan" :"vêtement pour femme de type haut à manches courtes ceinturée à la taillel'encolure du modèle est décorée de boules,il est réalisé en soie de chiffon 100%le tissu imprimé de couleur se décline en trois variations de couleur "acqua"(bleu pâle), "berry" (rouge") et "pink" (rosé)
-un modèle intitulé BEA CROSS DRESS qui présente les caractéristiques suivantes :robe cache-coeur ceinturée à la taille,réalisée en soie de chiffon 100%,tissu imprimé de couleurs.
-des modèles de tuniques courtes ou longues et de jupes reprenant également les caractéristiques essentielles des modèles de la série BEA :modèle ceinturé à la taille (pour la tunique Kaftan aux genoux) intitulé"BEA KAFTAN"réalisés en soie de chiffons 100%le tissu imprimé de couleurs.
Les demanderesses soutiennent que les modèles de la collection BEA sont composés de différents éléments caractéristiques tenant à la forme, aux finitions des encolures, à la matière au tissu imprimé coloré qui donnent à l'ensemble des modèles une forme originale qui porte la personnalité de leur auteur.
Pour autant, elles ne décrivent pas les éléments caractéristiques de chacune de ces oeuvres susceptibles de leur conférer l'originalité propre à chacune, élément indispensable pour pouvoir prétendre bénéficier de la protection par la propriété artistique. En effet, la combinaison revendiquée pour la robe BEA CROSS DRESS : "robe cache-coeur ceinturée à la taille, réalisée en soie de chiffon 100%, tissu imprimé de couleurs", est particulièrement large. Il en est de même des "modèles ceinturés à la taille (pour la tunique Kaftan aux genoux intitulé "BEA KAFTAN", réalisés en soie de chiffons 100% avec un tissu imprimé de couleurs".
Les demanderesses ne sauraient revendiquer le genre constitué par les vêtements de femmes de type haut à manches courtes et tuniques, en mousseline et avec une ceinture à la taille ou encore des robes cache-coeur avec une ceinture à la taille.
En conséquence, les demanderesses, à défaut d'établir leur qualité d'auteur d'oeuvres protégées par la propriété artistique, pour les modèles BEA JUPON, BEA CROSS DRESS, BEA KAFTAN, seront déclarées irrecevables en leurs demandes au titre de la contrefaçon de droit d'auteur pour ces modèles
Seul le modèle de tunique commercialisé sous la dénomination "Bea mini Kaftan" défini comme étant un "vêtement pour femme de type haut à manches courtes ceinturée à la taille l'encolure du modèle est décorée de boules, réalisé en soie de chiffon 100%;le tissu imprimé de couleur se décline en trois variations de couleur "aqua" (bleu pâle), "berry" (rouge") et "pink" (rosé) est susceptible d'être protégé dans la mesure où il présente un collier de perles autour de son encolure qui présente les caractéristiques suivantes collier de perles habillés de tissu, des perles de deux tailles différentes s'enchaînant selon le rythme suivant: une grosse perle
puis deux petites perles puis une grosse perle puis trois petites perles puis une grosse perle puis deux plus petites perles ; chacune de ces perles étant séparée de celle qui la précède et de celle qui la suit par un fil de coton noué de couleur jaune, rosé ou vert.
La société défenderesse produit un certain nombre d'antériorités;'si certaines comportent des ornements de perles cousues et de broderies à l'encolure aucune ne reprend la combinaison revendiquée de boules autour de l'encolure, sur un vêtement haut de femme, ceinturé à la taille.
En conséquence bien que les éléments de ce modèle sont connus et pris séparément peuvent être regardés comme appartenant au fonds commun de l'univers du vêtement féminin, en revanche leur combinaison, telle que revendiquée traduit un parti pris esthétique qui porte l'empreinte de la personnalité de son auteur, de sorte que l'oeuvre opposée est protégeable au titre du droit d'auteur et les demandes des demanderesses seront déclarées recevables pour le modèle BEA MINI KAFTAN.
Sur la contrefaçon
C'est au regard de l'article
L 122-4 du Code de la propriété intellectuelle, qui dispose que : "toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque" que doit être examiné le grief de contrefaçon.
Il est constant que la contrefaçon s'apprécie selon les ressemblances et non d'après les différences. Elle ne peut toutefois être retenue lorsque les ressemblances relèvent de la reprise d'un genre et non de la reproduction de caractéristiques spécifiques de l'oeuvre première.
En l'espèce, il ne ressort pas des pièces produites aux débats que la société défenderesse offre à la vente, des vêtements qui comportent les caractéristiques très proches voire identiques à celles de l'oeuvre des demandeurs.
Il convient d'observer que les demanderesses ne précisent pas quel modèle saisi devrait être comparé à quel modèle, se livrant à une comparaison globale des produits lesquels reprendraient "la même taille et la même forme ; l'utilisation d'une matière transparente, en l'espèce la soie ; l'utilisation de perles cousues à l'encolure et d'une ceinture à la taille; utilisation du même tissu imprimé en couleurs".
Le modèle saisi n°28839 est ceinturé à la taille pa r six rangées de fil élastique, ce qui produit un effet différent de la ceinture coulissante du modèle BEA MINI KAFTAN.Le modèle saisi n°28581 présente cousu de part et d 'autre de la taille un lien fin qui permet de le nouer. Dans ce cas également l'effet produit est différent de celui produit par la ceinture coulissante du modèle BEA MINI KAFTAN.Les autres modèles saisis ne comportent pas de ceinture.
Si les modèles argués de contrefaçon sont revêtus de décorations à l'encolure, ces décorations se distinguent nettement de celles figurant sur le modèle revendiqué.
Le modèle de la société ATOLL référencé 28442 présente les caractéristiques suivantes :II s'agit d'une tunique; à manches longues; fendue de chaque côté, non ceinturée àla taille ou sous la poitrine ;le col est échancré et peut être noué par deux fins et longs cordons du même tissuque le reste du vêtement, chaque cordon se finissant par une petite perle de boisronde rouge foncé.
Sur l'encolure figurent: une première rangée de perles cylindriques rosés le long de l'échancrure du col, et une seconde rangée composée de grosses perles facettées rosés, cousues au tissu, de chaque côté du col, de manière symétrique, alternativement de forme hexagonale et ronde, au nombre total de 14; à la pointe du col se trouve une fleur de tissu.
En outre, sur l'avant de la tunique sont cousues des petites perles, formant ensemble des dessins; une fleur, deux lignes d'une part, un demi soleil ainsi qu'une une petite fleur.
Le point caractéristique du modèle de la société ANTIK BATIK est la présence de boules de tissu cousues tout autour du col, formant comme un collier. Cette caractéristique n'est pas reprise. La coupe générale n'est pas davantage reprise, puisque sur le modèle de la société ANTIK BATIK les manches ne sont pas découpées alors qu'elles le sont dans le modèle ATTOL. Il résulte de la comparaison des modèles à laquelle s'est livré le tribunal que le modèle de la société ATOLL ne présente pas un aspect visuel d'ensemble semblable au modèle revendiqué par les demanderesses.
S'agissant du modèle 28581 de la société ATOLL:Ce modèle 28581 présente les caractéristiques suivantes :II s'agit d'un haut, dont les manches s'arrêtent aux coudes, avec un col en « V » échancré ;
Dont deux coutures prennent naissance à la pointe du « V » et partent en diagonale de manière symétrique; avec deux lacets fins et longs cousus à la taille pouvant être noués après avoir été enroulés autour de la taille;
Sur l'encolure figurent : alternativement, et symétriquement de chaque côté, deux ou trois rangées de perles de différentes couleurs s'enchaînant de la manière suivante : petites perles rosés ressemblant à des pastilles facettées au centre desquelles sont cousues des perles cylindriques irisées de différentes couleurs: jaune, orange, bleu, vert et rosé, cousues sur deux rangées parallèles de huit perles chacune;puis petites perles dorées transparentes, sur trois rangées parallèles, reliées et cousues au tissu; puis à nouveau des petites perles, bleues cette fois, ressemblant à des pastilles facettées au centre desquelles sont cousues des perles cylindriques irisées de différentes couleurs, cousues sur deux rangées parallèles de six perles chacune; puis petites perles irisées de différentes couleurs, sur trois rangées parallèles, reliées et cousues au tissu; puis deux rangées parallèles de sequins en miroir rosé, cousues; puis trois rangées de perles cylindriques irisées dorées transparentes, cousues; puis deux rangées parallèles de cinq perles chacune rosés ressemblant à des pastilles, facettées au centre desquelles sont cousues des perles cylindriques irisées de différentes couleurs.
A la pointe du « V » est cousue en son cœur une fleur de tissu.En outre, sur l'avant de ce haut sont cousues des petites perles, formant ensembledes dessins : fleur, lignes parallèles.
Il résulte de la comparaison des modèles à laquelle s'est livré le tribunal que le modèle de la société ATOLL ne présente pas un aspect visuel d'ensemble semblable au modèle revendiqué par les demanderesses, la coupe du vêtement et les décorations autour du col ne reprennent pas les boules formant collier du modèle opposé.
S'agissant du modèle n°29008 de la société ATOLL:Le modèle n°29008 de la société ATOLL présente les caractéristiques suivantes : II s'agit d'une tunique ample et longue, à manches chauve-souris, sans aucune pince ni ceinture ; avec un col arrondi de chaque côté, se terminant par une longueéchancrure ; deux cordons fins sont cousus de chaque côté de l'échancrure du col,au milieu de la longueur de celle-ci; ces cordons peuvent être noués entre eux pourmasquer la poitrine et se terminent par une petite boule en bois rouge
Sur l'avant de l'encolure figurent: une première rangée de perles cylindriques fushia cousue le long de l'échancrure du col, une seconde rangée de perles rosés pâles ressemblant à des pastilles facettées cousue le long de la première rangée; une troisième rangée de perles cylindriques fushia, espacées des deux premières rangées, et suivant les même courbes ; entre la deuxième et la troisième rangée de perles, alternance, de manière symétrique de chaque côté de l'encolure, de grosses perles ovales facettées fushia et de petites perles rondes facettées rosés.
Le modèle argué de contrefaçon de la société ATOLL ne présente pas un aspect visuel d'ensemble semblable au modèle revendiqué par les demanderesses. En effet, la forme générale est différente et beaucoup plus large, il n'est pas ceinturé et les décorations autour du col ne reprennent pas les boules formant collier du modèle opposé ;
S'agissant du modèle n °28839 de la société ATOLL:
Le modèle 28839 de la société ATOLL présente les caractéristiques suivantes : II s'agit d'une tunique courte, à manches chauve-souris recouvrant les épaules jusqu'aux coudes; avec un col rond dévoilant le haut des épaules; cinq petites bandes de tissu froissé resserrant le tissu sous la taille sur le corps , du fait de cinq piqûres de fils élastiques parallèles. Sur tout le tour de l'encolure figurent: une à deux rangées de perles selon le rythme suivant: depuis l'avant du col et de droite à gauche: deux rangées de perles cylindriques de différentes couleurs dans les tons marrons, suivies de deux rangées de perles ressemblant à des pastilles facettées beiges, suivies de perles argentées en forme de fleur au centre desquelles sont cousues de perles cylindriques marrons, suivies alternativement de perles rectangulaires facettées argentées et de perles cylindriques noires puis de perles argentées transparentes semi-sphériques facettées et de perles cylindriques noires, suivies de deux rangées de perles ressemblant à des pastilles facettées beiges, argentées en forme de fleur au centre desquelles sont cousues des perles cylindriques marrons, suivies alternativement de perles rectangulaires facettées argentées et de perles cylindriques noires puis de perles argentées transparentes semi-sphériques facettées et de perles cylindriques noires, suivies de deux rangées
de perles cylindriques de différentes couleurs dans les tons marrons, suivies de deux rangées de perles ressemblant à des pastilles facettées beiges, suivies de perles argentées en forme de fleur au centre desquelles sont cousues des perles cylindriques marrons, suivies alternativement de perles rectangulaires facettées argentées et de perles cylindriques noires puis de perles argentées transparentes semi-sphériques facettées et de perles cylindriques noires;
En outre, sur l'avant de la tunique sont cousues des petites perles argentées en forme de fleur par groupe de cinq.
Le modèle argué de contrefaçon de la société ATOLL ne présente pas un aspect visuel d'ensemble semblable au modèle revendiqué par les demanderesses en raison de la coupe différentes des modèles et de la non reprise du collier de boules caractéristique revendiquée du modèle opposé.
Dans ces conditions, aucun fait de contrefaçon ne peut être reproché à la société ATOLL.
Sur la concurrence déloyale
Conformément aux dispositions de l'article
1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il convient de rappeler à titre liminaire que le principe est celui de la liberté du commerce et que ne sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale ou parasitaire que des comportements fautifs tels que ceux visant à créer un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit ou à profiter sans bourse délier des investissements de son concurrent.
En l'espèce, la société ANTIK BATIK prétend que la société ATOLL se serait rendue coupable d'actes de concurrence déloyale au motif que les modèles qu'elle revendique auraient été copiés, ce qui aurait créé une confusion entre sa propre société et la société défenderesse; que la notoriété et l'image de sa société auraient été atteintes au motif que les produits argués de contrefaçon seraient de qualité médiocre; que la société ATOLL aurait détourné sa clientèle.
La comparaison visuelle des quatre produits saisis avec les modèles revendiqués par la société demanderesse fait apparaître qu'il y a eu reprise de l'imprimé BERRY, utilisé par la société demanderesse, pour réaliser comme la société défenderesse des hauts et des tuniques pour femmes, mais dans une qualité différente la soie étant remplacée par du polyester, créant un même effet de transparence.
Il y a lieu de constater que l'imprimé appelé BERRY dans le catalogue 2006-2007 de la société ANTIK BATIK, à dominante rouge, composé de taches de couleurs rouges, rosés, jaunes et bleus pâles, est peu courant, et donc facilement identifiable.
Dès lors, cette reprise de l'imprimé, pour des hauts féminins, dans un type de tissage produisant un effet de transparence, semblable à la soie, entraîne un risque de confusion dans l'esprit des consommateurs entre les modèles de la société
ANTIK BATIK et ceux de la société ATOLL. Cette reprise d'imprimé constitue un fait distinct de ceux examinés du point de vue de la contrefaçon.
En conséquence, une faute distincte de la contrefaçon étant caractérisée, la société ATOLL a commis des actes de concurrence déloyale.
Sur les mesures réparatrices
Par ordonnance en date du 24 juin 2008 Mme le vice-président au tribunal de grande instance de Paris a autorisé les demanderesses à faire pratiquer des opérations de saisie-contrefaçon au sein de la boutique de la défenderesse au [...] (75003) et au siège social de la société ATOLL au [...] (75003)Maître P, huissier de justice, s'est ainsi présenté le 17 juillet 2008 à la boutique sis [...].Il a constaté la présence des quatre modèles suivants commercialisés sous lamarque "PALME" :- 30 exemplaires du modèle de tunique référencée 28442- 102 exemplaires du modèle de haut avec fleurs référencé 28581- 15 exemplaires du modèle de boubou référencé 29008- 75 exemplaires du modèle de haut référencé 28839.
M. Jérôme R, directeur informatique, a indiqué à Maître P que ces quatre modèles ont été achetés auprès de la société CHURCHIT à NEW DELHI en Inde et que le stock serait ,sous réserve des dernières livraisons qui n'auraient pas été inscrites informatiquement, de :- 259 exemplaires du modèle réf: 28442- 132 exemplaires du modèle réf: 28581-2 46 exemplaires du modèle réf: 28839Le stock relatif au modèle réf: 29008 n'a pu être donné.M. Jérôme R a également indiqué que depuis le début du référencement de cesarticles en septembre 2007, date à laquelle ces articles ont été commercialisés par lasociété ATOLL, ont été vendus :- 270 exemplaires du modèle réf: 28442- 163 exemplaires du modèle réf 28581- 251 exemplaires du modèle réf 29008- 389 exemplaires du modèle réf 28839
Compte-tenu de ces éléments, le tribunal est en mesure de fixer à la somme de 15.000 Euros le montant de la réparation du préjudice subi par la société ANTIK BATIK du fait des actes distincts de concurrence déloyale.
Il convient d'interdire à la société défenderesse de commercialiser, à quelque titre que ce soit, les modèles référencées 28442, 28581, 29008 et 28839 dans la mesure où il sont réalisés avec l'imprimé litigieux, sous astreinte de 150 euros par infraction constatée passé un délai d'un mois suivant la signification du jugement, le tribunal se réservant la liquidation de l'astreinte ainsi ordonnée.
Cette mesure d'interdiction apparaissant suffisante au vu des faits de l'espèce, il n'est pas fait droit à la demande de destruction des produits contrefaisants. Le dommage étant suffisamment réparé il ne sera pas fait droit à la demande de publication du présent jugement.
Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive
La société ATOLL demande la condamnation solidaire de Mme Gabriella C et de la société ANTIK BATIK à lui verser la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices matériel, financier et économique et la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral. Ces demandes s'analysent en des demandes formées au titre de la procédure abusive.
L'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d'erreur grossière équipollente au dol.
En l'espèce, la société défenderesse sera déboutée de sa demande à ce titre, faute pour elle de rapporter la preuve d'une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de Mme C, qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits.
La société défenderesse ne pourra qu'être déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, à rencontre de la société ANTIK BATIK, l'action engagée par la société demanderesse à son encontre ayant partiellement prospéré.
De même, elle ne saurait obtenir une condamnation à une mesure de publication qui ne peut être qu'un complément d'indemnité, qui en l'espèce ne lui est pas accordée.
Sur les autres demandes
II y a lieu de condamner la société défenderesse, partie perdante, aux dépens.
En outre, elle doit être condamnée à verser à la société ANTIK BATIK, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l'article
700 du code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 10000 euros. En revanche, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes présentées au titre de l'article
700 du code de procédure civile présentées par Mme C et par la société ATOLL qui succombent dans leurs prétentions.
Les circonstances de l'espèce justifient le prononcé de l'exécution provisoire, qui est en outre compatible avec la nature du litige.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal publiquement, statuant contradictoirement, en premier ressort et par jugement mise à disposition au greffe ;
Déclare la société ANTIK BATIK recevable à agir au titre des droits d'auteur pour le modèle BEA MINI KAFTAN,
La déclare irrecevable à agir au titre du droit d'auteur pour les autres modèles revendiqués.
Dit que Mme Gabriella C n'établit pas être l'auteur des modèles revendiqués et en conséquence la déclare irrecevable à agir en contrefaçon,
Déboute la société ANTIK BATIK de son action en contrefaçon des droits patrimoniaux d'auteur,
Dit que la société ATOLL et en offrant à la vente les vêtements référencés n°28442, 28581, 28839 et 28839 dans le même imprimé que la société ANTIK BATIK utilise pour ses modèles BEA a commis des actes de concurrence déloyale à son encontre,
Condamne la société ATOLL à payer la société ANTIK BATIK la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la concurrence déloyale,
Interdit à la société défenderesse la poursuite de ces actes illicites sous astreinte de 150 € par infraction constatée passé un délai d' un mois suivant la signification du jugement, le tribunal se réservant la liquidation de l'astreinte ainsi ordonnée ; la durée de l'astreinte étant limitée à trois mois,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Ordonne l'exécution provisoire de la décision ;
Condamne la société ATOLL à verser à la société ANTIK BATIK la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile ;
Condamne la société ATOLL aux entiers dépens en ce compris les frais de constat d'huissier.