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Tribunal administratif de Paris, 4ème Chambre, 13 janvier 2023, 1923391

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Paris
  • Numéro d'affaire :
    1923391
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction totale
  • Rapporteur : M. Degand
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : BERGER STENGER
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par un jugement du 16 septembre 2020, le tribunal a, sur requête de M. A D, enregistrée le 31 octobre 2019 sous le n° 1923391 et tendant à l'annulation de la décision du 4 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, ordonné avant dire droit une expertise ayant pour objet de donner tous les éléments utiles à l'appréciation de l'aggravation de son infirmité et d'évaluer, le cas échéant, le supplément du taux de son infirmité en lien avec cette aggravation en se plaçant à la date de sa demande de révision de sa pension d'invalidité. Par une ordonnance du 3 novembre 2020, le vice-président du tribunal a désigné M. C B en qualité d'expert. M. B a déposé son rapport le 29 mars 2021. Par une ordonnance du 2 juin 2021, le président du tribunal a liquidé et taxé les frais d'expertise à la somme totale de 1 200 euros. Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 juin 2021 et le 18 octobre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. Par un mémoire, enregistré le 6 octobre 2022, M. D, représenté par Me Géraldine Berger-Stenger, avocate, demande au tribunal : 1°) d'annuler la décision du 4 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité ; 2°) de lui accorder une pension au taux de 30 % à compter de la date de sa demande et d'assortir le versement des sommes dues depuis cette date des intérêts au taux légal ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à verser à Me Berger-Stenger en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; 4°) de condamner l'Etat aux dépens. Il soutient qu'il remplit les conditions posées par l'article L. 154-1 dès lors que l'infirmité en raison de laquelle une pension lui a été accordée s'est aggravée et que le taux d'invalidité résultant de cette infirmité est supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. Un mémoire présenté pour M. D a été enregistré le 3 novembre 2022 et n'a pas été communiqué. M. D a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 juillet 2019. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Julinet, premier conseiller, - les conclusions de M. Degand, rapporteur public, - et les observations de Me Berger-Stenger pour M. D.

Considérant ce qui suit

: 1. M. A D, né le 31 août 1949, s'est vu concéder une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 10 % à compter du 6 avril 1973 par une décision du 7 mars 1975 en raison d'une blessure aggravée, constatée le 14 mai 1969, à l'occasion du service national accompli au sein de l'armée de terre du 6 janvier 1969 au 7 juillet 1970. Le 27 août 2014, il a présenté une demande de révision de sa pension pour aggravation de sa pathologie. Par une décision du 4 octobre 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande au motif qu'aucune aggravation n'avait été constatée. 2. Par le jugement susvisé du 16 septembre 2020, le tribunal a ordonné, avant de se prononcer sur la requête de M. D tendant à l'annulation de la décision du 4 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, qu'il soit procédé, par un expert désigné par le président du tribunal, à une expertise en vue de donner tous les éléments utiles à l'appréciation de l'aggravation de son infirmité et d'évaluer, le cas échéant, le supplément du taux de son infirmité en lien avec cette aggravation en se plaçant à la date de sa demande de révision de sa pension d'invalidité. L'expert a déposé son rapport le 29 mars 2021. 3. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la décision attaquée : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. /La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". Aux termes de l'article L. 151-2 du même code : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. / Il en est de même de la date d'entrée en jouissance de la pension révisée pour aggravation ou pour prise en compte d'une infirmité nouvelle. / () ". Aux termes de l'article L. 125-1 dudit code : " Le taux d'invalidité reconnu à chaque infirmité examinée couvre l'ensemble des troubles fonctionnels et l'atteinte à l'état général ". Aux termes du 4ème alinéa de l'article L. 125-3 de ce code : " L'indemnisation des infirmités est fondée sur le taux d'invalidité reconnu à celles-ci en application des dispositions d'un guide-barème portant classification des infirmités d'après leur gravité ". Aux termes de l'article L. 125-5 de ce code : " Lorsqu'il s'agit d'amputations ou d'exérèses d'organe, les pourcentages d'invalidité figurant aux barèmes mentionnés à l'article L. 125-3 sont impératifs. / Dans les autres cas, ils ne sont qu'indicatifs ". Aux termes de l'article D. 125-4 du même code : " Le taux d'invalidité mentionné à l'article L. 125-1 est déterminé par le guide-barème des invalidités annexé au présent code ". 4. Il résulte de ces dispositions qu'une pension militaire d'invalidité est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité est reconnu supérieur de dix points par rapport au pourcentage reconnu lors de l'attribution de la pension. Il résulte de l'instruction que le ministre des armées a rejeté la demande de révision formée le 27 août 2014 par M. D au motif que l'expertise réalisée le 26 avril 2018 ne montrait pas une aggravation d'au moins 10 % du taux d'invalidité correspondant aux infirmités résultant pour lui des séquelles de la méniscectomie bilatérale du genou droit qu'il a subie en mars et en mai 1970 en raison de la blessure dont l'aggravation à l'occasion du service a été constatée le 4 mai 1969 par rapport à la dernière expertise, réalisée le 8 février 2012 dans le cadre d'une précédente demande de révision également rejetée le 6 juin 2012, alors qu'il lui incombait, en l'absence de toute révision de la pension depuis son attribution, de comparer les infirmités résultant des conséquences de l'accident à la date de sa demande de révision, le 27 août 2014, avec celles retenues pour l'attribution de la pension le 7 mars 1975 à compter du 6 avril 1973. 5. Il résulte de l'instruction, notamment des rapports des expertises médicales administratives du 25 mars 1970 et du 8 octobre 1974, que, pour attribuer à M. D une pension au taux de 20 % dont 10 % à titre documentaire, il avait été retenu une petite hydarthrose résiduelle, une discrète hypotonie quadricipitale avec amyotrophie, une laxité ligamentaire importante avec mouvements de latéralité interne et de tiroir antérieur de faible amplitude responsables d'une certaine instabilité mais des mouvements de flexion et d'extension normaux, responsables d'une fatigabilité. Il résulte de l'instruction, en particulier des rapports de l'expertise médicale administrative du 26 avril 2018 et de l'expertise médicale judiciaire du 26 mars 2021, qu'en 2014, M. D souffrait d'une gonarthrose tricompartimentale évoluée prédominante en fémorotibiale latérale, avec une chondrolyse complète associée à des ostéophytes marginaux exubérants, une augmentation du volume du genou, une déviation en valgus, une amyotrophie de la cuisse, une limitation des mobilités de 10 % en extension et de 20 % en flexion, des douleurs et une impotence fonctionnelle accrues, une station unipodale instable, un accroupissement asymétrique et une légère boiterie à la marche. Au regard du guide barème annexé au code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et des infirmités découlant de l'ensemble de ces troubles fonctionnels, le taux d'invalidité correspondant à cette infirmité peut être évalué à un taux de 30 % dont 10 % à titre documentaire, soit un pourcentage de 20 %, supérieur de dix points par rapport au pourcentage reconnu lors de l'attribution de la pension, comme l'ont estimé le médecin expert désigné par l'administration en 2018 et l'expert désigné par le tribunal en 2020. Dès lors, M. D est fondé à soutenir qu'il remplit les conditions posées par les dispositions précitées de l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et, par suite, à demander l'annulation de la décision du 4 octobre 2018 et la révision de sa pension au taux de 20 % à compter du 27 août 2014, date de sa demande de révision. Sur les intérêts : 6. Les bénéficiaires de pensions militaires d'invalidité ont droit, sur leur demande, en cas de retard apporté au versement des sommes qui leur sont dues, à des intérêts moratoires. Dès lors, M. D est fondé à demander le versement par l'Etat des intérêts, au taux légal, sur la revalorisation des arrérages de sa pension résultant du présent jugement, à compter des dates respectives d'échéance de ces arrérages. Sur les frais liés au litige : 7. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat () ". 8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal le 16 septembre 2020, liquidés et taxés à la somme totale de 1 200 euros le 2 juin 2021, à la charge définitive de l'Etat. 9. M. D a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Berger-Stenger, avocate de M. D, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Berger-Stenger d'une somme de 1 500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : La décision de la ministre des armées du 4 octobre 2018 est annulée. Article 2 : Le taux de la pension militaire d'invalidité concédée à M. D est porté à 20 % à compter du 27 août 2014. Article 3 : La revalorisation des arrérages de la pension de M. D portera intérêt à compter des dates respectives d'échéance de ces arrérages. Article 4 : L'Etat versera à Me Berger-Stenger une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Berger-Stenger renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D est rejeté. Article 6 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 200 euros, sont mis à la charge définitive de l'Etat. Article 7 : Le présent jugement sera notifié à M. A D, à Me Géraldine Berger-Stenger et au ministre des armées. Une copie en sera adressée pour information à M. C B, expert désigné par le tribunal. Délibéré après l'audience du 16 décembre 2022, à laquelle siégeaient : Mme Aubert, présidente, M. Julinet, premier conseiller, M. Blusseau, conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2023. Le rapporteur, S. JULINET La présidente, S. AUBERTLa greffière, A. LOUART La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

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