Cour d'appel de Rennes, 17 février 2023, 23/00087

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Rennes
  • Numéro de pourvoi :
    23/00087
  • Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
  • Décision précédente :Cour d'appel de Rennes, 15 octobre 2015
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/63f07c246513ae05de86176a
  • Président : Philippe BRICOGNE
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Rennes
2023-02-17
Cour d'appel de Rennes
2015-10-15

Texte intégral

COUR D'APPEL DE RENNES N° 23/28 N° RG 23/00087 - N° Portalis DBVL-V-B7H-TQEV JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT O R D O N N A N C E article L 3211-12-4 du code de la santé publique Nous, Philippe BRICOGNE, Président à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Julie FERTIL, greffière, Statuant sur l'appel formé le 10 Février 2023 à 14h21 par Me PAILLE NICOLAS concernant : M. [A] [M] [F] né le 02 Juin 1954 à [Localité 4] de nationalité Française demeurant [Adresse 1] actuellement hospitalisé au centre hospitalier [5] ayant pour avocat Me Amélie PAILLE-NICOLAS, avocat au barreau de RENNES d'une ordonnance rendue le 31 Janvier 2023 par le Juge des libertés et de la détention de RENNES qui a ordonné le maintien de son hospitalisation complète ; En présence de [A] [M] [F], régulièrement avisé de la date de l'audience, assisté de Me Amélie PAILLE-NICOLAS, avocat En l'absence du curateur, le service des majeurs protégés CHGR, régulièrement avisé, En l'absence du représentant du préfet d'Ille et Vilaine, régulièrement avisé, En l'absence du procureur général régulièrement avisé (avis du 10/02/23), En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé, Après avoir entendu en audience publique le 16 Février 2023 à 14 H 00 l'appelant et son avocat en leurs observations, Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante : Par arrêt du 15 octobre 2015, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes a déclaré qu'il existait des charges suffisantes contre M. [A] [M] [F] d'avoir, le 31 juillet 2012 : - avec préméditation, volontairement donné la mort à [J] [V], - avec préméditation, volontairement donné la mort à [KD] [T], - avec préméditation, tenté de donner volontairement la mort à [S] [U] à [Z] [U], ladite tentative, manifestée par un commencement d'exécution, en l'espèce en percutant de manière volontaire la voiture des victimes avec la sienne alors qu'il roulait à vive allure, n'ayant manqué son effet que par une circonstance indépendante de sa volonté, - avec préméditation, tenté de donner volontairement la mort à [N] et [X] [G], ladite tentative, manifestée par un commencement d'exécution, en l'espèce en les agressant à leur domicile avec une arme, en l'espèce une machette, n'ayant manqué son effet que par une circonstance indépendante de sa volonté, - tenté de donner volontairement la mort à [N] [P] et [TT] [K], ladite tentative, manifestée par un commencement d'exécution, en l'espèce en les agressant avec une arme, à savoir une machette, n'ayant manqué son effet que par une circonstance indépendante de sa volonté, - soustrait un véhicule Peugeot 307 au préjudice de Monsieur [TT] [K], - par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, volontairement détruit la maison située au [Adresse 2] au préjudice de Madame [Y] [GS], - volontairement détruit l'immeuble situé [Adresse 3] ainsi que les meubles et objets personnels des résidents, au préjudice des locataires et propriétaires de l'immeuble, par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, avec cette circonstance que les faits ont entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours pour [O] [C]et pour [VM] [I], mais, sur le fondement d'expertises psychiatriques rendues par le Dr. [H] le 16 septembre 2014, par le Dr. [B] le 20 novembre 2013 et par le Dr. [W] le 20 avril 2013, l'a déclaré irresponsable pénalement, M. [A] [M] [F] étant par ailleurs, par ordonnance du même jour, admis en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète effectuée le 15 octobre 2015 au centre hospitalier [5] à [Localité 6]. Par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 5 août 2022, le maintien de la mesure d'hospitalisation complète de Monsieur [A] [M] [F] a été autorisé. M. [A] [M] [F] a ensuite fait l'objet d'évaluations mensuelles et d'un rapport du collège composé du Dr. [D], du Dr. [E] et de Mme [R] le 11 janvier 2023 décrivant un état clinique restant bien stabilisé et la situation clinique de M. [A] [M] [F] ne présentant pas d'évolution depuis plusieurs mois. Il existe un enkystement de sa persécution malgré le traitement sans que cela ne s'accompagne de troubles du comportement agressif. M. [A] [M] [F] reste anosognosique et nécessite des soins au long cours. Les fonctions cognitives sont perturbées probablement en lien avec une évolution vésanique de sa psychose. Une orientation en EHPAD serait une suite logique de son hospitalisation actuelle au regard de son âge et de son déclin cognitif à l'origine d'une certaine forme de dépendance. Les sorties de M. [A] [M] [F] dans le parc du centre hospitalier continuent à bien se dérouler avec un bon respect du cadre de l'hospitalisation. L'irresponsabilité pénale dont il a fait l'objet nécessite que les soins soient maintenus sous la forme d'une hospitalisation complète et continue. Sur requête du préfet d'Ille-et-Vilaine du 17 janvier 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé le maintien de la mesure d'hospitalisation complète de M. [A] [M] [F] par ordonnance du 31 janvier 2023. Le 10 février 2023, M. [A] [M] [F] a fait appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention. À l'audience du 16 février 2023 à 14 heures, M. [A] [M] [F] indique qu'il a du mal à enregistrer mais que tout se passe bien au centre hospitalier. Il voudrait toutefois sortir pour aller en EHPAD. Ses enfants et son frère viennent le visiter. Son avocate demande avant dire droit l'organisation de deux expertises psychiatriques, la mainlevée de l'hospitalisation de M. [A] [M] [F] et le paiement de la somme de 400,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle considère que la mainlevée de l'hospitalisation complète de M. [A] [M] [F] peut être envisagée, à charge pour la juridiction d'organiser la double expertise prévue par les textes. Le curateur de M. [A] [M] [F], le service des majeurs protégés du centre hospitalier [5], n'a pas comparu. Le centre hospitalier n'a pas comparu mais adressé un certificat médical de situation établi le 15 février 2023 par le Dr. [L] mentionnant que l'état clinique de M. [A] [M] [F] reste bien stabilisé et sa situation clinique ne présente pas d'évolution depuis plusieurs mois. Il existe un enkystement de sa persécution malgré le traitement sans que cela ne s'accompagne de troubles du comportement agressif. M. [A] [M] [F] reste anosognosique et nécessite des soins au long cours. Les fonctions cognitives sont perturbées probablement en lien avec une évolution vésanique de sa psychose. Une orientation en EHPAD serait une suite logique à son hospitalisation actuelle au regard de son âge et de son déclin cognitif qui procure une certaine forme de dépendance. Malheureusement, un tel projet est entravé par la décision judiciaire d'interdiction de séjour sur la région Bretagne. Les sorties de M. [A] [M] [F] dans le parc du CHGR continuent à bien se dérouler avec un bon respect du cadre de l'hospitalisation. L'irresponsabilité pénale dont a fait l'objet M. [A] [M] [F] nécessite que les soins à la demande d'un représentant de l'Etat soient maintenus sous la forme d'une hospitalisation complète et continue. Le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas comparu mais a adressé un mémoire dans lequel il sollicite le maintien de l'hospitalisation complète de M. [A] [M] [F]. Le ministère public requiert la confirmation de l'ordonnance, considérant que la double expertise, qui a vocation à éviter de libérer un patient dangereux, ne peut être prononcée que si le juge envisage une mainlevée de l'hospitalisation complète. DISCUSSION

Sur la recevabilité de

l'appel Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance. Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure. En l'espèce, M. [A] [M] [F] a formé le 10 février 2023 un appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 31 janvier 2023. Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable. Sur la demande d'expertise L'article L. 3211-12 du code de la santé publique prévoit que 'le juge des libertés et de la détention ne peut statuer qu'après avoir recueilli l'avis du collège mentionné à l'article L. 3211-9 du présent code lorsque la personne fait l'objet d'une mesure de soins ordonnée en application de l'article L. 3213-7 du même code ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale à la suite d'un classement sans suite, d'une décision d'irresponsabilité pénale ou d'un jugement ou arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale prononcés sur le fondement du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal et concernant des faits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement en cas d'atteinte aux personnes ou d'au moins dix ans d'emprisonnement en cas d'atteinte aux biens. Le juge ne peut, en outre, décider la mainlevée de la mesure qu'après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l'article L. 3213-5-1 du présent code. Le juge fixe les délais dans lesquels l'avis du collège et les deux expertises prévus au présent II doivent être produits, dans une limite maximale fixée par décret en Conseil d'Etat. Passés ces délais, il statue immédiatement'. Aux termes de l'article L. 3211-9, 'pour l'application du II des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1 et des articles L. 3212-7, L. 3213-1, L. 3213-3 et L. 3213-8, le directeur de l'établissement d'accueil du patient convoque un collège composé de trois membres appartenant au personnel de l'établissement : 1° Un psychiatre participant à la prise en charge du patient ; 2° Un psychiatre ne participant pas à la prise en charge du patient ; 3° Un représentant de l'équipe pluridisciplinaire participant à la prise en charge du patient'. L'article L. 3213-5-1 dispose que 'le représentant de l'Etat dans le département peut à tout moment ordonner l'expertise psychiatrique des personnes faisant l'objet d'une mesure de soins psychiatriques prononcée en application du présent chapitre ou du chapitre IV du présent titre ou ordonnée en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale. Cette expertise est conduite par un psychiatre n'appartenant pas à l'établissement d'accueil de la personne malade, choisi par le représentant de l'Etat dans le département sur une liste établie par le procureur de la République, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé de la région dans laquelle est situé l'établissement ou, à défaut, sur la liste des experts inscrits près la cour d'appel du ressort de l'établissement'. L'article R. 3211-14 prévoit que, 's'il l'estime nécessaire, le juge ordonne, le cas échéant sans débat, toute mesure d'instruction. Lorsque le juge ordonne deux expertises, les deux experts procèdent à des examens séparés de la personne qui fait l'objet de soins. Le ou les experts désignés ne peuvent exercer dans l'établissement d'accueil de la personne qui fait l'objet de soins psychiatriques. Les experts remettent leur rapport dans le délai fixé par le juge, qui ne peut excéder douze jours suivant leur désignation. Ils déterminent librement les modalités de conduite des opérations d'expertise. Par dérogation aux articles 160 et 276 du code de procédure civile, ils ne sont pas tenus de convoquer les parties ou de susciter leurs observations. Le rapport est déposé au secrétariat de la juridiction où les parties peuvent le consulter. Sur leur demande, le greffe leur en délivre une copie'. En l'espèce, un rapport du collège composé du Dr. [D], du Dr. [E] et de Mme [R] en date du 11 janvier 2023 est versé aux débats, lequel décrit 'un état clinique restant bien stabilisé et la situation clinique de M. [A] [M] [F] ne présentant pas d'évolution depuis plusieurs mois. Il existe un enkystement de sa persécution malgré le traitement sans que cela ne s'accompagne de troubles du comportement agressif. M. [A] [M] [F] reste anosognosique et nécessite des soins au long cours. Les fonctions cognitives sont perturbées probablement en lien avec une évolution vésanique de sa psychose. Une orientation en EHPAD serait une suite logique de son hospitalisation actuelle au regard de son âge et de son déclin cognitif à l'origine d'une certaine forme de dépendance. Les sorties de M. [A] [M] [F] dans le parc du centre hospitalier continuent à bien se dérouler avec un bon respect du cadre de l'hospitalisation. L'irresponsabilité pénale dont il a fait l'objet nécessite que les soins soient maintenus sous la forme d'une hospitalisation complète et continue'. Le fait que M. [A] [M] [F] reste anosognosique, avec des fonctions cognitives perturbées, et que les sorties pratiquées soient limitées au parc du centre hospitalier ne permet pas d'envisager une mainlevée de l'hospitalisation complète et continue, sans qu'il soit utile d'organiser la double expertise prévue par les textes. Par ailleurs, l'attention du curateur est attirée sur la nécessité d'anticiper une éventuelle sortie de M. [A] [M] [F] à l'occasion de la prochaine évaluation, compte tenu du tableau d'évolution favorable que semble présenter l'intéressé. En l'état, il conviendra de confirmer l'ordonnance entreprise. Sur les dépens Les dépens seront réservés. Sur l'article 700 du code de procédure civile Aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, Philippe BRICOGNE, président de chambre, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte, Recevons M. [A] [M] [F] en son appel, Confirmons l'ordonnance entreprise, Laissons les dépens d'appel à la charge du trésor public, Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Fait à Rennes, le 17 Février 2023 à LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,Philippe BRICOGNE, Président Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [A] [M] [F] , à son avocat, au CH, ARS et curateur-tuteur Le greffier, Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile. Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD Le greffier