CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 26 octobre 2023
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1058 FS-B
Pourvoi n° D 21-19.844
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 OCTOBRE 2023
La caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 21-19.844 contre l'arrêt rendu le 27 mai 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-9), dans le litige l'opposant à la société Lou Parais, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 septembre 2023 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, Mmes Vendryes, Caillard, M. Waguette, conseillers, Mmes Jollec, Bohnert, Latreille, Bonnet, Chevet, conseillers référendaires, M. Adida-Canac, avocat général, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article
R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 mai 2021), agissant en vertu de titres notariés et de l'ordonnance d'un juge des référés, en date du 1er juin 2012, ayant conféré force exécutoire à une transaction intervenue le 26 mars 2012, la société caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur (la banque) a fait délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière à la SCI Lou Parais (la SCI) puis l'a assignée à une audience d'orientation.
Examen des moyens
Sur le moyen relevé d'office
2. Après avis donné aux parties conformément à l'article
1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article
620, alinéa 2, du même code.
Vu
les articles
503, alinéa 1er,
1565,
1566 et
1567 du code de procédure civile, ces trois derniers créés par le décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012, et L. 111-3, 1°, du code des procédures civiles d'exécution :
3. Selon le cinquième de ces textes, constituent des titres exécutoires les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire, ainsi que les accords auxquels ces juridictions ont conféré force exécutoire. Selon le premier, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire.
4. Selon le deuxième de ces textes, l'accord auquel sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation ou une procédure participative peut être soumis, aux fins de le rendre exécutoire, à l'homologation du juge compétent pour connaître du contentieux dans la matière considérée.
5. Selon le troisième, le juge statue sur la requête qui lui est présentée sans débat, à moins qu'il n'estime nécessaire d'entendre les parties. S'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu la décision. La décision qui refuse d'homologuer l'accord peut faire l'objet d'un appel. Cet appel est formé par déclaration au greffe de la cour d'appel. Il est jugé selon la procédure gracieuse.
6. Selon le quatrième de ces textes, les dispositions des articles 1565 et
1566 sont applicables à la transaction conclue sans qu'il ait été recouru à une médiation, une conciliation ou une procédure participative. Le juge est alors saisi par la partie la plus diligente ou l'ensemble des parties à la transaction.
7. Ces trois derniers textes, relatifs à la procédure d'homologation des accords auxquels sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation, ou une procédure participative, instaurent un régime particulier distinct de celui de droit commun de l'ordonnance sur requête régie par les articles
493 et suivants du code de procédure civile et ne prévoient pas que l'ordonnance d'homologation, rendue à la requête de l'une seule des parties, est exécutoire au seul vu de la minute.
8. Il résulte de ce qui précède que lorsqu'une partie entend poursuivre l'exécution forcée d'une transaction, elle doit saisir le juge d'une requête à fin d'homologation. N'étant pas dissociable de la transaction à laquelle elle confère force exécutoire, l'ordonnance d'homologation doit, lorsqu'elle a été rendue à la requête de cette seule partie, être notifiée, conformément aux dispositions de l'article
503 du code de procédure civile, à la partie contre laquelle l'exécution est poursuivie.
9. Pour valider la procédure de saisie pour la somme de 498 730,67 euros, y compris les clauses pénales réduites respectivement à 100 euros (100 euros x 2), arrêtée au 14 janvier 2019, l'arrêt retient
que l'ordonnance du 1er juin 2012, rendue au visa de l'article 1441-4 ancien du code de procédure civile, que l'on trouve depuis son abrogation par le décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012, dans les articles
1565 à
1567 du code de procédure civile, constitue une ordonnance sur requête qui déroge au principe d'une notification par voie de signification et est exécutoire au seul vu de la minute et que ne sont établies ni la présentation de la minute, ni la remise d'une copie de la requête et de l'ordonnance à la gérante de la SCI.
10. En statuant ainsi
, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
11. En application de l'article
624 du code de procédure civile, la cassation de la disposition validant la procédure de saisie immobilière pour la somme de 498 730,67 euros entraîne la cassation des autres chefs de dispositif, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS
, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.
Condamne la SCI Lou Parais aux dépens ;
En application de l'article
700 du code de procédure civile, condamne la SCI Lou Parais à payer à la société caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille vingt-trois.