Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 10 novembre 2022, 21/09437

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Texte intégral

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE Chambre 1-6

ARRÊT

AU FOND DU 10 NOVEMBRE 2022 N° 2022/408 N° RG 21/09437 N° Portalis DBVB-V-B7F-BHWCJ [K] [W] Société MACSF ASSURANCES C/ [M] [R] épouse [N] [Z] [N] [J] [N] [A], [Y] , [V] [R] [X] [F] [B] [G] Caisse CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE (SIÈGE SOCIAL) Copie exécutoire délivrée le : à : -SCP PLANTARD ROCHAS VIRY -Me Philippe SOUSSI Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'AIX EN PROVENCE en date du 31 Mai 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 19/04437. APPELANTS Monsieur [K] [W] né le [Date naissance 7] 1981 à [Localité 18] de nationalité Française, demeurant Centre Médical [23] [Adresse 16] représenté et assisté par Me Jean-Michel ROCHAS de la SCP PLANTARD ROCHAS VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, postulant et plaidant. Société MACSF ASSURANCES, demeurant [Adresse 3] représentée et assistée par Me Jean-Michel ROCHAS de la SCP PLANTARD ROCHAS VIRY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, postulant et plaidant. INTIMES Madame [M] [R] épouse [N] Signification DA le 11/08/2021 à étude, née le [Date naissance 2] 1984 à [Localité 18], demeurant [Adresse 9] représentée et assistée par Me Philippe SOUSSI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Céline SCHIAVOLINI, avocat au barreau de NICE, postulant et plaidant. Monsieur [Z] [N], Epoux de Mme [M] [N], Signification DA le 11/08/2021 à étude, né le [Date naissance 4] 1982 à [Localité 24], demeurant [Adresse 9] représentée et assistée par Me Philippe SOUSSI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Céline SCHIAVOLINI, avocat au barreau de NICE, postulant et plaidant. Monsieur [J], [P], [S] [N] Mineur représenté par ses représentants légaux : Monsieur [Z] [N] et Madame [M] [N] née [R], Signification DA le 11/08/2021 à étude, né le [Date naissance 14] 2010 à [Localité 18] (13), demeurant [Adresse 9] représenté et assisté par Me Philippe SOUSSI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Céline SCHIAVOLINI, avocat au barreau de NICE, postulant et plaidant. Monsieur [A] [R], Signification DA le 11/08/2021 à étude, né le [Date naissance 11] 1954 à [Localité 17], demeurant [Adresse 8] représentée et assistée par Me Philippe SOUSSI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Céline SCHIAVOLINI, avocat au barreau de NICE, postulant et plaidant. Monsieur [X] [F], Signification en date du 10/08/2021 par PV 659 du CPC, né le [Date naissance 6] 1968 à [Localité 19], demeurant [Adresse 15] représenté et assisté par Me Philippe SOUSSI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Céline SCHIAVOLINI, avocat au barreau de NICE, postulant et plaidant. Madame [B] [G] Agissant en son nom personnel et en représentation de son époux décédé le [Date décès 5] 2020 en cours de procédure Monsieur [S] [G] né le [Date naissance 10] 1931 à [Localité 21]. Signification DA le 17/08/2021 à domicile. née le [Date naissance 12] 1935 à [Localité 18], demeurant [Adresse 22] représentée et assistée par Me Philippe SOUSSI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Céline SCHIAVOLINI, avocat au barreau de NICE, postulant et plaidant. Caisse CPAM DES BOUCHES DU RHÔNE (SIÈGE SOCIAL), Signification DA le 10/08/2021 à personne habilitée, demeurant [Adresse 13] Défaillante. *-*-*-*-* COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 27 Septembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries. La Cour était composée de : Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président Madame Anne VELLA, Conseillère Madame Fabienne ALLARD, Conseillère qui en ont délibéré. Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET. Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2022. ARRÊT Réputé contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2022, Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *** FAITS & PROCÉDURE Le 09/01/2015, Mme [I] [G] a consulté M. [W], gastro-entérologue exerçant en libéral à à la clinique [25] de [Localité 24], pour des troubles de la déglutition. Après endoscopie pratiquée le 28/01/2015, ce médecin a posé un diagnostic de sténose radique oesophagienne au vu duquel il a procédé le 16/02/2015 à une dilatation de l'oesophage et à la pose d'une prothèse oesophagienne expansive. La rupture de l'oesophage, l'apparition de fistules, la migration de la prothèse dans l'estomac et une détresse respiratoire progressive ont nécessité plusieurs interventions chirurgicales sous anesthésie à la clinique [25] pour remise en place d'une prothèse. Le 04/05/2015, une fibroscopie a révélé une récidive de la sténose. Admise le 15/06/2015 aux urgences du centre hospitalier de [Localité 20] à la suite d'une hémorragie digestive, Mme [I] [G] a subi un scanner qui a mis en évidence la saillie de la prothèse oesophagienne à travers la paroi postérieure de la trachée. Mme [G] a été réorientée vers le centre hospitalier Nord de [Localité 24], où le docteur [T] a procédé le 30/07/2015 à une thoracotomie, une laparotomie et une oesophagectomie. La persistance d'une fistule oseo-trachéale a déterminé le docteur [T] à réintervenir le 31/07/2015, en vain. L'analyse des prélèvements a conclu à un carcinome épidermoïde oesophagien, dont Mme [I] [G] est décédée le [Date décès 1]/2015. Mme [M] [N], fille de Mme [I] [G], a déposé plainte pour homicide involontaire. Une information judiciaire pour recherche des causes de la mort a été ouverte par le procureur de la République. Le juge d'instruction a commis successivement deux experts médicaux : - le docteur [U] a conclu le 12/05/2016 à une démarche diagnostic insatisfaisante en ce que, si le premier geste d'endoscopie avec biopsie était indiqué, l'interprétation des examens n'a pas été satisfaisante. Pour autant, une interprétation correcte n'aurait rien changé à l'issue nécessairement fatale du cancer de l'oesophage de Mme [I] [G]'; - le docteur [E] a conclu le 28/03/2017 à une faute de M. [W] tenant à l'erreur initiale de diagnostic et au fait de ne pas avoir sollicité d'examens complémentaires pour le rectifier. Il a estimé que Mme [I] [G] a perdu une chance de survie. Le procureur de la République a procédé à un classement sans suite, le délit d'homicide involontaire lui paraissant insuffisamment caractérisé, après avoir rappelé': - que l'erreur ou le retard de diagnostic ne constituent pas en eux-mêmes une faute pénale, sauf négligence lourde en l'espèce non caractérisée, - que les soins proposés et dispensés par les médecins intervenants ont été adaptés, n'encourent pas la critique, et, - que Mme [I] [G] était atteinte d'un cancer dont le stade de développement avancé ne promettait qu'une faible chance de survie à cinq ans. Par acte d'huissier de justice des 19/06, 20/06 et 05/07/2019, Mme [M] [N] et M. [Z] [N] agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants légaux de leur fils [J] [N], M. [S] [G] et son épouse, Mme [B] [C] épouse [G], M. [A] [R] et Mme [H] [F] ont saisi le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence d'une action indemnitaire dirigée à l'encontre de M. [W] et son assureur, la société mutuelle d'assurance du corps de santé français (MACSF), la société polyclinique du [25] et son assureur, la SA AXA France incendie, accidents et risques divers (IARD), au contradictoire de la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône. À la suite du décès de M. [S] [G], son épouse, Mme [B] [C] veuve [G], est intervenue volontairement à l'instance pendante devant la juridiction judiciaire, en qualité d'ayant-droit. Concomitamment, les demandeurs ont saisi le tribunal administratif de Marseille le 01/08/2018 d'une action indemnitaire dirigée contre l'Assistance Public des Hôpitaux de Marseille (APHM) et contre la Société Hospitalière d'Assurances Mutuelles (SHAM). La juridiction administrative est entrée en voie de condamnation et a réparé les préjudices nés pour les demandeurs de l'inutilité de l'intervention chirurgicale du 30/07/2015. Par jugement réputé contradictoire du 31/05/2021, le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence a': - déclaré le jugement commun à la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône, - déclaré recevable l'action des demandeurs, - constaté que M. [S] [G] est décédé le [Date décès 5]/2020 et que son épouse [B] [G] agit en son nom personnel et en représentation de son époux décédé, - déclaré recevable le rapport d'expertise judiciaire du 28/03/2017 établi par le docteur [E], - dit que M. [W] a commis une erreur fautive de diagnostic responsable de la perte de chance de survie de 40'% au préjudice de Mme [I] [G], - dit que M. [W] n'a pas fourni toute l'information nécessaire à sa patiente avant de pratiquer les endoscopies, - condamné in solidum M. [W] et la MACSF à réparer le préjudice souffert par les ayants-droits, - fixé les préjudices comme suit': ' Mme [M] [N]': 16.000,00 € en qualité d'ayant-droit de sa mère, 10.000,00 € au titre de son préjudice d'affection, 12.202,00 € au titre des frais funéraires, ' Mme [B] [C] épouse [G] : 10.000,00 € au titre de son préjudice d'affection, 10.000,00 € au titre du préjudice d'affection de feu M. [S] [G] dont elle est l'ayant-droit, ' Mme [H] [F] : 3.000,00 € au titre du préjudice d'affection, ' Mme [M] [N]'et M. [Z] [N] en qualité de représentants légaux de leur fils [J] [N] : 3.000,00 € au titre du préjudice d'affection, ' M. [Z] [N]': 1.500,00 €, au titre de son préjudice d'affection, ' M. [A] [R] : 3.000,00 € au titre du préjudice d'affection, - condamné in solidum M. [W] et la MACSF à payer lesdites sommes, outre une indemnité de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - condamné in solidum M. [W] et la MACSF à payer à la société Polyclinique [25] et à la SA AXA France IARD une somme de 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - condamné in solidum M. [W] et la MACSF aux dépens de l'instance, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Bruno Zandotti, - ordonné l'exécution provisoire du jugement. Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu les éléments suivants': ' M. [W] ne peut pas se prévaloir de l'autorité de chose jugée par le tribunal administratif'de Marseille, le juge administratif n'ayant statué que sur la responsabilité encourue par l'APHM au titre de l'inutilité de l'intervention chirurgicale du 30/07/2015 à l'hôpital Nord de [Localité 24], et non sur les manquements imputables aux médecins intervenus avant l'admission de Mme [I] [G] à l'hôpital Nord'; ' l'erreur de diagnostic de M. [W] est caractérisée': - le professeur [U], expert agréé près la cour de cassation, ayant considéré'que tous les éléments d'un diagnostic de malignité étaient réunis mais qu'ils n'ont pas été mis en perspective ' alors même que Mme [I] [G] avait suivi une radiothérapie une vingtaine d'années auparavant pour un cancer du sein, et que les antécédents de radiothérapie favorisent l'apparition du cancer de l'oesophage'; qu'il aurait fallu pratiquer une bronchoscopie immédiatement après la découverte de la sténose, compte tenu de la lésion du tiers supérieur de l'oesophage, et non six mois après'; qu'il aurait fallu procéder à des biopsies lors de chaque endoscopie oesophagienne, ce qui aurait permis de renoncer à une intervention chirurgicale vouée à l'échec'; - le professeur [E], spécialiste des pathologies de l'appareil digestif, a considéré'quant à lui que le diagnostic initial de sténose radique n'était pas conforme aux données acquises de la science dans la mesure où la sténose radique n'apparaît en moyenne que quatre ans et demi après la radiothérapie'; que le diagnostic de cancer de l'oesophage post-radique était de loin l'hypothèse de travail la plus plausible'; le délai séparant la radiothérapie de l'apparition du cancer est en général de 10 ans'; que Mme [I] [G] avait subi en outre une chimiothérapie, dont l'association à la radiothérapie a pour effet d'augmenter la toxicité oesophagienne de cette dernière'; avant de procéder d'emblée à une dilatation oesophagienne, il aurait fallu vérifier la pertinence du diagnostic de sténose radique en procédant à certains examens, en particulier un PET scan et une endosonographie ; la circonstance que les biopsies effectuées avant la dilatation se soient avérées négatives ne permettait pas d'écarter de plein droit la possibilité d'un cancer': la seule conclusion possible était qu'elles étaient intervenues dans une zone saine'; ' M. [W]'ne démontre pas avoir exécuté son devoir d'information du patient': le seul document émanant de Mme [I] [G] que M. [W] produit est une «'attestation d'avoir reçu une information'», datée du 15/02/2015, concernant l'endoscopie'; le professeur [E] n'a retrouvé aucun document de consentement éclairé exprimant le consentement de Mme [I] [G] à la dilatation oesophagienne, alors qu'un risque de perforation existe (1 perforation / 400 dilatations), et que le tabac et l'alcool constituent des facteurs de majoration du risque encouru'; ' même si le cancer de Mme [I] [G] préexistait à la dilatation, une perte de chance de survie de 40'% à échéance 5 ans peut être retenue, le professeur [E] inscrivant la perte de chance dans une fourchette de 30 à 67%. Par déclaration du 24/06/2021 dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, M. [W] et la MACSF Assurances ont interjeté appel de tous les chefs du dispositif du jugement du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence, hormis': - celui concernant le défaut d'information à Mme [I] [G] avant de pratiquer les endoscopies, - celui concernant l'opposabilité de la décision à la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône. Par ordonnance du 20/08/2021, le président de la chambre a constaté le désistement de M. [W] de son appel à l'égard de la société Polyclinque du [25]. Par ordonnance du 22/04/2022, le conseiller de la mise en état a donné acte à M. [W] et à la MACSF de leur désistement d'appel à l'égard de la SA AXA France IARD, et a constaté l'extinction de l'instance entre M. [W] et la MACSF, d'une part, et la SA AXA France IARD, d'autre part.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions au soutien de l'appel notifiées par RPVA le 30/08/2021, auxquelles il est renvoyé par application de l'article 455 du code de procédure civile pour un plus ample exposé des moyens et sur l'évaluation des préjudices, M. [W] et la MACSF demandent à la cour de': - infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Statuant à nouveau, - juger irrecevables les ayants-droit de Mme [G] en leurs prétentions pour défaut d'intérêt à agir en application de l'article 122 du code de procédure civile, leurs préjudices ayant été intégralement indemnisés par le tribunal administratif de Marseille, À titre subsidiaire, sur la responsabilité, - juger que le retard de diagnostic de la tumeur 'sophagienne épidermoïde du tiers supérieur de Mme [G] n'est pas imputable à une quelconque faute de M. [W], - juger que le retard de diagnostic de la tumeur 'sophagienne épidermoïde du tiers supérieur de Mme [G] n'a aucune incidence sur les chances de survie de cette patiente, - juger que les conditions de la responsabilité médicale ne sont pas réunies en l'espèce et que la responsabilité de M. [K] [W] ne saurait être engagée dans le cadre de la prise en charge de sa patiente Mme [G], - juger que M. [W] a rempli son obligation d'information de Mme [G] eu égard aux interventions endoscopiques réalisées,

En conséquence

, - débouter les ayants-droit de Mme [G] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de M. [K] [W] et de la MACSF, À titre infiniment subsidiaire, sur la réparation du préjudice, - juger que Mme [I] [G] n'a subi aucun préjudice de perte de chance de survie, - juger que seule peut être indemnisée la perte de chance pour Mme [I] [G] d'avoir subi une intervention chirurgicale inutile, - juger que cette perte de chance a d'ores et déjà été indemnisée par le tribunal administratif de Marseille par jugement du 23/03/2020 ayant condamné l'Assistance Publique des Hôpitaux de Marseille et son assureur à verser à la succession de Mme [G] la somme de 12.000,00 €, - débouter en conséquence les ayants-droits de leur demande de condamnation complémentaire formée à l'encontre de M. [W] et de son assureur, la MACSF, - dire, dans l'hypothèse où par impossible la cour en déciderait autrement, qu'il doit nécessairement être tenu compte des indemnités allouées par le juge administratif et perçues par les demandeurs et, en conséquence : ' limiter l'indemnisation du préjudice moral subi par sa fille Mme [M] [N] à la somme de 5.000,00 €, ' déduire de cette somme l'indemnité allouée à Mme [M] [N] par le tribunal administratif de Marseille d'un montant de 2.000,00 €, - débouter Mme [M] [N] de sa demande au titre des frais de chambre mortuaire comme étant mal fondée, - limiter l'indemnisation du préjudice moral subi par les parents de la défunte, M. et Mme [G], à la somme de 3.000,00 € chacun, - déduire de cette somme l'indemnité allouée à M. et Mme [G] par le tribunal administratif de Marseille d'un montant de 2.000,00 € chacun, - limiter l'indemnisation du préjudice moral subi par le gendre de la défunte, M. [Z] [N], à la somme de 1.500,00 €, - déduire de cette somme l'indemnité allouée à M. [Z] [N] par le tribunal administratif de Marseille d'un montant de 1.000,00 €, - limiter l'indemnisation du préjudice moral subi par le petit-fils de la défunte, [J] [N], à la somme de 1.500,00 €, - déduire de cette somme l'indemnité allouée à M. [J] [N] par le tribunal administratif de Marseille d'un montant de 1.000,00 €, - débouter M. [X] [F], compagnon allégué de la défunte, de sa demande d'indemnisation, - débouter M. [A] [R], ex-époux de la défunte, de sa demande d'indemnisation, - condamner in solidum les succombants à payer à M. [K] [W] et à la MACSF la somme de 4.000,00 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, - les condamner aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Maître Jean-Michel Rochas sur son affirmation de droit. M. [W] et la MACSF développent en particulier les moyens suivants : ' le premier juge a indemnisé le préjudice d'affection des ayants-droit de Mme [I] [G] alors que ce poste de dommage avait déjà été liquidé par le tribunal administratif de Marseille'; le préjudice d'affection des demandeurs résulte du seul décès de Mme [I] [G]'; or, ce préjudice a été réparé par le tribunal administratif de Marseille'; l'action indemnitaire devant le tribunal judiciaire se heurte par conséquent à une double fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée et du défaut d'intérêt à agir'; ' le premier juge a admis à tort un retard fautif de diagnostic de M. [W]'; le rapport du professeur [E] doit être écarté': il n'est ni cancérologue, ni même gastro-entérologue comme le professeur [U]'; après avoir effectué à une endoscopie oesophagienne le 29/01/2015, M. [W] a diagnostiqué une sténose non franchissable du tiers supérieur de l'oesophage'; il a alors procédé à plusieurs biopsies qui, le 03/02/2015, n'ont mis en évidence aucune tumeur'; au moment de la consultation, Mme [I] [G] était en bonne condition physique, ce qui plaidait en faveur d'un diagnostic de sténose radique et non d'un cancer'; le docteur [O], cancérologue, souligne que la fibroscopie du 26/02/2015 a objectivé la présence d'une fistule oeso-trachéale, ce qui signifie que Mme [I] [G] ne pouvait plus être opérée, et ce dès sa prise en charge par M. [W], et qu'elle ne relevait plus non plus d'un traitement par radiothérapie ou par chimiothérapie'; la seule solution consistait dans la mise en place d'une prothèse oesophagienne expansive, telle que M. [W] l'a pratiquée le 26/02/2015'; les complications opératoires ultérieures relèvent de l'aléa thérapeutique, ce qu'a admis le professeur [U]'; aucun des scanners réalisés n'a mis en évidence la présence d'une tumeur'suspecte ; l'espérance de vie de Mme [I] [G] était en tout état de cause inférieure à un an'; ' le premier juge a admis à tort un manquement de M. [W] à son obligation d'information'; Mme [I] [G] a bien reçu l'information concernant l'endoscopie du 16/02/2015 comme en témoigne l'« attestation d'avoir reçu l'information »'qu'elle a signée le 15/02/2015 ; ' le premier juge a admis à tort une perte de chance de survie de 40'% alors que le diagnostic, même tardif, n'a entraîné aucune conséquence sur les chances de survie eu égard à la nature de la pathologie de Mme [I] [G]. * * * Aux termes de leurs dernières conclusions d'intimés et aux fins d'appel incident notifiées par RPVA le 10/11/2022, auxquelles il est renvoyé par application de l'article 455 du code de procédure civile pour un plus ample exposé des moyens et sur l'évaluation des préjudices, les ayants-droit de Mme [I] [G] demandent à la cour de': - déclarer irrecevable la demande des appelants tendant à l'infirmation du jugement en ce qu'il retient un défaut d'information imputable à M. [W], - confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a : ' déclaré recevable l'action des demandeurs, ' constaté que M. [S] [G] est décédé le [Date décès 5]/2020 et que son épouse [B] [G] agit en son nom personnel et en représentation de son époux décédé, ' confirmé la parfaite recevabilité du rapport d'expertise judiciaire du 28/03/2017 établi par le docteur [E], ' dit que M. [W] a commis une erreur fautive de diagnostic responsable de la perte de chance de survie de Mme [I] [G], ' dit que M. [W] n'a pas fourni toute l'information nécessaire à sa patiente avant de pratiquer les endoscopies, ' condamné in solidum M. [W] et la MACSF à réparer le préjudice souffert par les ayants-droits, - infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a : ' retenu un taux de perte de chance de survie pour la défunte à hauteur de 40 %, ' fixé les préjudices de : * Mme [M] [R], en sa qualite d'héritière de sa mère, à la somme de 16.000,00 € pour les souffrances subies au titre de son préjudice d'affection, à la somme de 10.000,00 € et, s'agissant du préjudice économique, à la somme de 12.202,00 € au titre des frais funéraires de conservation et du permis d'inhumer, * Mme [B] [G] en son nom personnel et en sa qualité de représentante de son époux, au titre de leur préjudice d'affection, à la somme de 10.000,00 € chacun, * M. [X] [F], à la somme de 3.000,00 €, au titre de son préjudice d'affection, * M. [J] [N], à la somme de 3.000,00 €, au titre de son préjudice d'affection, * M. [Z] [N], à la somme de 1.500,00 €, au titre de son préjudice d'affection, * M. [A] [R], à la somme de 3.000,00 €, au titre de son préjudice d'affection, Et, statuant de nouveau, - retenir un taux de perte de chance de survie pour la défunte à hauteur de 70 %, - fixer les préjudices subis comme suit : ' en ce qui concerne le préjudice personnel de feue Mme [I] [G] (préjudice transmissible à son unique héritière, Mme [M] [R] épouse [N])': 48.000,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de Mme [M] [N] : * 28.000,00 € au titre du préjudice moral, * 30.505,00 € au titre du préjudice économique, ' en ce qui concerne les préjudices personnels des parents de la défunte, M. et Mme [G] : 56.000,00 € soit 28.000,00 € chacun, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [Z] [N] : 14.000,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [J] [N] : 14.000,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [A] [R] : 13.500,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [X] [F] : 13.500,00 €, En conséquence, - condamner in solidum M. [W] et la MACSF à procéder à l'indemnisation des intimés comme suit : ' en ce qui concerne le préjudice personnel de feue Mme [I] [G] (préjudice transmissible à son unique héritière, Mme [M] [R] épouse [N]) : 48.000,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de Mme [M] [N] : 28.000,00 € au titre du préjudice moral et 30.505,00 € au titre du préjudice économique, ' en ce qui concerne les préjudices personnels des parents de la défunte, M. et Mme [G] : 56.000,00 €, soit 28.000 € chacun, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [Z] [N] : 14.000,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [J] [N] : 14.000,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [A] [R] : 13.500,00 €, ' en ce qui concerne le préjudice personnel de M. [X] [F] : 13.500,00, À titre infiniment subsidiaire, - confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, En tout état de cause, - condamner in solidum M. [W] et la MACSF au paiement d'une somme de 5.000,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'appel, - débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions. Les ayants-droit de Mme [I] [G] développent en particulier les moyens suivants : - M. [W] n'a interjeté appel qu'au titre de l'erreur de diagnostic'mais non au titre du défaut d'information'; faute d'effet dévolutif, il est irrecevable à contester à présent ce chef du jugement entrepris (article 562 du code de procédure civile) ; - le jugement du tribunal administratif de Marseille ne constitue nullement une fin de non-recevoir à leur action devant la juridiction judiciaire car les manquements imputés à M. [W] sont bien antérieurs à l'intervention inutile du 30/07/2015 au titre de laquelle l'APHM a été condamnée'; - s'agissant de l'erreur de diagnostic, aucun des experts judiciaires intervenus n'indique que seule la pose d'une prothèse, solution mise en oeuvre par M. [W], était adaptée pour traiter le cancer de Mme [I] [G]'; - s'il a bien caractérisé le diagnostic fautif de M. [W], le premier juge n'a cependant pas apprécié la perte de chance de Mme [I] [G] à sa juste valeur, en ce que le taux de perte de chance n'est pas de 40'% mais plutôt de 70'% ; il est constant en tout cas que la perte de 1'éventualité de retarder l'échéance fatale ou d'avoir une fin de vie meilleure constitue une perte de chance réparable (Civ. 1, 07/07/2011, 10-19.766). * * * Assignée à personne habilitée le 10/08/2021 par acte d'huissier contenant dénonce de l'appel, la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône n'a pas constitué avocat. Par courrier du 25/10/2021, elle a indiqué n'avoir aucune créance à faire valoir. * * * La clôture a été prononcée le 13/09/2022. Le dossier a été plaidé le 27/09/2022 et mis en délibéré au 10/11/2022. MOTIFS DE LA DÉCISION Sur la nature de la décision rendue': L'arrêt rendu sera réputé contradictoire, conformément à l'article 474 du code de procédure civile. Sur l'absence alléguée d'effet dévolutif concernant le manquement au devoir d'information': Il résulte des dispositions de l'article 562 du code de procédure civile que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. En l'occurrence, le premier juge a alloué aux consorts [G] des montants d'indemnisation sans distinguer entre le défaut de soins et le défaut d'information reprochés à M. [W]. Le chiffrage étant global, M. [W] est nécessairement en droit de contester l'ensemble des fautes sur le fondement desquelles le premier juge a évalué le préjudice des consorts [G]. Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut à agir et de l'autorité de chose jugée s'attachant au jugement du tribunal administratif de Marseille du 23/03/2020 : Les instances successivement engagées contre l'Assistance Publique des Hôpitaux de [Localité 24] et contre M. [W] ne concernent pas les mêmes parties, de sorte qu'aucune autorité de chose jugée ne peut tenir en échec l'action des consorts [G] devant le juge judiciaire. D'autre part, les deux instances n'ont pas le même objet. Les ayants-droit de Mme [I] [G] ont agi devant le tribunal administratif de Marseille aux fins de condamnation de l'APHM du chef de manquements spécifiquement imputables au docteur [T]. Si ce préjudice distinct a incontestablement été réparé, il n'en reste pas moins que les ayants-droit de Mme [G] conservent un intérêt à voir statuer sur leurs prétentions fondées sur des manquements propres à M. [W]. Aucune fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir n'est donc recevable. Sur le défaut de soins : En vertu de l'article L.1142-1 § I du code de la santé publique, le professionnel de santé n'est responsable des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute de sa part. Cette responsabilité légale pesant sur le médecin est une responsabilité pour faute prouvée, dont la charge incombe à celui qui s'en prévaut. La faute est caractérisée lorsque le comportement n'est pas celui attendu d'un médecin diligent, c'est-à-dire lorsqu'il n'a pas donné au patient des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science à la date à laquelle les soins ont été prodigués. Cette obligation légale de moyens concerne également le diagnostic du médecin, ses investigations ou mesures préalables, le traitement et le suivi du traitement. La responsabilité du médecin peut être engagée pour une faute simple. Lorsque la faute du praticien est admise et qu'il est déclaré responsable du dommage corporel directement imputable à cette faute, la victime ne peut prétendre à une indemnisation au titre d'un manquement à l'obligation d'information. En tout état de cause, l'erreur de diagnostic ne constitue pas par elle-même une faute': le caractère fautif de l'erreur doit être démontré par référence aux circonstances dans lesquelles le diagnostic a a été posé. En l'occurrence, les éléments d'appréciation de la responsabilité de M. [W] résultent d'un rapport d'expertise du docteur [U], d'un second rapport d'expertise du docteur [E] et d'un avis rédigé par le docteur [O]. L'argument de M. [W] tiré du défaut de compétence technique du docteur [E], expert médical spécialisé dans les maladies de l'appareil digestif, n'emporte pas la conviction. Si aucun de ces trois documents n'a présenté de caractère réellement contradictoire au stade de son élaboration, tous ont été soumis à la libre discussion des parties concluantes. Le conseil de M. [W] ne formule aucune demande tendant à une expertise judiciaire civile comportant la diffusion d'un pré-rapport d'expertise et la possibilité d'adresser des dires à l'expert judiciaire désigné. Il est constant': - que Mme [I] [G], âgée de 51 ans lorsqu'elle a consulté M. [W] le 09/01/2015, présentait une dysphagie évoluant depuis plusieurs mois, qui étaient en rapport avec une sténose de l'oesophage localisée au tiers supérieur droit, - que la nature réelle de la sténose, en l'occurrence un cancer épidermoïde de l'oesophage, n'a été diagnostiquée qu'au lendemain des deux interventions chirurgicales pratiquées par le docteur [T] les 30 et 31/07/2015, et, - que le retard de diagnostic du carcinome épidermoïde de Mme [I] [G] correspond à la période de cinq mois comprise entre début février et début juillet 2015. Des rapports d'expertise du docteur [U] et du docteur [E], il résulte les éléments suivants: - avoir établi une relation de cause à effet entre une radiothérapie administrée près de vingt ans auparavant et la sténose était contestable dans la mesure où, dans cette hypothèse, la sténose apparaît dans un délai moyen inférieur à cinq ans et ne peut en aucun cas être de vingt ans. Il est établi en revanche que les antécédents de radiothérapie favorisent les cancers de l'oesophage post-radique, l'intervalle de temps entre la radiothérapie et le cancer étant alors de dix ans, ce délai s'inscrivant dans une amplitude de 5 à 25 ans ; - déduire le 03/02/2015 de ce que les biopsies auxquelles il a été procédé le 28/01/2015 n'ont mis en évidence aucune tumeur'maligne ne dispensait pas M. [W] de procéder systématiquement, pour chacune des sept endoscopies ultérieures, à des biopsies multiples ' leur négativité pouvant n'être que le signe que de ce qu'elles étaient intervenues dans une zone saine'; le docteur [O] rejoint sur ce point le docteur [U]'; - constater, à l'issue du transit oeso-gastro-duodénal (TOGD) du 03/02/2015 que la sténose était irrégulière, excentrée et ulcérée, aurait dû conduire à admettre la probabilité ou au moins la possibilité de la malignité de la sténose'; - interpréter correctement le scanner du 05/02/2015 aurait dû conduire à écarter le diagnostic de sténose radique, l'image intra-oesophagienne d'allure tissulaire de 36 mm de hauteur étant suspecte et évocatrice d'un cancer'; le docteur [O] lui-même admet l'évidence de la fistule dès la réalisation du TOGD et du scanner au début du mois de février 2015'; - recourir au PET-scan et à l'endosonographie, sans limiter l'imagerie au scanner et au TOGD, aurait permis de mettre en évidence la présende d'une tumeur cancéreuse et d'invalider le diagnostic trop rapide de sténose radique'; - constater une lésion de l'oesophage supérieur appelait la réalisation d'une bronchoscopie à bref délai en début d'année 2015 et non pas en juin. L'erreur fautive de diagnostic de M. [W] est caractérisée en définitive au regard': - des investigations qui ont été effectuées et dont les résultats ont été mal interprétés, - des investigations qui n'ont pas été effectuées'et qui auraient dû l'être, et, - de l'absence de mise en perspective des différentes données recueillies sur l'état de santé de Mme [I] [G]. Sur le défaut d'information': Par application des articles L.1111-2 et R.4127-35 du code de la santé publique, le médecin est tenu de donner à son patient sur son état de santé une information portant sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Délivrée au cours d'un entretien individuel, cette information doit être loyale, claire et appropriée. La charge de la preuve de son exécution pèse sur le praticien, même si elle peut être rapportée par tous moyens. La charge de la preuve de l'exécution de l'obligation légale d'informer incombe au médecin. Elle implique que le défaut d'information sur les risques inhérents à un acte de soin ou de traitement ait fait perdre au patient une chance d'éviter le dommage résultant de la réalisation de l'un de ces risques en refusant qu'il soit pratiqué. Pour que la perte de chance d'échapper au risque de l'acte projeté soit réparable, il convient en l'occurrence de déterminer si, mieux informée sur les risques s'attachant à l'endoscopie et à la dilatation oesophagienne, Mme [I] [G] aurait réellement refusé la réalisation de l'acte médical. Datée du 15/02/2015, l'attestation d'avoir reçu l'information signée par Mme [I] [G] est particulièrement elliptique, et ne mentionne pas l'existence d'un risque infectieux associé à l'endoscopie. Le docteur [E] souligne en outre que la dilatation oesophagienne pratiquée le 16/02/2015 n'a été quant à elle précédée d'aucune information écrite, et M. [W] ne prouve pas plus qu'il ne soutient avoir attiré l'attention de sa patiente sur le risque de perforation de l'oesophage. Le défaut d'information est avéré. Sur l'indemnisation des préjudices subis': Le premier juge a justement fait observer que le préjudice réparable est circonscrit au préjudice consécutif aux seuls actes de soins réalisés par M. [W] au cours du premier semestre 2015, et ne se confond pas avec le préjudice que le juge administratif de Marseille a réparé. Par suite, la demande de M. [W] tendant à déduire les dommages-intérêts alloués par le juge administratif du montant des sommes allouées par la cour ne peut prospérer. Par ailleurs, le préjudice subi ne peut être apprécié qu'en termes de perte de chance, définie comme la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable. Elle doit être mesurée à la valeur de la chance perdue et ne peut être égale à la valeur de cette chance si elle s'était réalisée. Elle est liée à la notion d'aléa, celui qui est susceptible de générer un gain. Il revient au juge du fond de tenir compte non seulement de l'existence de l'aléa mais aussi de son degré, c'est-à-dire du caractère plus ou moin sérieux de la chance perdue. Rappelant que la localisation du cancer de l'oesophage au tiers supérieur est d'une particulière gravité, le docteur [U] estime que le taux de survie moyen, compris entre 7'% et 10'% à 5 ans, n'aurait guère pu dépasser un an. Le docteur [E] retient pour sa part un taux de perte de chance de survie supérieur, compris entre 30 et 67'% à 5 ans. La cour retient un taux de perte de chance de survie de 20'% à 5 ans. Précision étant faite, comme souligné par le docteur [O], que Mme [I] [G] aurait pu éviter la chirurgie oesophagienne ' jugée douloureuse et inutile ' si le diagnostic de carcinome avait été posé dès le mois de février 2015. L'appréciation de la perte de chance de survie n'est pas réductible à la possibilité de vivre plus': elle inclut la possibilité de vivre mieux, comprise en l'occurrence comme l'accès de Mme [I] [G] à des soins palliatifs et à une fin de vie sereine, entourée de l'affection des siens. Mme [M] [R] épouse [N] ès qualité d'ayant-droit de feu Mme [I] [G], se voit allouer la somme de 10.000,00 € au titre des souffrances endurées par elle de son vivant. La cour alloue les montants suivants aux ayants-droit de Mme [I] [G]'au titre de leur préjudice d'affection': - Mme [M] [R] épouse [N]': 6.250,00 € - Mme [B] [C] épouse [G] ès qualité d'ayant-droit de feu Mme [I] [G]': 6.250,00 € - M. [X] [F]': 1.875,00 € - M. [J] [N]': 1.875,00 € - M. [Z] [N] : 937,50 € - M. [A] [R]': 1.875,00 € Mme [M] [R] épouse [N] produit un courrier du 30/11/2015 de l'APHM relatif à la facturation des frais de séjour en chambre mortuaire (45,00 € / jour). Elle produit également copie du permis d'inhumer délivré le 27/09/2017 par le procureur de la République d'Aix-en-Provence. Elle produit enfin un bordereau de situation des sommes dues édité par la Direction Générale des Finances Publiques, et justifie de ce qu'il lui est réclamé une somme de 30.505,00 €. Elle se verra donc allouer un montant de 7.626,50 € au titre du préjudice économique. Sur les demandes annexes': Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime doivent être confirmées. M. [W] et la MACSF succombent partiellement dans leurs prétentions et supporteront la charge des dépens d'appel, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile. L'équité ne justifie pas particulièrement de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Confirme le jugement entrepris, - hormis sur le taux de perte de chance de survie de Mme [I] [G], - hormis sur le montant de l'indemnisation des victimes et les sommes leur revenant. Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant, Dit que M. [K] [W] a commis une erreur de diagnostic responsable de la perte de chance de survie de 20'% de Mme [I] [G]. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF à payer à Mme [M] [R] épouse [N], agissant ès qualité d'ayant-droit de feu Mme [I] [G], la somme de 10.000,00 € (dix mille euros) au titre des souffrances endurées par Mme [I] [G] de son vivant. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF à payer à Mme [M] [R] épouse [N] la somme de 6.250,00 € (six mille deux cent cinquante euros) au titre de son préjudice d'affection. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF à payer à Mme [M] [R] épouse [N] la somme de 7.626,50 € (sept mille six cent vingt six euros et cinquante cents) au titre de son préjudice économique. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF à payer à M. [Z] [N] et à Mme [M] [R] épouse [N], agissant ès qualité de représentants légaux de leur enfant mineur, [J] [N], la somme de 1.875,00 € (mille huit cent soixante quinze euros) au titre de son préjudice d'affection. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF à payer à M. [Z] [N] la somme de 937,50 € (neuf cent trente sept cent euros et cinquante cents) au titre de son préjudice d'affection. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF à payer à M. [X] [F] la somme de 1.875,00 € (mille huit cent soixante quinze euros) au titre de son préjudice d'affection. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF à payer à M. [A] [R]'la somme de 1.875,00 € (mille huit cent soixante quinze euros) au titre de son préjudice d'affection. Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Condamne in solidum M. [K] [W] et la MACSF aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT