LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Yannick X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 19 mars 2015, qui, pour excès de vitesse, l'a déclaré pécuniairement redevable de trois amendes de 150 euros chacune ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 février 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article
567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller STEPHAN, les observations de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LACAN ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles
121-2 et
121-3 du code pénal, L. 121-3, R. 413-14, § 1, alinéa 1, du code de la route, 19 de l'arrêté modifié du 5 novembre 1984, préliminaire, 388,
512,
529-10,
802,
591 et
593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée in limine litis par l'avocat de M. X... et a confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions qui ont déclaré M. X... pécuniairement redevable de trois amendes de 150 euros pour excès de vitesse ;
" aux motifs propres qu'il est constant que trois véhicules loués par la société Cailleau Pneus, dont M. X... est le représentant légal ont été photographiés en excès de vitesse les 19 février 2013, 28 juin 2013 et 3 juillet 2013 ; qu'en cause d'appel, M. X... reprend son exception de nullité ; qu'il soutient que préalablement à sa mise en cause en tant que locataire du véhicule incriminé, l'officier du ministère public aurait dû transmettre l'avis de contravention aux sociétés CGL et Banque Populaire Lorraine Champagne, propriétaires des véhicules, puis que celles-ci auraient dû former une requête en exonération en désignant leur locataire ; que cet argument ne saurait prospérer, dès lors que ces sociétés ont désigné comme locataire la société Cailleau Pneus, le fait qu'elles l'aient fait sans respecter la procédure de l'article
529-10 du code de procédure pénale étant sans incidence sur la validité de la transmission de l'identité du locataire à l'officier du ministère, et ne faisant pas grief audit locataire ; qu'en effet, l'article
L. 121-3 du code de la route institue une responsabilité pécuniaire qui pèse sur le locataire lorsque le véhicule incriminé est loué (avant dernier alinéa) et l'article
529-10 du code de procédure pénale prévoit que l'avis d'amende forfaitaire est adressé au titulaire du certificat d'immatriculation ou aux personnes visées aux trois derniers alinéas de l'article
L. 121-2 du code de la route, lesquelles sont le locataire, le nouveau propriétaire, et le représentant légal de la personne morale propriétaire ; que, dès lors, il n'était nullement nécessaire que les sociétés propriétaires formulent une requête en exonération en bonne et due forme, ce que les textes susmentionnés n'imposent nullement, puisque l'officier du ministère public disposait des coordonnées complètes du locataire et pouvait donc lui adresser directement l'avis prévu par la loi ; que l'exception sera donc rejetée comme en première instance ; qu'au fond, M. X... n'invoque aucune des causes d'exonération prévues par l'article
529-10 du code de procédure pénale si bien que la décision sera donc confirmée quant à sa responsabilité pécuniaire ;
" et aux motifs réputés adoptés qu'il ressort des avis de contravention du 21 février 2013 et du 5 juillet 2013 adressés à M. le représentant légal de la société Cailleau Pneus, que les sociétés de crédit-bail Banque Populaire Lorraine Champagne et CGL l'ont désigné comme étant le conducteur du véhicule au moment de l'infraction ; que le prévenu a formulé pour chacune des infractions une requête en exonération les 27 février 2013 et 15 juillet 2013 ; que M. X... soulève l'irrecevabilité de l'action publique en s'appuyant sur les dispositions de l'article
529-10 du code de procédure pénale qui prévoit que la requête en exonération prévue par l'article
529-2 du code de procédure pénale ou la réclamation prévue par l'article
530 du code de procédure pénale n'est recevable que si elle est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et si elle est accompagnée de certains documents visés dans ledit article ; que ce dernier précise ; « l'officier du ministère public vérifie si les conditions de recevabilité de la requête ou de la réclamation prévues par le présent article sont remplies » ; que le prévenu soutient en l'espèce qu'en vertu du texte précité, les sociétés Banque Populaire Lorraine Champagne et CGL détentrices des véhicules, ne pouvaient s'exonérer de formuler une requête en exonération auprès de l'officier du ministère public à charge pour ce dernier d'en apprécier la recevabilité ; que cette requête constituait le préalable à sa désignation en sa qualité de locataire du véhicule incriminé ; qu'ainsi, en raison de l'absence dans la procédure en cours de la requête en exonération présentée par les sociétés susvisées propriétaires des véhicules incriminés, il convient donc de constater que les dispositions prévues par l'article
529-10 du code de procédure pénale n'ayant pas été respectées par ces dernières, l'action publique devra être déclarée irrecevable ; qu'il convient de constater dans les deux dossiers de contravention l'absence de la requête en exonération ou la réclamation prévue par le texte susmentionnée et formulée par les sociétés détentrices des véhicules incriminés ; que, néanmoins, que par soit-transmis en date du 26 mars 2014 versé contradictoirement aux débats, M. l'officier du ministère public d'Angers fait parvenir à la juridiction deux documents ressortant de la consultation du fichier SIV (système des immatriculations des véhicules) et portant sur les véhicules immatriculés 692 ABX 49 et CN-773- ER ; qu'en l'espèce, sur la pièce n° 1 il apparaît que le titulaire du véhicule 692 ABX 49 est CGL et que le locataire est la société Cailleau Pneus domiciliée 17, quai Félix Faure à Angers ; que sur la pièce n° 2, il est mentionné que le titulaire du véhicule CN-773- ER est Banque Populaire Lorraine Champagne dont l'adresse est 3 rue François de Curel 57021 Metz cedex 01 et que le locataire est Cailleau Pneus demeurant à l'adresse supra ; qu'il est également patent et non contesté aux débats que la société MPPI était locataire du véhicule ci-dessus mentionné lors du relevé de l'infraction ; qu'aux termes de l'article 19 de l'arrêté du 5 novembre 1984 relatif à l'immatriculation des véhicules et modifié par l'arrêté du 29 août 2002 ; que « les sociétés ou entreprises individuelles spécialisées dans la location sur une durée de deux ans ou plus ou dans le crédit-bail doivent immatriculer leurs véhicules dans le département du domicile du locataire.... A cet effet, la société ou entreprise individuelle de location doit élire domicile au siège de l'utilisateur, locataire du véhicule. Dans ce cas, le nom et le domicile du locataire ou l'adresse de l'établissement d'affectation du véhicule par le locataire doivent être indiqués sur la carte grise en sus du nom de la société ou de l'entreprise propriétaire, avec une mention indiquant le type de location du véhicule : OA (option d'achat) ou LD (longue durée) » ; qu'il convient de constater que figurent sur les documents n° 1 et n° 2 susvisés dans les rubriques « titulaire » le nom des sociétés détentrices des véhicules incriminés et dans la rubrique « locataire » l'intitulé de la société Cailleau Pneus ; qu'en l'espèce, les fiches synthétiques susmentionnées désignent donc bien, et ce conformément aux dispositions des arrêtés susvisés, la société Cailleau Pneus comme preneur d'un bail de location des véhicules immatriculés 692 ABX 49 et CN-773- ER ; que, de même, aux termes de l'article
L. 121-3, alinéa 4, du code de la route ; que « lorsque le véhicule était loué à un tiers, la responsabilité pécuniaire incombe au locataire sous les réserves prévues au, 1er alinéa, de l'article
L. 121-2 » ; qu'ainsi, la responsabilité de l'infraction relevée à l'encontre du véhicule incriminé pèse uniquement sur le locataire parfaitement identifié en tant que tel en vertu de la fiche synthétique du Système d'immatriculation des véhicules ; que, dès lors, il appartenait à l'officier du ministère public saisi de la poursuite de l'infraction de transmettre directement l'avis de contravention au seul locataire du véhicule incriminé au moment des faits et non au loueur du dit véhicule qui ne pouvait être tenu responsable de l'infraction commise ; qu'en l'espèce, la connaissance par l'officier du ministère public de l'identité du locataire figurant sur le certificat d'immatriculation l'exonérait de la transmission de l'avis de contravention au loueur du véhicule ; qu'ainsi, il n'a pas méconnu les dispositions de l'article
529-10 du code de procédure pénale ; que la procédure suivie a donc été régulièrement engagée directement à l'encontre de M. X... en sa qualité de représentant légal de la société Cailleau Pneus ; qu'en tout état de cause ladite procédure ne saurait faire grief au prévenu ; que, dès lors, le moyen soulevé ne pourra qu'être rejeté ; que M. X... est bien poursuivi en qualité de redevable de l'amende encourue pour les deux infractions d'excès de vitesse relevées le 19 févier 2013 et le 3 juillet 2013 ; qu'il ressort des dispositions de l'article
L. 121-3, alinéa 3, du code de la route que « lorsque le certificat d'immatriculation du véhicule est établi au nom d'une personne morale, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe, sous les réserves prévues au premier alinéa de l'article
L. 121-2, au représentant légal de cette personne morale » ; que le prévenu est bien le représentant légal de la société Cailleau Pneus locataire des véhicules à l'encontre desquels a été relevée une infraction d'excès de vitesse ; que, par ailleurs, le prévenu ne présente aucun élément de preuve de la nature de celles qui sont exigées par l'article
537 du code de procédure pénale ; que, par ailleurs, il n'établit pas aux termes, de l'alinéa 1, de l'article
L. 121-3 du code de la route « l'existence d'un vol ou de tout autre événement de force majeure ou qu'il n'apporte tous éléments permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur véritable de l'infraction » ; qu'il convient donc, en application de l'article
L. 121-3 du code de la route de le déclarer redevable pécuniairement de l'amende encourue pour les deux contraventions d'excès de vitesse susvisées ; que M. X... est cité devant la juridiction de céans en sa qualité de représentant légal de la société Cailleau Pneus sise 17, quai Félix Faure à Angers, aux fins d'être reconnu pénalement responsable de l'amende encourue pour l'infraction d'excès de vitesse relevée le 28 juin 2013 à Angers (avenue Victor Chatenay, direction Angers vers Paris), par procès-verbal n° 3589893290, à l'encontre du véhicule immatriculé CE-889- EH ; que le prévenu a contesté être l'auteur de l'infraction reprochée, rappelant que le véhicule en cause appartenait à la société Cailleau Pneus ; que, de même, il résulte des débats de l'audience et des pièces versées à la procédure que le conducteur du véhicule responsable de cet excès de vitesse n'a pu être identifié ; qu'il convient, dès lors, de requalifier l'incrimination d'excès de vitesse en redevable pécuniaire de l'amende encourue pour excès de vitesse sur la base de l'article
L. 121-3 du code de la route ; que les faits étant ainsi établis à l'encontre de M. X... en qualité de représentant légal de la société Cailleau Pneus, il conviendra de le déclarer redevable pécuniairement de l'amende encourue ; que M. X... a versé des consignations d'un montant total de deux cent soixante et onze euros (271 euros) auprès du trésor public, lors de ses requêtes en exonération d'amendes forfaitaires des 27 février 2013, 5 juillet 2013 et 15 juillet 2013 ; que le 7 mars 2013 une somme de soixante-huit euros (68 euros) ; que le 11 juillet 2013 une somme de cent trente-cinq euros (135 euros) ; que le 17 juillet 2013 une somme de soixante-huit euros (68 euros) ; que ladite somme consignée devra venir en déduction du montant de l'amende prononcée par la juridiction de proximité ;
" 1°) alors que les juridictions répressives ne peuvent statuer qu'à l'égard des personnes visées par la citation qui les a saisies ; que M. X... était poursuivi devant la juridiction d'appel en qualité de personne physique et non en sa qualité de représentant légal de la société Cailleau Pneus ; qu'en déclarant redevable pécuniairement M. X... en ce qu'il est représentant légal de ladite société alors même qu'il n'a pas été cité en cette qualité, la juridiction d'appel a excédé les limites de sa saisine et a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors que l'avis d'amende forfaitaire concernant une des contraventions mentionnées à l'article
L. 121-3 du code de la route ne peut être adressé à une autre personne que le titulaire du certificat d'immatriculation et propriétaire du véhicule sur la seule déclaration de celui-ci ; que cet avis doit d'abord être adressé au propriétaire du véhicule à charge pour ce dernier de désigner ensuite le locataire ; qu'en retenant, en l'espèce, que l'avis de contravention litigieux avait pu être adressé au représentant légal de la société Cailleau Pneus, les sociétés CGL et Banque Populaire Lorraine Champagne, propriétaires des véhicules, l'ayant désigné comme conducteur au moment de l'infraction, au motif inopérant qu'il ressortait des documents issus de la consultation du fichier du système d'immatriculation des véhicules que la société Cailleau Pneus était bien locataire du véhicule au moment du relevé de l'infraction, quand les avis de contravention auraient d'abord dû être adressés aux propriétaires des véhicules à charge pour ces derniers de désigner ensuite le locataire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés ;
" 3°) alors qu'une procédure de contravention mal dirigée par l'officier du ministère public en l'état des informations dont il dispose au moment de l'infraction, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne poursuivie, laquelle n'a pas à rapporter la preuve d'un grief pour en obtenir l'annulation ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes précités " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que trois véhicules ont été contrôlés en excès de vitesse, respectivement le 19 février 2013, à Saint-Barthelemy d'Anjou, le 28 juin 2013, à Angers, et le 3 juillet 2013, à Les Allauds ; que l'un de ces véhicules a été identifié comme étant la propriété de la société Cailleau Pneus, par ailleurs locataire des deux autres véhicules, appartenant, pour l'un, à la société CGL et, pour l'autre, à la Banque Populaire Lorraine Champagne ; que M. X..., représentant légal de la société Cailleau Pneus, a formulé des requêtes en exonération des trois amendes forfaitaires dont les avis de contravention lui avaient été adressés ; que, devant les juges du fond, il a soulevé l'irrecevabilité de l'action publique en raison du non respect des dispositions de l'article
529-10 du code de procédure pénale, au motif que les avis de contraventions concernant les véhicules loués auraient dû être adressés aux sociétés propriétaires desdits véhicules, à charge pour celles-ci de formuler une requête en exonération ;
Sur le moyen pris, en sa première branche :
Attendu que, faute d'avoir été proposé devant les juges du fond, le grief, critiquant l'irrégularité de la citation délivrée au prévenu, est nouveau, mélangé de fait et de droit, et, comme tel, irrecevable ;
Sur le moyen pris, en ses deuxième et troisième branches :
Attendu que, pour rejeter l'exception qui lui était soumise et déclarer M. X... pécuniairement redevable, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen, dès lors que conformément aux articles
L. 121-2 et
L. 121-3 du code de la route, le ministère public peut poursuivre directement, en tant que pécuniairement redevable de l'amende encourue pour vitesse excessive, le locataire mentionné sur le certificat d'immatriculation du véhicule contrôlé, dont les informations sont reprises officiellement par le service d'immatriculation des véhicules ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente et un mars deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.