1. |
Dans l'affaire qui nous occupe aujourd'hui, le requérant est un fonctionnaire entré au service de la traduction de la Commission en octobre 1958 en tant que réviseur. Il a été titularisé au grade LA 5 en décembre 1962 et promu au grade LA 4 par une décision du mois de septembre 1963. Par une décision du mois de mars 1981, il a été nommé chef d'équipe — apparemment sans changement d'échelon. A plusieurs reprises, il a été chargé d'assurer par intérim les fonctions de chef de la division française du service de la traduction, en particulier (ainsi que cela ressort d'une décision du mois de février 1984) pour les périodes du 1er mai jusqu'au 30 septembre 1981 et du 1er juin jusqu'au 24 octobre 1982. Lorsque ce poste est devenu vacant, après le départ du titulaire, le requérant s'est également vu confier la suppléance de ce dernier pour la période du 20 janvier au 16 mai 1984. |
2. |
Par avis de vacance COM/407/84, la Commission a informé le personnel que le poste précité de chef de la division française de traduction était à pourvoir. Onze personnes ont posé leur candidature, dont le requérant. |
3. |
Dans un premier temps, ces candidatures ont été examinées par un comité consultatif dont la saisine est prévue par une décision de juillet 1980 lorsqu'il s'agit de nominations aux grades A 2 et A 3 et qui se compose — comme l'a expliqué la Commission — de quatre membres, à savoir le secrétaire général de la Commission, le directeur général de l'administration et du personnel, un directeur général ou un chef de service désigné par le président de la Commission et un représentant du commissaire chargé du personnel et de l'administration (le requérant commet une erreur lorsqu'il indique que ce comité se compose du secrétaire général de la Commission, du directeur général de l'administration et du personnel et du directeur général de la direction générale de laquelle le poste vacant relève). A l'issue de son examen, le comité a désigné, par ordre alphabétique, cinq candidats (dont le requérant), qui « devraient être particulièrement pris en considération ». L'un de ces candidats, M. Dubois, a ensuite été nommé au poste vacant par voie de promotion par décision du 16 mai 1984. |
4. |
C'est contre cette décision que le requérant a introduit une réclamation le 22 juin 1984. Dans cette réclamation, il alléguait en premier lieu que la Commission n'avait pas procédé à un examen comparatif régulier des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils avaient fait l'objet, examen qui est prévu à l'article 45 du statut. Le requérant faisait en effet valoir que, dans le cas de ses concurrents, la Commission avait examiné les derniers rapports de notation établis en application de l'article 43 du statut, mais qu'elle ne l'avait pas fait dans son propre cas (car le dernier rapport de notation le concernant, qui lui était parvenu le 16 mai 1984 et qui avait été modifié à la suite de ses observations, le 28 mai 1984, ne se trouvait pas dans son dossier personnel au moment où a été prise la décision). En second lieu, le requérant faisait grief à la Commission de ne pas lui avoir communique les motifs pour lesquels elle avait rejeté sa candidature. C'est pour ces raisons qu'il a demandé l'annulation de la décision implicite de rejet de sa candidature ainsi que l'annulation de la décision portant nomination de M. Dubois. |
5. |
Nous savons que cette réclamation n'a pas abouti. Dans sa décision du 7 novembre 1984, la Commission a explicitement déclaré au requérant qu'elle avait procédé à un nouvel examen des mérites des candidats en prenant également en considération le dernier rapport de notation le concernant, qu'elle en avait conclu que le poste vacant devait être pourvu par promotion de M. Dubois, qu'elle avait donc confirmé sa décision du 16 mai 1984 et décidé qu'il n'y avait pas lieu d'annuler la nomination de M. Dubois. Au surplus, la Commission attirait l'attention du requérant sur le fait que, selon la jurisprudence applicable en la matière, l'autorité investie du pouvoir de nomination n'est pas tenue de motiver les décisions de promotion à l'égard des candidats non promus. |
6. |
A la suite de cela, le requérant a introduit un recours contentieux le 31 janvier 1985. Ce recours tend — aux termes des conclusions du requérant — à l'annulation des actes suivants:
Nous examinerons maintenant en détail ce qu'il y a lieu de penser de ces conclusions que la Commission conteste. |
7. |
Ainsi que vous le savez, la Commission a formulé des objections quant à la recevabilité de la requête — sans toutefois soulever expressément l'exception d'irrecevabilité. Il convient de commencer par examiner ces objections et les questions connexes. |
8. |
L'exposé des faits aura permis de comprendre — et cela ressort clairement de la décision adressée au requérant à la suite de sa réclamation — que la Commission a procédé, le 24 octobre 1984, à « un nouvel examen des mérites des candidats » et qu'elle en a tiré la conclusion « qu'il y avait lieu de pourvoir à l'emploi publié dans l'avis de vacance COM/407/84 par la promotion de M. Henry Dubois ». |
9. |
On peut donc dire que la décision du 16 mai 1984 a été réexaminée le 24 octobre 1984 et — selon les termes de la Commission — qu'elle a été remplacée, à cette date, par une autre décision tendant au même résultat. Cela signifie que la décision mentionnée dans le premier chef de conclusions n'existe plus à proprement parler et qu'il n'est donc d'aucune utilité d'agir contre cette décision car — à supposer qu'elle soit annulée — le poste que le requérant vise à obtenir au moyen du présent recours ne deviendrait pas vacant pour autant. En conséquence, si on s'attache à la lettre du premier chef de conclusions et si on envisage ce chef de conclusions comme une demande isolée, on peut parfaitement soutenir qu'il est irrecevable à cet égard. |
10. |
Le fait que le recours porte aussi sur la décision du 16 mai 1984 peut, à la rigueur, se comprendre — et éventuellement se justifier — dans la mesure où la décision susmentionnée, statuant sur la réclamation administrative, fait elle-même état d'une «confirmation» de la décision du 16 mai 1984 — ce qui, selon les dires mêmes de la Commission, prête à confusion. |
11. |
Ce chef de conclusions — à supposer qu'il soit envisagé isolément — se heurte, lui aussi, à des objections fondées. En effet, considéré au sens strict, il implique de constater qu'il aurait fallu à vrai dire donner suite à la candidature du requérant et le nommer au poste vacant. Or, une telle constatation intervenant dans le cadre d'une nomination à un emploi vacant par voie de promotion n'a pas sa place par principe dans une procédure juridictionnelle. Conformément à l'article 45 du statut, l'autorité investie du pouvoir de nomination dispose, en effet, d'un pouvoir d'appréciation et la Cour ne peut certainement pas substituer son appréciation à celle de l'administration. Nous voudrions rappeler les arrêts rendus dans les affaires 27/63 ( 1 ), 188/73 ( 2 ), 280/80 ( 3 ) et 173/84 ( 4 ) (dans lesquels la Cour a souligné le large pouvoir discrétionnaire dont dispose l'administration quant aux décisions prévues à l'article 45 du statut); nous rappelons aussi l'affaire 62/75 ( 5 ), dans laquelle la Cour a mis l'accent sur le fait qu'il appartenait à l'autorité investie du pouvoir de nomination de choisir la méthode adéquate pour l'examen comparé des mérites prévu à l'article 45 du statut. Nous rappelons enfin tout particulièrement l'arrêt rendu dans l'affaire 282/81 ( 6 ) la Cour y a clairement précisé que, dans une procédure de promotion, elle ne saurait substituer son appréciation des qualifications des candidats à celle de l'autorité investie du pouvoir de nomination. Or, comme le requérant n'a pas démontré de façon concluante que, en l'espèce, l'autorité investie du pouvoir de nomination disposait d'une marge d'appréciation si étroite qu'elle ne pouvait légitimement envisager aucune autre candidature que celle du requérant pour occuper le poste vacant par voie de promotion, force est de constater que le deuxième chef de conclusions est bel et bien irrecevable. |
12. |
Eu égard à ce chef de conclusions, la Commission renvoie à l'article 91, paragraphe 2, du statut, en vertu duquel un recours devant la Cour de justice n'est recevable que si l'intéressé a préalablement, et dans les délais prévus, formé une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision qui lui fait grief, et si sa réclamation n'a pas abouti. Étant donné que la réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, vise la décision faisant grief, c'est-à-dire la décision dont l'annulation est demandée, il est clair — poursuit la Commission — que cette condition fait défaut en ce qui concerne la décision du 24 octobre 1984, car le requérant n'a, en fait, formé une réclamation que contre la décision du 16 mai 1984. |
13. |
Sur ce point, on peut sans doute admettre le raisonnement de la Commission et, par voie de conséquence, être tenté de croire que le troisième chef de conclusions doit, lui aussi, être considéré comme irrecevable pour inobservation de la condition édictée à l'article 91, paragraphe 2, du statut. On ne saurait effectivement méconnaître le fait que la réclamation introduite par le requérant reposait essentiellement sur l'argument suivant: la décision du 16 mai 1984 n'aurait pas été régulièrement arrêtée car le dernier rapport de notation concernant le requérant faisait défaut au moment où elle a été adoptée. La Commission a, par la suite — selon ses dires —, remédié à cette irrégularité lorsqu'elle a adopté la décision du 24 octobre 1984. On pourrait donc affirmer que, à cette date, une nouvelle décision avait été prise sur la base de faits nouveaux et qu'elle aurait dû faire l'objet d'une nouvelle réclamation car — comme le montre la procédure contentieuse — les critiques formulées contre cette nouvelle décision se présentent de façon différente. |
14. |
Si nous hésitons néanmoins à vous suggérer de conclure à l'irrecevabilité du troisième chef de conclusions, c'est d'abord parce que le but de la réclamation formée par le requérant était l'annulation de la décision de nomination et parce qu'on ne saurait, certes, pas prétendre que sa réclamation a abouti à une solution sur ce point. D'autre part — et c'est un aspect sur lequel le requérant a tout particulièrement mis l'accent —, la décision statuant sur sa réclamation dit bel et bien que la décision du 16 mai 1984 a été confirmée. Cela pouvait parfaitement donner l'impression que — comme la décision confirmée avait déjà fait l'objet d'une réclamation — il était inutile d'introduire une seconde réclamation qui aurait eu pour effet d'allonger la durée de la procédure. En présence d'une telle situation, il paraît effectivement difficile d'admettre que l'on puisse imposer des exigences strictes quant à la procédure administrative préalable et sanctionner ensuite leur inobservation par l'irrecevabilité du recours. |
15. |
A cet égard, on peut affirmer, sur le plan des principes, que, selon le système du statut, tel qu'il ressort des articles 90 et 91, le contrôle juridictionnel ne s'exerce que sur les mesures qui font grief, c'est-à-dire les décisions administratives initiales, mais non les décisions de rejet d'une réclamation qui laissent intactes les décisions initiales. A supposer donc qu'on interprète le quatrième chef de conclusions à la lumière de ce principe, on s'aperçoit tout de suite au demeurant, si on s'attache à la décision contre laquelle la réclamation était dirigée, que, interprété de cette façon, ce chef de conclusions se heurte à certaines objections quant à sa recevabilité car — comme nous l'avons déjà montré — il est effectivement dépourvu d'objet par suite du remplacement de la décision du 16 mai 1984 par une nouvelle décision. Il est vrai que l'on peut aussi imaginer, puisqu'une nouvelle décision de nomination a été notifiée avec la décision statuant sur la réclamation, que le quatrième chef de conclusions doit être compris en ce sens qu'il vise cette nomination d'un autre fonctionnaire au poste vacant, c'est-à-dire la décision confirmative du 24 octobre 1984. Or, la recevabilité de ce chef de demande, ainsi interprété, ne rencontre finalement aucune objection décisive — comme nous l'avons déjà montré. |
16. |
5. Force est donc de conclure que la requête peut difficilement être considérée comme irrecevable dans sa totalité, mais tout au plus eu égard aux deux premiers chefs de conclusions. |
17. 1. |
Sous le titre « Violation de l'article 45 du statut », le requérant a allégué que, selon la jurisprudence applicable en la matière, on pouvait critiquer le fait que la décision du 16 mai 1984 avait été adoptée malgré l'absence, dans le dossier du requérant, de son dernier rapport de notation. Le requérant a ensuite objecté qu'aucun représentant du personnel n'avait participé au comité consultatif saisi à cette occasion et que, en outre, la constitution de ce comité était en l'espèce problématique dans la mesure où un directeur général (le directeur général de l'administration et du personnel dont relève le poste à pourvoir) y avait cumulé deux fonctions. Ensuite, le requérant a également fait valoir que, la décision du 24 octobre 1984 faisant état d'une confirmation de la décision du 16 mai 1984, une décision qui était nulle en raison de l'irrégularité en question ne pouvait pas être confirmée. Enfin, au cours de l'audience, le requérant a également objecté — si nous avons bien compris — que, en l'espèce, il avait été fait application de l'article 45 du statut sans que les critères sur lesquels devait se fonder l'appréciation des qualifications et de l'expérience des candidats aient été préalablement définis. Ces griefs appellent, selon nous, les observations suivantes. |
18. |
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19. |
Nous ne nous rallierons pas non plus à la thèse du requérant selon laquelle il n'aurait pas été possible de confirmer, par la décision du 24 octobre 1984, la décision de mai 1984 qui, selon le requérant, était nulle (ou illégale — sa terminologie à cet égard n'étant pas uniforme). Un acte irregulier — il ne s'agit certainement de rien de plus en ce qui concerne la décision de mai 1984 — peut naturellement être adopté une seconde fois par la suite — sans être entaché d'irrégularité. Selon la thèse de la Commission, c'est bien ce qui s'est produit et, même si elle a utilisé à ce propos le terme « confirmé » qui prête à confusion, ce seul fait ne permet pas, à notre avis, d'inférer quoi que ce soit au sujet de la régularité de l'acte « confirmatif ». |
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21. |
Si on veut néanmoins analyser cet argument — puisqu'une décision de principe de la Commission prévoit la saisine de ce comité lors de nominations aux grades A 2 et A 3 et puisque l'intervention dudit comité, au printemps 1984, peut également avoir influencé dans une certaine mesure la décision « confirmative » du mois d'octobre 1984 (nous reviendrons sur ce point) —, il apparaît rapidement qu'il n'en résulte aucun grief pertinent contre la décision de promotion adoptée par la Commission. En effet, d'une part, selon les explications de la Commission, il n'est nullement exact que le directeur général de l'administration et du personnel a participé aux travaux du comité en cumulant deux fonctions; le comité se compose en fait — ainsi que nous l'avons précédemment exposé — du secrétaire général de la Commission, du directeur général de l'administration et du personnel, d'un directeur général désigné par le président et d'un représentant du commissaire chargé du personnel et de l'administration ( 8 ). D'autre part, il importe, à cet égard, de retenir simplement que les décisions de promotion et la nomination à certains postes par voie de promotion relèvent, selon le statut, de la seule autorité investie du pouvoir de nomination. Or, si, au cours de la phase préparatoire des actes de nomination ou de promotion, celle-ci fait intervenir une instance consultative qui n'est pas prévue par le statut, on ne saurait certainement pas faire grief de l'absence de représentants du personnel dans une telle instance. |
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d) Nous estimons donc qu'aucun des arguments exposés par le requérant à l'appui de son premier moyen n'est susceptible de faire aboutir sa demande. |
2. |
Sous le titre « Excès et détournement de pouvoir », le requérant a exposé un autre groupe de griefs et il en a considérablement développé certains — au cours de la procédure orale comme par la suite. A cet égard, il y a lieu de faire les remarques suivantes: |
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Or, de telles circonstances particulières semblent effectivement devoir résulter des faits suivants: au printemps 1984, la défenderesse devait choisir le candidat le plus apte parmi onze candidats. Dans ces conditions, l'intervention du comité consultatif constituait une préparation utile, peut-être même indispensable, de la décision de la Commission. A l'automne 1984, la décision ne portait plus que sur le point de savoir si le rapport de notation dont le requérant avait fait l'objet pour la période du 1er juillet 1981 au 30 juin 1983, rapport qui faisait initialement défaut mais qui avait entre-temps été communiqué, imposait une autre décision; en d'autres termes, il s'agissait de décider si le choix de M. Dubois pouvait être maintenu après examen du dernier rapport de notation établi au sujet du requérant. Il ne s'agissait donc plus que d'un examen très limité visant à déterminer si le candidat le plus apte était le requérant ou le fonctionnaire qui avait été nommé. L'avis du comité précité n'était assurément pas nécessaire à cet effet. En conséquence, nous ne pouvons pas non plus nous rallier à l'argument du requérant selon lequel il y aurait eu inégalité de traitement entre les candidats lors de la procédure de nomination: le comité aurait été complet en mai mais non les dossiers alors que, en novembre, les dossiers auraient été complets mais non le comité. En fait, les situations étaient différentes: au printemps, il s'agissait d'examiner les dossiers personnels complets de onze candidats; en automne, il s'agissait d'examiner un seul document nouveau, le rapport de notation du requérant, et de déterminer ses conséquences éventuelles sur la nomination d'un seul des autres candidats. En présence de situations différentes, il n'y a pas lieu de critiquer le recours à une procédure différente. |
27. |
Les explications de la Commission permettent aussi de penser que la tâche du comité consultatif consiste uniquement à examiner l'aptitude des candidats à exercer une fonction donnée, et qu'elle ne consiste donc pas à porter une appréciation d'ensemble sur les mérites des candidats à la promotion (cette thèse est corroborée par la teneur du procès-verbal de la réunion du comité consultatif de mai 1984, procès-verbal qui nous a été communiqué et dont il ressort que, à l'issue de la réunion, cinq fonctionnaires énumérés par ordre alphabétique ont été désignés comme étant aptes à être nommés au poste vacant, sans qu'aucun d'eux ait fait l'objet d'une mention particulière). Le comité s'est effectivement acquitté de cette tâche au printemps 1984 et a alors mentionné aussi le requérant parmi les candidats qui lui semblaient aptes à être nommés. Une seconde saisine n'avait donc plus d'utilité à l'automne 1984, puisque seule subsistait encore — comme nous l'avons montré — la question de savoir qui du requérant ou du fonctionnaire nommé était le plus qualifié pour être promu et, en tout état de cause, c'est de l'autorité investie du pouvoir de nomination que relevait cette question. |
28. |
A supposer, néanmoins, que le comité exerce effectivement des fonctions plus larges et soit en particulier chargé de proposer, le cas échéant, le candidat le plus qualifié pour être promu (à cet effet, il doit naturellement avoir connaissance de tous les éléments importants, et notamment des rapports de notation), il convient d'observer que, en l'espèce, rien ne permet de penser que le jugement porté sur le requérant (dont le dernier rapport de notation faisait défaut) aurait été différent si ledit rapport avait été connu; en d'autres termes, rien ne permet de penser qu'il aurait alors été distingué de l'ensemble des candidats dont le choix paraissait envisageable au comité pour pourvoir au poste considéré. Sur ce point, il est tout de même significatif que le requérant — qui, à la vérité, devrait pourtant justifier d'un intérêt à voir aboutir ce grief — n'a pas prétendu que le dernier rapport de notation le concernant était tel qu'il aurait nécessairement influencé de façon substantielle le jugement d'ensemble porté sur lui (jugement d'ensemble qui pouvait en fait s'appuyer sur toute une série d'autres rapports de notation). Ce qui est également significatif, c'est que l'autorité investie du pouvoir de nomination, qui décide en dernier ressort du choix du candidat et qui, à l'automne 1984, avait connaissance du dernier rapport de notation concernant le requérant (nous reviendrons sur ce point), n'a pas jugé opportun de donner la préférence au requérant plutôt qu'au concurrent désigné lorsqu'elle a été appelée à prendre une décision. |
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31. |
La façon dont la décision attaquée a été préparée et adoptée est expliquée dans le mémoire de la Commission du 25 mars 1986. Parmi les indications fournies dans ce mémoire, il convient de souligner — en ce qui concerne l'examen du dossier personnel du requérant, qui constitue pour lui le point principal — le fait que les membres de la Commission et leurs cabinets avaient la possibilité de prendre connaissance des dossiers personnels plusieurs jours avant la réunion du 24 octobre et que, à cette date, le secrétariat général avait mis à leur disposition les dossiers personnels de tous les candidats. La Commission ayant explicitement affirmé que le dernier rapport concernant le requérant (qui ne figurait pas dans son dossier personnel en mai 1984) a précisément été, lui aussi, examiné avant l'adoption de la décision attaquée, il n'y a, à notre avis, aucune raison valable d'en douter. |
32. |
On ne saurait, en tout cas, mettre ce fait en doute en s'appuyant sur l'argument selon lequel — en vertu de l'article 26 du statut — les dossiers personnels sont confidentiels et ne peuvent être consultés que dans les bureaux de l'administration. En effet, il paraît évident que cette restriction ne saurait être opposée aux membres de la Commission. Au surplus, il convient de ne pas oublier que le requérant a constaté lui-même, à l'occasion de ses investigations auprès de l'administration, que son dossier avait été consulté trois ou quatre fois entre le mois de mai et le 24 octobre 1984. Nous pouvons donc partir de l'idée qu'au moins le commissaire chargé de l'administration a consulté le dossier, comme il en avait l'obligation, et qu'il a également informé ses collègues de sa teneur. Or, cela semblerait devoir être considéré comme suffisant en vue d'une préparation régulière de la décision litigieuse. |
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34. |
En second lieu, en ce qui concerne la demande d'appréciation par la Cour elle-même des rapports concernant le requérant et le fonctionnaire nommé, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, une telle appréciation est exclue par principe. Il ressort des principes dégagés par la jurisprudence (voir, notamment, l'arrêt rendu dans l'affaire 280/80 ( 9 )) que l'application de l'article 45 du statut ne peut donner lieu qu'à un contrôle des voies et moyens qui ont conduit l'administration à son appréciation et que ce contrôle vise à découvrir les erreurs manifestes. Nous avons déjà répondu sur le premier point; quant au second, il convient de remarquer que l'argumentation du requérant n'apporte rien. A propos de cette question, et à supposer que l'appréciation portée sur le requérant equivalile approximativement à celle portée sur le fonctionnaire nommé, on pourrait, de surcroît, faire encore remarquer que d'autres facteurs tels que l'aptitude à exercer des fonctions de direction, l'esprit d'initiative et le sens de l'organisation ont pu être décisifs pour l'adoption de la décision de nomination, ce qui n'est certainement pas critiquable. La défenderesse en a fait état à l'audience, mais l'argumentation développée par le requérant ne mentionne rien à ce sujet. |
35. |
Enfin, quant aux allégations concernant l'état de santé du concurrent nommé, nous sommes enclins à penser qu'elles ne permettent pas non plus de contester la décision de nomination. A cet égard, c'est en premier lieu à la Commission qu'il appartient de déterminer ce qui est compatible ou non avec l'intérêt du service. Or, il semble cependant qu'il n'y ait pas lieu de conclure de ce fait à l'existence d'une décision entachée d'un vice substantiel, étant donné qu'il paraît concevable — avec une organisation appropriée — de diriger un service sans être constamment présent. |
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Ainsi — et sans qu'il paraisse nécessaire de donner suite à d'autres offres de preuves du requérant —, nous ne pouvons que suggérer à la Cour de rejeter le recours et de statuer sur les dépens de l'instance conformément à l'article 70 du règlement de procédure. |