QUATRIÈME SECTION
DÉCISION
Requête no 20405/08
présentée par Adam WĘGRZYŃSKI (SUSKA)
contre la Pologne
La Cour européenne des droits de l'homme (quatrième section), siégeant le 15 septembre 2009 en une chambre composée de :
Nicolas Bratza, président,
Lech Garlicki,
Giovanni Bonello,
Ljiljana Mijović,
Ján Šikuta,
Mihai Poalelungi,
Nebojša Vučinić, juges,
et de Fatoş Aracı, greffière adjointe de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 16 avril 2008,
Vu les déclarations formelles d'acceptation d'un règlement amiable de l'affaire.
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
Le requérant, M. Adam Węgrzyński (Suska), est un ressortissant polonais, né en 1978 et résidant à Koszalin. Le gouvernement polonais (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. Jakub Wołąsiewicz, du ministère des Affaires étrangères.
Les circonstances de l'espèce
Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.
En vertu d'une ordonnance prononcée le 11 mars 2004 par le tribunal de district de Koszalin, le requérant fut placé en détention préventive dans le cadre d'une procédure pénale intentée contre lui. Il était soupçonné de s'être rendu coupable du délit d'association de malfaiteurs dont les activités consisteraient notamment à une série de vols, avec le recours aux armes à feu, commis dans des magasins de joaillerie en Allemagne.
La détention du requérant fut prolongée par la suite à des intervalles réguliers. Pour motiver leurs décisions de maintenir le requérant en détention les autorités se fondèrent en particulier sur des soupçons, étayés par des éléments du dossier, que celui-ci avait été l'auteur des faits incriminés, passibles d'une peine d'emprisonnement élevée. Les autorités se fondèrent également sur l'existence du risque de collusion de la part du requérant et de ses complices tout comme celui d'entraves au bon déroulement de l'enquête que le requérant pourrait tenter de créer s'il était libéré. En outre, elles mirent l'accent sur la complexité de l'enquête résultant notamment du fait que les activités du requérant et de ses complices s'étendaient au-delà du territoire polonais, ce qui obligeait les autorités poursuivantes de solliciter la coopération de leurs homologues étrangers.
Le 7 mars 2006, le tribunal régional de Koszalin prolongea la détention du requérant jusqu'au 30 juin 2006 au motif que l'application de cette mesure préventive était toujours indispensable pour garantir le bon déroulement de la procédure. Le 23 octobre 2006, invoquant les motifs similaires, le tribunal régional prolongea la détention du requérant au 30 novembre 2006.
Entretemps, par un arrêt du 14 novembre 2006, le tribunal régional reconnut le requérant et ses trois complices coupables des infractions qui leur étaient reprochées. Le requérant se vit infliger une peine de neuf années de réclusion criminelle.
Toutefois, le 23 octobre 2007, la cour d'appel de Szczecin annula l'arrêt du tribunal de première instance à l'égard du requérant et de deux de ses complices et renvoya l'affaire pour reconsidération.
Le 30 octobre 2007, la cour d'appel prolongea la détention du requérant jusqu'au 31 janvier 2008, estimant que cela était indispensable du point de vue des intérêts de la justice.
Le 14 novembre 2007, la cour d'appel rejeta la demande par laquelle le requérant avait sollicité sa libération.
Par les ordonnances des 23 janvier et 15 avril 2008, la cour d'appel décida de maintenir le requérant en détention préventive respectivement jusqu'au 30 avril et 31 août 2008. La cour d'appel se fonda sur les motifs essentiellement similaires à ceux invoqués antérieurement.
Entretemps, le 12 mars 2008, la cour d'appel rejeta le recours formé par le requérant à l'encontre de l'ordonnance du 23 janvier. Elle estima qu'en dépit du fait qu'en l'espèce, la détention du requérant s'était prolongée significativement, au vu de la gravité et l'ampleur des activités des inculpés, cette circonstance en elle seule ne pouvait justifier la libération de l'intéressé, d'autant plus que les autorités instruisaient l'affaire avec la diligence appropriée.
Le 22 août 2008, une nouvelle fois la cour d'appel prolongea la détention du requérant pour une période de trois mois, soit jusqu'au 30 novembre 2008. Le 17 septembre 2008, le recours formé par le requérant à l'encontre de l'ordonnance de la cour d'appel fut rejeté.
Il ressort du dossier que le 26 mars 2009, un jugement de condamnation fut prononcé à l'égard du requérant en vertu duquel ce dernier s'était vu infliger une peine de huit années et six mois de réclusion criminelle. Le requérant interjeta appel.
GRIEFS
Invoquant l'article 5 § 3 de la Convention, le requérant se plaint de la longueur de sa détention préventive.
Citant l'article 6 de la Convention, le requérant conteste la durée de la procédure pénale dirigée contre lui.
EN DROIT
Le 6 juillet 2009, la Cour a reçu du Gouvernement la déclaration suivante :
« Je soussigné, Jakub Wołąsiewicz, agent du Gouvernement, déclare que le gouvernement polonais offre de verser à M. Adam Wegrzynski (Suska), la somme de 4 540 zlotys polonais [1] en vue d'un règlement amiable de l'affaire ayant pour origine la requête susmentionnée pendante devant la Cour européenne des droits de l'homme.
Cette somme, qui couvrira tout préjudice matériel et moral ainsi que les frais et dépens, sera exempte de toute taxe éventuellement applicable. Elle sera payée dans les trois mois suivant la date de la notification de la décision de la Cour rendue conformément à l'article 37 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme. A défaut de règlement dans ledit délai, le Gouvernement s'engage à verser, à compter de l'expiration de celui-ci et jusqu'au règlement effectif de la somme en question, un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage. Ce versement vaudra règlement définitif de l'affaire. »
Le 16 juin 2009, la Cour a reçu la déclaration suivante, signée par la partie requérante :
« Je soussigné, Adam Wegrzynski (Suska), le requérant, note que le gouvernement polonais est prêt à me verser la somme de 4 540 zlotys polonais en vue d'un règlement amiable de l'affaire ayant pour origine la requête susmentionnée pendante devant la Cour européenne des droits de l'homme.
Cette somme, qui couvrira tout préjudice matériel et moral ainsi que les frais et dépens, sera exempte de toute taxe éventuellement applicable. Elle sera payée dans les trois mois suivant la date de la notification de la décision de la Cour rendue conformément à l'article 37 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme. A compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au règlement effectif de la somme en question, il sera payé un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage.
J'accepte cette proposition et renonce par ailleurs à toute autre prétention à l'encontre de la Pologne à propos des faits à l'origine de ladite requête. Je déclare l'affaire définitivement réglée. »
La Cour prend acte du règlement amiable auquel sont parvenues les parties. Elle estime que celui-ci s'inspire du respect des droits de l'homme tels que les reconnaissent la Convention et ses protocoles et n'aperçoit par ailleurs aucun motif justifiant de poursuivre l'examen de la requête (article 37 § 1 in fine de la Convention). En conséquence, il convient de rayer l'affaire du rôle.
Par ces motifs
, la Cour, à l'unanimité,
Décide de rayer la requête du rôle.
Fatoş Aracı Nicolas Bratza
Greffière adjointe Président
[1] approx. 1 060 euros