Cour d'appel de Paris, Chambre 5-3, 16 décembre 2016, 16/00444

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2018-01-10
Cour d'appel de Paris Pôle 5 - Chambre 3
2016-12-16

Texte intégral

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT

DU 16 DÉCEMBRE 2016 (n° , 7 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00444 Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Décembre 2015 -Juge de la mise en état de PARIS - RG n° 15/01449 APPELANTS Madame [D] [J], Présidente du Conseil Régional d'Ile de France, en sa qualité d'ordonnateur domicilié [Adresse 2] [Adresse 2] Représentée par Maître Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Ayant pour avocat plaidant Maître Jean MAUVENU de la SCP SUR MAUVENU ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0319 REGION ILE DE FRANCE représentée par sa Présidente en exercice, Madame [D] [J], dûment habilitée par la délibération n° CR-93-15- du 18 décembre 2015 demeurant [Adresse 2] [Adresse 2] Représentée par Maître Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Ayant pour avocat plaidant Maître Jean MAUVENU de la SCP SUR MAUVENU ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0319 INTIMÉE SARL ATEMI TRANSAT prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège ayant son siège social [Adresse 3] [Adresse 3] Représenté par Maître Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334 Ayant pour avocat plaidant Maître Henri-Nicolas FLEURANCE de la SELAS DE GAULLE, FLEURANCE & ASSOCIES, avocat au barreau de Paris, toque :K 0035 substitué par Me Danielle SMOLDERS COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Octobre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Chantal BARTHOLIN, Présidente de chambre, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Chantal BARTHOLIN, Présidente de la chambre, Madame Anne-Marie GALLEN Présidente, Madame Marie-Brigitte FREMONT, Conseillère Greffière, lors des débats : Mme Clémentine GLEMET ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente de la chambre, et par Madame Sandrine CAYRE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire. ************** FAITS ET PROCÉDURE : Suivant acte sous seing privé non daté, la société Atemi Transat a consenti à la région Ile-de-France un bail portant sur des locaux à usage de bureaux représentant les lots n°33 et 106 d'une surface de 1725 m² au 19ème étage de la copropriété Tour Maine Montparnasse, située [Adresse 1], outre des réserves en niveau - 6 et 20 emplacements de parking au 5ème sous-sol, pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 2007. Par avenant du 19 mai 2010, la durée du bail a été rétroactivement portée à neuf années à compter du 1er janvier 2010, la bailleresse acceptant par ailleurs de ramener le loyer annuel à la somme de 764.500 euros en principal au 1er janvier 2010 et de limiter l'augmentation du loyer résultant de l'indexation prévue au bail. Reprochant à la bailleresse l'existence d'un risque d'exposition à l'amiante au sein de la Tour Maine Montparnasse, la région Ile-de-France a sollicité la résiliation anticipée du bail au 18 mars 2014 par courrier daté du 4 mars 2014. Selon courrier du 17 mars 2014, la société bailleresse a refusé la résiliation unilatérale du bail et l'établissement d'un état des lieux de sortie. La région Ile-de-France a informé la société Atemi Transat de la réalisation d'un état des lieux de sortie non contradictoire le 18 mars 2014 et de la remise des badges aux services de sécurité de la tour suivant courrier du 2 mai 2014. C'est dans ces circonstances que la société Atemi Transat a fait assigner la région Ile-de-France devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris par acte d'huissier du 16 octobre 2014, en paiement des loyers dus au titre des deux premiers trimestres 2014 et injonction de permettre les visites des lieux pour les besoins de leur commercialisation. Par ordonnance en date du 12 mai 2015, le juge des référés a dit la société Atemi Transat recevable en ses demandes mais constaté l'existence de contestations sérieuses et dit n'y avoir lieu à référé. La société Atemi Transat a assigné la région Ile-de-France et M. [X] en qualité en président du conseil régional devant le tribunal de grande instance de Paris par acte du 19 janvier 2015, aux fins de voir notamment dire la résiliation unilatérale nulle, condamner la locataire au paiement de la dette locative représentant au 1er janvier 2015 une somme de 1 064 476,20 euros TTC à parfaire, annuler les titres de recette n°2091-1 du 4 décembre 2014, 2088-1 et 2087-1 de même date, outre sa condamnation à lui régler une somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts. Par conclusions signifiées le 15 octobre 2015, la région Ile-de-France et M. [X] ont opposé à l'action de la demanderesse une exception de procédure tirée de l'incompétence du tribunal au profit des juridictions administratives et ont demandé à titre subsidiaire au visa des articles 771 et 384 du code de procédure civile que l'extinction de l'instance soit constatée. Par ordonnance en date du 7 décembre 2015, le juge de la mise en état a : - rejeté l'exception d'incompétence du tribunal soulevée par la région Ile-de-France et M. [X], - dit que la demande subsidiaire de la région Ile-de-France et de M. [X] relative à l'extinction de l'instance est sans objet, - condamné la région Ile-de-France et M. [X], président du conseil régional es-qualités d'ordonnateur à payer à la société Atemi Transat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et débouté les parties du surplus de leurs demandes. La région Ile-de-France a relevé appel de cette ordonnance le 17 décembre 2015. Par ses dernières conclusions signifiées le 17 août 2016, la région Ile-de-France désormais représentée par Mme [J] es-qualités de présidente du conseil régional et ordonnateur demande à la cour : - d'infirmer l'ordonnance entreprise, et statuant à nouveau, À titre principal : - déclarer incompétent le tribunal de grande instance de Paris au profit du tribunal administratif de Paris, - débouter la société Atemi Transat de l'ensemble de ses demandes, À titre subsidiaire : - constater l'extinction de l'instance, - condamner la requérante au paiement de la somme de 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance, qui pourront être directement recouvrés par la SELARL Lexavoué Paris-Versailles en application de l'article 699 du même code. Par ses dernières conclusions signifiées le 27 juillet 2016 au visa des articles 1382, 1719, 1720, 1722, 1741 et 1760 du code civil, L. 145-4 et L145-9 du code de commerce, 559 et 771 du code de procédure civile, R. 421-1 et R. 421-5 du code de justice administrative, la société Atemi Transat demande quant à elle à la cour de : - débouter la région Ile-de-France et Mme [J], ès qualité de président du conseil régional d'Ile-de-France et ordonnateur, de leurs demandes, fins et conclusions, - confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, À titre reconventionnel : - condamner la région Ile-de-France à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, - condamner la région Ile-de-France à une amende civile en application de l'article 559 du code de procédure civile, En tout état de cause : - condamner la région Ile-de-France et Mme [J] ès qualités à payer chacun à la société Atemi Transat la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, - condamner la région Ile-de-France aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant pourra être recouvré conformément aux dispositions de l'article 699 du même

SUR CE

Llants soutiennent : - que la résiliation unilatérale du bail est intervenue en application de la délibération de la commission permanente du conseil régional d'Île-de-France du 20 novembre 2013 et de la décision du président du conseil régional d'Île-de-France du 4 mars 2014, actes détachables du contrat litigieux, - que les demandes en nullité de la résiliation unilatérale et en paiement de dommages et intérêts impliquent l'existence d'une contestation sur la légalité interne des décisions administratives dont elles procèdent, - que s'agissant de décisions administratives, ce contrôle appartient au juge administratif quand bien même les décisions critiquées porteraient sur un contrat de droit privé (V. notamment : CE 16 juin 1923, Septfonds ; TC 4 novembre 1991 n°02655, CE 5 décembre 2005, Cne de Pontoy) - qu'en conséquence le juge judiciaire doit se déclarer incompétent au profit du juge administratif. À titre subsidiaire, ils demandent à la cour de constater l'extinction de la présente instance par application des dispositions de l'article 384 du code de procédure civile, faute pour la société bailleresse d'avoir contesté la légalité des délibérations devant le juge administratif et d'avoir exercé son recours dans le délai contentieux de l'article R. 421-1 du code de justice administrative. Sur la question des titres de recette, les appelants reprochent au premier juge d'avoir considéré qu'il s'agissait d'une contestation accessoire à la régularité de la résiliation et de s'être déclaré compétent. Ils ne contestent pas le caractère accessoire de la demande d'annulation mais soutiennent qu'elle doit accompagner la question de la légalité de la résiliation devant le juge administratif. Or le juge judiciaire est compétent pour connaître des actions fondées sur des contrats de droit privé, y compris ceux passés par une personne de droit public dés lors que le contrat ne porte pas sur le domaine public, ne comporte pas de clause exorbitante et ne fait naître que des rapports de droit privé sans lien avec l'exercice d'une mission de service public ou de travaux publics, Au cas d'espèce, le tribunal a été saisi d'une action en contestation du congé donné par la Région Ile de France, en nullité de la résiliation du bail la liant à la société bailleresse et voir dire en conséquence que le bail s'est poursuivi, que les loyers restent dus et tendant à voir annuler les titres de recettes délivrés par la Région Ile de France ; Cette action fondée sur l'existence d'un bail 'commercial' de droit privé passé entre les parties au contrat et l'application des dispositions du statut des baux commerciaux et subsidiairement sur celles du droit civil est de la compétence du juge judiciaire et il importe peu que des délibérations préalables à la décision prise par la région Ile de France de résilier le bail constituent des actes administratifs qui ne peuvent être attaqués que devant le juge administratif dés lors que la légalité même de tels actes dont la bailleresse n'a pas été destinataire et qui ne lui ont pas été notifiés n'est pas contestée. La contestation des titres de recettes n'est elle-même qu'accessoire à la demande principale tendant à voir dire nulle et de nul effet la résiliation notifiée par la région Ile de France le 4 mars 2014, et voir constater la poursuite du bail à son terme et elle ne peut permettre de déterminer la compétence du juge pour connaître de l'entière demande; En conséquence, en ce qu'il a dit que la juridiction compétente pour connaître du litige était le tribunal de grande instance de Paris, juridiction du lieu de situation de l'immeuble dans laquelle se trouvent les locaux objet du bail, le juge de la mise en état doit être approuvé . Il est sans intérêt de constater l'extinction de l'instance devant le juge administratif . La SARL Atemi transat fait valoir que les moyens soulevés par la partie adverse sont dilatoires et s'accompagnent par ailleurs de demandes de renvoi, de sursis à statuer et de conclusions tardives qui ralentissent l'issue de la procédure. Elle sollicite en conséquence la condamnation de la partie adverse à lui verser une somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts et demande à la cour de la condamner à une amende civile. Or l'exercice par la région Ile de France en contestation de la compétence du juge judiciaire ne revêt pas à ce stade de caractère abusif et ne peut donner lieu à dommages intérêts et a fortiori à une condamnation à une amende civile. La région Ile de France et Mme [D] [J] es qualités supporteront les dépens et paieront à la SARL Atemi transat la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

, La cour, CONFIRME l'ordonnance déférée, DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes, CONDAMNE la Région Ile de France et Mme [D] [J] es qualités de présidente du conseil régional et d'ordonnateur, aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et à payer à la SARL Atemi la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du même code . LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE Sandrine CAYRE Chantal BARTHOLIN