Vu la procédure suivante
:
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 7 décembre 2022 et le 6 mai 2024, Mme B A, représentée par Me Carmona, demande au tribunal :
1°) de condamner la
commune de Boulogne sur Gesse à lui verser une somme totale de 55 000 euros en réparation des préjudices que lui a causé un
feu d'artifice réalisé le 15 août 2022 ;
2°) de mettre à la charge de la
commune de Boulogne sur Gesse les entiers dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la responsabilité de la
commune est établie dès lors que le
feu d'artifice a été tiré d'un endroit très proche de son domaine, à environ 120 m ; aucune mesure n'a été prise pour la sécurité de son exploitation ;
- son préjudice d'un montant de 55 000 euros résulte de la perte de chance de voir valorisés certains de ses chevaux, qui n'ont pu participer à certaines compétitions pendant vingt-et-un jours en raison de l'administration de calmants et de la blessure d'un cheval qui a été blessé par un résidu de plastique qui s'est planté dans sa patte et a dû bénéficier de soins particuliers, d'un important travail qui a dû être effectué pour nettoyer et sécuriser les lieux et d'une perte de clientèle.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 23 mars 2023 et le 21 mai 2024, ce dernier n'ayant pas été
communiqué, la
commune de Boulogne sur Gesse, représentée par Me Briand conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme A sur le fondement des dispositions de l'article 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme A ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 22 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mai 2024 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code
de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Péan,
- les conclusions de Mme Carvalho, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit
:
1. Mme A possède une exploitation d'élevage équin à Boulogne sur Gesse. Par un courrier du 25 octobre 2022, elle a adressé au maire de cette
commune une réclamation préalable en vue d'obtenir l'indemnisation des préjudices résultant selon elle du tir d'un
feu d'artifice le 15 août 2022. Le maire de la
commune de Boulogne sur Gesse ayant rejeté sa demande indemnitaire, Mme A demande au tribunal de condamner la
commune à lui verser la somme de 55 000 euros en réparation des préjudices causés par le tir de ce
feu d'artifice.
Sur les conclusions indemnitaires :
2. La responsabilité d'une
commune ne peut être engagée en cas d'accident survenu du fait d'un
feu d'artifice tiré sur la commande de celle-ci, que si la victime établit l'existence d'une faute de la
commune soit dans le choix de l'artificier, soit dans l'organisation ou le fonctionnement du service public, soit enfin dans l'accomplissement des mesures de police prises pour assurer la sécurité des personnes et des biens.
3. Il résulte de l'instruction, d'une part, que le tir de
feu d'artifice du 15 août est organisé par la
commune de Boulogne sur Gesse depuis plusieurs années en direction du lac, afin de respecter le périmètre de sécurité et, d'autre part, que l'édition 2022 dont la durée n'a pas excédé 21 minutes, a été réalisée depuis un viaduc situé à 180 mètres de la propriété de Mme A et, enfin, qu'en dehors de dix d'entre eux nécessitant une distance de sécurité comprise entre 140 et 165 mètres, les
artifices utilisés nécessitaient une distance de sécurité de 100 mètres.
4. Par ailleurs, en se bornant à produire une attestation peu circonstanciée émanant d'une de ses employés, des documents photographiques ne permettant pas d'identifier les dates et lieux de prise de vue, des constats d'huissier établis les 15 et 16 août 2023 après l'édition du
feu d'artifice tiré le 15 août 2023, soit un an après les faits en cause, et un certificat vétérinaire attestant de la blessure par un morceau de plastique pointu d'un de ses chevaux le 26 octobre 2022, Mme A n'établit pas avoir été victime d'une pollution fautive de son exploitation par les déchets générés par le
feu d'artifice tiré par la
commune de Boulogne sur Gesse le 15 août 2022.
5. En outre, si Mme A fait valoir qu'elle a subi des préjudices en raison du stress engendré par cet évènement chez ses chevaux, elle n'apporte aucun élément de nature à établir que ce stress, à le supposer établi, serait directement imputable à une faute de la
commune, ni a fortiori au
feu d'artifice en cause, indépendamment même de toute faute. A cet égard elle ne saurait utilement se prévaloir, pour établir ces préjudices, de l'administration à l'un des chevaux de calmants, prescrite par une ordonnance de réutilisation en date du 27 juin 2022, soit sept semaines avant le
feu d'artifice en cause.
6. Dans ces conditions, Mme A n'apporte pas la preuve de l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre le
feu d'artifice tiré le 15 août 2022 et les préjudices allégués, pas plus d'ailleurs que l'existence d'une faute de la
commune dans l'organisation ou le fonctionnement du service public ou d'une carence fautive dans l'exercice de ses pouvoirs de police par le maire lors de ce
feu d'artifice. Par suite, la responsabilité de la
commune de Boulogne sur Gesse ne peut être retenue.
7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par Mme A ne peuvent être que rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la
commune de Boulogne sur Gesse. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la requérante la somme demandée par la
commune sur le même fondement. Enfin, la présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées à ce titre par la requérante ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la
commune de Boulogne sur Gesse tendant à l'application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et à la
commune de Boulogne sur Gesse.
Délibéré après l'audience du 18 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Viseur-Ferré, présidente,
Mme Préaud, conseillère,
Mme Péan, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 janvier 2025.
La rapporteure,
C. PÉAN
La présidente,
C. VISEUR-FERRÉ
La greffière,
F. DEGLOS
La République mande et ordonne au préfet du Tarn, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit
commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.