Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 octobre 1990, 89-85.047

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
1990-10-29
Cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle
1989-07-03

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Sur le rapport de M. le conseiller SOUPPE, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ et de la société civile professionnelle DESACHE et GATINEAU, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;

Statuant sur le pourvoi formé par

: X... Raymond, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 3 juillet 1989, qui l'a condamné pour corruption, faux en écriture de commerce et usage de faux, infractions à la loi sur les sociétés commerciales, émission de chèque sans provision, abus de confiance, et escroquerie, à 2 ans d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende ainsi qu'à l'interdiction des droits mentionnés à l'article 42 du Code pénal pendant 5 ans et a prononcé sur les d réparations civiles ; Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen

de cassation pris de la violation de l'article 405 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ; " en ce que l'arrêt a déclaré établie la prévention d'escroquerie par présentation d'un faux document comptable afin de persuader le destinataire de l'existence d'un crédit imaginaire qui a déterminé la signature d'un acte de cession de créance et d'octroi de fonds sous la forme d'un crédit d'escompte ; " alors que le délit d'escroquerie ne saurait être réalisé aux termes de l'article 405 du Code pénal par un simple mensonge, fût-il écrit, si celui-ci ne s'accompagne pas de manoeuvres frauduleuses destinées à l'accréditer aux yeux de la victime, dont l'existence n'est pas relevée en l'espèce " ;

Attendu qu'il résulte

des énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement dont il adopte les motifs en ce qui concerne le chef de prévention mis en cause par le moyen, que X..., gérant de la SARL " Pêche-Sport-Marine " (PSM), ayant sollicité du Crédit mutuel de Soissons des facilités de crédit, a été invité par le directeur de cette banque à produire les derniers bilans sociaux ; que pour satisfaire à cette exigence, il a fait établir une situation comptable au moyen d'un système informatique, puis, après en avoir modifié les données dans sa reproduction dactylographique pour faire apparaître un résultat d'exploitation positif au lieu de la perte d'exploitation révélée, a présenté le document, ainsi falsifié, à la banque qui lui a consenti l'octroi de fonds sous la forme de crédit d'escompte ; Attendu que pour déclarer X... coupable d'escroquerie au préjudice du Crédit mutuel de Soissons, les juges du fond énoncent que la présentation de la situation comptable mensongère constitue une manoeuvre frauduleuse ayant pour objet de persuader l'existence d'un crédit imaginaire et a déterminé la signature du banquier ; Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations d'où il résulte que le document, dont la production avait déterminé la remise, étant falsifié, ne d constituait pas un simple mensonge écrit, la cour d'appel a caractérisé sans insuffisance les manoeuvres frauduleuses, élément constitutif du délit d'escroquerie retenu à la charge du prévenu, et a ainsi justifié sa décision ; Que dès lors le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen

de cassation pris de la violation de l'article 66 du décret-loi du 30 octobre 1935 modifié, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ; " en ce que la cour d'appel a déclaré X... coupable du délit d'émission de chèque sans provision ; " alors qu'il ne résulte pas des motifs de la décision attaquée que le concluant ait eu l'intention de nuire à la victime " ; Attendu que pour déclarer X... coupable d'avoir émis le 13 décembre 1985 à l'ordre de Y... un chèque de 300 000 francs sans provision, les juges du fond relèvent que le chèque constituait le remboursement d'un prêt de même montant consenti par le bénéficiaire pour trois mois le 31 août 1985 ; qu'ils énoncent ensuite qu'à la date de l'émission, le tireur, gérant de la société sur le compte de laquelle le chèque était tiré, ne pouvait ignorer que la situation de ce compte ne permettait pas le paiement ; qu'ainsi, l'élément intentionnel défini par l'article 66 du décret-loi du 30 octobre 1935 modifié, est constitué ; Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel, ayant établi l'intention de nuire du tireur, a justifié sa décision sans encourir le grief allégué ; Que dès lors le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen

de cassation pris de la violation de l'article 177 du Code pénal, et des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ; " en ce que la cour d'appel d'Amiens a déclaré X... coupable du délit de corruption passive ; " alors qu'elle relève qu'il est constant que le concluant n'a sollicité le versement d'une commission d que le 21 février 1984 au soir après que la commission eut rendue sa décision, et qu'elle affirme en même temps l'existence d'un accord entre les différents protagonistes avant la réunion de cette commission " ; Attendu qu'il appert des énonciations de l'arrêt attaqué qu'à la suite d'un appel d'offre effectué par la Régie des Transports de l'Aisne (RTA) pour l'acquisition de véhicules, la commission d'adjudication de cet établissement public réunie le 21 février 1984 sous la présidence de X..., conseiller général, a attribué la quasi intégralité du marché à la société Renault Véhicules Industriels dont Z... était le directeur commercial ; qu'à la suite de cette décision, une somme de 100 000 francs a été octroyée à la société PSM dont X... était le gérant et qui n'était intervenu à aucun titre dans cette opération ; Attendu que pour déclarer X... coupable de corruption passive, les juges du second degré retiennent, compte tenu des circonstances de fait qu'ils exposent, qu'une entente préalable est intervenue entre Z... et X... avant la réunion du 21 février 1984, en exécution de laquelle ce dernier président du conseil d'administration de la RTA en s'abstenant d'intervenir dans la délibération de la commission d'adjudication, a favorisé les intérêts de la société RVI soumissionnaire ; Attendu qu'en l'état de ces motifs par lesquels les juges du fond ont souverainement constaté que l'abstention imputée au prévenu avait été précédée d'une entente qui avait pour objet de la rémunérer, la cour d'appel a donné une base légale à sa décision ;

D'où il suit

que le moyen doit être écarté ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux dépens ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents : M. Tacchella conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en d remplacement du président empêché, M. Souppe conseiller rapporteur, MM. Gondre, Hébrard, Hecquard, Culié, Guerder conseillers de la chambre, M. de Mordant de Massiac conseiller référendaire, M. Perfetti avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;