COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT
AU FOND
DU 16 MAI 2024
N°2024/78
Rôle N° RG 20/01419 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFQTA
[R] [Z]
[M] [V]
Association ASSOCIATION CULTURELLE DES MUSULMANS DE [Localité 14]
C/
[A] [N]
[F] [B]
[E] [T]
[KL] [RM]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Paul LE GALL
Me Aréba BOUHADOUZA
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence en date du 13 Janvier 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 14/06611.
APPELANTS
Monsieur [R] [Z] pris en sa qualité d'ancien président de l'Association Culturelle des Musulmans de [Localité 14], demeurant [Adresse 12]
représenté par Me Paul LE GALL, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
Monsieur [M] [V] pris en sa qualité d'ancien président de l'Association Culturelle des Musulmans de [Localité 14], demeurant [Adresse 13]
représenté par Me Paul LE GALL, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
ASSOCIATION CULTURELLE DES MUSULMANS DE [Localité 14], prise en la personne de son représentant légal en exercice dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Me Paul LE GALL, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [A] [N], né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 11] (13) demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Aréba BOUHADOUZA, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Hamdi BACHTLI, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [F] [B], né le [Date naissance 4] 1939 à [Localité 8] (ALGERIE) demeurant [Adresse 10]
représenté par Me Aréba BOUHADOUZA, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Hamdi BACHTLI, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [E] [T], né le [Date naissance 5] 1980 à [Localité 11] (13) demeurant [Adresse 6]
représenté par Me Aréba BOUHADOUZA, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Hamdi BACHTLI, avocat au barreau de MARSEILLE
Monsieur [KL] [RM] Pris en sa qualité d'ancien président de l'Association Culturelle des Musulmans de [Localité 14], demeurant [Adresse 3]
défaillant
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles
804,
806 et
907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Mars 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président Rapporteur,
et Madame Laetitia VIGNON, conseiller- rapporteur,
chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, magistrat rédacteur
Madame Laetitia VIGNON, Conseiller
Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2024.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mai 2024.
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
L'Association culturelle des musulmans de [Localité 14] (ACMV), précédemment dénommée Association cultuelle musulmane de [Localité 14], a été créée en 1994 avec pour objet de faire connaître la culture et le culte musulman sur la commune de [Localité 14] ainsi que la protection des lieux cultuels et culturels mis à sa disposition.
Elle gère à ce titre la mosquée Le Albani de [Localité 14].
Elle était initialement présidée par M. [R] [Z].
Certains membres, conduits par M. [A] [N], ont créé en 2013 une nouvelle association dénommée Association du futur centre culturel et cultuel musulman de [Localité 14] (AFCCCMV) pour porter le projet de construction d'une nouvelle mosquée.
Des tensions sont apparues entre les deux associations.
M. [Z] ayant donné sa démission de ses fonctions de président de l'ACMV, ainsi que d'autres membres du bureau, une assemblée générale s'est tenue le 13 octobre 2013, au cours de laquelle un nouveau bureau a été désigné, M. [M] [V] étant notamment désigné président en remplacement de M. [Z].
Les membres nouvellement désignés ont à leur tour démissionné en début d'année 2014 et un nouveau bureau a été désigné par décision d'assemblée générale du 15 mars 2014, en les personnes de M. [KL] [RM], président, M. [U], trésorier, et M. [C], secrétaire.
MM [N], [B] et [T] ont contesté la validité des assemblées générales des 13 octobre 2013 et 15 mars 2014.
Ils ont saisi en premier lieu le juge des référés du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence pour obtenir l'annulation des délibérations de l'assemblée générale et la désignation d'un administrateur provisoire.
Par ordonnance du 19 août 2014, le président du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a déclaré les requérants irrecevables en leurs demandes d'annulation et pour le surplus, dit n'y avoir lieu à référé.
Par arrêt du 12 novembre 2015, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé l'ordonnance sauf en ce qui concerne la recevabilité de l'action engagée par MM [N] et [B].
Par acte du 20 octobre 2014, M. [A] [N], M. [F] [B] et M. [E] [T] ont fait assigner l'ACMV, M. [KL] [RM] pris en sa qualité de président déclaré de l'association, M. [R] [Z] pris en sa qualité d'ancien président déclaré de l'association et M. [M] [V], pris en sa qualité d'ancien président déclaré de l'association aux fins d'entendre prononcer l'annulation des délibérations du 13 octobre 2013 prise par le conseil d'administration de l'ACMV et improprement qualifié d'assemblée générale extraordinaire et en date du 15 mars 2014 prise par l'assemblée générale de l'ACMV.
Ils demandaient en outre au tribunal par conclusions ultérieures la désignation d'un administrateur provisoire.
Par jugement du 13 janvier 2020, le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence a :
- dit que M. [N] est recevable en ses prétentions,
- déclaré irrecevables les demandes de M. [T],
- déclaré irrecevable la demande de M. [B] mais uniquement concernant l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
- rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
- constaté que les personnes présentes lors de la prétendue assemblée générale du 15 mars 2014 sont apparues ce jour et ce en l'absence de tout membre effectif de l'association,
- annulé l'ensemble des délibérations prises par la prétendue assemblée générale du 15 mars 2014,
- dit que les membres du bureau en exercice, avant cette assemblée générale, sous le contrôle de MM [N] et [B], membres de l'association culturelle des musulmans de [Localité 14] à l'époque, devront convoquer une nouvelle assemblée générale pour la désignation d'un nouveau conseil d'administration, en convoquant notamment l'ensemble des personnes convoquées pour l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
- dit que le présent jugement pourra être communiqué à la sous-préfecture d'[Localité 9],
- rejeté les autres demandes et notamment celle de désignation d'un administrateur provisoire et au titre d'une procédure abusive,
- condamné in solidum l'association culturelle des musulmans de [Localité 14], M. [KL] [RM] et M. [M] [V] à payer une somme totale de 2500 euros à MM [N] et [B] sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Le tribunal a retenu à cet effet :
Sur la recevabilité à agir des demandeurs :
Aucune liste de membres de l'association n'est produite pour les années 2013 et 2014, l'association ne justifie d'aucun appel de cotisations pour ces années et d'aucune décision sur le montant de la cotisation, de sorte que le non-paiement de la cotisation ne peut entraîner automatiquement la perte de la qualité de membre.
Alors qu'une déclaration en sous-préfecture du 8 mars 2012 mentionne que M. [E] [T] ne fait plus partie de l'association, ce dernier ne verse aucun élément démontrant qu'il était effectivement membre de l'association.
M. [F] [B] présent lors de l'assemblée générale du 13 octobre 2013 a voté pour la désignation du nouveau bureau et n'est donc pas recevable en sa demande d'annulation de cette assemblée.
Sur l'assemblée générale du 13 octobre 2013 :
La convocation du 27 septembre 2013 avec pour objet la modification des membres du bureau pour une AGE du 13 octobre 2013 et les accusés de réception sont produits.
Le procès-verbal mentionne que neuf personnes sont présentes et que la décision est prise par huit personnes. Les statuts ne fixent aucun quorum. La majorité des deux tiers a été atteinte.
Sur l'assemblée générale du 15 mars 2014 :
L'association ne justifie d'aucun envoi de convocation, notamment à MM [N] et [B] à l'égard desquels elle a donc commis une faute, étant rappelé que M. [N] était le seul opposant à la nouvelle direction.
La comparaison entre la liste des membres convoqués pour l'assemblée générale du 13 octobre 2013 et la nouvelle composition du conseil d'administration du 15 mars 2014 montre qu'aucun des membres convoqués le 13 octobre 2013 ne figure dans cette nouvelle liste, aucune des personnes figurant sur la feuille de présence de l'assemblée générale du 15 mars 2014 n'avait été convoquée à l'assemblée générale du 13 octobre 2013.
Cette 'assemblée générale' du 15 mars 2014 n'a donc aucun lien avec l'association et a eu pour objet de prendre le pouvoir au sein de l'association en écartant les membres 'historiques' pour y faire entrer des personnes dont les liens avec l'association sont ignorés.
La désignation d'un nouveau conseil d'administration par cette prétendue assemblée générale est nulle ainsi que toutes les délibérations prises.
Il appartiendra aux responsables du bureau tels que fixés par l'assemblée générale du 13 octobre 2013, avec M. [N] et M. [B], de convoquer les membres de l'association de l'époque pour une nouvelle assemblée générale.
Sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire :
La demande est recevable comme présentant un lien direct avec la demande initiale.
Une telle mesure n'apparaît pas utile à ce stade dès lors qu'il convient en premier lieu de convoquer une nouvelle AG pour la désignation d'un nouveau conseil d'administration.
L'ACMV, MM [R] [Z] et [M] [V] ont interjeté appel de cette décision le 28 janvier 2020.
Par conclusions déposées et notifiées le 3 juillet 2023, les appelants demandent à la cour de réformer le jugement du 13 janvier 2020 et de :
In limine litis, sur l'irrecevabilité de la demande, vu l'article
122 du code de procédure civile :
- juger que M. [T] n'est plus membre de l'association depuis 2012 ;
- juger que M. [B] est irrecevable à agir puisqu'il a approuvé les résolutions de l'assemblée générale du 13 octobre 2013 ;
- constater qu'est irrecevable à agir contre une assemblée générale, un membre de l'association qui n'est pas convoqué pour défaut de paiement de la cotisation ;
- juger que MM [B] et [N] sont irrecevables à agir, puisqu'ils n'ont pas réglé la cotisation à l'association ACMV pour l'année 2014 ;
- subsidiairement, juger que MM [B] et [N] sont irrecevables à agir en raison de la perte de leur qualité de membre de l'association ;
Au fond, sur la parfaite régularité des assemblées du 13 octobre 2013 et du 15 mars 2014 :
- juger que l'examen approfondi des conditions qui ont présidé à la réunion du 13 octobre 2013, démontre que l'assemblée générale a été valablement réunie, et il a été procédé dans la foulée au remplacement des dirigeants démissionnaires ;
- confirmer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale du 13 octobre 2013 ;
- juger que le jugement du 13 janvier 2020 a fait une mauvaise appréciation de la jurisprudence constante sur la force probante de l'acte sous seing privé qui prévoit que les mentions d'un acte sous seing privé, tel un procès-verbal d'assemblée générale, font foi jusqu'à preuve du contraire ;
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il a prononcé la nullité des délibérations de l'assemblée générale du 15 mars 2014, puisqu'il a inversé la charge de la preuve pour déclarer la nullité des délibérations du 15 mars 2014 au motif qu'il ne lui a pas été communiqué la preuve de la convocation ;
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il a prononcé la nullité des délibérations de l'assemblée générale du 15 mars 2014, puisqu'il a fait une mauvaise appréciation de la non-participation de MM [N] et [B] à l'assemblée générale du 15 mars 2014, qui ne provient pas d'une faute de l'association mais de leur volonté de ne plus participer à la vie de l'association ACMV après l'assemblée générale du 13 octobre 2013, qui a marqué leur rupture avec l'association ;
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il a prononcé la nullité des délibérations de l'assemblée générale du 15 mars 2014, puisqu'il a fait une mauvaise appréciation de la non-participation de MM [N] et [B] à l'assemblée générale du 15 mars 2014, qui se justifie par le non paiement de la cotisation 2014 ;
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il a prononcé la nullité des délibérations de l'assemblée générale du 15 mars 2014, puisque constater (sic) que les membres de l'association ACMV que le jugement de du 13 janvier 2020 qualifie de 'membres historiques' n'ont pas été écartés de l'association ACMV, comme l'a estimé le premier juge, car leur absence lors de l'assemblée générale du 15 mars 2014 résulte de leur démission, qui est un acte volontaire et dont l'association ACMV n'est en rien responsable ;
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il a prononcé la nullité des délibérations de l'assemblée générale du 15 mars 2014, puisque les nouveaux dirigeants ne se sont pas réunis spontanément pour prendre le pouvoir de l'association, mais ils ont adhéré suite à un appel à cotiser des membres 'historiques', puis ont été convoqués par ces mêmes membres 'historiques' à l'assemblée générale du 15 mars 2014, où ils ont été régulièrement élus ;
Au fond, sur l'absence de fondement de la décision de réunion d'une assemblée générale d'anciens membres de l'association ACMV :
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il prévu la convocation d'une assemblée générale d'anciens membres de l'association ACMV par MM [V], [O] et [H], puisque seule une décision qui viendrait annuler les démissions de MM [V], [O] et [H] pourrait les remettre en fonction, mais une telle décision, qui n'a aucun fondement et qui n'a pas été prise, conduit nécessairement à établir que la remise en fonction de MM [V], [O] et [H] est impossible ;
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il prévu la convocation d'une assemblée générale d'anciens membres de l'association ACMV, puisque cela aboutirait à remettre en fonction les membres de l'association au jour de la convocation de l'assemblée générale du 13 octobre 2013 qui ont démissionné et que la remise en cause de ces démissions n'entre pas dans le périmètre de l'annulation de l'assemblée générale du 15 mars 2014, de sorte que la décision de convocation d'une assemblée générale est nécessairement infondée ;
- réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il prévu la convocation d'une assemblée générale d'anciens membres de l'association ACMV, puisqu'il ressort que l'annulation de l'assemblée générale du 15 mars 2014 ne peut remettre en cause les décisions ultérieures, ni les organes de direction actuels de l'association ACMV, de sorte que le jugement du 13 janvier 2020 ne peut décider la convocation d'une assemblée générale pour remplacer les organes de direction actuels régulièrement élus, et ce, en confiant la décision à des tiers qui ne sont plus membres de l'association ACMV.
Sur l'irrecevabilité et l'absence de réunion des conditions pour désigner un administrateur provisoire :
- juger que la demande de désignation d'un administrateur provisoire est irrecevable puisqu'elle constitue une demande nouvelle par rapport à l'assignation, et ce, en violation de l'article
4 du code de procédure civile et qu'elle intervient plus de 3 ans et 3 mois après l'assignation ;
- juger que la désignation d'un administrateur provisoire n'est possible qu'en cas de vacance de la direction de l'association ou de trouble manifestement illicite la paralysant, alors qu'en l'espèce que les dirigeants actuels ont été désignés par les membres de l'association et que l'association poursuit normalement son activité ;
En conséquence,
- confirmer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu'il a rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire ;
- débouter MM [N], [B] et [T] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
- condamner MM [N], [B] et [T] à régler à l'association et à MM [Z] et [V] une somme de 3000 euros chacun au titre de l'article
700 du code de procédure civile ;
- condamner MM [N], [B] et [T] aux entiers dépens d'instance dont distraction au profit de Maître Paul Le Gall.
Par conclusions déposées et notifiées le 22 août 2020, MM [N], [B] et [T] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement du 13 janvier 2020 du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence en ce qu'il a jugé les demandes de M. [N] recevables,
- infirmer le jugement du 13 janvier 2020 du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence en ce qu'il a jugé les demandes de M. [T] irrecevables, jugé les demandes de M. [B] irrecevables pour l'assemblée générale du 13 octobre 2020, rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
- confirmer le jugement en ce qu'il a annulé les délibérations de l'assemblée générale du 15 mars 2014, décidé que les membres du bureau en exercice avant l'assemblée générale du 13 mars 2013, sous le contrôle de M. [N], et M. [B], devront convoquer une nouvelle assemblée générale pour la désignation d'un nouveau conseil d'administration, en convoquant l'ensemble des personnes convoquées pour l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de désignation d'administrateur provisoire et au titre de la procédure abusive,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les défendeurs au titre de l'article
700 du code de procédure civile,
Statuant de nouveau :
- juger les demandes de M. [N] recevables,
- juger les demandes de M. [B] recevables,
- juger les demandes de M. [T] recevables,
- annuler les délibérations des assemblées des 13 octobre 2013 et 15 mars2014,
En tout état de cause, désigner un administrateur provisoire avec mission :
1- obtenir de la part des organes de direction, au besoin par la contrainte, les clés de l'immeuble appartenant à l'association, les titres de propriété, le registre d'adhérents pour les 2013 et suivantes s'il existe, le registre spécial obligatoire prévu par la loi, les PV d'assemblées générales et des conseils d'administration, la comptabilité, la liste des comptes ouverts auprès d'établissements bancaires ou financiers et l'ensemble des moyens de paiement y afférent, les conventions de subventions si elles existent,
2- gérer avec les plus larges pouvoirs l'association dans le respect de l'objet social et des statuts
3- recenser les membres de l'association par tout moyen,
4- organiser conformément aux statuts une assemblée générale ayant pour ordre du jour la désignation d'un nouveau conseil d'administration avec mission de désigner un nouveau bureau
- débouter les défendeurs de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions,
- condamner solidairement les défendeurs solidairement au paiement de la somme de
10 000 euros au titre de l'article
700 du code de procédure civile, ainsi les frais irrépétibles rendus nécessaires par leurs errements.
M. [KL] [RM], cité à sa personne, n'a pas constitué avocat.
La procédure a été clôturée le 4 juillet 2023.
MOTIFS
:
Sur les fins de non-recevoir :
- sur la qualité à agir de M. [E] [T] :
Les appelants versent aux débats la copie d'un courrier daté du 8 mars 2012 constituant la notification au sous-préfet, par l'Association culturelle des musulmans de [Localité 14], de la perte de la qualité de membre de six personnes dont M. [E] [T].
En l'état d'une décision de l'association n'ayant fait l'objet d'aucune contestation de l'intéressé, le premier juge a considéré à juste titre que M. [T], qui ne justifie pas avoir retrouvé la qualité de membre de l'association postérieurement à 2012, était irrecevable à agir en annulation de délibérations d'assemblées générales tenues en 2013 et 2014.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
- sur l'intérêt à agir de M. [B] en annulation des délibérations de l'assemblée générale du 13 octobre 2013 :
Ayant relevé que selon les termes du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 13 octobre 2013, M. [F] [B], mentionné comme présent lors de cette réunion, a voté en faveur de l'adoption des décisions soumises au vote, seul M. [N] ayant refusé la modification du bureau et ayant quitté la réunion sans voter, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que M. [B] était irrecevable à agir, pour défaut d'intérêt, en annulation de ces délibérations, le jugement étant également confirmé sur ce point.
- sur la qualité à agir de MM [B] et [N] en annulation des délibérations de l'assemblée générale du 15 mars 2014 :
Les appelants soutiennent que MM [B] et [N] seraient irrecevables à agir faute d'avoir réglé la cotisation à l'association ACMV pour l'année 2014 et en raison de la perte de leur qualité de membre de l'association.
Il sera relevé en premier lieu que les appelants ne sont pas fondés à se prévaloir de dispositions des statuts issues d'une modification intervenue le 6 décembre 2014, soit postérieurement à l'assemblée générale litigieuse.
La qualité de membre de l'association de MM [B] et [N] ainsi que leur droit à prendre part à l'assemblée générale doivent être appréciés au regard des statuts dans leur version en vigueur au 15 mars 2014.
Ainsi que le font valoir les intimés à juste titre, l'article 7 des statuts prévoit que la qualité de membre se perd par la démission, le décès ou la radiation prononcée par le conseil d'administration pour motif grave. Il en résulte que le non-paiement de la cotisation n'entraîne pas automatiquement la perte de la qualité de membre qui doit faire l'objet d'une décision de radiation formalisée par le conseil d'administration.
Il n'est pas contesté que MM [B] et [N], qui figurent comme administrateurs au procès-verbal de la réunion du 13 octobre 2013, étaient effectivement membres de l'association en 2013.
Les appelants ne justifiant ni de leur démission ni de leur radiation avant l'assemblée générale du 15 mars 2014, ne démontrent pas qu'ils n'étaient plus membres de l'association à la date de cette assemblée.
Les appelants soutiennent d'autre part que selon l'article 9 des statuts en vigueur jusqu'au 6 décembre 2014, l'assemblée générale ordinaire se réunit au moins une fois par an et comprend tous les membres de l'association à jour de leurs cotisations.
Ils en déduisent que MM [B] et [N], qui n'avaient pas réglé leur cotisation pour l'année 2014, n'avaient pas le droit de participer à l'assemblée générale du 15 mars 2014.
Il sera relevé en premier lieu que les appelants invoquent une règle applicable aux assemblées générales ordinaires alors que les délibérations dont ils poursuivent la nullité ont été prises en assemblée générale extraordinaire.
Les appelants, qui ne produisent aucune délibération fixant le montant de la cotisation pour 2014, aucun appel de cotisation antérieur à l'assemblée générale du 15 mars 2014 et ne justifient pas de la date d'exigibilité de la cotisation pour l'année 2014, ne sont pas fondés à soutenir que MM [B] et [N] n'étaient pas à jour du paiement de leur cotisation à la date de l'assemblée générale litigieuse, d'autant qu'en omettant de les convoquer à cette assemblée, l'association les a privés de la possibilité de régulariser leur cotisation à cette occasion.
La fin de non-recevoir soulevée par les appelants sera écartée, le jugement étant confirmé sur ce point.
Sur le fond :
- sur la demande d'annulation de l'assemblée générale du 13 octobre 2013 :
M. [N] soutient que la réunion du 13 octobre 2013 est en réalité un simulacre de conseil d'administration improprement qualifié d'assemblée générale extraordinaire.
Il rappelle que selon l'article 12 des statuts, le conseil d'administration devait comporter 20 membres et qu'en cas de vacance de poste, le conseil d'administration devait pourvoir provisoirement au remplacement de ses membres, que la présence de la moitié au moins de ses membres était nécessaire pour que le conseil d'administration puisse délibérer valablement et que le vote par procuration n'était pas autorisé.
Il prétend que le conseil d'administration s'est réuni alors que plusieurs postes d'administrateurs étaient vacants à la suite de démissions et non remplacés provisoirement, qu'il ne comptait que 14 membres au lieu de 20, que 9 personnes ont pris part au vote dont une par procuration, que la réunion est intervenue en l'absence de convocation régulière de l'ensemble des membres du conseil d'administration en exercice et sans que puisse être identifié l'auteur de la convocation.
Le procès-verbal de la réunion du 13 octobre 2013, versé aux débats, est intitulé 'assemblée générale extraordinaire'.
La lecture de ce procès-verbal révèle cependant que seuls les membres du bureau et du conseil d'administration, au nombre de 14 et dont la liste est reproduite, ont été convoqués à la réunion dont l'objet est la désignation d'un nouveau bureau à la suite de la démission de MM [Z], président, [I], trésorier, et [G], secrétaire, une telle désignation relevant bien de la compétence du conseil d'administration et non de l'assemblée générale, conformément à l'article 12 des statuts.
Il y est ainsi précisé que 'tous les membres du bureau et conseil d'administration ont été prévenus de l'objet de la réunion par courrier avec AR 15 jours avant la date du 13/10/2013' et que 8 personnes sont présentes plus une procuration de M. [J] [W] [X] 'donc au total 9 personnes sur 14 pour le vote'.
Il convient en conséquence de considérer que malgré un intitulé inapproprié, la réunion du 13 octobre 2013 est une réunion du conseil d'administration et non pas une assemblée générale des membres de l'association.
Les appelants versent aux débats une copie de la convocation adressée le 27 septembre 2013 pour le dimanche 13 octobre à 18h00 avec comme ordre du jour la modification des membres du bureau, ainsi que des accusés de réception de cette convocation.
M. [N] a bien été destinataire de la convocation et s'est d'ailleurs présenté à la réunion.
Le défaut de signature du président sur la convocation adressée au nom de l'association est une irrégularité mineure qui n'a porté aucune atteinte aux droits des administrateurs convoqués. Elle ne sera en conséquence pas retenue comme une cause de nullité de la délibération du conseil d'administration.
Les administrateurs sont choisis parmi les membres de l'association.
La règle fixant à 20 le nombre d'administrateurs ne peut être respectée que dans la limite du nombre d'adhérents susceptibles d'être candidats.
Les appelants soutiennent qu'à la date de la réunion litigieuse, l'association ne comptait que 14 membres et que la réunion de l'assemblée générale se confondait avec une réunion du conseil d'administration dont tous les adhérents étaient membres.
Les procès-verbaux d'assemblées générales tenues en 2002, 2003, 2011, versés aux débats, révèlent que l'association fonctionnait depuis de nombreuses années avec un nombre d'administrateurs inférieur à 20 (13 en 2002, 9 en 2003, 14 en 2011).
La modification des statuts votée le 6 décembre 2014 ramène d'ailleurs à 7 le nombre minimum d'administrateurs, ce qui confirme que le nombre de 20 était inadapté à la taille de l'association.
Dans ces conditions et compte tenu de la pratique antérieure, le non-respect du nombre de 20 administrateurs prévu aux statuts ne sera pas retenu comme une cause de nullité.
Il résulte des mentions du procès-verbal que même en faisant abstraction du vote par procuration que ne permettent pas les statuts, les délibérations du conseil d'administration ont été prises en présence de la moitié au moins de ses membres et à la majorité.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de 'l'assemblée générale' du 13 octobre 2013.
- sur la demande d'annulation de l'assemblée générale du 15 mars 2014 :
MM [B] et [N] prétendent qu'un groupe d'individus n'ayant pas la qualité de membres de l'association s'est emparé de celle-ci aux termes d'une prétendue assemblée générale frauduleuse et tenue sans convocation des adhérents et en dehors de tout cadre statutaire.
Les appelants reprochent au premier juge d'avoir inversé la charge de la preuve en retenant que l'association ne justifiait d'aucune convocation à l'égard des membres de l'association et notamment à l'égard de MM [N] et [B] alors que le procès-verbal de l'assemblée générale, dont les mentions font foi jusqu'à preuve contraire, précise que 'le 15 mars 2014 à 16h30, les membres de l'Association culturelle des musulmans de [Localité 14] se sont réunis au siège social en assemblée générale ordinaire sur convocation du président conformément aux dispositions des statuts'.
Cette mention rédigée en termes généraux n'a cependant qu'une force probante limitée en l'absence de référence à une liste précise de personnes convoquées. Le premier juge a considéré à juste titre qu'elle était insuffisante à contredire l'affirmation de MM [N] et [B] selon laquelle ils n'avaient pas été convoqués.
Le procès-verbal de l'assemblée générale relate que l'assemblée générale a procédé à l'élection des membres du conseil d'administration et comporte la liste des 20 membres élus.
Les appelants exposent qu'au début de l'année 2014, le nouveau président a organisé un appel à adhérer et cotiser à l'association auprès des fidèles de la mosquée Le Albani, entraînant un profond renouvellement des membres de l'association.
Ils produisent un document non daté intitulé 'adhérents année 2014' comportant une liste de 27 personnes dont le nom est suivi de la mention 'payé'.
Il se déduit de ces explications et de cette production que seules ont été convoquées à l'assemblée générale du 15 mars 2014, en plus de MM [M] [V] et [P] [O], membres du bureau démissionnaires, les personnes figurant sur cette liste, laquelle ne comprend aucun des membres convoqués le 13 octobre 2013.
Si le procès-verbal du conseil d'administration du 13 octobre 2013 mentionne bien la démission de MM [G], [I], [D] et [S] et que M. [Y] [H] atteste le 17 juin 2014 avoir démissionné de son propre gré, il n'est produit aucun justificatif concernant la perte de la qualité de membre de MM [K], [J], [RB], [L], tous membres de l'association en 2013 de même que MM [B] et [N].
Le fait que M [N] ait quitté la réunion du 13 octobre 2013 à la suite d'un désaccord sur l'ordre du jour et que M. [B] ait démissionné du bureau de l'association par courrier du 14 octobre 2013 ne caractérisent aucunement une volonté non équivoque de leur part de démissionner de l'association.
Par ailleurs, et comme énoncé précédemment par la cour, les appelants, qui ne produisent aucune délibération fixant le montant de la cotisation pour 2014, aucun appel de cotisation antérieur à l'assemblée générale du 15 mars 2014 et ne justifient pas de la date d'exigibilité de la cotisation pour l'année 2014, ne sont pas fondés à soutenir que MM [B] et [N] n'étaient pas à jour du paiement de leur cotisation à la date de l'assemblée générale litigieuse, d'autant qu'en omettant de les convoquer à cette assemblée, l'association les a privés de la possibilité de régulariser leur cotisation à cette occasion.
Faute pour les appelants d'établir que MM [N] et [B] ont été convoqués à l'assemblée générale du 15 mars 2014, le jugement sera confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation de l'ensemble des délibérations prises par cette assemblée générale.
- sur les conséquences de l'annulation et la demande de désignation d'un administrateur provisoire :
La décision du premier juge enjoignant aux membres du bureau en exercice, avant cette assemblée générale, sous le contrôle de MM [N] et [B], de convoquer une nouvelle assemblée générale pour la désignation d'un nouveau conseil d'administration, en convoquant notamment l'ensemble des personnes convoquées pour l'assemblée générale du 13 octobre 2013 se heurte au fait que d'une part, une partie des personnes convoquées pour le 13 octobre 2013 avaient démissionné dès avant le 15 mars 2014 et que d'autre part, de nouvelles assemblées générales ont été tenues depuis le 6 décembre 2014, date à laquelle il a été procédé à la révision des statuts, à l'adoption d'un règlement intérieur et à l'élection d'un nouveau conseil d'administration et de nouveaux dirigeants, que la composition du bureau a fait l'objet de plusieurs modifications par le conseil d'administration réuni annuellement, qu'en dernier lieu, une assemblée générale désignant un nouveau conseil d'administration s'est tenue le 17 février 2023, un nouveau bureau de six membres étant désigné dans la foulée.
Cette disposition du jugement, que l'écoulement de dix années de procédure prive de sens, sera en conséquence infirmée.
La demande de désignation d'un administrateur provisoire, présentée en première instance, est une demande incidente additionnelle, recevable au regard des articles
4 et
70 du code de procédure civile en ce que, fondée en partie sur de prétendus irrégularités et dysfonctionnements déjà invoqués à l'appui de la demande initiale en annulation de délibérations d'assemblées générales, elle se rattache à celle-ci par un lien suffisant.
La désignation judiciaire d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de l'association et menaçant celle-ci d'un péril imminent.
Il ressort des pièces produites par les appelants (notamment PV d'AG des 6/12/2014, 31/12/2015, 29/09/2017, 17/02/2023 et de réunions du conseil d'administration des 31/12/2015, 27/02/2016, 18/11/2016,30/12/2016, 3/03/2017,29/09/2017, 9/03/2018, 17/02/2023) que des assemblées générales et réunions du conseil d'administration sont tenues régulièrement depuis 2014, qu'il est pourvu à l'élection du conseil d'administration et du bureau, qu'une comptabilité des encaissements et décaissements est soumise à l'assemblée générale, qu'en dernier lieu, l'assemblée générale du 17 février 2023 a approuvé les comptes de l'association et désigné de nouveaux administrateurs qui ont eux-même désigné un nouveau bureau, le compte de résultat de l'association et une liste des membres étant annexés au procès-verbal de réunion de l'assemblée générale.
Les allégations des intimés relatives à l'absence de registre des adhérents et de registre des délibérations, à la prétendue irrégularité et opacité de la comptabilité et à l'existence d'un clivage entre les pratiquants sont insuffisantes à caractériser une entrave au fonctionnement de l'association et un péril menaçant l'association dans sa survie ou à tout le moins un risque d'atteinte très grave à son intérêt.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire .
Aucune des parties ne critique la disposition du jugement ayant rejeté la demande en dommages et intérêts présentée par les défendeurs pour procédure abusive, qui sera en conséquence également confirmée.
Chacune des parties succombant partiellement sur ses prétentions en cause d'appel conservera la charge des dépens et frais irrépétibles par elle exposés.
PAR CES MOTIFS
:
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit que M. [N] est recevable en ses prétentions,
- déclaré irrecevables les demandes de M. [T],
- déclaré irrecevable la demande de M. [B] mais uniquement concernant l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
- rejeté la demande d'annulation de l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
- annulé l'ensemble des délibérations prises par l'assemblée générale du 15 mars 2014,
- rejeté les autres demandes et notamment celle de désignation d'un administrateur provisoire et au titre d'une procédure abusive,
- condamné in solidum l'association culturelle des musulmans de [Localité 14], M. [KL] [RM] et M. [M] [V] à payer une somme totale de 2500 euros à MM [N] et [B] sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Infirme le jugement en ce qu'il a :
- dit que les membres du bureau en exercice, avant cette assemblée générale, sous le contrôle de MM [N] et [B], membres de l'association culturelle des musulmans de [Localité 14] à l'époque, devront convoquer une nouvelle assemblée générale pour la désignation d'un nouveau conseil d'administration, en convoquant notamment l'ensemble des personnes convoquées pour l'assemblée générale du 13 octobre 2013,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens et frais irrépétibles d'appel par elle exposés.
LE GREFFIER LE PRESIDENT