Cour d'appel de Versailles, Chambre 14, 15 octobre 2015, 14/09047

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Versailles
  • Numéro de pourvoi :
    14/09047
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance de Pontoise, 3 décembre 2014
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/60367fb85b95b223579652f1
  • Président : Madame Dominique DUPERRIER
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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2017-06-21
Cour d'appel de Versailles 14e chambre
2015-10-15
Tribunal de grande instance de Pontoise
2014-12-03

Texte intégral

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 82C 14e chambre

ARRÊT

N° contradictoire DU 15 OCTOBRE 2015 R.G. N° 14/09047 AFFAIRE : SNCF MOBILITES EPIC C/ CHSCT - COMITÉ D'HYGIÈNE DE SÉCURITÉ ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL DE L'UPT DE [Localité 2] [Localité 3] Décision déférée à la cour : ordonnance rendue le 03 Décembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE N° RG : 13/01168 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : Me Corinna KERFANT Me Claire TOUTAIN RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE QUINZE, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : SNCF MOBILITES EPIC pris en la personne de son président en exercice [Adresse 1] [Localité 1] Représenté par Me Corinna KERFANT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 19 assisté de Me Marie-Christine GHAZARIAN HIBON, avocat au barreau de PARIS APPELANTE **************** CHSCT - COMITÉ D'HYGIÈNE DE SÉCURITÉ ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL DE L'UPT DE [Localité 2] [Localité 3] représenté par M. [X] [K] (secrétaire du CHSCT) [Adresse 2] [Localité 2] Représenté par Me Claire TOUTAIN, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire 231 - N° du dossier 1501001 assisté de la SCP FABIGNON-LARDON-GALEOTE-EVEN-REMOISSONNET-KRAMER-ALLARD-REBOURCET, avocat INTIMÉE **************** Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 02 Septembre 2015, Madame Dominique DUPERRIER, présidente ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de : Monsieur Jean-Michel SOMMER, président, Madame Dominique DUPERRIER, président, Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Agnès MARIE FAITS ET PROCÉDURE L'établissement public et commercial de la SNCF est organisé autour de la Présidence, de Directions centrales attachées à la Présidence, de Directions régionales et d'Etablissements locaux. Chaque région comporte un certain nombre d'établissements ; chaque établissement est en principe spécialisé dans une activité ou un domaine particulier (commercialisation voyageurs, gestion des contrôleurs, gestion de lignes dédiées, entretien du matériel roulant, gestion des agents de conduite, etc...). Les établissements sont organisés, outre leur propre siège et pôles d'appui, en plusieurs sites 'Unités' opérationnelles ou de production (U.O et U.P). Localement, une centaine de CHSCT sont implantés en lien avec un Comité d'Etablissement Régional. Selon le Référentiel RH 0323 (accord collectif du 11janvier 1996), dans chaque établissement, les CHSCT sont mis en place auprès des unités de production ou opérationnelles (ou regroupement d'unités) dont l'effectif est au moins égal à 120 agents ou auprès de l'établissement lorsque celui-ci ne comporte pas d'U.P ou d'U.O. Pour la Région SNCF de Paris Nord est institué le CER de Paris Nord et la Région abrite, entre autres l'Etablissement Traction Nord Parisien (E.T.N.P). Ce dernier est lui-même composé de cinq pôles d'appui (ressources humaines, qualité sécurité, production, gestion finances et formation) et de sept unités opérationnelles : l'U.P IDF, UP GL, UP CRML, UP [Localité 4], UP [Localité 6], UP [Localité 2] [Localité 3]. Quatre C.H.S.C.T sont institués au sein de l'Etablissement Traction Nord Parisien, dont le CHSCT de l'U.P Traction de [Localité 2] [Localité 3]. L'Unité de production de [Localité 2] [Localité 3] a émis le 11 septembre 2013, une note de consultation des membres du CHSCT de l'U.P Traction portant sur deux projets distincts. Le premier relatif à la requalification d'un poste de gestionnaire de moyens de catégorie D en catégorie E, le second relatif à la modification des roulements au sein du pôle gestion des moyens. Suivant acte délivré le 29 novembre 2013, la SNCF a délivré assignation au C.H.S.C.T à comparaître devant le président du tribunal de grande instance de Pontoise, afin d'obtenir l'annulation de la délibération prise le 15 octobre 2013 fixant le principe d'une expertise. La SNCF a relevé appel de l'ordonnance rendue le 3 décembre 2014 par le président du tribunal de grande instance de Pontoise, statuant en la forme des référés, qui, au visa des articles L 4514-12, L 4614-13, R 4614-18, R 4614-19 et R 46146-20 du code du travail, a : - déclaré la demande de la SNCF irrecevable, - condamné la SNCF à payer au CHSCT de l'unité de Production Traction de [Localité 2] [Localité 3] la somme de : - 2.000 euros à titre de dommages et intérêts, - débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, - rappelé que l'exécution provisoire de la procédure est de droit en vertu de l'article 514 du code de procédure civile, - condamné la SNCF à payer au CHSCT de l'unité de Production Traction de [Localité 2] [Localité 3] la somme de : - 2.000 euros sur le fondement de l'article L 4614-13 du code du travail, - condamné la SNCF aux dépens. La SNCF MOBILITES, nouvelle dénomination de l'EPIC à compter du 1er janvier 2015, demande à la cour, au visa des articles précités, de : - réformer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, statuant à nouveau, - prononcer l'annulation de la délibération du CHSCT de l'unité de Production Traction de [Localité 2] [Localité 3] du 15 octobre 2013 fixant le principe d'une expertise et les modalités de sa mise en oeuvre, - condamner le CHSCT de l'unité de Production Traction de [Localité 2] [Localité 3] aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de maître Corinna Kerfant, avocat, par application de l'article 699 du code de procédure civile. Par conclusions régulièrement signifiées et déposées le 24 mars 2015, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, le CHSCT demande à la cour, à titre principal, de : - confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a jugé la SNCF irrecevable en sa demande et en ce qu'elle a consacré le principe d'un trouble manifestement illicite au détriment du CHSCT, - condamner la SNCF à lui payer la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le trouble manifestement illicite à son détriment, - formant appel incident, de : - condamner la SNCF à lui payer la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts pour ce chef de préjudice, - y ajoutant, - condamner la SNCF MOBILITES à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, - condamner la SNCF Mobilités en tous les dépens, à titre subsidiaire, - dire et juger la SNCF mal fondée en ses demandes, - l'en débouter, - condamner la SNCF Mobilités à lui payer les sommes de : - 4.000 euros à titre de dommages et intérêts pour trouble manifestement illicite, - 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance, - 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, - et en tous les dépens.

MOTIFS

DE LA DÉCISION , L'article L. 4612-8 du code du travail énonce que : ... 'le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail'... Selon l'article L. 4614-12, ' le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé : (...) 2° En cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévu à l'article L. 4612-8. Les conditions dans lesquelles l'expert est agréé par l'autorité administrative et rend son expertise sont déterminées par voie réglementaire'. Le second alinéa de l'article L. 4614-13 du code du travail précise que les frais d'expertise sont à la charge de l'employeur et prévoit que l'employeur qui entend contester la nécessité de l'expertise, la désignation de l'expert, le coût ou le délai de l'expertise, saisit le juge judiciaire. I - Sur le caractère tardif de la contestation de la société SNCF Mobilités : Il résulte de la combinaison des articles R. 4614-18, R. 4614-19 et R. 4614-20 du code du travail que l'expertise faite en application de 2° de l'article L. 4614-12 doit être réalisée dans un délai d'un mois pouvant être porté à 45 jours et que la contestation de l'employeur est formée devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés et en urgence. Si aucun texte n'impartit de délai à l'employeur pour saisir le juge de sa contestation, il doit cependant agir dans un délai raisonnable, le législateur ayant entendu que cette contestation soit tranchée avec célérité compte tenu, d'une part, du délai imposé à l'expert pour réaliser l'expertise et, d'autre part, de l'urgence dans laquelle l'affaire doit être jugée. Le délai raisonnable doit être compté depuis la délibération du CHSCT dont l'employeur a nécessairement eu immédiatement connaissance, soit le 15 octobre 2013. Le 11 septembre 2013 le CHSCT de l'Union de Production de [Localité 2] [Localité 3] a été convoqué à une réunion fixée au 26 septembre suivant afin, notamment, d'être consulté sur les projets de re-qualification du poste de gestionnaire de moyens et sur la modification des roulements. En vue de cette réunion, un document a été remis aux membres du CHSCT. La première réunion s'est tenue le 26 septembre 2013 ; faute de temps, tous les points à l'ordre du jour n'ont pu être examinés. La discussion sur le premier point en litige a donné lieu à un avis défavorable ; la discussion sur le second point a été ajournée au 15 octobre suivant. Le 9 octobre 2013, un membre et le secrétaire du CHSCT ont demandé au président du CHSCT l'organisation d'une réunion extraordinaire du CHSCT, conformément à l'article L .4614-10 du code du travail, afin de pouvoir être consulté sur la globalité du projet. Le 11 octobre 2013, la direction de la SNCF a convoqué le CHSCT à une réunion extraordinaire pour le 23 octobre 2013. Lors de la réunion du 15 octobre 2013, le CHSCT de Traction de [Localité 2] [Localité 3] a considéré qu'il s'agissait de la suite de la première réunion dont les décisions n'avaient pas un caractère définitif et a voté le recours à une mesure d'expertise conformément aux dispositions de l'article L 4614-12 du code du travail destinée à l'aider à répondre à certaines interrogations laissées sans réponses, et à ses préoccupations en termes de conditions de travail, de santé et d'impact sur les salariés afin de lui permettre d'émettre un avis motivé. Par lettre recommandée du 24 octobre 2013, l'E.P.I.C de la S.N.C.F a notifié au secrétaire du C.H.S.C.T sa contestation du bien fondé du recours à un expert et sa décision de saisir la justice. Elle a engagé sa contestation suivant acte délivré le 29 novembre 2013 au CHSCT d'avoir à comparaître devant le président du tribunal de grande instance de Pontoise, afin d'obtenir l'annulation de la délibération fixant le principe d'une expertise. L'information du CHSCT par l'employeur de ce qu'il conteste le bien-fondé du recours à une mesure d'expertise est sans effet sur l'obligation qui pèse sur lui, en vertu des textes précités, d'exercer son recours judiciaire dans des délais qui permettent au juge de se prononcer dans l'urgence. Compte tenu de la réunion intermédiaire qui s'est tenue le 23 octobre 2013, portant sur le même objet, la mise en oeuvre effective du recours suivant acte délivré le 29 novembre 2013 par la SNCF ne peut être considérée comme tardive. L'ordonnance déférée est infirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable la contestation de l'employeur. II - Sur le fond : a) sur la validité de la mesure d'expertise : La SNCF soutient d'une part, que l'avis négatif émis par le CHSCT le 26 septembre 2013 sur le premier point relatif à la requalification d'un poste de gestionnaire de moyens de catégorie GM en catégorie E fait obstacle au recours à une mesure d'expertise qui doit nécessairement précéder l'avis ; que d'ailleurs, à l'issue de cet avis, elle a mis en place son projet. Le CHSCT soutient que la SNCF a scindé le point C en deux questions et que l'avis émis le 26 septembre 2013 ne porte que sur l'une des questions alors qu'elles sont indissociables. Il ajoute que cette requalification impacte l'organisation GM de [Localité 5] et encore et surtout celle de [Localité 2] ainsi que des conducteurs de ces deux sites soit respectivement 88 et 95 conducteurs. A l'issue de la réunion du 26 le président du CHSCT a indiqué : ...'un nouveau projet de roulement sera proposé', question retirée par la suite par l'employeur. Par conséquent, le CHSCT ne s'est pas prononcé sur le nouveau projet de roulement. Or, il résulte des différents documents produits aux débats que la modification de la qualification d'un poste de D en E s'accompagne également d'un redéploiement du poste puisque la mission du titulaire est modifiée notamment par une mise à disposition au site d'[Localité 5]. Cette modification du contenu de la fiche de poste et de son redéploiement géographique a nécessairement un retentissement sur l'organisation générale du roulement du service comportant plusieurs agents quand bien même la SNCF a retiré cette question de sa demande d'avis. Dès lors, il ne peut être considéré que l'avis négatif pris le 26 septembre 2013 par le CHSCT était définitif et faisait obstacle à sa décision prise postérieurement le 15 octobre 2013 du recours à une mesure d'expertise. b) sur la nécessité de la mesure d'expertise : La SNCF Mobilités soutient que la requalification d'un seul poste, justifiée par l'accomplissement de tâches supplémentaires ponctuelles, ne constitue pas un 'projet important' au sens des dispositions du code du travail. Elle soutient que le point sur lequel l'expertise pourrait porter est la modification des roulements sur laquelle le CHSCT n'a pas émis d'avis ; le projet ayant été abandonné, l'expertise envisagée est en toute hypothèse sans objet. Elle expose que : - le gestionnaire de moyens est un agent qui assure la gestion des plannings des agents de conduite, - il est en lien direct avec ces derniers, - au sein de L'UP de [Localité 2] [Localité 3], il existe 4 postes de gestionnaire de moyens, qualification D, - l'un deux est parti en formation qualifiante au mois de juillet et n'a plus vocation à revenir au sein du bureau de commande de L'UP Traction Persan Beaumont, - son remplacement était donc nécessaire, - dans le même temps, l'annexe de L'UP de [Localité 2] [Localité 3] située à [Localité 5] a sollicité de l'aide auprès du bureau de commande de [Localité 2] [Localité 3] pour son chef de feuille dans la réalisation de certaines tâches, - le chef de feuille, supérieur hiérarchique des gestionnaires de moyens, veille à l'harmonisation de leur travail et assure donc des fonctions essentiellement managériales, - pour autant, un poste à plein temps au sein de l'annexe d'[Localité 5] n'était pas nécessaire, s'agissant d'une aide ponctuelle, - pour cette raison il a été envisagé de procéder à la requalification du poste de gestionnaire de moyens de l'UP de [Localité 2] [Localité 3], - le nouveau gestionnaire de moyens, placé à la qualification E, supérieure à la qualification D, a pour charge complémentaire d'aider ponctuellement le chef de feuille de l'annexe de l'UP située à [Localité 5], - ce projet a fait l'objet d'une consultation auprès du CHSCT lors de la réunion du 26 septembre qui a reçu un avis défavorable, - il a été envisagé une modification des roulements, c'est-à-dire des plannings mis en place au sein de L'UP de [Localité 2] [Localité 3], - en effet, les roulements actuels prévoient deux journées de disponibilité par semaine pour les GM, - à ces occasions, les agents en disponibilité sont effectivement présents sur leur poste de travail mais en sureffectif et à la disposition de leur hiérarchie, - leur présence n'est donc pas nécessaire et l'UP Traction de [Localité 2] [Localité 3] souhaitait remédier à cette situation, - le projet devait être présenté au CHSCT lors de la réunion du 26 septembre mais tous les documents pouvant permettre au CHSCT de rendre un avis n'étant pas réunis, la consultation a été reportée, - finalement le projet a été abandonné. Le CHSCT réplique que le projet est important au sens de l'article L. 4614-12 du code du travail puisque le poste GM présente les caractéristiques suivantes : - il s'agit d'un poste de gestionnaire de moyens qui sert à organiser et préparer le travail des conducteurs notamment, - le poste de GM de jour en roulement constitue une 'réserve' en ce qu'il sert de variable d'ajustement à la programmation lorsqu'un GM est absent, - en fonction de la qualification dudit GM les compétences et les fonctions sont différentes. Il précise qu'il en résulte d'une part, qu'en requalifiant E un poste de GM, manifestement l'employeur impacte l'organisation GM de [Localité 5] et encore et surtout celle de [Localité 2] ainsi que l'organisation des conducteurs ; d'autre part, que l'absence d'embauche en remplacement du poste GM requalifié impacte sur [Localité 5] 88 conducteurs et sur [Localité 2] 95 conducteurs. Le CHSCT soutient que dans ce contexte, la modification envisagée est donc plus importante et ce d'autant que si l'employeur tente de 'partager' le temps de travail d'un GM, ledit GM va se voir imposer une mobilité géographique avec une méconnaissance des postes conducteurs et des agents qu'il doit gérer. Il ajoute que cette importance est d'autant plus prouvée que de façon incompréhensible, la SNCF aurait pu affecter un GM de [Localité 7] sur [Localité 5] puisqu'[Localité 5] dépend de l'Ile de France et non de [Localité 2]. Cette incidence est démontrée par les questions soulevées par le CHSCT le 15 octobre 2013. La cour constate qu'il résulte de la partie du compte-rendu de cette réunion diffusée le 25 octobre 2013, que les points de désaccords entre la direction de l'unité de production et le CHSCT concernent notamment les éléments suivants : - la grille de repos actuelle des GM développe plus que les 114 repos minimum réglementaires alors que le projet de requalification du poste et son affectation partielle en soutien à l'unité d'[Localité 5] ramènera la grille à 113,75 repos, inférieur à la réglementation, - l'agent en qualification E effectuera, pour partie de son temps de travail, les mêmes tâches que ses collègues du site de [Localité 2] [Localité 3] avec un salaire supérieur ce qui engendrera une inégalité de traitement entre ces différents agents, - le programmateur d'[Localité 5] est effectivement surchargé par l'exécution de tâches de plus en plus nombreuses. Le CHSCT et la direction sont en opposition sur la réorganisation du travail destinée à pallier cette situation. La direction a transformé un poste de qualification D en poste de qualification E, par conséquent rémunéré à un taux supérieur, affecté sur deux sites : [Localité 2] [Localité 3] et [Localité 5]. Le CHSCT préconise d'une part, l'embauche d'un personnel D sur [Localité 2] [Localité 3] en remplacement de la personne en formation et également, la création d'un poste supplémentaire à plein temps à [Localité 5] de qualification E qui trouvera des candidats parmi les agents de catégorie E de l'entreprise. Cette discussion porte sur la consistance de l'effectif et plus précisément sur l'option entre le reploiement d'un poste avec qualification supérieure sur deux sites soutenu par la direction ou sur le maintien d'un quatrième poste D de gestionnaire de gestion et, conjointement, de la création d'un poste supplémentaire à plein temps avec une qualification supérieure sur le site d'[Localité 5] soutenu par le CHSCT. Les termes de la mission d'expertise sont énoncés ainsi : ... : ' - étudier l'adéquation charge/ressource en GM à PNB (IDF), à ERT, à PEB en fonction des tâches et des horaires d'ouverture, - lister précisément toutes les tâches qui incombent au GM de jour à ERT et vérifier que celui-ci est bien en mesure de les effectuer sur son temps de présence, - étudier la question du stress au travail induite par la flexibilité (horaire et géographique) du poste à qualification E envisagé, - étudier la question de l'inégalité de traitement dans la mesure où le poste à qualification E, quand il sera à [Localité 2], fera le même travail que les GM qui sont eux sur un poste à qualification D, - exiger de la direction qu'elle respecte la règlementation du travail (RH 077) dans le montage d'une grille de repos pour les GM si elle souhaite la modifier, - faire respecter le CO GM actuel à PEB, - comprendre pourquoi si ERT est une annexe de PNB IDF, la direction souhaite-t-elle que ce soit PEB qui couvre en partie le poste de GM à ERT, - définir comment [Localité 5] peut aujourd'hui rester une annexe et non une UP à part entière au sein de l'ETNP de par son effectif et de par le fait de son affectation à la ligne C du RER ' Le cabinet devra diagnostiquer les évolutions à venir, et leurs effets sur les conditions de travail et de santé de l'ensemble des salariés et de l'UP Traction de [Localité 2] [Localité 3]. ...'. A l'exception de la dernière phrase rédigée en termes très généraux, les termes de la mission n'ont pas pour objet de rechercher si le projet de la direction est de nature à modifier l'organisation du travail des agents de conduite et son impact en terme de santé et de sécurité au travail. Ils portent sur la consistance du poste de Gestionnaire de Moyens requalifié, ainsi que, sur la pertinence des choix de la direction en ce qui concerne l'organisation entre les différentes unités de production. La modification envisagée, telle que décrite ci-dessus de façon exhaustive, ne constitue pas une modification importante des conditions d'hygiène et de sécurité ou les conditions de travail au sens de l'article L. 4612-8 du code du travail et par conséquent, n'autorise pas le recours à une mesure d'expertise préalable destinée à aider le CHSCT à donner son avis sur le projet de la direction. La cour annule l'expertise ordonnée par le CHSCT le 15 octobre 2013. III - Sur le trouble illicite : Ainsi qu'il a été dit à bon droit par le premier juge, l'opposition de l'employeur à l'exercice de la mission d'expertise constitue un trouble manifestement illicite résultant de la violation évidente de la règle de droit issue des dispositions de l'article L 4614-13 du code du travail. Dans un courrier daté du 14 novembre 2011, l'inspection du travail a rappelé à l'employeur les obligations qui lui incombent dans la mise en oeuvre de l'expertise décidée par le CHSCT de nature à caractériser l'entrave en cas de manquement. Le 25 novembre 2013, l'employeur a refusé l'accès à l'expert désigné par le CHSCT aux locaux et aux documents de l'entreprise. Ce refus constitue un trouble manifestement illicite indépendamment de l'annulation ultérieure de cette décision par le présent arrêt alors que, notamment, le recours de l'employeur n'a aucun effet suspensif sur la décision du CHSCT de recourir à une expertise avant de rendre son avis. Il justifie la condamnation de l'employeur à payer au CHSCT la somme provisionnelle de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts telle qu'arbitrée par le premier juge. La décision déférée est confirmée sur ce point. IV - Sur les mesures accessoires : En application de l'article L 4614-13 du code du travail il convient de condamner la SNCF Mobilités à payer au CHSCT la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par ce dernier en cause d'appel. La SNCF Mobilités est condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

; La cour, Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, INFIRME l'ordonnance déférée en ce qu'elle a : - déclaré la demande de la SNCF irrecevable, Statuant à nouveau : REJETTE le moyen tiré de la tardiveté de la demande, CONFIRME l'ordonnance pour le surplus, Y ajoutant, ANNULE la décision ordonnant une mesure d'expertise prise le 15 octobre 2013 par le CHSCT de l'unité de Production Traction de [Localité 2] [Localité 3], CONDAMNE la SNCF Mobilités aux dépens d'appel. Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Jean-Michel SOMMER, président et par Madame Agnès MARIE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Le greffier,Le président,