AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mme X..., embauchée le 25 octobre 1995 par la société Clean Services, en qualité d'agent de propreté à temps partiel, a, par lettre du 27 avril 1997, fait parvenir à l'employeur une réclamation concernant le remboursement de ses frais de déplacements et ses heures de travail, annonçant qu'elle cesserait le travail en l'absence de règlement ; que le 3 mai 1996, elle adressait une nouvelle réclamation ; qu'elle a saisi le 8 juillet 1996 le conseil de prud'hommes d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement de rappel de salaires et d'indemnités et s'est inscrite à l'ANPE le 15 août 1996 ; qu' elle a été licenciée le 11 octobre 1996 pour faute grave, l'employeur invoquant une absence injustifiée ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le moyen unique du pourvoi formé par la salariée :
Vu les articles
L. 122-4 et
L. 122-14-3 du Code du travail ;
Attendu que la cour d'appel énonce que la rupture du contrat de travail n'est pas imputable à l'employeur et que la salariée doit être déboutée de ses demandes d'indemnité de préavis et de dommages-intérêts ;
Attendu, cependant, que lorsque l'employeur et le salarié sont d'accord pour admettre que le contrat de travail a été rompu, chacune des parties imputant à l'autre la responsabilité de la rupture, il incombe au juge de trancher le litige en disant quelle est la partie qui a rompu ; qu'à défaut d'une démission claire et non équivoque d'un salarié, il est impossible de lui imputer la rupture et que l'employeur, qui ne verse pas les rémunérations dues à leur échéance, provoque la rupture du contrat de travail qui s'analyse en un licenciement ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle n'avait pas relevé de démission claire et non équivoque de la salariée, et qu'elle avait condamné l'employeur à payer à la salariée des rappels de salaire et des remboursements de frais afférents à plusieurs mois de travail, ce dont il résultait que celui-ci avait manqué à ses obligations et que la rupture s'analysait en un licenciement, la cour d'appel a méconnu son office et violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article
627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure , en cassant partiellement sans renvoi, de mettre partiellement fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS
:
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes relatives à la rupture, l'arrêt rendu le 22 juin 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que la rupture s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi de ce chef ;
Renvoie afin qu'il soit statué sur les conséquences de la rupture ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille trois.