Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 19 janvier 2023, 21/15464

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
  • Numéro de pourvoi :
    21/15464
  • Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
  • Décision précédente :tribunal de grande instance de Toulon, 21 juin 2018
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/63ca42069066fd7c90fc22f5
  • Président : M. Gilles PACAUD
Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel d'Aix-en-Provence
2023-01-19
tribunal judiciaire de Toulon
2021-10-26
tribunal de grande instance de Toulon
2018-06-21

Texte intégral

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE Chambre 1-2

ARRÊT

DU 19 JANVIER 2023 N° 2023/46 Rôle N° RG 21/15464 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIKOL [S] [A] [J] [X] épouse [A] C/ [N] [K] épouse [B] Copie exécutoire délivrée le : à : Me Elric HAWADIER Me Dorothée BRUNET Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de TOULON en date du 26 octobre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/00451. APPELANTS Monsieur [S] [A] né le 07 janvier 1955 à [Localité 3] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1] Madame [J] [X] épouse [A] née le 21 août 1958 à [Localité 4] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1] représentés par Me Elric HAWADIER de la SELARL CABINET HAWADIER-RUGGIRELLO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant INTIMEE Madame [N] [K] épouse [B] née le 18 février 1932 à [Localité 4], de nationalité Française, demeurant [Adresse 5] représentée par Me Dorothée BRUNET, avocat au barreau de TOULON, plaidant *-*-*-*-* COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 29 novembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme OUVREL, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries. La Cour était composée de : M. Gilles PACAUD, Président Mme Catherine OUVREL, Conseillère rapporteur Mme Angélique NETO, Conseillère qui en ont délibéré. Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE. Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2023. ARRÊT Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 janvier 2023, Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *** EXPOSÉ DU LITIGE Monsieur [O] [K], bailleur, avait consenti aux époux [U] un bail commercial portant sur des locaux situés [Adresse 2], lesquels comprenaient une salle de bar, un appartement, outre une chambre avec débarras et salle d'eau. Ce bail avait également pour objet une très grande salle de bal située à l'extrémité de la terrasse de l'établissement, et constituant un bâtiment indépendant non utilisable depuis de nombreuses années. Après un arrêté administratif pris compte tenu de l'état de délabrement avancé de cette salle de bal, il fut convenu le 5 août 1974, entre monsieur [O] [K] et monsieur [U] que, pour des raisons de sécurité, 'ce local ne serait plus utilisé en vue de toute exploitation commerciale et, pour ce faire, monsieur [U] avait convenu d'en barricader l'accès aux moyens de chaînes et cadenas donc il détiendra personnellement les clés'. Par acte authentique du 17 février 1986, les époux [U] ont cédé ce bail aux époux [A]. Le 18 février 1986, un protocole d'accord additif a été pris entre le bailleur et monsieur [S] [A], ce dernier a admis que les prescriptions prises relatives à la prévention des lieux loués étaient toujours en vigueur, et que les précautions nécessaires seraient prises et respectées par le nouveau preneur comme le faisait l'ancien. Un protocole d'accord de renouvellement a été signé le 10 août 1989 entre monsieur [O] [K] et les époux [A], aux termes duquel il a été précisé : 'en ce qui concerne la grande salle de bal, ainsi dénommée dans le bail du 30 mai 1979, incorporée dans la désignation ancienne du bail à renouveler, mais fermée par arrêté administratif depuis 1973-1974, les époux [A] [S] précisent qu'ils auront sans doute l'intention de la rénover et de la mettre en harmonie avec les normes actuelles de sécurité, en vue de son exploitation. Pour l'instant, les réserves émises par le propriétaire quant à sa responsabilité civile au cas où elle serait résiliée sans son accord, restent et demeurent toujours valables'. Le 19 octobre 1989, le bail commercial a été renouvelé par monsieur [O] [K], bailleur, à monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A], preneurs, sur ces locaux. Madame [N] [K] épouse [B], intervenant aux droits de son père, bailleur, après le décès de celui-ci, s'est opposée à ses locataires dans un contentieux à la suite de la délivrance le 29 septembre 2007, d'un congé avec refus de renouvellement et offre de paiement d'une indemnité d'éviction. Par jugement du 21 juin 2018, le tribunal de grande instance de Toulon a : - prononcé la résiliation du bail aux torts exclusifs des preneurs, pour défaut de paiement des taxes foncières, à compter du 19 novembre 2012, - dit n'y avoir lieu à indemnité d'éviction, - ordonné l'expulsion des époux [A] et de tous occupants de leur chef avec si besoin le concours de la force publique, à compter du mois de la signification du jugement, - fixé une indemnité d'occupation mensuelle de 1 100 € à compter du 19 novembre 2012 incluant le montant des charges, mais non celui des taxes et impôts prévus par le bail, - condamné les époux [A] à payer la somme de 30 077 € au titre des taxes foncières au 12 décembre 2017. Ce jugement a été frappé d'appel. Le 13 octobre 2020, une ordonnance de sursis à statuer a été prise par le conseiller de la mise en état en raison de l'expertise en cours sur le montant de l'indemnité d'éviction. Le 29 juin 2018, les époux [A] informaient madame [N] [K] épouse [B] de l'effondrement d'une partie de la toiture de la salle de bal. Le 20 juin 2019, une expertise amiable contradictoire avait lieu. Compte tenu de la présence révélée d'amiante, provenant de la brisure de plaques d'amiante entreposées dans les locaux qui n'auraient pas été un élément constitutif de la toiture, les époux [A] ont cessé d'exploiter le fonds de commerce. Par jugement du tribunal de commerce de Toulon du 18 juin 2019, le époux [A] ont été placés sous sauvegarde judiciaire. A la demande des époux [A], par ordonnance de référé du 17 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Toulon a ordonné une expertise afin de déterminer l'origine de l'amiante présente dans la salle de bal. En revanche, la demande de provision des époux [A] a été rejetée. Le rapport d'expertise a été déposé le 4 janvier 2022. Les preneurs ont cessé de payer les loyers à compter du deuxième trimestre 2020. Après une mise en demeure du 7 mai 2020, madame [N] [K] épouse [B] a procédé, le 3 septembre 2020, à une déclaration de créance relative aux loyers non réglés au titre de l'année 2020 auprès du mandataire des époux [A]. Par acte du 14 décembre 2020, madame [N] [K] épouse [B] a fait délivrer aux époux [A] et à leur mandataire un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail. Le 16 décembre 2020, les époux [A] ont consigné l'intégralité de ces sommes, soit 7 421,34 €, sur le compte professionnel de leur conseil. Par jugement du tribunal de commerce de Toulon du 28 janvier 2021, un plan de sauvegarde sur 7 ans a été prononcé avec apurement des dettes à compter du 1er janvier 2022. Par acte du 3 février 2021, monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] ont saisi le juge des référés aux fins que la suspension de l'obligation de paiement des loyers soit ordonnée tant que les locaux n'auront pas été remis en état d'exploitation normale, et, à titre subsidiaire, aux fins d'être autorisés à consigner le montant des loyers avec suspension des effets de la clause résolutoire. Par ordonnance en date du 26 octobre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Toulon a : dit n'y avoir lieu à référé, rejeté toutes demandes plus amples ou contraires, condamné les époux [A] au paiement des dépens. Le premier juge a estimé, d'une part, qu'il n'appartient pas au juge des référés de faire obstacle au plan de sauvegarde décidé par le tribunal de commerce, d'autre part, que la cour était toujours saisie du litige relatif à la résiliation du bail dans la mesure où le sursis à statuer ne la dessaisit pas, et, enfin, que la demande d'acquisition de la clause résolutoire pour non paiement des loyers au titre de 2020 se heurte à une contestation sérieuse puisqu'ayant fait l'objet d'une déclaration de créances. Selon déclaration reçue au greffe le 2 novembre 2021, monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] ont interjeté appel de la décision, l'appel portant sur toutes les dispositions de l'ordonnance déférée dûment reprises. Par dernières conclusions transmises le 8 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] demandent à la cour : de réformer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, À titre principal : d'ordonner la suspension de l'obligation de paiement des loyers tant que les locaux n'auront pas été remis en état d'exploitation normale, À titre subsidiaire : de les autoriser à consigner le montant des loyers et d'ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire dans l'attente d'une décision à intervenir sur l'exigibilité des loyers tant que les locaux ne seront pas de nouveau exploitables, Sur appel incident : de débouter madame [N] [K] épouse [B] de sa demande reconventionnelle comme étant irrecevable et faute de justification de la dénonce aux créanciers nantis, de juger madame [N] [K] épouse [B] infondée compte tenu des demandes principales du locataire et de l'engagement de ce dernier de respecter les modalités de paiement qui seront définies s'il n'est pas fait droit à sa demande principale, En tout état de cause : de condamner madame [N] [K] épouse [B] à lui payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens. Les époux [A] imputent à la bailleresse l'inexploitation du local commercial en l'absence de toute clause du bail prévoyant que les conséquences de la vétusté puissent être à la charge du locataire, à raison de la non conformité électrique imputable au bailleur. Les appelants critiquent la décision entreprise. Ils font valoir que leur demande de suspension des loyers concerne les loyers échus après le jugement de redressement judiciaire, de sorte qu'aucune interférence avec le plan de sauvegarde qui concerne les créances antérieures n'est à craindre. De même, ils indiquent qu'aucune déclaration de créance n'a été faite au titre de ses loyers postérieurs pour lesquels la suspension de paiement ou la consignation est sollicitée. Ils font valoir que le litige déjà soumis et pendant devant la cour ne porte pas sur le même objet puisque celui-ci ne concerne en rien les suites de l'effondrement de la toiture de la salle de bal. Les appelants indiquent avoir saisi le juge du fond ensuite du dépôt du rapport d'expertise qui établirait, selon eux, qu'il existe une impossibilité d'exploiter les locaux dans leur ensemble compte tenu de l'effondrement de la toiture de la salle de bal et de la contamination à l'amiante de l'ensemble des locaux loués. Ils soutiennent que l'expertise établirait leur absence de responsabilité quant à la présence d'amiante. Ils dénoncent le défaut de conformité de l'installation électrique. Ils invoquent le confinement décidé en France comme cause de non exploitation de leur fonds. Les appelants démentent le fait que le tribunal de commerce ait arrêté un plan de sauvegarde sur la base de fausses déclarations. Ils invoquent le caractère définitif du jugement de sauvegarde et son opposabilité, de sorte que le tribunal de commerce n'avait pas à connaître du litige postérieur, né entre eux et madame [N] [K] épouse [B]. Enfin, les appelants font valoir que la demande de résiliation du bail ne peut prospérer faute de dénonce du commandement aux créanciers nantis et soutiennent qu'une telle demande ne peut être présentée à titre reconventionnel. En tout état de cause, ils invoquent leur consignation des sommes dues. Par dernières conclusions transmises le 21 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, madame [N] [K] épouse [B] sollicite de la cour qu'elle : déboute monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] de toutes leurs demandes, réforme l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté la demande de résiliation du bail liant les parties, constate que le bail commercial prohibe l'exploitation de la salle de bal, constate que les sommes dues par les époux [A] au titre des loyers des trois derniers trimestres 2020, constitutives de créances postérieures, ont été consignées postérieurement à la délivrance du commandement de payer et sans autorisation, constate l'acquisition de la clause résolutoire, prononce la résiliation du bail au 15 janvier 2021 pour non paiement des loyers, condamne monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] à lui payer la somme de 7 421,34 euros au titre des loyers des trois derniers trimestres 2020, condamne monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] à lui payer la somme de 7 421,34 euros au titre des loyers des trois derniers trimestres 2021, condamne monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] à lui payer la somme de 2 473,78 € par trimestre à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à parfaite libération des lieux, ordonne l'expulsion de monsieur [S] [A], madame [J] [X] épouse [A] et de tous occupants de leur chef, condamne monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens, avec distraction. Madame [N] [K] épouse [B] invoque les articles 1728 et 1342-2 du code civil s'agissant de la prétention tendant à l'autorisation de consignation ou de suspension des loyers par les preneurs. Elle soutient que la salle de bal ne faisait pas partie des lieux exploités par les appelants qui s'étaient engagés à en proscrire l'accès, de sorte que son inexploitation ou la présence d'amiante en son sein ne justifie pas la cessation d'exploitation du fonds de commerce. Elle dénonce la consignation des loyers faite par les preneurs trois jours après la délivrance du commandement, sans aucunement l'en avertir. Elle fait valoir que les époux [A] ont poursuivi l'exploitation du commerce un an après l'effondrement partiel de la toiture de la salle de bal, et, continue de louer les appartements inclus dans le bail, ce qui leur procure des revenus, sans pour autant s'acquitter à son égard du moindre paiement d'une indemnité d'occupation, leur dette s'élevant à 14 842,68 € au 21 octobre 2021. Madame [N] [K] épouse [B] fait également valoir qu'en application des articles L 622-17, R 622-15 et L 626-5 du code de commerce, c'est sur la base de fausses déclarations que le plan de sauvegarde a été acté par le tribunal de commerce, et au mépris de son opposition. Elle dénonce le fait que le tribunal de commerce ait considéré que les dettes postérieures de l'article L 622-17 avaient été régularisées grâce à la consignation effectuée, alors que cette dernière est intervenue à son insu et sans son accord. À titre reconventionnel, madame [N] [K] épouse [B] sollicite la résiliation du bail pour non paiement des loyers postérieurs à la procédure de sauvegarde. Elle soutient que la créance invoquée dans son commandement du 14 décembre 2020 et celle issue du non paiement des indemnités d'occupation pour 2021 sont des créances postérieures au sens de l'article L 622-17 du code de commerce, qui n'ont pas été régularisées puisque consignation ne vaut pas paiement, de sorte que la mise en oeuvre de la clause résolutoire se trouve acquise. L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 15 novembre 2022. Par soit-transmis du 29 novembre 2022, la cour a soulevé d'office le moyen tiré de l'absence de caractère provisionnel des prétentions élevées par l'intimée au titre du paiement de la dette locative et au titre de l'indemnité d'occupation bien que s'agissant de l'appel d'une ordonnance de référé. Elle a donc demandé aux parties de lui faire retour de leurs observations par le truchement d'une note en délibéré déposée avant le 9 décembre 2022 minuit. Par notes en délibéré déposées par le conseil des appelants le 5 décembre 2022 et celui de l'intimée le 1er décembre 2022, les parties ont fait part de leurs observations. Les appelants ont soutenu le caractère non provisionnel, et non motivé comme tel, des prétentions émises par l'intimée, de sorte qu'elles échappent à la compétence du juge des référés. L'intimée, pour sa part, a fait valoir que ces prétentions étaient de toute évidence formées à titre provisionnel puisqu'en l'état d'une procédure en référé.

MOTIFS

DE LA DÉCISION La cour d'appel précise, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de 'constatations', de 'prise d'acte' ou de 'dire et juger' qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques. Sur la demande de suspension du paiement des loyers, ou, à défaut, de consignation des loyers Par application de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. Le trouble manifestement illicite se caractérise par toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. En outre, aucune condition d'urgence ou d'absence de contestation sérieuse n'est requise pour l'application de l'article susvisé. Par application de l'article 1728 du code civil, le preneur est tenu de deux obligations principales : 1° D'user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ; 2° De payer le prix du bail aux termes convenus. Il est de jurisprudence constante que le locataire n'est pas tenu de payer le loyer quand il se trouve dans l'impossibilité d'utiliser les lieux loués comme le prévoit le bail. En l'occurrence, les époux [A] sont locataires de madame [N] [K] épouse [B] par l'effet du bail renouvelé le 19 octobre 1989 au titre de locaux commerciaux situés [Adresse 2]. Par décision du 21 juin 2018, le tribunal de grande instance de Toulon a prononcé la résiliation de ce bail aux torts des preneurs, pour défaut de paiement des taxes foncières, à compter du 19 novembre 2012. Ce jugement, non assorti de l'exécution provisoire, est frappé d'appel. Le sursis à statuer ordonné par le conseiller de la mise en état le 13 octobre 2020, ne dessaisit pas la cour en application de l'article 379 du code de procédure civile, de sorte que la résiliation du bail n'est pas définitive, ni exécutoire. A ce titre, cette décision du 21 juin 2018 ne constitue pas un obstacle à la procédure en cours, ni une contestation sérieuse. Le 29 juin 2018, les appelants ont informé madame [N] [K] épouse [B] de l'effondrement d'une partie de la toiture de la salle de bal. Ils ont poursuivi néanmoins l'exploitation de leur fonds de commerce de bar - restaurant jusqu'en juillet 2019, date de réalisation d'une expertise amiable des lieux. A compter de cette date, ils ont cessé l'exploitation de leur activité commerciale principale. Une expertise judiciaire a été ordonnée par décision du 17 janvier 2020 et le rapport d'expertise a été déposé le 4 janvier 2022. Monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] ont cessé de régler les loyers à compter du deuxième trimestre 2020, et ont consigné, le 16 décembre 2020, les sommes réclamées à ce titre dans le commandement de payer que leur a fait délivrer l'intimée le 14 décembre 2020. Les appelants entendent obtenir la suspension de l'obligation de paiement des loyers dus, ou, à titre subsidiaire, l'autorisation de consigner le montant des loyers avec suspension des effets de la clause résolutoire, ce tant que les locaux ne sont pas de nouveau exploitables dans des conditions normales. En premier lieu, il convient d'observer effectivement que, par jugement du 18 juin 2019, les époux [A] ont été placés sous sauvegarde judiciaire. Puis, le 28 janvier 2021, le tribunal de commerce de Toulon leur a accordé un plan de sauvegarde sur 7 ans avec apurement des dettes à compter du 1er janvier 2022. Par essence, les dettes incluses dans ce plan de sauvegarde, définitivement adopté, et qu'il n'appartient pas à la présente juridiction de remettre en cause, sont antérieures à l'ouverture de la procédure collective concernant les appelants. Or, les loyers dont la suspension, ou la consignation, est requise, tout comme ceux réclamés par l'intimée dans le cadre de son commandement du 14 décembre 2020, sont postérieurs à l'ouverture de la procédure collective, le 18 juin 2019. Au demeurant, il n'est justifié d'aucune déclaration de créance au titre des loyers postérieurs, dans le cadre de la procédure collective ouverte. Aussi, la présente décision ne peut aucunement faire échec au plan de sauvegarde adopté par le tribunal de commerce le 28 janvier 2021, ce sur quoi le premier juge s'est mépris. A ce titre, il n'existe pas de contestation sérieuse, ni d'obstacle manifeste au bénéfice de l'obligation dont se prévalent les époux [A]. En deuxième lieu, il convient de relever que la cour d'appel d'Aix-en-Provence est saisie, au fond, d'un autre contentieux existant entre les mêmes parties, et portant sur la résiliation du bail, ordonnée aux torts des preneurs, pour non paiement des taxes foncières, par décision du 21 juin 2018. Dans ce cadre également, la prétention des époux [A] au titre d'une indemnité d'éviction a été rejetée, leur expulsion a été ordonnée et une indemnité d'occupation mensuelle a été fixée à compter du 19 novembre 2012. Ce contentieux est né préalablement à la découverte de la présence d'amiante dans la salle de bal dont la toiture ne s'est partiellement effondrée que fin juin 2019. Certes, le sursis à statuer a été ordonné à raison de l'expertise en cours, la présence d'amiante étant invoquée aux torts des preneurs par madame [N] [K] épouse [B], comme étant l'une des causes potentielles de résiliation du bail. Néanmoins, aucune décision définitive n'est intervenue à ce titre, de sorte qu'aucune autorité de chose jugée ne peut être opposée et que la saisine parallèle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence au fond ne peut faire obstacle à la présente instance en référé. En troisième lieu, toutefois, il appartient aux époux [A] de justifier d'une cause légitime de cessation de l'exploitation de leur fonds de commerce depuis juillet 2019 pour obtenir la suspension, voire la consignation, des loyers dus à leur bailleresse. Or, d'une part, il résulte du bail renouvelé le 19 octobre 1989, mais également des protocoles d'accord signés par monsieur [S] [A], les 18 février 1986 et 10 août 1989, que les locaux loués comprennent une salle de bar, un appartement, outre une chambre avec débarras et salle d'eau. Cependant, la salle de bal qui se situe dans un bâtiment indépendant, distant d'une dizaine de mètres à l'extrémité de la terrasse de l'établissement dénommé 'bar de la Marine', a été expressément exclue du champ contractuel. En effet, dès la convention du 5 août 1974, intervenue entre les précédents bailleur et preneur, il a été expressément décidé de condamner provisoirement l'accès à cette salle de bal, pour des raisons de sécurité et le preneur en conservant les clefs. Dans le cadre du protocole du 10 août 1989 entre les époux [A] et monsieur [O] [K], il a expressément été fait référence à cette non exploitation et aux restrictions mises en oeuvre en 1974 comme étant toujours applicables. Ainsi, il est acquis que l'accès à la salle de bal, dont la toiture s'est partiellement effondrée et dans laquelle la présence d'amiante a été relevée, est condamnée depuis de nombreuses années, ce alors que l'exploitation du fonds de commerce s'est poursuivie. En conséquence, le lien entre la cessation d'exploitation de celui-ci et l'effondrement partiel de la toiture de la salle de bal, non comprise dans cette activité, est indéniablement discutable et ne peut justifier les prétentions des preneurs en termes de suspension, voire de consignation, des loyers. D'autre part, force est de relever que l'exploitation du fonds de commerce 'Bar de la Marine' s'est poursuivi un an après l'effondrement de la toiture de la salle de bal, ce qui tend à démontrer que tel n'est pas la cause légitime d'arrêt de l'exploitation. Les époux [A] font valoir que c'est la révélation de la présence d'amiante qui les a conduit à cesser leur activité. En effet, c'est dans le cadre du rapport de visite du cabinet d'expert FD Expertise, mandaté à titre amiable, en juillet 2019, que la présence d'amiante a été révélée à raison de plaques en amiante ciment, planes ou ondulées, entreposées à l'intérieur du bâtiment, dit 'salle de bal', et réduites en débris par l'effondrement de la toiture. Ce premier expert a conclu à l'absence de plaques d'amiante dans la structure de la salle de bal et pose la question de leur provenance, et donc de l'imputabilité de leur présence dans les lieux. Une expertise judiciaire a été ordonnée afin de déterminer la présence d'amiante, son origine et les travaux propres à y remédier. Aux termes du rapport d'expertise judiciaire, déposé le 4 janvier 2022, en l'état des investigations menées et en l'absence d'investigation complémentaire sollicitée par l'expert mais n'ayant pu avoir lieu faute de paiement de la consignation complémentaire requise et ordonnée, il appert que 'l'amiante est présent, d'une part, sous forme de déchets de débris de plaques planes et de plaques ondulées et mélangés à un tas de gravas, composés de tuiles, d'éléments de charpentes, d'éléments de plâtre, de meubles et de déchets de plomberie, de verres, d'éléments de lits en métal, de chariots, de panneaux de bois, situés au sol dans la salle de bal'. L'expert relève, 'd'autre part, que l'amiante est présent sous forme de déchets de débris de plaques planes et de plaques ondulées, situés au sol, en intérieur dans le cabanon situé côté Sud-Est, avec les mêmes caractéristiques dans leur descriptif que ceux présents dans la salle de bal'. Enfin, l'expert indique que 'l'amiante est présent sous forme de plaque de retenu de terre de type plaques sous tuiles, situé côté Sud-Est, à l'extérieur et aux abords immédiats de la salle de bal'. Il conclut à l'impossibilité de déterminer les origines de la présence d'amiante dans la salle de bal, se contentant d'en émettre les origines possibles, à savoir : 'des déchets rapportés n'ayant aucun rapport avec la couverture d'origine, des matériaux similaires, non visibles sans mesures exploratoires destructives sur la partie de la couverture non effondrée, ou, des réparations effectuées sur la partie extérieure de la couverture effondrée'. Le rapport d'expertise judiciaire ne fait aucunement état de la présence d'amiante dans l'air. Au contraire, ses constats quant au type d'amiante relevé sont conformes aux conclusions du rapport FD Expertise de juillet 2019 qui avait, pour sa part, indiqué 'une absence de fibres d'amiante dans l'air', après avoir expliqué que 'de par la nature même des matériaux en présence, le risque de pollution environnemental était très limité, ces débris d'amiante ciment n'émettant pas spontanément des fibres d'amiante par passage d'air ou vibration, mais uniquement au moment de la casse et en les déplaçant, exclusivement lors du retrait'. Ainsi, il avait été conclu que l'obstruction de toutes les ouvertures et la sécurisation totale des accès à la salle de bal devaient permettre d'éviter tout passage et déplacement de débris et de poussières vers l'extérieur. Le rapport d'expertise judiciaire ne contredit en rien ces analyses. Aussi, il convient d'en déduire que les époux [A] ne démontrent pas, avec l'évidence requise en référé, qu'ils ont été contraints de cesser l'exploitation de leur activité à raison de la présence d'amiante révélée par l'effondrement partiel de la salle de bal, située à distance du bar, et exclue du champ d'exploitation contractuellement défini. En outre, les appelants invoquent une absence de conformité électrique pour justifier la cessation d'exploitation du fonds de commerce. Or, si un certain nombre de non conformités et d'avis non satisfaisants sont relevés à ce titre dans le cadre du rapport de l'agence Alpes Contrôles du 18 mai 2021, force est d'observer, d'une part, qu'il n'est pas justifié de ce que ceux-ci empêchent totalement l'exploitation du fonds de commerce, et, d'autre part, qu'ils ont été mis en avant en mai 2021, soit bien après la cessation de l'exploitation du fonds par les appelants, près de deux ans auparavant, ne pouvant donc en être la cause. Enfin, il n'est pas contesté que, tout en ayant cessé l'exploitation du fonds de commerce de bar-restaurant, les époux [A] continuent de louer les deux appartements inclus dans le bail commercial, et d'en tirer des revenus. Aussi, en tout état de cause, aucune inexploitation totale des lieux véritablement objet du bail commercial en cause n'est avérée. En définitive, les appelants échouent à démontrer l'impossibilité complète d'exploiter les lieux objets du bail commercial liant les parties, qui plus est du fait de la bailleresse, de sorte qu'aucun motif légitime de suspension, ou de consignation, des loyers n'est justifié avec l'évidence requise en référé. Leurs prétentions doivent donc être écartées et il convient de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé, le juge du fond étant au demeurant saisi de prétentions similaires depuis le 8 mars 2022. Sur la demande tendant à la résiliation du bail, par mise en oeuvre du jeu de la clause résolutoire, et à l'expulsion des époux [A] En vertu de l'article L 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. En vertu de l'article L 143-2 du code de commerce, le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel s'exploite un fonds de commerce grevé d'inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile élu par eux dans leurs inscriptions. Le jugement ne peut intervenir qu'après un mois écoulé depuis la notification. La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu'un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles élus. En l'espèce, il a été rappelé que les parties sont liées par un bail commercial renouvelé le 19 octobre 1989. Le 14 décembre 2020, madame [N] [K] épouse [B] a fait délivrer à monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A], ainsi qu'à leur mandataire, un commandement de payer visant la clause résolutoire, incluse au bail sus-visé. Néanmoins, il est acquis que les époux [A] bénéficient d'une procédure collective de sauvegarde depuis le 18 juin 2019 et qu'un plan d'apurement de leurs dettes a été adopté le 28 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Toulon. A la lecture de cette décision, il appert qu'ils sont débiteurs de plusieurs créanciers, nécessairement inscrits puisque leurs dettes ont été prises en compte par le mandataire désigné. Or, madame [N] [K] épouse [B] ne justifie d'aucune dénonciation régulière de la procédure tendant à la résiliation du bail commercial aux créanciers inscrits, de sorte qu'aucune résiliation du bail liant la bailleresse aux époux [A] ne peut être valablement prononcée, pour quelque cause que ce soit, la résiliation étant inopposable aux créanciers et le litige étant par nature sur ces points indivisible. La prétention reconventionnellement émise à ce titre par madame [N] [K] épouse [B] ne peut donc qu'être rejetée et l'ordonnance entreprise, qui a dit n'y avoir lieu à référé de ce chef doit être confirmée à ce titre également. Sur la dette locative au titre des années 2020 et 2021 En l'occurrence, madame [N] [K] épouse [B] sollicite le paiement par les époux [A] d'une somme de 7 421,34 € pour chacune des deux années concernées au titre des loyers dus en exécution du bail commercial en cause. Or, cette demande telle que formulée dans le dispositif des conclusions de l'intimée, qui saisissent la cour au sens de l'article 954 du code de procédure civile, n'est pas formée à titre provisionnelle, comme elle ne l'est au demeurant pas davantage dans les motifs de ces écritures, pour n'être pas même explicitée dans ce cadre. Aucun référence expresse à la procédure de référé ne résulte d'ailleurs des textes visés au dispositif des conclusions de madame [N] [K] épouse [B]. En tout état de cause, un tel visa ne saurait sauver la qualification d'une demande, ni étendre l'objet du litige tel que fixé par les parties. Or, la fixation d'une créance définitive et la condamnation à ce titre excèdent les pouvoirs du juge des référés ici saisi. Dès lors, cette prétention ne peut aboutir, sans même qu'il y ait lieu d'en apprécier la teneur plus avant, et il n'y a pas lieu à référé sur la demande de condamnation en paiement au titre des loyers dus en 2020 et 2021. L'ordonnance entreprise, qui a écarté cette prétention, sera donc confirmée. Sur l'indemnité d'occupation De la même manière, madame [N] [K] épouse [B] sollicite la condamnation des appelants au paiement d'une indemnité d'occupation à hauteur de 2 473,78 € par trimestre. Cette prétention n'est pas davantage émise à titre provisionnel. Aussi, pour les mêmes motifs, une telle demande ne peut prospérer et l'ordonnance entreprise sera, là encore, confirmée. Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens Les époux [A] qui succombent principalement au litige, ayant interjeté appel principal, seront déboutés de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de madame [N] [K] épouse [B] les frais, non compris dans les dépens, qu'elle a exposés pour sa défense. Une indemnité de 1 500 € se trouve justifiée à son profit en appel au titre des frais irrépétibles. Les appelants supporteront en outre les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions soumises à la cour, Y ajoutant : Condamne monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] à payer à madame [N] [K] épouse [B] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, Déboute monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] de leur demande sur ce même fondement, Condamne monsieur [S] [A] et madame [J] [X] épouse [A] au paiement des dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. La Greffière Le Président