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Cour administrative d'appel de Douai, 2ème Chambre, 7 février 2023, 21DA01650

Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Douai
7 février 2023
Tribunal administratif de Lille
18 mai 2021
Tribunal administratif de Lille
23 juillet 2013

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Douai
  • Numéro d'affaire :
    21DA01650
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Dispositif : Rejet
  • Nature : Texte
  • Décision précédente :Tribunal administratif de Lille, 23 juillet 2013
  • Identifiant Légifrance :CETATEXT000047116778
  • Rapporteur : Mme Sylvie Stefanczyk
  • Rapporteur public :
    M. Toutias
  • Président : Mme Seulin
  • Avocat(s) : SELAS COMOLET-ZANATI AVOCATS
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) Établissement A. Cathelain et Compagnie a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Établissement français du sang (EFS) à lui verser, d'une part, la somme de 94 815,69 euros TTC au titre de travaux sous-traités par la SAS Coprebat conformément à la déclaration de sous-traitance du 16 avril 2013, assortie des intérêts moratoires au taux de 7,5 % à compter du 4 septembre 2013 et capitalisation des intérêts, d'autre part, la somme de 129 051,33 euros TTC au titre des travaux supplémentaires sous-traités sans avoir donné lieu à régularisation d'une déclaration de sous-traitance modificative, assortie des intérêts moratoires au taux de 7,5 % à compter du 13 novembre 2015 et capitalisation des intérêts, de rejeter toute demande indemnitaire de l'EFS à son encontre au titre des désordres affectant les voiries et les réseaux divers extérieurs, à titre subsidiaire, de juger que la somme maximale susceptible d'être allouée à l'EFS par voie reconventionnelle ne saurait excéder 32 684,90 euros et de mettre à la charge de l'EFS une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1811845 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de la société Établissement A. Cathelain et Compagnie, l'a condamnée à verser à l'EFS par voie reconventionnelle une somme de 71 872,43 euros TTC au titre des désordres affectant les voiries et réseaux divers extérieurs et une somme de 2 979,08 euros au titre des frais d'expertises taxés et liquidés par ordonnance du président du tribunal en date du 6 mai 2017 et a mis à sa charge une somme de 2 000 euros au titre de de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 juillet 2021, 26 juillet et 29 août 2022, la société Établissement A. Cathelain et Compagnie, représentée par Me Stanislas Comolet, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de condamner l'EFS à lui verser la somme de 94 815,69 euros TTC au titre de travaux sous-traités par la SAS Coprebat conformément à la déclaration de sous-traitance du 16 avril 2013, assortie des intérêts moratoires au taux de 7,5 % à compter du 4 septembre 2013, soit une somme totale de 139 341,15 euros TTC et de la capitalisation des intérêts ; 3°) de condamner l'EFS à lui verser la somme de 129 051,33 euros TTC au titre des travaux sous-traités sans avoir donné lieu à régularisation d'une déclaration de sous-traitance modificative, assortie des intérêts moratoires au taux de 7,5 % à compter du 13 novembre 2015 et capitalisation des intérêts ; 4°) de rejeter toute demande reconventionnelle de l'EFS à son encontre au titre des désordres affectant les réseaux de voirie et les réseaux divers extérieurs ; 5°) à titre subsidiaire, de juger que la somme maximale susceptible d'être allouée à l'EFS par voie reconventionnelle ne saurait excéder 32 684,90 euros ; 6°) de mettre à la charge de l'EFS une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Elle soutient que : - sa requête est bien recevable car elle est représentée par une personne ayant qualité pour agir, ce qui n'est pas le cas de l'EFS et elle justifie de moyens d'appel ; - elle établit avoir présenté une demande de paiement direct de la somme de 94 815,69 euros TTC dans les conditions prévues par les dispositions combinées de l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance et de l'article 116 du code des marchés publics dès lors qu'elle a adressé à l'entrepreneur principal et au maître d'ouvrage sa demande de paiement accompagnée de l'ensemble des pièces justificatives et que le caractère non contestable des factures est attesté par l'admission de ses créances au passif de l'entreprise principale ; - elle est en droit d'obtenir, sur le fondement de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1975, le paiement de la somme de 129 051,33 euros TTC correspondant à des travaux supplémentaires commandés par l'entreprise principale qui n'ont toutefois pas donné lieu à l'établissement d'actes spéciaux de sous-traitance spécifiques, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage compte tenu des retards causés par les épisodes d'intempéries et la nécessité d'achever les travaux de voiries et réseaux divers ; - à titre subsidiaire, la responsabilité quasi-délictuelle de l'EFS est engagée sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, dès lors qu'il avait l'obligation de s'assurer qu'en sa qualité de sous-traitante de la société Coprebat, elle avait été acceptée et que ses conditions de paiement avaient été agréées ; - elle n'a bénéficié d'aucun versement dans le cadre de la procédure de liquidation de l'entreprise principale ; - en ce qui concerne la somme de 94 815,69 euros TTC, les intérêts moratoires doivent commencer à courir à compter du 4 septembre 2013, date à l'expiration de laquelle l'EFS devait l'avoir payée en application de l'article 116 du code des marchés publics, de l'article 4 du décret n° 2002-232 du 21 février 2002 et de l'article 5.3.5 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché principal ; - en ce qui concerne la somme de 129 051,33 euros TTC, les intérêts moratoires doivent commencer à courir à compter du 13 novembre 2015, date de mise en demeure de l'EFS ; - les intérêts échus depuis plus d'un an doivent être capitalisés en application de l'article 1343-2 du code civil ; - c'est à tort que le tribunal administratif a fait droit à la demande reconventionnelle de l'EFS alors que seul le titulaire du marché est contractuellement tenu à l'égard du maître d'ouvrage des travaux exécutés par son sous-traitant ; - l'EFS n'est pas fondé à soutenir que son laboratoire de thérapie cellulaire doit être déplacé du fait des seuls désordres de voiries et réseaux divers, alors que sa part de responsabilité n'est que de 50 % ; - le montant de la demande reconventionnelle de l'EFS doit être limité à la somme de 32 684,90 euros dès lors que le poste relatif au remplacement des descentes d'eaux pluviales à l'intérieur du bâtiment figurant au devis de la société VATP, correspond à une mesure de confort ; - n'ayant qu'une part de responsabilité de 50 %, elle n'a pas à supporter l'intégralité du coût des travaux de réparation alors que le maître d'ouvrage n'a entrepris aucune démarche à l'encontre de la société Coprebat depuis l'ouverture de la liquidation judiciaire, ni à l'encontre de la société Amexia, assistante à maitrise d'ouvrage, responsable des désordres à hauteur de 10%, ni à l'encontre des assureurs de ces deux sociétés. Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 mai et 7 octobre 2022, l'Établissement français du sang (EFS), représenté par Me Timothée Bassi, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la société Établissement A. Cathelain et Compagnie une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la requête de la société Établissement A. Cathelain et Compagnie est irrecevable dès lors, d'une part, qu'il n'est pas établi que celle-ci soit représentée par une personne ayant qualité pour agir en son nom et, d'autre part, qu'elle ne comporte aucun moyen d'appel ; - c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les conclusions de la société Établissement A. Cathelain fondées sur l'enrichissement sans cause en l'absence de demande préalable présentée à ce titre ; - les conclusions tendant au paiement de la somme de 94 815,69 euros TTC doivent être rejetées dès lors que l'appelante n'a pas respecté la procédure de paiement direct prévue par les dispositions combinées de l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975 et de l'article 116 du code des marchés publics ; - la créance de 94 815,69 euros TTC est dépourvue de caractère certain dès lors que, d'une part, la société appelante n'établit pas que celle-ci n'a pas été payée dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire et, d'autre part, aucune précision n'est apportée concernant la facture du 12 juin 2013 d'un montant de 1 583,43 euros TTC, dont l'objet est intitulé " erreur dans le calcul de la remise commerciale " ; - la somme de 94 815,69 euros TTC n'est pas conforme à l'acte spécial de sous-traitance ; - il n'est pas établi que les travaux supplémentaires d'un montant de 129 051,33 euros TTC résulteraient de sujétions techniques imprévues ou auraient été indispensables à la bonne réalisation des travaux initialement convenus ; - il a accepté l'intervention de la société Établissement A. Cathelain en qualité de sous-traitante et agréé ses conditions de paiement mais n'a pas eu connaissance de travaux supplémentaires réalisés par l'appelante, il n'a donc commis aucune faute ; - il n'est pas établi que la créance de 129 051,33 euros TTC n'aurait pas été payée dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire et il n'est pas possible d'exercer un contrôle sur la facture du 30 novembre 2013 d'un montant de 37 829,26 euros portant sur des travaux de remblayage ; - l'appelante fait totalement abstraction de sa propre négligence ainsi que des fautes de la société Coprebat, qui doivent être prises en compte nonobstant la liquidation judiciaire de celle-ci ; - le point de départ des intérêts moratoires réclamés au titre de la somme de 129 051,33 euros TTC ne peut pas être fixé au 13 novembre 2015 dès lors qu'aucune demande préalable n'avait été présentée par l'appelante au jour où elle a présenté sa demande devant le tribunal ; - en raison de l'impossibilité de rechercher utilement la responsabilité de la société Coprebat, de la méconnaissance par la société appelante de ses obligations législatives et réglementaires à l'origine de la survenance de désordres de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou le rendre impropre à sa destination et de l'existence d'un préjudice direct et certain, la responsabilité quasi-délictuelle de la société Établissement A. Cathelain, en sa qualité de sous-traitante de la société Coprebat, titulaire du marché, doit être engagée et c'est à juste titre qu'elle a été condamnée à lui verser la somme de 71 872,43 euros TTC ; - à titre subsidiaire, la créance de 129 051,33 euros TTC est prescrite ; - à titre infiniment subsidiaire, la demande de la société Établissement A. Cathelain est irrecevable en l'absence de liaison du contentieux et en raison de sa tardiveté. La requête a été communiquée au ministre de la santé et de la prévention, qui n'a pas produit d'observations. Par une ordonnance du 7 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 octobre 2022 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ; - le code des marchés publics ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère, - les conclusions de M. Guillaume Toutias, rapporteur public, - et les observations de Me Timothée Bassi, représentant l'établissement français du sang.

Considérant ce qui suit

: 1. L'Établissement français du sang (EFS) Nord de France a décidé en 2010 de construire un nouveau laboratoire de qualification biologique des dons (QBD) devant accueillir principalement l'activité de thérapie cellulaire, sur le site d'Eurasanté à Lille. Par un acte d'engagement en date du 5 décembre 2011, il a confié la conception et la réalisation de ce bâtiment modulaire pérenne, pour un prix global et forfaitaire, à un groupement d'entreprises composé de la société par actions simplifiée (SAS) Coprebat, mandataire, la société Arodie Architecture et la SAS Saunier et Associés. La société Coprebat a sous-traité à la SAS Établissement A. Cathelain et Compagnie les travaux préparatoires, les travaux d'adaptation au sol, les travaux de gros œuvre, de voiries et réseaux divers et les travaux de maçonnerie. Par acte spécial de sous-traitance du 28 juin 2012 modifié les 27 septembre 2012 et 16 avril 2013, l'EFS a agréé à hauteur de 1 084 455,33 euros HT la société Établissement A. Cathelain et Compagnie. La réception des travaux a été prononcée le 15 février 2013 avec réserves, dont l'une d'elles portait sur les travaux de voiries et réseaux divers extérieurs. Par une ordonnance en date du 23 juillet 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Lille, saisi par l'EFS Nord de France, a ordonné une expertise portant sur les désordres affectant le bâtiment modulaire. Par courriers en date des 19 décembre 2013 et 28 janvier 2014, restés sans réponse, la société Établissement A. Cathelain et Compagnie a demandé à l'EFS Nord de France de lui régler la somme de 94 815,69 euros TTC au titre des travaux de gros œuvre et de voiries et réseaux divers relevant de l'acte spécial de sous-traitance et la somme de 119 051,33 euros TTC au titre de travaux supplémentaires. A la suite du placement en liquidation judiciaire de la société Coprebat, le 7 mai 2014, elle a adressé au liquidateur de la société une déclaration de créance pour un montant total de 235 175,59 euros TTC, dont l'intégralité a été admise par décision du juge commissaire du 10 juin 2015. Par courrier en date du 13 novembre 2015, la société Établissement A. Cathelain et Compagnie a réitéré sa demande indemnitaire auprès de l'EFS Nord de France, laquelle est restée sans réponse. Le 23 décembre 2016, l'expert désigné par le juge des référés a déposé son rapport. 2. La société Établissement A. Cathelain et Compagnie relève appel du jugement n°1811845 du 18 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'EFS à lui verser la somme de 94 815,69 euros TTC au titre de travaux réalisés conformément à la déclaration de sous-traitance du 16 avril 2013 et la somme de 129 051,33 euros TTC au titre des travaux supplémentaires n'ayant pas donné lieu à régularisation d'une déclaration de sous-traitance modificative, tout en faisant droit aux conclusions reconventionnelles de l'EFS en la condamnant à lui verser la somme de 71 872,43 euros TTC au titre des désordres affectant les voiries et réseaux divers extérieurs et une somme de 2 979,08 euros au titre des frais d'expertises et a mis à sa charge une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions présentées par la société Établissement A. Cathelain et Compagnie au titre de la procédure de paiement direct : 3. Aux termes de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance dans sa rédaction applicable au marché litigieux : " Le sous-traitant direct du titulaire du marché qui a été accepté et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage, est payé directement par lui pour la part du marché dont il assure l'exécution. (...) ". Aux termes de l'article 8 de cette loi : " L'entrepreneur principal dispose d'un délai de quinze jours, comptés à partir de la réception des pièces justificatives servant de base au paiement direct, pour les revêtir de son acceptation ou pour signifier au sous-traitant son refus motivé d'acceptation. / Passé ce délai, l'entrepreneur principal est réputé avoir accepté celles des pièces justificatives ou des parties de pièces justificatives qu'il n'a pas expressément acceptées ou refusées / Les notifications prévues à l'alinéa 1er sont adressées par lettre recommandée avec accusé de réception ". 4. Aux termes de l'article 112 du code des marchés publics alors en vigueur : " Le titulaire d'un marché public de travaux, d'un marché public de services ou d'un marché industriel peut sous-traiter l'exécution de certaines parties de son marché à condition d'avoir obtenu du pouvoir adjudicateur l'acceptation de chaque sous-traitant et l'agrément de ses conditions de paiement ". Selon l'article 116 de ce code alors en vigueur : " Le sous-traitant adresse sa demande de paiement libellée au nom du pouvoir adjudicateur au titulaire du marché, sous pli recommandé avec accusé de réception, ou la dépose auprès du titulaire contre récépissé. / Le titulaire dispose d'un délai de quinze jours à compter de la signature de l'accusé de réception ou du récépissé pour donner son accord ou notifier un refus, d'une part, au sous-traitant et, d'autre part, au pouvoir adjudicateur ou à la personne désignée par lui dans le marché. / Le sous-traitant adresse également sa demande de paiement au pouvoir adjudicateur ou à la personne désignée dans le marché par le pouvoir adjudicateur, accompagnée des factures et de l'accusé de réception ou du récépissé attestant que le titulaire a bien reçu la demande ou de l'avis postal attestant que le pli a été refusé ou n'a pas été réclamé./ Le pouvoir adjudicateur ou la personne désignée par lui dans le marché adresse sans délai au titulaire une copie des factures produites par le sous-traitant. / Le pouvoir adjudicateur procède au paiement du sous-traitant (...) ". 5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, pour obtenir le paiement direct par le maître d'ouvrage de tout ou partie des prestations qu'il a exécutées dans le cadre de son contrat de sous-traitance, le sous-traitant régulièrement agréé doit adresser sa demande de paiement direct à l'entrepreneur principal, titulaire du marché. Il appartient ensuite au titulaire du marché de donner son accord à la demande de paiement direct ou de signifier son refus dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette demande. Le titulaire du marché est réputé avoir accepté cette demande s'il garde le silence pendant plus de quinze jours à compter de sa réception. A l'issue de cette procédure, le maître d'ouvrage procède au paiement direct du sous-traitant régulièrement agréé si le titulaire du marché a donné son accord ou s'il est réputé avoir accepté la demande de paiement direct. Cette procédure a pour objet de permettre au titulaire du marché d'exercer un contrôle sur les pièces transmises par le sous-traitant et de s'opposer, le cas échéant, au paiement direct. Sa méconnaissance par le sous-traitant fait ainsi obstacle à ce qu'il puisse se prévaloir, auprès du maître d'ouvrage, d'un droit à ce paiement. 6. Le sous-traitant bénéficiant du paiement direct des prestations sous-traitées a également droit à ce paiement direct pour les travaux supplémentaires qu'il a exécutés et qui ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage, ainsi que pour les dépenses résultant pour lui de sujétions imprévues qui ont bouleversé l'économie générale du marché, dans les mêmes conditions que pour les travaux dont la sous-traitance a été expressément mentionnée dans le marché ou dans l'acte spécial signé par l'entrepreneur principal et par le maître de l'ouvrage. 7. D'une part, il résulte de l'instruction que si la société Établissement A. Cathelain et Compagnie a adressé le 13 novembre 2015 une demande de paiement direct à l'EFS Nord de France, maître d'ouvrage, de la somme de 94 815,69 euros TTC correspondant aux travaux des lots gros œuvre et voiries et réseaux divers qui lui avaient été confiés conformément à la déclaration de sous-traitance du 16 avril 2013, elle ne peut toutefois être regardée comme ayant présenté une demande de paiement direct selon les formes prescrites par les dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1975 et du code des marchés publics dès lors que le courrier adressé le 28 janvier 2014 à la société Coprebat en recommandé avec accusé de réception, avait uniquement pour objet le paiement direct de la somme de 119 051,33 euros TTC correspondant aux travaux supplémentaires qu'elle avait réalisés sans que ceux-ci eussent donné lieu à régularisation d'une déclaration de sous-traitance modificative. Dans ces conditions, les conclusions présentées par la société Établissement A. Cathelain et Compagnie tendant à la condamnation de l'EFS à lui verser la somme de de 94 815,69 euros TTC au titre de travaux sous-traités doivent être rejetées. 8. D'autre part, si l'appelante demande le paiement direct de la somme de 129 051,33 euros TTC au titre des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés compte tenu des retards causés par des épisodes d'intempéries et de la nécessité d'achever les travaux de voiries et réseaux divers, il ne résulte d'aucun des éléments de l'instruction et, notamment, du compte-rendu de chantier en date du 8 février 2013 et du procès-verbal de réception des travaux du 15 février 2013 dont l'intéressée se prévaut, que ces travaux auraient été techniquement indissociables de ceux prévus initialement par l'acte spécial de sous-traitance, compte tenu des nombreuses réserves émises à la réception des travaux, ou bien qu'il s'agirait d'autres travaux ayant revêtu un caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ou résultant de sujétions imprévues. Si l'appelante fait valoir que le maître d'ouvrage était informé de sa présence sur le chantier y compris après la réception des travaux, cette seule circonstance n'est pas de nature à faire regarder les travaux de reprise comme des travaux supplémentaires indemnisables eu égard aux nombreuses réserves opposées aux constructeurs, dont la société Coprebat et la société appelante, qui nécessitaient sa présence sur le chantier après la réception des travaux. Dès lors, les conclusions présentées par la société Établissement A. Cathelain et Compagnie tendant à la condamnation de l'EFS à lui verser la somme de 129 051,33 euros TTC au titre de travaux supplémentaires, doivent être rejetées. En ce qui concerne les conclusions présentées par la société Établissement A. Cathelain et Compagnie au titre de la responsabilité quasi-délictuelle du maître d'ouvrage : 9. Aux termes de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1975 : " L'entrepreneur qui entend exécuter un contrat ou un marché en recourant à un ou plusieurs sous-traitants doit, au moment de la conclusion et pendant toute la durée du contrat ou du marché, faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître de l'ouvrage ; l'entrepreneur principal est tenu de communiquer le ou les contrats de sous-traitance au maître de l'ouvrage lorsque celui-ci en fait la demande ". Aux termes de l'article 14-1 de cette loi : " Pour les contrats de travaux de bâtiment et de travaux publics : / - le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 ou à l'article 6, ainsi que celles définies à l'article 5, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations. Ces dispositions s'appliquent aux marchés publics et privés (...) ". 10. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au maître d'ouvrage, lorsqu'il a connaissance de l'exécution, par le sous-traitant, de prestations excédant celles prévues par l'acte spécial et conduisant au dépassement du montant maximum des sommes à lui verser par paiement direct, de mettre en demeure le titulaire du marché ou le sous-traitant de prendre toute mesure utile pour mettre fin à cette situation ou pour la régulariser, à charge pour le titulaire du marché, le cas échéant, de solliciter la modification de l'exemplaire unique ou du certificat de cessibilité et celle de l'acte spécial afin de tenir compte d'une nouvelle répartition des prestations avec le sous-traitant. 11. Il résulte de l'instruction qu'un acte spécial de sous-traitance concernant la société Établissement A. Cathelain et Compagnie a été établi le 28 juin 2012. Puis, à la suite des demandes faites par le conducteur d'opérations les 5, 12 et 19 septembre 2012 au maître d'ouvrage, un acte spécial modificatif a été rédigé le 27 septembre 2012. Postérieurement à la réception des travaux intervenue le 15 février 2013, le maître d'ouvrage, afin de tenir compte des travaux réalisés par la société Établissement A. Cathelain et Compagnie dont il avait eu connaissance, a signé, le 16 avril 2013, un acte spécial modificatif que la société Établissement A. Cathelain et Compagnie et la société Coprebat, titulaire du marché, avaient préalablement signé les 18 et 19 février 2013. Si l'appelante fait valoir que l'EFS Nord de France avait été informé de la réalisation de travaux supplémentaires non inclus dans l'acte spécial modificatif du 16 avril 2013, elle ne l'établit cependant pas. Dans ces conditions, la société Établissement A. Cathelain et Compagnie n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité quasi-délictuelle de l'EFS Nord de France est engagée. En ce qui concerne la somme mise à la charge de la société Établissement A. Cathelain et Compagnie par voie reconventionnelle par le jugement attaqué : 12. S'il appartient, en principe, au maître d'ouvrage qui entend obtenir la réparation des conséquences dommageables d'un vice imputable à la conception ou à l'exécution d'un ouvrage, de diriger son action contre le ou les constructeurs avec lesquels il a conclu un contrat de louage d'ouvrage, il lui est toutefois loisible, dans le cas où la responsabilité du ou des cocontractants ne pourrait pas être utilement recherchée, de mettre en cause, sur le terrain quasi-délictuel, la responsabilité des participants à une opération de construction avec lesquels il n'a pas conclu de contrat de louage d'ouvrage, mais qui sont intervenus sur le fondement d'un contrat conclu avec l'un des constructeurs. Il peut, à ce titre, invoquer, notamment, la violation des règles de l'art ou la méconnaissance de dispositions législatives et réglementaires mais ne saurait se prévaloir de fautes résultant de la seule inexécution, par les personnes intéressées, de leurs propres obligations contractuelles. En outre, alors même qu'il entend se placer sur le terrain quasi-délictuel, le maître d'ouvrage ne saurait rechercher la responsabilité de participants à l'opération de construction pour des désordres apparus après la réception de l'ouvrage et qui ne sont pas de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination. 13. Ainsi qu'il a été dit au point 1, la société Coprebat, titulaire du marché, qui a sous-traité à la SAS Établissement A. Cathelain et Compagnie notamment les travaux de voiries et réseaux divers, a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal du commerce de Paris en date du 7 mai 2014. Dès lors que la clôture des opérations de liquidation pour insuffisance d'actifs a été prononcée par jugement du 24 novembre 2020, l'EFS ne peut utilement rechercher la responsabilité de son co-contractant au titre des désordres apparus postérieurement à la réception de l'ouvrage et est ainsi fondé à rechercher la responsabilité quasi-délictuelle de la société Établissement A. Cathelain et Compagnie. 14. Il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif de Lille que les réseaux d'assainissement ont présenté des problèmes d'engorgement ce qui a nécessité, en novembre 2013, un curage entraînant l'évacuation de plusieurs centaines de litres de gravats et déchets de toute nature. L'expert ainsi que le sapiteur ont relevé l'absence de cunette dans les regards sur les réseaux d'assainissement, la présence de cunettes avec décalages de fil d'eau sur certains regards sur le réseau eau usé, des joints dans les regards parfois dégradés voire absents au niveau des assemblages de rehausses ou au droit des raccordements de branchements, des raccordements de descente d'eau pluviale anormalement réalisés en piquage direct sur les collecteurs sans mise en œuvre de culotte ou embranchement spécifique ni de regard de visite ainsi que des débordements non étanches entre canalisations avec décalage de niveaux entre fils d'eau provenant des décantations, des contre-pentes voire des siphons sujets à décantation entre des regards et un changement de direction sans tampon de visite sur un regard. Selon le rapport d'expertise, les désordres constatés, d'une part, ne sont pas de nature à compromettre la solidité du bâtiment modulaire mais le rendent impropre à sa destination dès lors qu'ils ne permettent plus l'évacuation des eaux usées et, d'autre part, résultent tant d'erreurs de conception imputables à la maitrise d'œuvre que d'erreurs dans l'exécution des travaux de voiries et réseaux divers. Il en résulte que les manquements aux règles de l'art commis par la société Établissement A. Cathelain et Compagnie sont de nature à engager sa responsabilité quasi-délictuelle. 15. L'expert judiciaire a évalué le montant des travaux de reprise des désordres relatifs au lot voirie et réseaux divers à la somme de 22 461,66 euros TTC et le montant des travaux de curage, de nettoyage et d'inspection vidéo des réseaux et de reprise des collecteurs eaux pluviales à la somme de 49 410,77 euros TTC, soit un montant total des réparations estimé à 71 872,43 euros TTC. Si la société Établissement A. Cathelain et Compagnie fait valoir qu'il convient de déduire de ce montant la somme de 5 418, euros HT correspondant au remplacement des descentes d'eaux pluviales à l'intérieur du bâtiment qui est, selon le devis établi par la société VATP, une mesure de confort, il ressort toutefois de l'évaluation de l'expert que celle-ci ne prend pas en compte ce poste de dépense qui a pour origine des fuites constatées dans les faux plafonds et relève ainsi de désordres distincts. Par ailleurs, la circonstance que l'expert ait fixé à 50 % la part de responsabilité de la société appelante, dans la survenue des désordres ne fait pas obstacle à ce qu'elle soit condamnée à réparer l'ensemble des préjudices subis par l'EFS dès lors que dans le cadre d'une condamnation solidaire, il n'y a pas lieu de tenir compte du partage de responsabilités entre les coauteurs, lequel n'affecte que les rapports réciproques de ces derniers mais non le caractère et l'étendue de leur obligation à l'égard de la victime du dommage. 16. Il résulte de tout ce qui précède que la société Établissement A. Cathelain et Compagnie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes de paiement dirigées à l'encontre de l'EFS Nord de France et l'a condamnée à lui verser, par voie reconventionnelle, la somme de 71 872,43 euros TTC. Sur les frais d'expertise : 17. Il y a lieu de mettre définitivement à la charge de la société Établissement A. Cathelain et Compagnie la somme de 2 979,08 euros correspondant à un neuvième des frais de l'expertise ordonnée par le président du tribunal administratif de Lille, taxés et liquidés par une ordonnance du 6 mai 2017 à la somme de 26 811,74 euros TTC, dès lors que les opérations d'expertise relatives aux huit autres désordres n'ont pas été utiles à la résolution du litige. Sur les frais liés à l'instance : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EFS, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Établissement A. Cathelain et Compagnie demande à ce titre. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Établissement A. Cathelain et Compagnie une somme de 2 000 euros à verser à l'EFS.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société par actions simplifiée Établissement A. Cathelain et Compagnie est rejetée. Article 2 : La somme de 2 979,08 euros correspondant à un neuvième des frais de l'expertise ordonnée par le président du tribunal administratif de Lille, taxés et liquidés par une ordonnance du 6 mai 2017 à la somme de 26 811,74 euros TTC, est mise définitivement à la charge de la société par actions simplifiée Établissement A. Cathelain et Compagnie. Article 3 : La société par actions simplifiée Établissement A. Cathelain et Compagnie versera à l'Établissement français du sang une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Établissement A. Cathelain et Compagnie et à l'Établissement français du sang. Délibéré après l'audience publique du 24 janvier 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Anne Seulin, présidente chambre, - M. Marc Baronnet, président-assesseur, - Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2023. La rapporteure, Signé : S. StefanczykLa présidente de chambre, Signé : A. Seulin La greffière, Signé : A.S. Villette La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière Anne-Sophie Villette 2 N°21DA01650

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