LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que I... C... est décédé le [...] , laissant pour lui succéder son épouse séparée de biens, Mme G..., donataire de la plus forte quotité disponible en vertu d'un acte notarié du 7 mars 1994 et ayant opté en faveur de la totalité en usufruit, son fils, M. N... C..., et ses deux petits-enfants, M. W... C... et Mme X... C..., venant par représentation de leur père O... C..., prédécédé ; que des difficultés sont survenues dans le règlement de la succession ;
Sur les premier et deuxième moyens
, le troisième moyen, pris en ses deux premières branches, et le quatrième moyen du pourvoi principal et les deux moyens du pourvoi incident, ci-après annexés :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur la troisième branche du troisième moyen du pourvoi principal :
Vu les articles
843 et
894 du code civil ;
Attendu que le rapport d'une donation déguisée sous couvert d'une vente à moindre prix n'est dû que pour l'avantage ainsi conféré, correspondant à la différence entre la valeur du bien donné et le prix payé ;
Attendu que, pour ordonner le rapport à la succession de la somme de 336 000 euros au titre de la donation déguisée du bien immobilier « [...] », l'arrêt relève que I... C... a régularisé le 14 avril 2009 la vente de ce bien au profit de la société civile immobilière BMV, dont le gérant est M. N... C..., pour un prix d'acquisition de 205 000 euros, mais que l'expert amiable, intervenu à la demande des parties, a valorisé le bien à la somme de 336 000 euros, mettant en évidence une sous-évaluation de près de 40 % au moment de sa cession, et retient que cette dissimulation de prix caractérisée prouve l'intention libérale du défunt au profit de son fils ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et
sur le cinquième moyen
, pris en sa troisième branche :
Vu l'article
4 du code civil ;
Attendu que, pour dire qu'à défaut pour Mme G... de justifier dans le cadre judiciaire des opérations de comptes, liquidation et partage, que le financement du bien immobilier « [...] » provient du remploi de ses fonds personnels issus de la vente de la villa dite « [...] », [...], il y a lieu de fixer une créance due par elle à l'égard de la succession de I... C... à hauteur de 1,4 million d'euros, l'arrêt relève que, s'il ressort d'une lettre du notaire que l'acquisition du bien « [...] » par Mme G... à la société civile immobilière [...], dont le gérant était son époux, a été effectuée au moyen de fonds personnels provenant de la vente du bien immobilier « [...] » dans les années 1970, lui-même acquis par Mme G... à la société civile immobilière Résidence [...], dont le gérant était I... C..., avec paiement du prix comptant, mais hors comptabilité du notaire, la provenance des fonds n'est justifiée dans aucun acte ; qu'il ajoute qu'il n'est pas sérieusement contesté que Mme G... n'exerçait pas d'activité professionnelle et n'avait donc pas de revenus ; qu'après avoir constaté que celle-ci ne produit aucune pièce à l'appui de ses allégations selon lesquelles cette dernière acquisition a elle-même été permise en 1970 par des fonds personnels issus de la vente du bien immobilier « [...] », [...], lui-même acquis en 1965 grâce à ses fonds personnels, il retient qu'au contraire, ces indices et l'absence de tout élément sur l'éventuelle existence d'un patrimoine personnel permettent de considérer qu'elle a acquis « [...] » avec les seuls deniers de son époux ;
Qu'en se dessaisissant et en déléguant ses pouvoirs au notaire liquidateur, alors qu'il lui incombait de trancher elle-même la contestation dont elle était saisie, la cour d'appel a méconnu son office et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du cinquième moyen :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il ordonne le rapport à la succession de la somme de 336 000 euros au titre du bien immobilier « [...] » ayant fait l'objet d'une donation déguisée et dit qu'à défaut pour Mme G... de justifier dans le cadre judiciaire des opérations de comptes, liquidation et partage, que le financement du bien « [...] » provient du remploi de ses fonds personnels issus de la vente de la villa dite « [...] », [...], il y a lieu de fixer une créance due par elle à l'égard de la succession de I... C... à hauteur de 1,4 million d'euros, l'arrêt rendu le 21 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne M. W... C... et Mme C... aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf et signé par lui et par Mme Randouin, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYENS ANNEXES
au présent arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. N... C... et Mme G...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme G... et M. N... C... de la fin de non-recevoir tirée de l'absence de demande tendant à la réduction de la donation consentie le 7 mars 1994 par I... C... à son épouse, Mme G..., et d'AVOIR en conséquence, ordonné le partage des biens de la succession de I... C..., désigné un notaire pour procéder aux opérations de partage, fixé la valeur unitaire des actions de la société Baagi au jour du décès de I... C... à la somme de 581,25 euros, ordonné le rapport à la succession de la somme de 336 000 euros au titre du bien immobilier « [...] » ayant fait l'objet d'une donation déguisée, ordonné le rapport à la succession de la somme de 198 496,33 euros au titre des droits, frais et émoluments ayant fait l'objet d'une donation indirecte, fixé, à défaut pour Mme G... de justifier dans le cadre judiciaire des opérations de compte, liquidation et partage, que le financement du bien « [...] » provenait du remploi de ses fonds personnels issus de la vente de la villa « [...] » à [...], la créance de la succession de I... C... à l'encontre de Mme G... à la somme de 1 400 000 euros, fixé la valeur du bien immobilier « Les jardins du Pont du Lys » à Antibes à la somme de 597 400 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur l'absence de demande en réduction en première instance et en appel, N... C..., au travers son appel incident, estime que l'ensemble des demandes de Madame X... C... et Monsieur W... C... sont irrecevables à défaut pour Madame X... C... et Monsieur W... C... d'avoir demandé la réduction de la donation ni en première instance ni en appel ; qu'outre que nul ne plaide par procureur, Monsieur N... C... n'étant pas le bénéficiaire de la dite donation, il est rappelé que l'assignation introductive d'instance du 2 décembre 2011 délivrée par Madame X... C... et Monsieur W... C... était fondée non seulement sur les dispositions légales du partage judiciaire, mais était également juridiquement motivée par les articles 920 et suivants du code civil tendant à voir appliquer l'action en réduction à l'encontre des libéralités excessives ; qu'en conséquence, tous ces moyens d'irrecevabilité soulevés par Monsieur N... C... s'avèrent inopérants et devront être écartés » ;
1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé ; que les conclusions par lesquelles il était demandé à la cour d'appel de « constater l'absence de demande en réduction formulée par les héritiers appelants et intimés » et de « déclarer X... et W... C... irrecevables en leur action en partage » sont communes à M. N... C... et à Mme G... ; qu'en retenant, pour écarter la fin de non-recevoir ainsi opposée à l'action en partage de Mme X... C... et de M. W... C..., que nul ne plaide par procureur et que M. N... C... n'est pas bénéficiaire de la donation du 7 mars 1994, quand la prétention était également émise par Mme G..., la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles
4 et
5 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, un tiers peut se prévaloir du contrat en tant que situation de fait, à la condition que celle-ci soit de nature à fonder l'application d'une règle juridique lui conférant le droit qu'il invoque ; qu'en retenant, pour écarter la fin de non-recevoir opposée par Mme G... et M. N... C... à l'action en partage de Mme X... C... et de M. W... C..., que nul ne plaide par procureur et que M. N... C... n'est pas bénéficiaire de la donation du 7 mars 1994, quand il résulte de l'acte du 7 mars 1994, subordonnant expressément à une demande en réduction le cantonnement des droits de la donataire à la plus forte quotité disponible, qu'en l'absence d'une telle demande, Mme G... est propriétaire de l'universalité des biens successoraux, de sorte que Mme X... C... et M. W... C... ne peuvent prétendre du vivant de leur grand-mère à aucun droit indivis de nature à fonder leur action en partage, circonstance dont M. N... C... pouvait se prévaloir au soutien de la fin de non-recevoir qu'il opposait à l'action en partage de ses cohéritiers, la cour d'appel a violé les articles
1134 et
1165 du code civil dans leur rédaction, antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ;
3°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties qui doivent être formulées dans le chef de dispositif de leurs conclusions ; que le dispositif de l'acte introductif d'instance de Mme X... C... et M. W... C... ne comportait de demande tendant à la réduction de libéralité que pour celle ayant bénéficié à M. N... C..., les motifs de l'assignation explicitant que les demandeurs étaient fondés à solliciter « la réduction de la donation consentie par leur grand-père à leur oncle M. N... C..., le 4 août 2005 » ; qu'en retenant, pour écarter la fin de non-recevoir opposée par Mme G... et M. N... C... à l'action en partage de Mme X... C... et de M. W... C... tirée de l'absence de demande en réduction, que l'assignation introductive d'instance du 2 décembre 2011 était juridiquement motivée par les articles 920 et suivants du code civil, quand ce visa ne pouvait fonder que la seule demande explicitement formulée tendant à la réduction de la donation du 4 août 2005 ayant bénéficié à M. N... C... et non celle, consentie le 7 mars 1994 par I... C... à son épouse, Mme G..., qui n'était pas même évoquée par l'acte introductif d'instance, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article
4 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE la demande tendant à l'ouverture des opération de compte, liquidation et partage d'une succession n'emporte pas, par elle-même, demande de réduction des libéralités ; qu'en retenant, pour écarter la fin de non-recevoir opposée par Mme G... et M. N... C... à l'action en partage de Mme X... C... et de M. W... C... tirée de l'absence de demande en réduction, que l'assignation introductive d'instance était fondée sur les dispositions légales du partage judiciaire, sans relever que les demandeurs avaient sollicité dans le chef de disposition de leur assignation la réduction de la donation consentie à Mme G... le 7 mars 1994, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
921 du code civil.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit qu'il y avait lieu de valoriser les actions de la société Baagi à 581,25 euros l'action au jour de décès de I... C... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la valorisation de la donation des 667 actions de la société Baagi, à l'occasion du décès de O... C... en [...], l'action de la SA Baagi avait été valorisée à la somme de 2272 francs, soit 346,36 euros ; que, suivant acte authentique du 7 août 2005 reçu par Maître P... R..., I... C... a fait donation à Monsieur N... C..., hors part successorale de 667 actions qu'il possédait dans la SA Baagi immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'Antibes sous le n° B713 000 495 ; qu'il ressort qu'en cours de procédure, le 4 janvier 2016, l'ensemble des parties a cédé la société Baagi pour une valeur de 1 589 234 euros, soit 635 euros l'action ; que, dans le cadre de l'arrêt définitif du prix de cession en l'état de l'arrêt des comptes au 31 décembre 2016, le prix de cession de l'action a été fixé à la somme de 581,25 euros ; que les parties d'ailleurs s'accordent pour dire que ce prix de cession représente la seule évaluation impartiale des parts ; qu'aussi, en appliquant la même méthodologie que celle ayant permis de valoriser la société Baagi à la date du 4 janvier 2016, la valeur de la société à la date du décès de I... C... peut être retenue à la somme de 1 523 566,60 euros, soit plus de 609,43 euros l'action ; que cette évaluation est manifestement supérieure de celle retenue de 364,34 euros dans le projet de succession ; que, pour tenter de contester les valeurs des actions avancées par les intimés, Monsieur N... C... et Madame G... soulèvent que les détournements de fonds dont s'est rendue coupable une employée d'agence, Madame E... ont été réalisés sur une période de 20 ans ; que, néanmoins, Monsieur N... C... et Madame G... ont valorisé l'action à la somme de 364,34 euros en 2010, date du projet de succession alors qu'ils étaient dans l'ignorance des agissements délictueux et ont vendu les actions 581,25 euros après que les détournements aient été révélés, outre l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ; que ce constat permet de voir qu'en dépit de l'existence de détournements de fond de près de 588 000 euros au préjudice de la société Baagi, la valeur des actions n'a pas baissé mais au contraire a profité d'une plus-value ; que cette augmentation en dépit de l'appauvrissement d'origine frauduleuse de la société démontre sans conteste que la valeur de la part au moment de la donation litigieuse de 2010 a manifestement été sous-évaluée ; que Madame G... et Monsieur N... C... opposent le principe de l'estoppel selon lequel une partie ne peut se prévaloir d'une position contraire à celle qu'elle a prise antérieurement lorsque ce changement se produit au détriment d'un tiers ; qu'en l'espèce, les appelants dénoncent l'insuffisance de valorisation de l'action de la société Baagi sur la déclaration de 1999 au moment du décès de O... C..., père des intimés ; qu'ils estiment que si les règles d'évaluation de l'action au moment de la vente à Foncia sont retenues, il faudrait alors pratiquer un abattement de 25% sur la valeur des dites actions puisque la valeur déclarée de la part en 1999 était de 2272 francs et qu'au vu de la dite méthode de calcul elle valait en réalité 2974 francs ; que, cependant, le principe de l'estoppel n'a pas vocation à s'appliquer puisque par nature la contradiction doit être réalisée dans une même instance judiciaire ; que les appelants finissent par avancer que la valeur calculée pour une vente entre associés d'un nombre d'action ne conduisant pas le cessionnaire à obtenir la majorité ou une majorité de blocage est systématiquement minorée de 25 à 30% compte tenu de la disqualification du groupe d'action ; que cette allégation n'est suivie cependant d'aucune démonstration et ne pourra être retenue ; qu'en conséquence, il y a lieu de valoriser les actions de la SA Baagi à 581,25 euros l'action au jour de décès de I... C... telles qu'elles ont été arrêtées dans le cadre de l'arrêt définitif du prix de cession en l'état de l'arrêt des comptes au 31 décembre 2016 au profit du groupe Foncia » ;
1°) ALORS QU'une éventuelle indemnité de réduction s'apprécie au regard de la réunion fictive des biens dont il a été disposé par donation d'après leur état à l'époque de la donation et leur valeur à l'ouverture de la succession ; qu'en retenant, pour fixer comme elle l'a fait la valeur des actions de la société Baagi, « que la valeur de la part au moment de la donation litigieuse en 2010 avait manifestement été sous-évaluée », après avoir relevé que la donation avait été faite par acte authentique du 7 août 2005, la cour d'appel a violé l'article
922 du code civil ;
2°) ALORS QU'à tout le moins, en se fondant, pour déterminer la valeur des actions en 2010, date d'ouverture de la succession, sur la plus-value révélée par la revente des actions en 2016, sans se référer à l'état du bien en 2005, date de la donation litigieuse, la cour d'appel a violé l'article
922 du code civil ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, une motivation inintelligible équivaut à un défaut de motifs ; qu'en fixant à 581,25 euros la valeur unitaire de l'action au jour du décès le [...] , soit la même valeur que celle dont elle a constaté qu'elle résultait de l'arrêté définitif du prix de leur cession le 31 décembre 2016, après avoir retenu que la valeur des actions avait résulté d'une plus-value et que cette augmentation établissait la sous-évaluation des parts « au moment de la donation litigieuse de 2010 », sans que ces motifs permettent de comprendre à quelle date et en fonction de quel état la valeur de l'action avait été fixée, la cour d'appel a privé sa décision de motif en violation de l'article
455 du code de procédure civile.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné le rapport à la succession de la somme de 336 000 euros au titre du bien immobilier [...] ayant fait l'objet d'une donation déguisée ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la vente du bien immobilier [...] à la SCI BMV, aux termes de l'article
894 du code civil, la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte ; qu'en vertu de l'article
12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'il relève du pouvoir d'appréciation du juge de requalifier un acte de vente en un acte de donation déguisée ; que la charge de prouver l'intention libérale incombe aux héritiers qui allèguent l'existence d'une donation déguisée ; que I... C... a régularisé le 14 avril 2009 la vente d'un bien immobilier de 136 m² dénommé [...] au profit de la SCI BMV dont le gérant est son fils, N... C... pour un prix d'acquisition de 205 000 euros ; que l'expert amiable, Monsieur U..., intervenu à la demande des parties, a valorisé ce dit bien à la somme de 336 000 euros ; qu'il justifie cette évaluation par la méthode de rentabilité et de la valeur locative, comme d'ailleurs le souhaitait les appelants ; qu'il justifie et retient un coefficient de 7% en opérant une diminution pour définir la valeur du bien au 1er avril 2009 ; que le bien immobilier [...] a manifestement été sous-évalué de près de 40% au moment de sa cession, cette dissimulation de prix caractérisée emporte preuve de l'intention libérale du défunt au profit de son fils N... C... qu'en vertu de l'article
843 du code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; qu'en conséquence, il y a lieu d'ordonner le rapport à la succession de la somme de 336 000 euros au titre du bien immobilier [...] ayant fait l'objet d'une donation déguisée » ;
1°) ALORS QUE seul l'héritier bénéficiaire d'une donation peut être tenu au rapport ; qu'en se bornant à retenir, pour condamner M. N... C... à rapporter à la succession la somme de 336 000 euros au titre de la donation déguisée qu'il aurait reçue de son père à l'occasion de la vente par ce dernier d'un bien immobilier à la société BMV, que M. N... C... était le gérant de la société acquéreuse, quand cette seule qualité n'établissait pas qu'il avait bénéficié de la donation, la cour d'appel a violé les articles
843 et
894 du code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, lorsque la donation est faite par le défunt à son héritier par interposition d'une société dont ce dernier est associé, le rapport n'est dû à la succession qu'à proportion du capital qu'il y détient ; qu'en condamnant M. N... C... au rapport de l'entière valeur de l'immeuble vendu à la société dont il était le gérant sans déterminer la proportion du capital qu'il y détenait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles
843 et
894 du code civil ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le rapport d'une donation déguisée sous couvert d'une vente à moindre prix n'est dû que pour l'avantage ainsi conféré, correspondant à la différence entre la valeur du bien donné et le prix payé ; qu'en condamnant M. N... C... au rapport de la somme de 336 000 correspondant à la valeur de l'immeuble, tout en constatant que le prix en avait été payé à hauteur de 205 000 euros, ce dont il résultait que la donation avait tout au plus porté sur la somme de 131 000 euros, la cour d'appel a violé l'article
843 et
894 du code civil.
QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné le rapport à la succession de la somme de 198 496,33 euros au titre des droits, frais et émoluments ayant fait l'objet d'une donation indirecte ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la prise en charge des frais de mutation, Madame X... C... et Monsieur W... C... dénoncent également que le produit de la vente litigieuse du bien [...] à hauteur de 198 496,33 euros a servi à financer le montant des frais et droits de mutation de la donation de la nue-propriété du bien immobilier [...], ces derniers ayant été acquittés par Madame A... G... veuve C... ; que la prise en charge par le donateur des droits, frais et émoluments constitue une donation indirecte au vu de l'importance de la somme acquittée caractérisant manifestement l'intention libérale de la donatrice au profit du donataire ; que la dite somme sera donc soumise à la règle du rapport successoral de l'article
843 du code civil » ;
1°) ALORS QUE l'héritier n'est tenu au rapport à la succession que de ce qu'il a reçu du défunt ; qu'en condamnant M. N... C... à rapporter à la succession de I... C... la somme de 198 496,33 euros au titre des droits, frais et émoluments ayant fait l'objet d'une donation indirecte, après avoir constaté, d'une part, que c'est Mme G... qui avait, par acte du 14 mai 2009, fait donation à son fils, avec dispense de rapport, de la nue-propriété du bien sis dans la résidence [...] et, d'autre part, que l'intégralité des frais et droits relatifs à cette mutation avait été payée par la donatrice, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il résultait que l'avantage ainsi consenti ne l'avait pas été par le défunt et ne pouvait être rapporté à sa succession, a violé l'article
843 du code civil.
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, les frais d'une donation expressément stipulée non rapportable ne sont eux-mêmes pas sujets au rapport ; qu'en condamnant M. N... C... à rapporter à la succession la somme de 198 496,33 euros au titre des droits, frais et émoluments de la donation du 14 mai 2009 dont elle a relevé qu'elle était expressément stipulée non rapportable, la cour d'appel a violé l'article
843 du code civil.
CINQUIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit qu'à défaut pour Mme G... veuve C... de justifier dans le cadre judiciaire des opérations de compte, liquidation et partage, que le financement du bien "[...]" provient du remploi de ces fonds personnels issus de la vente immobilière de la villa dite [...] [...], il y a lieu de fixer une créance due par Mme A... G... veuve C... à l'égard de la succession de I... C... à hauteur de 1,4 millions d'euros » ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur l'appartement [...] appartenant à Madame A... G... veuve C..., en vertu de l'article
1538 du code civil, "tant à l'égard de son conjoint que des tiers, un époux peut prouver par tous les moyens qu'il a la propriété exclusive d'un bien. Les présomptions de propriété énoncées au contrat de mariage ont effet à l'égard des tiers, aussi bien que dans les rapports entre époux, s'il n'en a été autrement convenu. La preuve contraire sera de droit et elle se fera par tous les moyens propres à établir que les biens n'appartiennent pas à l'époux que la présomption désigne, ou même s'ils lui appartiennent, qu'il les a acquis par une libéralité de l'autre époux. Les biens sur lesquels aucun des époux ne peut justifier d'une propriété exclusive sont réputés leur appartenir, à chacun pour moitié" ; que, sous le régime de la séparation de biens, le bien appartient à celui des époux dont le titre établit la propriété sans égard à son financement ; que lorsqu'un époux acquiert un bien avec des deniers qui lui ont été donnés par son conjoint à cette fin, la donation n'est jamais que des deniers ; qu'en effet, en vertu de l'article
1099-1 du code civil, quand un époux acquiert un bien avec des deniers qui lui ont été donnés par l'autre à cette fin , la donation n'est que des deniers et non du bien auquel ils sont employés ; qu'en ce cas, les droits du donateur ou de ses héritiers n'ont pour objet qu'une somme d'argent suivant la valeur actuelle du bien ; que la succession a seulement la possibilité d'obtenir le règlement d'une créance lors du règlement de la succession, si ceux qui revendiquent cette créance prouvent que le de cujus a financé tout ou en partie cette acquisition ; qu'il ressort d'un courrier de Maître R... que l'acquisition de l'appartement [...] par Madame A... G... veuve C... à la SCI société [...], dont le gérant était son époux, lui a été permise par des fonds personnels ; que ces deniers personnels proviennent de la vente immobilière de la résidence [...] dans les années 1970 ; qu'or cette résidence elle-même a été acquise par Madame A... G... veuve C... à la SCI résidence [...] dont le gérant était I... C..., son mari, dont le prix a été payé comptant à l'instant même mais sans passer par la comptabilité du notaire soussigné ; que la provenance des fonds n'est justifiée dans aucun acte ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que Madame A... G... veuve C... n'exerçait pas d'activité professionnelle et n'avait donc pas de revenus ; que Madame A... G... veuve C... allègue que l'acquisition de la résidence [...] a elle-même été permise en 1970 par des fonds personnels issus de la vente immobilière de la villa dite [...] [...], bien immobilier lui-même acquis en 1965 grâce à ses fonds personnels ; que, cependant, elle ne produit aucune pièce permettant de fonder ses affirmations ; qu'au contraire, les indices sus développés permettent de considérer que Madame A... G... veuve C... a acquis [...] avec les seuls deniers de son époux, aucun élément n'étant produit sur l'éventuelle existence d'un patrimoine personnel de Madame A... G... veuve C... ; que, dans le cadre judiciaire des opérations de compte, liquidation et partage, si Madame A... G... veuve C... n'apporte pas la preuve que le financement du bien [...] provient du remploi de ces fonds personnels issus de la vente immobilière de la villa dite [...] [...], il conviendra de fixer une créance due par Madame A... G... veuve C... à la succession de I... C... à hauteur de la seule évaluation mentionnée au dossier et réalisée par l'expert T... de 1,4 millions d'euros » ;
1°) ALORS QUE la preuve d'une donation de denier incombe à celui qui l'allègue ; qu'en déduisant l'existence d'une créance de la succession de I... C... à l'encontre de Mme G..., au titre du financement de l'acquisition de l'immeuble [...], de l'impossibilité dans laquelle elle se trouvait de justifier de la manière dont elle en avait acquitté le prix, en présence d'indices permettant de considérer que l'acquisition s'était faite avec les seuls deniers de son époux, quand il incombait à Mme X... C... et à M. W... C..., de rapporter la preuve de ce que l'acquisition du bien litigieux avait été faite au moyen de fonds donnés par le défunt, la cour d'appel a violé l'article
1315, devenu
1353, du code civil, ensemble l'article 1099-1 même code ;
2°) ALORS QUE l'existence d'une donation suppose établie l'intention libérale du donateur ; qu'en déduisant l'existence d'une créance de la succession de I... C... à l'encontre de Mme G..., au titre du financement de l'acquisition de l'immeuble [...], de l'impossibilité dans laquelle elle se trouvait de justifier de la manière dont elle en avait acquitté le prix, en présence d'indices permettant de considérer que l'acquisition s'était faite avec les seuls deniers de son époux, sans constater que c'est avec une intention libérale que le défunt avait financé l'acquisition de l'immeuble litigieux par son épouse, la cour d'appel a violé les articles
893 et
1099-1 1315 du code civil ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, méconnaît son office le juge qui, saisi d'une demande tendant à la reconnaissance d'une créance de la succession sur l'épouse du défunt, avec lequel il avait été marié sous le régime de la séparation de biens, au titre du financement, par celui-ci, d'un bien personnel à celle-là, renvoie au notaire chargé des opérations de liquidation l'appréciation des éléments de preuve permettant d'établir que le financement provenait de fonds personnels de l'épouse ; qu'en jugeant que la succession de I... C... détiendrait une créance à l'égard de Mme G... à défaut pour cette dernière de justifier du remploi de fonds personnel pour l'acquisition de l'immeuble [...] devant le notaire chargé des opérations de compte liquidation et partage, la cour d'appel, qui s'est dessaisie du litige qu'elle était tenue de trancher, a violé l'article
4 du code civil. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour Mme C... et M. W... C...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit qu'aucun recel successoral n'est établi.
AUX MOTIFS QUE « En vertu de l'article 778, sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits 'détournés' ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont eu ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier. Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part. L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession. Il ne suffit pas qu'une libéralité soit déguisée ou indirecte pour que le recel existe, encore faut il pouvoir établir des faits positifs de recel et la preuve d'une intention frauduleuse. Pour Madame X... C... et Monsieur W... C..., il existe quatre recels successoraux commis par Madame A... G... veuve C... et Monsieur N... C.... Sur l'évaluation des actions : Si la valeur des actions de la société BAAGI a été sous évaluée dans le projet du règlement de succession de I... C... de 2010, il est également démontré que ces mêmes actions ont déjà fait l'objet d'une sous-évaluation au moment du règlement de la succession du père des intimés, O... C.... Ces insuffisances de valorisation de l'action à chaque règlement de succession démontrent moins une intention frauduleuse de dissimuler de l'actif du patrimoine aux autres successibles qu'une volonté de diminuer des obligations à l'égard de l'administration fiscale. Aucun acte positif de recel ni d'intention frauduleuse n'est suffisamment caractérisé. Sur la donation déguisée du bien '[...]' [...] à Monsieur N... C... : Le bien immobilier '[...]' a été sous-évalué de près de 40% au moment de sa cession. Si cette sous-évaluation manifeste une intention libérale de la part du de cujus, Madame X... C... et Monsieur W... C... n'apportent pas la preuve d'acte positif caractérisant une dissimulation frauduleuse. En effet, Madame X... C... et Monsieur W... C... ont eu pleinement connaissance de l'acte d'acquisition du bien '[...]' lequel ne comportait aucune déclaration mensongère. Aucun acte positif caractérisant une dissimulation frauduleuse ne s'est révélé. Sur les droits de mutation : Si la prise en charge par le donateur des droits, frais et émoluments constitue une donation indirecte au vu de l'importance de la somme acquittée caractérisant manifestement l'intention libérale de la donatrice au profit du donataire, cette pratique est courante dans le cadre des donations en nue-propriété ou les donateurs prennent également en charge les droits et frais et émoluments de la libéralités et ne peut suffisamment caractériser l'intention frauduleuse de dissimulation, condition nécessaire pour retenir le recel. Sur la donation déguisée de la part de I... C... dans le cadre de l'acquisition du bien dans l'ensemble immobilier '[...]' dont la revente a permis l'acquisition du bien [...] : A ce stade, même s'il existe un commencement de preuve, il n'est pas établi que le bien '[...]' a été l'objet d'une donation déguisée au profit de Madame A... G... veuve C.... Aucun acte de recel successoral n'est établi. Les demandes de Madame X... C... et Monsieur W... C... au titre des recels successoraux seront donc rejetés » ;
1) ALORS QUE toute intention frauduleuse permet de constituer un recel successoral ; qu'en jugeant, à propos de la sous-évaluation des actions de la société BAAGI, qu'elle démontrait moins une intention frauduleuse de dissimuler l'actif du patrimoine aux autres successibles qu'une volonté de diminuer des obligations à l'égard de l'administration fiscale, pour en déduire que l'intention frauduleuse n'était pas suffisamment caractérisée, la cour d'appel a violé l'article
778 du code civil.
2) ALORS QUE la dissimulation volontaire par l'héritier gratifié des libéralités qui lui ont été consenties est constitutive d'un recel ; qu'en l'espèce, s'agissant de la donation des droits, frais et émoluments au profit de M. N... C..., la cour d'appel a retenu qu'il s'agissait d'une pratique courante dans le cadre des donations en nue-propriété et qu'elle ne pouvait suffire à caractériser l'intention frauduleuse de dissimulation ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants pris du caractère courant de la pratique, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. N... C... n'était pas tenu de révéler cette donation aux cohéritiers, lesquels faisaient valoir qu'ils n'en avaient pas été informés et n'en avaient appris l'existence que par l'ouverture d'une procédure contentieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
778 du code civil.
3) ALORS QUE toutes les personnes appelées à venir au partage de la succession en vertu d'un titre universel sont tenues de révéler les libéralités qui leur ont été consenties ; que la dissimulation volontaire est constitutive d'un recel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que Mme G... avait acquis le bien immobilier "[...]" avec les seuls deniers de son époux et qu'il convenait de fixer une créance due à ce titre à la succession ; qu'en écartant néanmoins le recel successoral de ce chef, au seul motif inopérant qu'il n'était pas établi que le bien "[...]" avait été l'objet d'une donation déguisée au profit de Mme G..., sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme G... n'avait pas intentionnellement omis de déclarer lors de l'ouverture de la succession de son époux défunt cette donation des fonds ayant financé l'acquisition du bien, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
778 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR débouté Mme X... C... et M. W... C... de leur demande de condamnation de Mme G... et M. N... C... à les relever et garantir de toutes pénalités, majorations et intérêts de retard liés au dépôt tardif de la déclaration fiscale de la succession.
AUX MOTIFS QUE « Sur la condamnation des appelants à relever et garantir X... et W... C... de toutes pénalités et majorations des droits d'enregistrement liés à la succession de I... C.... A l'appui de cette demande, Madame X... C... et Monsieur W... C... mettent en avant les fautes particulièrement graves commises par les appelants les empêchant de régulariser une déclaration de succession en bonne et due forme auprès des services fiscaux. S'agissant des fautes de Monsieur N... C..., aucun acte de recel successoral n'a été retenu. Au surcroît, il n'est pas démontré que l'attitude des appelants a conduit à freiner volontairement le partage. Les parties se sont lancées dans la voie judiciaire et doivent assumer ensemble les éventuelles conséquences face à l'administration fiscale » ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen du pourvoi incident, relatif au recel successoral, emportera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a débouté Mme X... C... et M. W... C... de leur demande de condamnation de Mme G... et M. N... C... à les relever et garantir de toutes pénalités, majorations et intérêts de retard liés au dépôt tardif de la déclaration fiscale de la succession, à raison des fautes commises, notamment au titre du recel successoral, par application de l'article
624 du code de procédure civile.