Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale, 30 mai 2024, 22/00879

Mots clés
Relations du travail et protection sociale • Relations individuelles de travail • Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Versailles
30 mai 2024
Conseil de Prud'hommes de Nanterre
15 février 2022

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Versailles
  • Numéro de pourvoi :
    22/00879
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Nature : Arrêt
  • Décision précédente :Conseil de Prud'hommes de Nanterre, 15 février 2022
  • Identifiant Judilibre :665969603780990008865f5f
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Résumé

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Texte intégral

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80A Chambre sociale 4-6

ARRET

N° CONTRADICTOIRE DU 30 MAI 2024 N° RG 22/00879 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VCIX AFFAIRE : [F] [E] C/ S.A.S. CHANEL Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Février 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE N° Chambre : N° Section : E N° RG : F19/01001 Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à : Me Olivier BONGRAND de la SELARL O.B.P. Avocats Me Martine DUPUIS de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE, La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Monsieur [F] [E] né le 11 Mai 1984 à [Localité 5] de nationalité Française [Adresse 2] [Localité 4] Représentant : Me Olivier BONGRAND de la SELARL O.B.P. Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0136 - APPELANT **************** S.A.S. CHANEL N° SIRET : 542 05 2 7 66 [Adresse 1] [Localité 3] Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - - Représentant : Me Pascale LAGESSE de la SAS BREDIN PRAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T12 substitué par Me Mathilde PAQUELIER avocat au barreau de PARIS INTIMEE **************** Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 Février 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie COURTOIS, Président chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Nathalie COURTOIS, Président, Madame Véronique PITE, Conseiller, Madame Odile CRIQ, Conseiller, Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE, Greffier lors du prononcé :Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI FAITS ET PROCÉDURE A compter du 1er juin 2010, M.[F] [E] a été engagé par contrat de travail à durée déterminée, avec reprise d'ancienneté au 14 juin 2009, puis en contrat à durée indéterminée à compter du 1er avril 2011, en qualité de contrôleur de gestion junior, par la SAS Chanel, société intervenant dans les domaines d'activité suivants : la mode, les parfums, l'horlogerie et la joaillerie, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective nationale des industries chimiques et connexes. A compter du 1er septembre 2015, M.[F] [E] occupait les fonctions d'auditeur interne senior pour la région Amérique, Royaume-Uni et Japon. A compter du 1er septembre 2017, il a été détaché à New-York, pour une durée de trois ans, en qualité d'auditeur interne. Convoqué le 13 novembre 2018 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 27 novembre suivant, et mis à pied à titre conservatoire, il a été licencié par courrier du 18 décembre 2018, renvoyé le 4 février 2019, énonçant une cause réelle et sérieuse. La lettre de licenciement est ainsi libellée: « Monsieur, À la suite de la perte par les services postaux du courrier de notification en date du 18 décembre 2018 adressé par lettre recommandée international n° RK 44 764 609 8 FR, nous sommes contraints de vous adresser de nouveau la présente notification qui se substitue donc à notre envoi précédent. Seule la première présentation du présent courrier de notification par les services postaux fera foi comme point de départ du préavis dans l'hypothèse où vous finiriez par réceptionner ultérieurement notre premier courrier daté du 18 décembre 2018. Par lettre remise en main propre le 13 novembre 2018, nous vous avons convoqué à un entretien préalable fixé au 27 novembre 2018. Nous sommes au regret de vous informer que les explications que vous nous avez fournies n'ont pas permis de modifier notre appréciation des faits et que nous avons décidé de procéder à votre licenciement pour les motifs qui ont été portés à votre connaissance lors de cet entretien. Nous vous notifions par la présente votre licenciement en raison des faits rappelés ci-dessous, lesquels démontrent un manque d'intégrité et de probité, pourtant indispensables à l'exercice de vos fonctions, et une volonté de tromper la Société incompatible avec le lien de confiance inhérent à votre niveau de responsabilité, et contraire à vos engagements contractuels issus notamment de votre avenant de détachement en date du 22 août 2017 et en particulier de notre code de l'éthique dénommé «Ethics@Chanel »; ceci entraînant la perturbation du fonctionnement normal du service. Pour mémoire, vous avez été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er avril 2011 en qualité de Contrôleur de Gestion Junior, puis d'Auditeur Interne au sein du Département Audit Interne à compter du l° septembre 2015, la Société ayant eu la volonté d'accompagner votre évolution professionnelle. En août 2017, la Société a souhaité poursuivre l'accompagnement de votre évolution, et vous avez été affecté au sein de Chanel INC en qualité d'Auditeur Interne Senior à compter du 1er septembre 2017. Depuis le 1er septembre 2015, vous avez ainsi rejoint le Département Audit Interne qui, comme vous le savez, occupe un rôle stratégique au sein de la Société et du Groupe, dans un contexte réglementaire comme médiatique de plus en plus exigeant à l'égard du respect des règles d'éthiques au sein des sociétés, a fortiori lorsqu'elles sont présentes sur la scène internationale. En tant qu'Auditeur Interne, vous occupez ainsi un rôle prépondérant dans la stratégie externe et interne de l'entreprise à travers la conduite de vos missions, en participant notamment aux dispositifs de gestion des risques de Chanel, et donc à la protection de la Marque, au travers de l'évaluation et de l'identification des zones d'amélioration des processus de contrôle interne, en vérifiant l'application des procédures et le respect des lois et réglementations dans tous les domaines, et en émettant des recommandations pertinentes et adaptées aux situations. L'exercice de vos fonctions implique donc de grandes responsabilités et l'accès à de nombreuses informations confidentielles dans tous les domaines, auprès de toutes les divisions et unités du Groupe. Dès lors, vous devez faire preuve de qualités de probité, et de loyauté sans faille, afin de garantir un lien de confiance essentiel, et il vous incombe en particulier, à votre niveau de responsabilités, de respecter scrupuleusement l'ensemble de vos obligations contractuelles et, en particulier, de porter à notre connaissance tout conflit d'intérêt potentiel dans les conditions stipulées par notre code d'éthique dénommé « Ethics@Chanel ». Or, votre comportement démontre un manque évident de probité et de loyauté ne vous permettant plus d'exercer correctement vos fonctions. En effet, nous constatons que vous avez sciemment dissimulé votre situation maritale ainsi que la situation professionnelle de votre épouse, dissimulation contraire aux engagements pris en application du code éthique de révéler tout conflit d'intérêt potentiel. Ainsi, à plusieurs occasions, vous avez été accompagné par votre épouse, Madame [A] [UI], et avez assisté avec elle à de nombreux dîners d'équipe lors de déplacements à l'étranger de l'équipe Audit Interne pour leurs missions en 2017 et 2018, à Las Vegas, au Panama, à Londres et au Japon au cours desquels, et en présence uniquement de collaborateurs de Chanel INC, vous avez indiqué, à plusieurs reprises, que votre épouse travaillait pour le groupe Hermès - alors que cela est faux et qu'elle est une ancienne salariée de notre Société. Outre ce mensonge répété, nous comprenons désormais que certains de vos agissements, en apparence banals, relevaient en réalité d'une volonté très claire de dissimulation - ce qui nous conduit à nous interroger sur l'objectif d'une telle duplicité : - Vous n'avez jamais mentionné que vous vous étiez marié et n'avez pas mis à jour votre dossier personnel RH au sein de la Société. - Vous n'avez pas inscrit votre épouse en qualité de bénéficiaire du régime de mutuelle ou de prévoyance applicable au sein de notre Société. - Vous êtes venu seul à l'événement de Noël organisé en décembre 2017 sachant que de nombreux salariés français connaissant votre épouse seraient présents (contrairement aux déplacements de l'équipe Audit Interne américaine). Au-delà de ces manipulations, votre absence d'intégrité et de probité se révèle également dans la gestion de vos frais professionnels lors de vos missions et déplacement à l'étranger. Ainsi, lors de la soumission des rapports de frais concernant vos différentes missions à l'étranger en 2018, il est apparu que le partage des coûts concernant les frais entre ce qui relevait de vos frais personnels et de vos frais professionnels était flou. Le manque de clarté de vos rapports de frais a généré un travail supplémentaire de la part des équipes concernées. Votre comportement a également perturbé le fonctionnement du département d'Audit Interne auquel vous appartenez notamment en raison de la gêne et de l'incompréhension qu'il a généré alors qu'il relève précisément du rôle du département d'identifier et de faire cesser les manquements à l'éthique et à la probité qui pourraient être commis. A titre d'illustration, en juillet 2018, vous avez fait part de la réalité relative à votre situation maritale à l'une des collaboratrices de l'équipe Audit Interne en lui demandant de conserver une telle information, pourtant anodine, comme confidentielle la mettant ainsi dans une position très inconfortable. Ne supportant plus cette situation, celle-ci s'est confiée à sa supérieure hiérarchique le 2 novembre dernier. En outre, votre attitude a contraint à revoir le plan de charge de cette équipe compte tenu des doutes légitimes sur votre capacité à exercer vos fonctions avec intégrité et loyauté. En effet, dans de telles circonstances, il n'était pas envisageable que vous puissiez avoir accès à des données extrêmement sensibles concernant la gestion des ressources humaines ou de la paie au sein de la Société et du Groupe. Dans ce contexte, nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement, votre attitude ayant définitivement rompu le lien de confiance indispensable à l'exercice de vos fonctions du fait de vos manquements à la probité et à l'intégrité, et entraînant la perturbation du fonctionnement normal du service. La première présentation du présent courrier par les services postaux marque le début de votre préavis de trois mois que nous vous dispensons d'exécuter. Ce préavis vous sera néanmoins rémunéré aux échéances normales de la paie. Ainsi qu'il est d'usage, vous voudrez bien restituer tous les biens, matériels, produits et documents appartenant à la Société ou au Groupe qui seraient encore en votre possession (badge d'accès, ordinateur portable, téléphone...). A cet effet, nous vous demandons de prendre contact avec Madame [I] [M], Head of People & Organization, afin d'organiser cette restitution. Nous vous rappelons que vous demeurez tenu à une obligation de confidentialité et de discrétion, laquelle couvre toutes les informations dont vous auriez pu avoir connaissance dans le cadre de l'accomplissement de vos fonctions, ainsi qu'à une obligation de loyauté. La rupture de votre contrat de travail met immédiatement fin à votre affectation au sein de Chanel INC. Conformément aux dispositions de votre avenant, la Société prendra en charge vos frais de rapatriement en France (billets d'avion et déménagement) sous réserve que ce retour soit effectivement réalisé dans les 3 mois suivants la réception du présent courrier. A cet effet, nous vous invitons à vous rapprocher de Madame [B] [G]. La rupture de votre contrat de travail interviendra à l'expiration de votre préavis, date à laquelle nous vous adresserons votre solde de tout compte, votre certificat de travail et votre attestation Pôle-emploi. Par ailleurs, nous vous informons que nous renonçons à l'application de la clause de non-concurrence prévue à votre contrat de travail. [...] » Par courrier du 19 février 2019, M.[F] [E] a contesté les motifs de son licenciement. Par courrier du 26 mars 2019, la SAS Chanel a répondu à M.[F] [E] et apporté des précisions sur les motifs du licenciement. Le 10 avril 2019, M.[F] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins d'obtenir la requalification de son licenciement en un licenciement nul, ou, à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse, ainsi que la condamnation de la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, ce à quoi la société s'est opposée. Par jugement rendu le 15 février 2022, notifié le 18 février 2022, le conseil a statué comme suit: fixe le salaire de référence mensuel de M.[F] [E] à la somme de 5 763 euros bruts dit que le licenciement de M.[F] [E] repose sur une cause réelle et sérieuse condamne la société Chanel à verser à M.[F] [E] les sommes suivantes : * 28 614.51 euros bruts au titre de la contrepartie financière de la clause de non- concurrence * 2 861.45 euros bruts au titre des congés payés afférents déboute M.[F] [E] de ses autres demandes déboute la société Chanel de sa demande reconventionnelle ordonne l'exécution provisoire de droit fixée à l'article R 1454-28 du code du travail ordonne l'application des dispositions légales en matière d'intérêt de droit et la capitalisation des intérêts à compter de la date de réception de la convocation du défendeur devant le bureau de conciliation et d'orientation, soit le 10 juillet 2019 condamne la société Chancel aux éventuels dépens. Le 17 mars 2022, M.[F] [E] a relevé appel de cette décision par voie électronique. Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 17 novembre 2023, M. [F] [E] demande à la cour de : infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 15 février 2022 Statuant à nouveau : fixer le salaire de référence à la somme de 13.740 euros à titre principal, annuler le licenciement de M.[F] [E] compte tenu de la violation du droit au respect de sa vie privée, du droit d'accès au juge et de la violation de sa liberté d'expression ordonner la réintégration de M.[F] [E] dans son emploi d'auditeur interne senior en conséquence, condamner la société Chanel à verser à M.[F] [E] la somme de 796 920 euros à titre d'indemnité de nature forfaitaire correspondant aux salaires dont il a été privé depuis le terme de son préavis jusqu'à sa réintégration effective dans son emploi, arrêtée à titre provisoire au 4 mars 2024 à défaut de réintégration, condamner la société Chanel à verser à M.[F] [E] une indemnité de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et très subsidiairement sans cause réelle ni sérieuse condamner la société Chanel à verser à M.[F] [E] les sommes suivantes: * 30.850 euros, à titre de rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement et subsidiairement 15.442 euros * 25 706 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis, outre 2 570 euros au titre des congés payés y afférents et subsidiairement 13 766 euros outre 1 376 euros de congés payés * 99 428 euros à titre de contrepartie financière de clause de non-concurrence, outre 9 942 euros de congés payés y afférents et subsidiairement 67 588 euros outre 6 758 euros de congés payés y afférents en tout état de cause, condamner la société Chanel à verser à M.[F] [E] les sommes suivantes : * 8 468 euros à titre de rappel de salaire sur bonus 2018 et 2019, outre 846 euros au titre des congés payés afférents *16 041 euros de dommages et intérêts pour rupture anticipée du détachement au titre du préjudice locatif ; * 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de droit et circonstances vexatoires * 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ordonner la remise de ses affaires personnelles ordonner la remise d'une attestation Pôle emploi conforme assortir les condamnations de l'intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil concernant les créances salariales et de l'indemnité de licenciement et ordonner la capitalisation des intérêts condamner la société Chanel aux entiers dépens débouter la société Chanel de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions. Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 12 septembre 2022, la société Chanel demande à la cour de : à titre principal, confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 15 février 2022 en conséquence, juger que le licenciement de M.[F] [E] repose sur une cause réelle et sérieuse débouter M.[F] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions A titre subsidiaire, sur le salaire de référence : si la cour refusait d'établir le salaire de référence de M.[F] [E] à 5 763 euros bruts, fixer le salaire mensuel de référence à 8.090,21 euros bruts sur la demande de réintégration : si la cour ordonnait la réintégration de M.[F] [T], ordonner un rappel des salaires non perçus entre la date de fin du préavis (soit le 14 mai 2019) et la date de réintégration sur la seule base d'un salaire de référence brut de 5 763 euros (ou, à titre très subsidiaire, 8.090,21 euros) et ordonner la déduction de l'indemnité conventionnelle de licenciement versée d'un montant de 22 296,71 euros bruts du rappel de salaires prononcé débouter M.[F] [E] de sa demande de paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés sur la période d'éviction en l'absence de production par ce dernier de justificatifs démontrant l'absence d'emploi occupé sur l'ensemble de la période sur le complément d'indemnité conventionnelle de licenciement : si la cour décidait de fixer le salaire mensuel de référence à 8.090,21 euros, limiter le rappel de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement à 8 996,22 euros bruts sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : si la cour jugeait que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, ramener à de plus justes proportions l'indemnisation allouée et, en tout état de cause, la limiter à la somme de 51 873 euros bruts (ou, à titre subsidiaire, 72 812 euros si la cour fixait à 8 090,21 euros le salaire mensuel de référence) en tout état de cause, condamner M.[F] [E] à verser à la société Chanel la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. Par ordonnance rendue le 22 novembre 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 27 février 2024. Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement Sur la cause Selon l'article L1232-1 du code du travail, un licenciement pour motif personnel doit être motivé par une cause réelle et sérieuse. La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte. La cause sérieuse revêt une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles. La lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables. Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties. En cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L1235-1 du code du travail. Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables. Les motifs invoqués dans la lettre de licenciement sont: - le risque de conflit d'intérêt par la dissimulation de sa situation matrimoniale et plus particulièrement de la situation professionnelle de son épouse, 'dissimulation contraire aux engagements pris en application du code éthique de révéler tout conflit d'intérêt potentiel'engendrant une perturbation du fonctionnement du département d'Audit Interne auquel M.[F] [E] appartient notamment en raison de la gêne et de l'incompréhension que son comportement a généré et son attitude ayant contraint à revoir le plan de charge de cette équipe compte tenu 'des doutes légitimes sur sa capacité à exercer ses fonctions avec intégrité et loyauté', 'il n'était pas envisageable que vous puissiez avoir accès à des données extrêmement sensibles concernant la gestion des ressources humaines ou de la paie au sein de la Société et du Groupe'. - l'absence d'intégrité et de probité dans la gestion de ses frais professionnels lors de ses missions et déplacement à l'étranger La SAS Chanel expose qu'il n'est pas reproché à M.[F] [E] de s'être marié mais d'avoir délibérément dissimulé le fait que sa compagne était une ancienne salariée de la SAS Chanel voire menti en la présentant comme une ancienne salariée d'Hermès, de ne pas s'être interrogé sur un éventuel conflit d'intérêt et par ce comportement, avoir démontré un manque de probité et de loyauté ne lui permettant plus d'exercer correctement ses fonctions outre une remise en cause de la confiance indispensable à l'exercice des responsabilités importantes qui étaient les siennes. M.[F] [E] conteste les motifs de son licenciement et invoque une violation de libertés fondamentales : droit à la protection de sa vie privée, droit d'accès au juge, liberté d'expression. Sur l'obligation d'information Il résulte des pièces produites aux débats par la société que: - pièce 3: le contrat de travail signé le 1er avril 2011, et reconduit dans cette disposition, prévoit que ' vous aurez à nous faire connaître sans délai tout changement qui interviendrait dans votre situation personnelle ( adresse, situation de famille etc...)' - pièce 7: traduction de la lettre de mission signée le 22 août 2017 dans le cadre de son affectation au poste d'auditeur interne senior - Etats Unis d'Amérique qui prévoit, dans son paragraphe ' Loi sur la protection des données' ' en signant la présente lettre de mission, vous acceptez par les présentes la collecte, le traitement et l'utilisation des données à caractère personnel recueillies dans le cadre de votre relation de travail avec la société et vous êtes conscient que la société est autorisée à collecter, traiter et utiliser les données à caractère personnel nécessaires pour les besoins de votre mission. Vous reconnaissez que vous comprenez que vos données peuvent être transmises en dehors de votre pays d'origine, y compris vers un ou plusieurs pays qui appliquent des règles de protection des données moins strictes que votre pays d'origine'. - pièce 10: traduction du courriel du 6 novembre 2018 de Mme [H] [L], global head of internal audit, qui, à la demande de M.[Z] [S], directeur des affaires sociales de Chanel, écrit : * lorsque M.[F] [E] a rejoint l'équipe d'audit interne américaine en août/septembre 2017, il n'était pas marié et son contrat de détachement concernait une personne seule * ' l'équipe d'audit interne des Etats-Unis a passé trois semaines pour la mission d'audit de la revue des contrôles généraux au Panama en septembre 2017. [E] a demandé à sa petite amie de l'époque, [A], de se joindre à nous au Panama pendant toute la durée du voyage et l'a invitée à de multiples dîners d'équipe. Au moment de la mission d'audit, l'équipe était composée de moi-même, de [Y] [X] et d'[E]. Au cours de ces dîners d'équipe, tant [E] que [A] ont déclaré que [A] avait travaillé pour Hermès' * 'Lors du déjeuner d'adieu du précédent responsable mondial de l'audit interne ([C] [W]), [C] a adressé un commentaire à [E] sur le fait qu'il avait découvert que [A] avait un visa L2. Lors de ce déjeuner, les participants suivants étaient présents: moi-même, [C], [OX] [P], [D] [U] [J] et [K] [R]. [E] est devenu silencieux, car nous avons tous commencé à apprendre qu'un visa L2 signifie que lui et [A] ont été mariés. Interrogé par [C], [E] a admis qu'il s'était marié avec [A] un mois auparavant' * ' en décembre 2017, la fête de Noël de CHANEL INC/TCCL a eu lieu au MoMa. Malgré le fait que c'était la première fois que les employés étaient autorisés à amener des personnes significatives, [E] n'a pas amené [A]. Remarque: un nombre important d'employés de Chanel France étaient présents à la Holiday Party du MoMa'. * ' tout au long de l'année 2018, [E] a amené [A] aux voyages suivants: Las Vegas, Nevada (Etats-Unis) - deux semaines, Londres (Royaume Uni) - quatre semaines, et Tokyo (Japon) - trois semaines. [A] était présente pendant la totalité de ces voyages, et avait passé du temps avec les membres de l'équipe d'audit interne des Etats-Unis en dehors des heures de travail. Au moment de ces missions d'audit, l'équipe était composée de moi-même, [D] [E], [U] et [K]. Les commentaires relatifs au fait que [A] travaillait avec Hermès avaient été répétés à [U] et [K] par [F] et [A]' [...] * ' en septembre 2018, alors que j'étais présente à la conférence de l'IFLT au Royaume Uni, [V] [O] m'a pris à part pour m'informer qu'elle avait appris qu'[E] était marié à une ancienne employée de Chanel qui avait commis une fraude, avait ensuite été licenciée par Chanel France, et avait récemment saisi notamment pour harcèlement moral contre son ancien patron. Dès que j'ai appris cette nouvelle, j'ai informé [N] et le comité directeur de la conformité mondiale'. * ' [D] et moi (ainsi que certaines personnes dont les noms figurent dans cet e-mail) avons commencé à rassembler les faits concernant l'histoire professionnelle de [A] chez Chanel France. Nous avons ensuite commencé à enquêter sur le fait qu'[E] n'avait pas divulgué un conflit d'intérêt majeur' * ' Le vendredi 2 novembre, j'ai demandé à [K] de prendre le temps, le lundi 5 novembre, de s'assurer que tous les fichiers de l'équipe étaient sauvegardés sur le disque partagé pour tous les projets et de s'asseoir avec [E] pour passer en revue ses fichiers de test. A ce moment-là, [K] m'a révélé que pendant son séjour à Tokyo en juillet, [F] lui avait confié que [A] était une ancienne employée de Chanel, et qu'elle était en procès avec la société pour licenciement abusif. Il lui avait demandé de garder cette nouvelle confidentielle' [...] - pièce 11: traduction du courriel adressé le 11 juin 2018 par Mme [K] [R], group director internal audit-USA, japon & UK régions, à Mme [H] [L] où elle écrit ' lorsque notre équipe était au Japon en juillet, [F] nous a demandé, à [U] et à moi, si nous voulions nous joindre à lui et à [A] pour un repas au café du hall de notre hôtel. [U] ne s'est pas jointe à nous, mais je l'ai fait pour la compagnie. Pendant le repas, j'ai demandé pourquoi [A] et [F] avaient récemment évité de sortir avec le reste de l'équipe. A noter que [A] l'avait rejoint dans tous les voyages de travail, à l'exception du plus récent travail de terrain d'audit effectué au Panama en septembre 2018. Ils ont parlé en français, puis [F] m'a confié que [A] travaillait chez Chanel et qu'elle était en procès avec la société pour licenciement abusif. Il a expliqué qu'il essayait de l'empêcher d'être avec l'équipe pour éviter que le sujet ne soit abordé et qu'il aimerait s'assurer que ses dépenses sont séparés de celles de la société. J'ai demandé pourquoi elle avait été licenciée, et il a répondu que c'était compliqué, mais qu'il lui avait notamment été demandé d'effectuer des tâches ne correspondant pas à sa description de poste. J'ai maintenu cette confidentialité jusqu'à vendredi dernier, le 2 novembre. Récemment, j'ai remarqué qu'il y avait eu des enquêtes sur les performances d'[F] et que j'étais au courant de ses fichiers de travail et de l'endroit où ils étaient sauvegardés. J'ai pensé qu'il pourrait être important de partager les informations que j'avais avec [H], et pour autant que je sache, je suis la seule personne à qui [F] a communiqué ces informations'. - pièce 21: charte Ethics @ Chanel qui dispose dans son paragraphe ' conflits d'intérêts', ' Nous exigeons de nos collaborateurs qu'ils évitent les conflits d'intérêts avérés ou apparents. Conformément aux attentes de Chanel relatives au respect des plus hauts standards d'exigence en matière d'intégrité, les collaborateurs doivent s'abstenir de toute activité, prise d'intérêt et relation qui sont en conflit avec les intérêts de Chanel ou sont susceptibles de porter atteinte à leur capacité de s'acquitter de leurs obligations professionnelles de manière objective. Les collaborateurs doivent être attentifs aux conflits d'intérêts ainsi qu'aux circonstances susceptibles d'en donner l'apparence et les éviter. Les décisions commerciales doivent toujours être prises dans l'intérêt de Chanel. [...] Dans les limites autorisées par la loi applicable, les collaborateurs sont tenus de signaler à leur supérieur hiérarchique toute relation d'affaires effective ou potentielle y compris celles avec des membres de leur famille, susceptibles de donner lieu à un conflit d'intérêt. [...]' - pièce 22: fiche relative à la procédure globale de gestion des conflits d'intérêts. C'est vainement que M.[F] [E] soutient, sans l'établir par le moindre justificatif, que sa situation matrimoniale, à savoir sa vie commune avec Mme [UI] identifiée comme ancienne salariée Chanel, était connue depuis 2017, qu'il ne s'en était jamais caché et que le motif retenu par son employeur relève en tout état de cause de la sphère privée. Néanmoins, il résulte des pièces 10 et 11 précitées que M. [F] [E] a volontairement dissimulé d'une part, à son employeur le fait qu'il était en couple avec Mme [A] [UI], d'autre part, à l'équipe avec laquelle il travaillait que celle-ci était une ancienne salariée de Chanel, indiquant faussement qu'elle travaillait auparavant pour Hermès puis faisant comprendre à une salariée, à qui il s'était confié, qu'il ne souhaitait pas que cela se sache. L'attestation de Mme [KL] (pièce 32) produite par M.[F] [E] ne remet nullement en cause les pièces 10 et 11 précitées, celle-ci confirmant même celle de Mme [L] sur le fait que, c'est lors d'un déjeuner en novembre 2017, qu'il avait évoqué son mariage avec [A] [UI]. Néanmoins, ni l'attestation de Mme [KL] ni aucune autre pièce ( M.[F] [E] ne produisant que cette seule attestation) ne confirment que, comme le sous-entend M.[F] [E], tous et notamment Mme [L] savaient que Mme [UI] était une ancienne salariée de Chanel. Les différents agissements mentionnés dans la lettre de licenciement [ l'absence de mise à jour du dossier personnel RH au sein de la société le faisant ainsi toujours apparaître comme célibataire, la non inscription de son épouse en qualité de bénéficiaire du régime de mutuelle ou de prévoyance applicable au sein de la société ( M.[F] [E] expliquant, sans le justifier, qu'elle avait sa propre complémentaire), le fait qu'il soit venu seul à l'événement de Noël organisé en décembre 2017 où se trouvaient plusieurs salariés français connaissant son épouse contrairement aux déplacements de l'équipe audit interne américaine (M.[F] [E] expliquant, sans le justifier, qu'elle n'était pas à New York le soir de Noel), le fait de mentir sur la profession de son épouse et d'expliquer à l'une de ses collaboratrices de l'équipe audit interne son souhait de ne pas révéler la vérité sur la situation de son épouse] ne sont pas en soi des griefs mais sont autant d'éléments caractérisant une volonté de dissimulation de la situation réelle de sa compagne alors même que celle-ci l'avait très fréquemment accompagné lors de ses voyages professionnels et de dîners avec l'équipe audit interne et un refus d'informer son employeur de sa situation matrimoniale et donc du risque de conflit d'intérêt. Il s'agit donc de déterminer si cette obligation d'information porte atteinte aux libertés fondamentales invoquées par M.[F] [E]. S'agissant du droit d'accès au juge garanti par l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M.[F] [E] ne peut invoquer une violation de ce droit dès lors que ce droit est un droit personnel et qu'en l'espèce, ce droit a été exercé par son épouse, droit qui lui est propre et que M.[F] [E] ne peut revendiquer pour contester son propre licenciement, ce d'autant que son employeur ne lui a jamais reproché le fait que son épouse ait engagé une action en justice à son encontre. S'agissant de la liberté d'expression, selon l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 'Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière'. La liberté d'expression est le droit pour chacun, et en l'occurrence pour chaque salarié, de dire, écrire, diffuser librement ses idées. Elle s'exerce sans limitation de temps ou de lieu. Elle peut être individuelle ou collective. Et, a priori, elle ne doit rien avoir à faire avec l'employeur, lequel n'a pas de droit de regard sur elle. Néanmoins, cette liberté n'est pas sans limite. En l'espèce, ce n'est pas tant le fait de mentir qui est reproché à M.[F] [E] mais la finalité du mensonge et sa nature professionnelle à savoir cacher à son employeur la situation d'un risque de conflit d'intérêt en ne déclarant pas son lien matrimonial avec Mme [UI]. Si la liberté d'expression comprend également le droit de ne pas dire, cette réserve doit s'apprécier à l'aune des responsabilités du salarié et de ses obligations contractuelles. Or non seulement M.[F] [E] n'a pas déclaré son lien matrimonial comme l'y invitait son contrat de travail mais il a également fait une présentation volontairement erronée de son épouse contrevenant à son obligation de loyauté à l'égard de son employeur. Il n'y a donc pas violation de sa liberté d'expression. S'agissant de la protection de la vie privée, il résulte de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme que 'Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance', de l'article 9 alinéa 1 du code civil, ' Chacun a droit au respect de sa vie privée.' et de l'article L1121-1 du code du travail que 'Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché'. La cour de cassation a depuis longtemps posé une exigence d' indifférence de la vie privée du salarié à l'égard de l'employeur, seuls pouvant être admis en tant que cause de licenciement, des faits en relation avec la vie professionnelle du salarié, l'employeur ne pouvant pas indirectement prendre en considération à travers la violation d'une obligation d'information ceux qui relèvent de sa vie personnelle, les éléments indifférents n'ayant pas à être révélés. Elle affirme ainsi qu'un élément de la vie privée du salarié ne peut être une cause de licenciement, excepté lorsque, par son comportement, compte tenu de la nature de ses fonctions et de la finalité propre de l'entreprise, le salarié a causé un trouble caractérisé au sein de l'entreprise (Cour de cassation, , Publié). Dès lors qu'un élément échappe, par sa nature, au domaine des causes possibles de licenciement, le salarié n'est évidemment pas tenu d'en informer son employeur et ne peut donc pas être licencié pour avoir violé une obligation d'information (Cour de cassation, , Publié). Néanmoins, cette construction d'une sphère protégée au titre de la vie personnelle du salarié n'a jamais été conçue comme devant être absolument étanche avec la sphère de la vie professionnelle. C'est ainsi que la Haute juridiction retient la qualification de faute des faits, commis en dehors de son activité professionnelle, mais qui pénètrent dans le domaine professionnel à travers l'exigence de loyauté et/ou de probité pesant sur le salarié (Cour de Cassation, , Publié). Il s'agit donc de déterminer si l'obligation d'information s'agissant de sa situation familiale s'imposait à M.[F] [E] dans le contexte d'un risque de conflit d'intérêt et de l'exigence de loyauté et de probité attendue de la part d'un salarié. Plusieurs critères alternatifs en cas de liens d'intérêts permettent de cerner l'existence d'un éventuel conflit: - un défaut de loyauté - une absence de transparence - une absence d'indépendance, de neutralité ou d'impartialité - le non-respect de l'intérêt social. La Cour de cassation a rappelé que le licenciement pour une cause inhérente à la personne du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs imputables à ce salarié et que le seul risque d'un conflit d'intérêts ne peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement dès lors qu'aucun manquement du salarié à l'obligation contractuelle de bonne foi n'était caractérisé (). Comme relevé par la SAS Chanel, la dissimulation est d'une part, contraire aux engagements contractuels souscrits par M.[F] [E] dans le cadre de sa collaboration (faire connaître tout changement intervenu dans sa situation familiale-pièces 3 et 6) et constitue une méconnaissance de sa part des obligations découlant de son contrat de travail, d'autre part, une violation des règles éthiques applicables au sein de la société dont le respect est particulièrement essentiel pour les salariés occupant des responsabilités telles que celles de M.[F] [E]. En effet, l'employeur rappelle les termes de la pièce 21 où sont développées les valeurs de la société et où l'on peut lire en page 2 ' Chaque collaborateur doit, dans l'exercice de son métier, refléter sans aucun compromis nos valeurs fondamentales d'intégrité, de respect et de responsabilité', en page 4 ' La protection de la réputation de Chanel relève de la responsabilité de chaque collaborateur. En toute circonstance, notre intégrité absolue doit démontrer que l'on peut avoir confiance en nous, en notre authenticité et en notre impartialité [...]' en page 17 ' Nous exigeons de nos collaborateurs qu'ils évitent les conflits d'intérêts avérés ou apparents [...]' outre la charte Ethics @ Chanel précitée qui dispose dans son paragraphe ' conflits d'intérêts', ' Nous exigeons de nos collaborateurs qu'ils évitent les conflits d'intérêts avérés ou apparents. Conformément aux attentes de Chanel relatives au respect des plus hauts standards d'exigence en matière d'intégrité, les collaborateurs doivent s'abstenir de toute activité, prise d'intérêt et relation qui sont en conflit avec les intérêts de Chanel ou sont susceptibles de porter atteinte à leur capacité de s'acquitter de leurs obligations professionnelles de manière objective. Les collaborateurs doivent être attentifs aux conflits d'intérêts ainsi qu'aux circonstances susceptibles d'en donner l'apparence et les éviter. Les décisions commerciales doivent toujours être prises dans l'intérêt de Chanel. [...] Dans les limites autorisées par la loi applicable, les collaborateurs sont tenus de signaler à leur supérieur hiérarchique toute relation d'affaires effective ou potentielle y compris celles avec des membres de leur famille, susceptibles de donner lieu à un conflit d'intérêt. [...] Il en résulte que le salarié devait informer d'un risque possible de conflit d'intérêt du fait de son lien matrimonial avec Mme [UI], ancienne salariée ayant un différend judiciaire avec son employeur, de sorte que l'obligation d'information pesait bien sur M.[F] [E]. Ce d'autant qu'il est demandé aux collaborateurs en cas de doute concernant toute situation réelle ou potentielle de conflit d'intérêts de 'demander conseil à leur manager, aux ressources humaines ou à la direction juridique', ce que M. [F] [E] ne démontre pas avoir fait (pièce 22). Comme rappelé par la SAS Chanel, M. [F] [E] était en charge de 'recenser les risques et les procédures de contrôle du groupe, de contrôler la pertinence et l'application de ces procédures par la réalisation d'audits, d'élaborer des recommandations pour en améliorer l'efficacité et d'analyser les structures financières et les schémas organisationnels de l'entreprise ainsi que les données externes pour identifier et évaluer les risques comptables et organisationnels, ce contrôle des risques s'étendant également à la gestion des risques opérationnels dont notamment ceux liés aux systèmes d'information qui se sont complexifiés ces dernières années mais aussi les risques liés aux problématiques de gouvernance'. La société précise que dans le cadre de sa mission, il pouvait être amené par exemple à auditer les systèmes opérationnels des ressources humaines, de gestion des frais professionnels ou les modalités mises en oeuvre concernant le traitement des données personnelles des sociétés du groupe Chanel et qu'aux fins d'exercice de ses missions, il avait accès à un grand nombre d'informations confidentielles et sensibles notamment en matière stratégique, financière et comptable pour l'ensemble du groupe Chanel, ce que ne conteste pas utilement M.[F] [T] et qui avait justifié l'introduction d'une clause de non concurrence dans son contrat de travail (pièces 5 et 6). Son niveau hiérarchique, ses responsabilités et missions de contrôle interne exigeaient donc transparence, exemplarité, loyauté à l'égard de son employeur. Le salarié doit comme l'employeur exécuté de bonne foi son contrat de travail et le comportement de M.[F] [E] a provoqué un doute légitime sur sa loyauté à l'égard de son employeur. Ce défaut de loyauté, cette attitude dissimulatrice, cette absence de transparence relevés par la société a obligé celle-ci à revoir le plan de charges de l'équipe audit interne, certaines missions ne pouvant plus lui être confiées compte tenu des faits reprochés et des données sensibles auxquelles il avait accès. C'est ainsi que dans son courriel du 6 novembre 2018 (pièce 10), Mme [L] écrit : 'Lors de l'évaluation du plan d'audit interne des Etats-Unis, le reste des projets prévus jusqu'en juin 2019 portent sur des sujets très sensibles (c'est-à-dire les ressources humaines et la paie, les avantages sociaux, la sécurité des données, le GDPR et d'autres sujets qui posent un risque supplémentaire de conflit si [E] était chargé de ces questions. En tant que tel, j'ai dû revoir le plan d'audit interne des Etats-Unis et je vais devoir reporter ces projets et les remplacer par d'autres, ce qui modifiera sensiblement le plan (qui a été accepté par la direction comme étant les principales priorités lors de l'évaluation annuelle des risques)'. L'affirmation, sans justificatif, de M.[F] [E] selon laquelle le calendrier de l'audit aurait été respecté est contredite par le courriel du 24 novembre 2018 de Mme [L] (pièce 25). Outre le trouble dans le fonctionnement de l'équipe audit interne et dans le calendrier des audits programmés, la SAS Chanel invoque le fait que les collaborateurs de l'équipe ont été profondément déstabilisés et troublés par la découverte de la dissimulation dont avait fait preuve M.[F] [E] en particulier à leurs égards et lors d'événements professionnels conviviaux et rappelle la culture américaine plus exigeante en terme de transparence et de loyauté. Les échanges de mails conviviaux avec son équipe (pièce 34) ne contredisent pas le trouble relevé par l'employeur, ces échanges ayant eu lieu avant la procédure de licenciement. Ce grief est donc établi. Sur l'absence d'intégrité et de probité dans la gestion de ses frais professionnels lors de ses missions et déplacement à l'étranger La SAS Chanel précise qu'elle ne reproche pas à M. [F] [E] des irrégularités mais un manque de clarté et de précision ayant contraint le collaborateur en charge de la gestion des notes de frais à lui rappeler les règles et à lui demander de détailler davantage ses notes de frais. Elle rappelle qu'une exemplarité est également imposée aux membres de l'équipe Audit Interne dans la gestion et la soumission de leurs notes de frais, équipe en charge de contrôler les procédures de gestion des notes de frais au sein du groupe Chanel. Or, il avait également été observé que les frais professionnels soumis par M.[E] étaient fréquemment présentés de manière floue et peu claire en ce qui concernait le partage entre ses frais personnels et frais professionnels, ce qui générait un travail supplémentaire pour les responsables et avait donné lieu à des échanges explicites à ce sujet. En août 2018, il était rappelé à l'ordre par Monsieur [Y] [X], responsable de l'Audit Interne, et l'échange de courriels produit entre lui et M.[F] [E] démontre que ce dernier a dû refaire ses demandes et faire, selon les termes de M.[F] [E] lui-même, 'plus de commentaires possibles (et clairs)' (pièce 23). Néanmoins, le manque de clarté et de précision ne constitue pas un motif de licenciement sérieux, de sorte qu'il ne sera pas retenu. Au vu des éléments ci-dessus développés, il convient de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de débouter M. [F] [E] de toutes ses demandes afférentes à sa demande de nullité par confirmation du jugement. Sur les conséquences indemnitaires du licenciement Sur le rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement M.[F] [E] sollicite de voir fixer son salaire de référence à 13 740 euros (et subsidiairement 9 760,26 euros) et non, comme retenu par le Conseil, à 5 763 euros bruts. Selon l'article R1234-4 du code précité, 'Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié : 1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l'ensemble des mois précédant le licenciement ; 2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion'. A titre principal, la SAS Chanel rappelle que l'article 7, annexe 1 de l'avenant de détachement (pièce 6) dispose que ' La rémunération annuelle de référence correspond à la rémunération annuelle garantie brute que le salarié percevrait en France s'il n'était pas détaché est appelée rémunération de référence. Cette rémunération de référence, qui correspond au salaire de base mensuel multiplié par 13 auquel s'ajoute la prime de vacances s'élève à 62 810 euros bruts par an. Cette rémunération de référence, qui ne fera l'objet d'aucun versement, pourra évoluer en fonction de la politique de rémunération de Chanel. Pendant la mission du salarié, la rémunération de référence servira de base de calcul pour la détermination: - de la rémunération nette perçue pendant le détachement ( salaire et allocations diverses) [...] - des indemnités brutes qui seraient dues au moment du départ en retraite - des indemnités brutes qui seraient dues en cas de rupture du contrat de travail pour un autre motif - le salarié sera également éligible à percevoir un bonus dont le montant annuel pourra varier de 0 à 10% de son salaire de référence. Ce bonus est déterminé en mars de chaque année et assujetti à la présence aux effectifs au 31 décembre de l'année précédente [...]'. Selon elle, l'avenant de détachement signé par M.[F] [E] prévoit la rémunération de référence à savoir ' salaire de base mensuel multiplié par 13 auquel s'ajoute la prime de vacances' et pour l'année 2018, un avenant du 22 juin 2018 a revalorisé la rémunération de référence annuelle à la somme de 63 438 euros à laquelle s'ajoute un bonus pour l'année 2017 de 5 726 euros (pièce 9), de sorte que sur la base des douze mois précédent la notification du licenciement soit de février 2018 à janvier 2019, le salaire mensuel moyen de référence de M.[F] [E] s'élevait à 5 763,67 euros bruts. Néanmoins, la cour de cassation a rappelé que l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité conventionnelle de licenciement, les salaires dus au titre de l'allocation de congé de reclassement et les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doivent être calculés sur la base du salaire d'expatriation, nonobstant les stipulations contractuelles et les dispositions de la convention collective applicable moins favorables que les dispositions de l'article L1231-5 du code du travail (Cour de cassation, , Publié). En conséquence, il convient de retenir la proposition subsidiaire de la SAS Chanel, non remise en cause utilement par M.[F] [E], soit le salaire perçu au titre de l'année 2018 ($71 542,78 soit 59 254,95 euros bruts), et d'y intégrer l'indemnité les primes d'expatriation constituant un élément de salaire, d'exclure celles qui ont pour objet un remboursement de frais soit le bonus de $ 6 466 soit 5 355,43 euros bruts et l'allocation logement de $ 39 205,92 soit 32 472,11 euros bruts soit un total de 97 082,49 euros bruts annuels et 8 090,21 euros bruts mensuels, excluant ainsi les demandes de M.[F] [E] de voir rajouter l'avantage en nature billet d'avion, les cotisations salariales sur avantage en nature logement et les cotisations salariales sur billet d'avion, correspondant à des remboursements de frais et non des éléments de salaire. Sur la base de ces éléments, le salaire de référence de M.[F] [E] est fixé à 8 090,21 euros bruts par infirmation du jugement et il lui sera alloué, sur la base de l'article 14 de l'avenant n°3 du 16 juin 1955 de la convention collective de chimie invoqué par les parties, la somme de 8 996,22 euros au titre du rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement ( 31 293,93 euros (indemnité conventionnelle) - 22 296,71 euros (indemnité conventionnelle déjà versée) par infirmation du jugement. Sur le rappel d'indemnité compensatrice de préavis Selon l'article 1353 du code civil, ' Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation'. M.[F] [E] soutient que la durée de son préavis, en sa qualité de cadre, était de 3 mois, et que la SAS Chanel lui devait la somme totale de 41 220 euros et subsidiairement 29 280,78 euros et qu'elle ne lui a réglé que 15 514 euros. La SAS Chanel s'y oppose en indiquant que M.[F] [T] se fonde sur le montant théorique mentionné sur une attestation pôle emploi alors qu'il a été rémunéré pendant l'intégralité de son préavis de 3 mois et a perçu l'intégralité des éléments de rémunération auxquels il pouvait légalement prétendre pour la période de février à mai 2019, et renvoie aux avis de dépôt non négociables portant paiement des salaires pour la période de février à mai 2019 (pièce 41), non remis en cause par M.[F] [E], de sorte qu'il sera débouté de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis par confirmation du jugement. Sur le rappel d'indemnité de clause de non-concurrence M.[F] [E] rappelle que la clause de non-concurrence doit être assortie d'une contrepartie pécuniaire et que l'article 25 de la convention collective applicable prévoit que l'employeur qui dénonce un contrat de travail prévoyant une clause de non-concurrence peut, avec l'accord de l'intéressé, libérer par écrit, au moment de la dénonciation, le salarié de la clause d'interdiction. Dans ce cas, l'indemnité mensuelle prévue au paragraphe 3 sera payée pendant trois mois à dater de l'expiration de la période du préavis, de sorte que faute d'avoir sollicité son accord, la SAS Chanel en renonçant unilatéralement à cette clause aux termes de la lettre de licenciement, lui est redevable de la somme de 109 920 euros calculée sur la base d'un salaire de référence de 13 740 euros, la SAS Chanel contestant le montant du salaire de référence retenu par M.[F] [E]. En conséquence, en application des dispositions contractuelles non remises en cause par les parties et sur la base d'un salaire de référence de 8 090,21 euros bruts, il convient d'allouer à M.[F] [E] la somme de 55 183,51 euros au titre du rappel d'indemnité de clause de non-concurrence ([8090,21 x 2/3 x12 = 64 721,68 euros] - 9 538,17 euros déjà perçus) par infirmation partielle du jugement. Sur les demandes accessoires Sur la demande au titre du rappel de bonus 2018 et 2019 M.[F] [E] sollicite la somme de 6351 euros pour l'année 2018 et 2117 au prorata du temps de présence pour l'année 2019. La SAS Chanel se dit non responsable du paiement de la rémunération de M. [F] [E] durant sa période de détachement et soutient que ses demandes de rappel de bonus sont irrecevables à son encontre. Outre le fait que le conseil des prud'hommes ne s'est prononcé sur aucune fin de non recevoir de ce chef, aucune n'est mentionnée dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que la Cour n'en est pas saisie conformément à l'article 954 du code de procédure civile. Selon l'article 1353 du code civil, ' Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation'. Selon l'annexe 1 à l'avenant de détachement (pièce 6) que ' Le salarié sera également éligible à percevoir un bonus dont le montant annuel pourra varier de 0 à 10% de son salaire de référence. Ce bonus est déterminé en mars de chaque année et assujettit à la présence aux effectifs au 31 décembre de l'année précédente'. Il résulte de l'attestation pôle emploi (pièce 30) invoquée par M.[F] [E] que ce dernier a perçu un bonus le 31 mars 2018 pour la période de janvier à décembre 2017 de 5726 euros et qu'il n'y a aucune mention de bonus au titre des années 2018 et 2019. La SAS Chanel invoque la pièce 38, non remise en cause utilement par M.[F] [E] ,qui fait apparaître au 27 décembre 2018 le versement d'un bonus 2018 de 6 466 $ soit 5 355,43 euros bruts, de sorte qu'il sera débouté de sa demande de ce chef par confirmation du jugement. S'agissant du bonus 2019, la société qui s'oppose à tout versement et à toute proratisation ne justifiant pas des règles locales en vigueur faisant obstacle selon elle à toute proratisation, il convient de faire droit à la demande à hauteur de la somme de 2 117 euros bruts telle que demandée par M.[F] [E] au prorata du bonus 2019. M.[F] [E] demande le paiement des congés payés afférents aux bonus. Il convient d'y faire droit, le bonus constituant un élément de rémunération et celui-ci devant être inclus dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés (Cour de cassation du 17 mai 2023, pourvoi n°21-23247), de sorte qu'il convient de lui allouer la somme de 535, 54 euros de congés payés afférents au bonus 2018 et 211 euros de congés payés afférents au bonus 2019 par ajout au jugement. Sur la demande de dommages-intérêts pour rupture anticipée du détachement à titre du préjudice locatif M.[F] [E] rappelle qu'il devait normalement être détaché à New York pour une durée prévisible de 3 ans, renouvelable jusqu'à 5 ans; que son visa américain dépendait exclusivement de son contrat de détachement; qu'en application des règles migratoires américaines, il ne disposait que de 60 jours pour quitter le territoire américain à partir de la date de fin de son contrat de travail et ne pouvait en aucun cas travailler durant cette période. S'étant engagé le 5 octobre 2018 à louer son appartement jusqu'au 30 octobre 2019, aucune clause de sortie ou de rupture anticipée n'étant prévue, l'intégralité des loyers était due. M.[F] [E] demande la réparation de son préjudice à hauteur de 16 041 euros correspondant à la somme des loyers versés jusqu'au 30 octobre 2019, ce à quoi s'oppose la SAS Chanel. Si la SAS Chanel est tenue de maintenir l'intégralité de la rémunération, en ce compris l'allocation logement 'taxable housing' de $ 39 205,92 (soit 32 472,11 euros bruts), elle n'y est plus tenue à l'expiration du délai de préavis outre le fait que, dès lors que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, il n'y a pas de manquement causal du dommage allégué, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande qui porte sur la période postérieure au préavis par confirmation du jugement. Sur la demande de dommages-intérêts pour abus de droit et circonstances vexatoires Selon l'article L1222-1 du code du travail, 'Le contrat de travail est exécuté de bonne foi'. Les circonstances brutales du licenciement, même justifié, peuvent entraîner un préjudice distinct qui justifie l'octroi d'une indemnité spécifique conformément à l'article 1231-1 du code civil. Outre le fait que M.[F] [E] n'invoque et ne démontre aucun comportement vexatoire de la part de son employeur, il ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui résultant de son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse confirmé par la présente cour. Sur la demande de remise de ses affaires personnelles Si cette demande figure au dispositif de ses conclusions, M.[F] [E] motive très sommairement cette demande en page 52 de ses conclusions en écrivant sans plus de précision 'Au surplus, Monsieur [E] a été mis à pied à titre conservatoire, et n'a, de ce fait, pas été en mesure de saluer ses collègues et n'a pas davantage pu leur expliquer les raisons de son départ. Il n'a pas été en mesure de récupérer ses affaires personnelles (et notamment de nombreux documents administratifs confidentiels) et jamais la société CHANEL s'est proposée de les lui envoyer'. Cette demande imprécise sera rejetée par ajout au jugement. Sur la remise d'une attestation pôle emploi conforme Il convient d'ordonner la remise d'une attestation pôle emploi conforme au présent arrêt. Sur la demande au titre des intérêts au taux légal Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales produiront intérêts au taux légal à compter de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation, et les créances indemnitaires produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt. Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens Il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes de ce chefs et dit que chacune des parties conservera à sa charge la part des dépens par elle exposés.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, Confirme le jugement du conseil des prud'hommes de Nanterre du 15 février 2022 en ce qu'il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse; débouté M.[F] [E] de sa demande au titre du rappel d'indemnité de préavis et des congés afférents, au titre du bonus 2018, au titre des dommages-intérêts pour préjudice locatif et de sa demande pour abus de droit et circonstances vexatoires; L'infirme pour le surplus; Statuant à nouveau et y ajoutant; Fixe à 8 090,21 euros bruts le salaire mensuel de référence; Condamne la SAS Chanel à payer à M.[F] [E] la somme de 8 996,22 euros au titre du rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement; Condamne la SAS Chanel à payer à M. [F] [E] la somme de 55 183,51 euros au titre du rappel d'indemnité de clause de non-concurrence; Condamne la SAS Chanel à payer à M. [F] [E] la somme de 535, 54 euros de congés payés afférents au bonus 2018; Condamne la SAS Chanel à payer à M. [F] [E] la somme de 2 117 euros bruts au titre du prorata du bonus 2019 et 211 euros de congés payés afférents; Déboute M. [F] [E] de sa demande de voir ordonner la restitution d'affaires personnelles; Ordonne la remise d'une attestation pôle emploi conforme au présent arrêt; Rappelle que les créances salariales produiront intérêts au taux légal à compter de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation, et les créances indemnitaires produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt; Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ; Dit que chacune des parties conservera à sa charge la part des dépens par elle exposés. - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Nathalie COURTOIS, Président et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Le greffier, Le président,
Note...

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