CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 février 2021
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10110 F
Pourvoi n° W 19-24.222
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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DÉCISION
DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 3 FÉVRIER 2021
La société
Néoliane santé, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° W 19-24.222 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige l'opposant à la société
Mutuelle mieux être, société mutualiste, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations écrites de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société
Néoliane santé, de la SCP
Delamarre et Jehannin, avocat de la société
Mutuelle mieux être, et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l'article 1014
, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société
Néoliane santé aux dépens ;
En application de l'article
700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société
Néoliane santé et la condamne à payer à la société
Mutuelle mieux être la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE
à la présente décision
Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société
Neoliane santé
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société
Néoliane santé à payer à la
Mutuelle Mieux Être la somme de 1 262 027,77 euros au titre des reprises de commissions arrêtées au 31 décembre 2012, avec intérêts au taux légal à compter du 4 février 2013 et d'avoir condamné la société
Néoliane santé à payer à la
Mutuelle Mieux Être la somme de 1 614 185 € euros au titre des taux de chute supérieurs à 13 % arrêtée au 31 décembre 2012, avec intérêts au taux légal à compter du 4 février 2013, outre la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du CPC.
AUX MOTIFS QUE l'intimée inverse ainsi la chronologie des échanges intervenus entre les parties ; que la lettre du 2 mai 2012 de M. J..., délégué courtage Sud-Est de l'agence de Nice
Mutuelle Mieux Être, précise en réalité que : « La mutuelle a décidé de suspendre à effet immédiat la commercialisation de ses offres. L'audit en cours doit permettre de redéfinir les contours de la politique commerciale de la
Mutuelle Mieux Être. En conséquence à ce stade nous sommes au regret de ne plus accepter de demande de saisie. Une fois l'audit terminé, nous ne manquerons pas de vous communiquer les nouvelles orientations arrêtées par les instances dirigeantes de la MME » ; que si le 25 juin 2012 Mme G..., déléguée régionale de l'agence de Marseille
Mutuelle Mieux Être, a fait savoir que les tarifications réalisées avant mai 2012 et qui n'avaient pas été validées étaient caduques, Mme C..., directrice générale de la
mutuelle Mieux Être, évoque dans un courriel du 12 juillet 2012 une discussion entre les parties « pour envisager les conditions d'une reprise de notre activité commune » ; qu'il n'en ressort pas l'aveu allégué de ce que le partenariat avec
Néoliane santé allait cesser ; que la demande d'arrêt des saisies du mois de mai était toute provisoire, dans l'attente d'un audit et du renflouement qui sont intervenus ; que le président de
Néoliane santé, M. Y..., a écrit le 8 août 2012, une missive dont le contenu montre sa connaissance du renflouement intervenu par le groupe Pro BTP à hauteur de 60 millions d'euros, dont il affirmait se réjouir, et qui avait mis fin à la période d'incertitude invoquée ; que le mail postérieur daté du 5 septembre 2012 de M. H..., directeur commercial, (« je te demande de ne pas reprendre la production Néoliane comme déjà indiqué nous ne pouvons pas te payer
Rappelle-moi stp ») ne correspond pas à la situation financière qui était celle de la MME en septembre 2012, où le risque de non assurance était nul suite à la recapitalisation et à la réassurance à 100 % par le groupe Pro BTP ; que
Néoliane santé affirmant que la
Mutuelle Mieux Être représentait 80 % de son chiffre d'affaires, il lui appartenait de se rapprocher de la direction générale de la MME, son interlocuteur habilité étant la directrice générale, Mme C... ; que ce courriel laconique du 5 septembre 2012 de M. H... ne saurait démontrer que la rupture des relations serait en réalité imputable à la
Mutuelle Mieux Être et justifier un transfert des adhésions vers un nouvel assureur, lequel a nécessairement été initié avant le mois de septembre 2012 ; de surcroît que la MME fait valoir, sans être contredite, que ce courriel, produit en pièce n° 6 de l'intimée, est manifestement tronqué au regard des mentions automatiques figurant sur tous les envois de ses préposés, que la mutuelle n'en a trouvé aucune trace en dépit de ses recherches internes, et que le directeur des systèmes d'information de
Néoliane santé lui a indiqué n'avoir pas pu le retrouver dans la boîte de son prétendu destinataire, M. Y..., ni davantage dans les comptes de collaborateurs qui auraient pu le recevoir ; que contrairement à ce que soutient l'intimée, c'est à celui qui invoque une pièce pour prétendre être déchargé de ses obligations contractuelles d'en prouver l'authenticité et non à la MME de déposer plainte pour faux ; que l'authenticité de cette pièce n° 6, versée en photocopie, n'est pas établie ; qu'en tout état de cause, les trois courriels invoqués ne visent que l'arrêt de la commercialisation et en aucun cas ne pouvaient dispenser
Néoliane santé de conserver le stock des contrats en vigueur ; que les écrits de Mme C... destinés au gestionnaire Mutua, parlant d'une résiliation à titre conservatoire, avaient pour finalité d'obtenir seulement une baisse de ses coûts de gestion ; qu'il ne s'agissait pas alors de changer de gestionnaire ; et qu'en toute hypothèse un changement de gestionnaire ne pouvait pas avoir d'impact sur les affaires nouvelles qu'à compter du 1er janvier 2013, et non sur le stock des adhésions ; que les décisions relatives à la délégation ou non de la gestion à Mutua Gestion relèvent de la seule responsabilité de la
Mutuelle Mieux Être et ne pouvaient constituer une cause de rupture du partenariat entre
Néoliane santé et la MME ; qu'en toute hypothèse, même si
Néoliane santé était fondée à se retirer et changer d'assureur, elle ne pouvait s'affranchir de ses obligations contractuelles envers de la Mieux Être; qu'elle devait adresser une lettre recommandée avec accusé de réception trois mois avant sa décision de transfert pour résilier la convention en application de l'article 3.1 de l'avenant n° 2 de la convention d'intermédiation ; qu'en l'absence de griefs à l'encontre de la
Mutuelle Mieux Être pour justifier le transfert massif du portefeuille par Néoliane, celle-ci est seule à l'origine de cette décision dont elle n'a jamais prévenu l'appelante, de sorte que les clauses de la convention d'intermédiation doivent recevoir application ; que la MME fait valoir exactement qu'il lui était loisible, si
Néoliane santé souhaitait travailler désormais avec un autre assureur, de commercialiser des affaires nouvelles avec cet assureur, sans transférer le portefeuille assuré par l'appelante et son stock des 8297 adhésions en cours ; qu'en application de l'article 3 de l'avenant n° 2 de la convention d'intermédiation : « Les premiers 12 mois d'adhésion. La
Mutuelle Mieux Être versera à
Néoliane santé pour chaque adhésion une rémunération d'acquisition escomptée précomptée d'un montant de 50 % du chiffre d'affaires annualisé des cotisations brutes hors TCA et CMU. La commission sera versée par avance avec un maximum d'effet différé de 15 mois. Exemple : (') En cas de chute (rétractation, annulation, résiliation, absence de prise d'effet, etc.) avant le 24e mois à compter de la date d'effet d'une adhésion,
Néoliane santé remboursera à la
Mutuelle Mieux Être la commission d'acquisition escomptée afférente à cette adhésion au prorata de la durée d'adhésion. Les années suivantes : après expiration d'un délai de 12 mois à compter de la date d'effet de l'adhésion,
Mutuelle Mieux Être versera à
Néoliane santé une rémunération d'un montant de 12 %, net de toutes taxes, TCA et CMU, des cotisations encaissées » ; qu'il en résulte que la clause de la convention d'intermédiation concernant les taux de chute qui conduit la MME à solliciter la somme de 1 614 185 €, ne peut pas être qualifiée de clause pénale contrairement à ce que soutient
Néoliane santé, et qu'elle ne peut pas donner lieu à réduction, dans la mesure où elle ne peut pas s'analyser en une pénalité sanctionnant une inexécution contractuelle ; qu'aucune faute contractuelle ne pouvant être retenue contre la MME qui n'a fait subir aucune défaillance financière à Néoliane, l'appelante ne pas en être privée ; que la demande d'expertise présentée à titre subsidiaire par l'intimée n'est pas justifiée, la
Mutuelle Mieux Être versant aux débats les bordereaux permettant de calculer les reprises de commissions dues par Néoliane ; que le mode de calcul par la mutuelle du montant de 1 262 029, 77 € et du montant de 1 614 185 € n'est pas discuté par
Néoliane santé ; que la MME est donc fondée à solliciter la condamnation de
Néoliane santé à lui verser la somme de 1 262 029,77 € au titre des reprises de commissions arrêtées au 31 décembre 2012, et la somme de 1 614 185 € au titre des taux de chute supérieurs à 13 % arrêtés au 31 décembre 2012, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 4 février 2013 ;
1/ ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que tout manquement aux obligations contractées constitue une faute contractuelle ; qu'en l'espèce la société
Néoliane santé soutenait que la
Mutuelle Mieux Être avait pris l'engagement pour l'année 2012 d'honorer une production d'affaires nouvelles jusqu'à 7 000 polices nettes de chute ; que celle-ci avait pris unilatéralement la décision, dès le mois de mai 2012, de suspendre toute commercialisation d'offres nouvelles quand une enveloppe de 2 903 polices restait encore à pourvoir pour atteindre le seuil des 7 000 polices convenues (écritures d'appel, p. 4 antépénult. § ; p. 28 pénult. § à p. 31 antépénult. §) ; qu'en jugeant qu'aucun grief ni aucune faute contractuelle ne pouvait être retenus contre la
Mutuelle Mieux Être, sans s'expliquer sur ces manquement de la société
Mutuelle Mieux Etre à ses obligations contractuelles, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles
1134 et
1184 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2/ALORS QUE les manquements d'une des parties au litige autorise l'autre partie à ne pas exécuter ses propres obligations ; qu'en l'espèce la Cour d'appel a expressément constaté qu'en dépit de l'engagement de la MME d'assurer à la société Néoliane une valeur annuelle de 7000 contrats, la société MME avait suspendu la commercialisation de ses offres à raison de ses difficultés économique menaçant la pérennité de la Mutuelle ; qu'en outre la société MME ne pouvait plus garantir le traitement des dossiers par le gestionnaire en titre dont le contrat venait d'être résilié ; qu'en affirmant que ces manquements avérés de la MME ne dispensaient pas la société
Néoliane Santé de conserver le stock de dossiers en vigueur ni de respecter ses propres obligations contractuelles envers la MME à qui elle aurait dû adresser une lettre recommandée avec accusé de réception 3 mois avant sa décision de transfert, la Cour d'appel a violé les articles
1134 et
1184 du Code Civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
3/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de l'exposante (écritures d'appel p. 26 § 3 à 28 § 5) qui soutenait que les clauses de rémunération convenues entre les parties ne reposaient plus sur aucune cause dès lors qu'elles avaient été convenues dans le cadre de relations commerciales normales où chacune des parties avait intérêt à voir le nombre d'adhérents aux garanties de la
Mutuelle Mieux Être s'accroitre et non dans l'hypothèse d'un conflit tel que celui ayant donné lieu au transfert de 8297 adhésions en cours vers un autre assureur, la cour d'appel a violé l'article
455 du code de procédure civile ;
4/ ALORS QUE le juge ne peut méconnaître les termes du litige tels qu'ils résultent des prétentions des parties, lesquelles sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense ; qu'en l'espèce la société
Néoliane santé contestait le mode de calcul de l'indemnité de 1 614 185 euros invoquée par la
Mutuelle Mieux Être au titre du taux de chute en niant, d'une part, l'authenticité et la justesse des calculs compris dans le tableau produit aux débats par la
Mutuelle Mieux Être en raison de l'absence des éléments sous-jacents et des liens entre les données et, d'autre part, du « mode de calcul » de cette indemnité en raison du cumul opéré par la
Mutuelle Mieux Être du taux de chute année sur année quand le contrat prévoyait une détermination du taux de chute par génération sur une période de 12 mois (écritures d'appel, p. 36 § 5 et 6) ; qu'en jugeant cependant que le « mode de calcul par la mutuelle [
] du montant de 1 614 185 euros n'[était] pas discuté par
Néoliane santé », la cour d'appel a violé l'article
4 du code de procédure civile ;
5/ ALORS QU'en toute hypothèse, en s'abstenant de répondre au moyen de l'exposante tiré de la contestation du mode de calcul de l'indemnité de 1 614 185 euros sollicitée par la
Mutuelle Mieux Être au titre du taux de chute, la cour d'appel a violé l'article
455 du code de procédure civile.