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Tribunal administratif de Versailles, 8ème Chambre, 22 juin 2023, 2103097

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
  • Numéro d'affaire :
    2103097
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Dispositif : Rejet
  • Rapporteur : Mme Marc
  • Nature : Décision
  • Décision précédente :Tribunal administratif, 21 décembre 2020
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Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Versailles
22 juin 2023
Tribunal administratif
7 juin 2023
Tribunal administratif
16 mai 2023
Ministère de l'intérieur
21 février 2022
Tribunal administratif
21 décembre 2021
Tribunal administratif
21 février 2021
Tribunal administratif
21 décembre 2020

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête, enregistrée le 13 avril 2021, M. B A demande au tribunal : 1°) d'annuler la décision implicite de rejet née le 21 février 2021 du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur la demande qu'il lui a adressée le 21 décembre 2020, tendant au paiement de l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT) et des suppléments horaires qui lui sont dus ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 13 905,97 euros au titre des indemnités journalières d'absence temporaire (IJAT) et suppléments horaires dus depuis le 1er mai 2016, cette somme étant assortie des intérêts de retard, ainsi que la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral, le tout sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai consenti à l'autorité ministérielle pour exécuter le jugement à intervenir ; 3°) de mettre la charge de l'Etat la somme de 200 euros au titre des frais liés à l'instance. Il soutient que : - le régime indemnitaire découle de la position administrative, comme l'indique la note n° 100144 du 18 janvier 2010 du directeur central des compagnies républicaines de sécurité ; - la position administrative " MP " (mission ponctuelle) ne peut s'appliquer qu'à un nombre de fonctionnaires égal ou supérieure à douze ; - par conséquent, lorsqu'il est inscrit en position " MP " sur sa fiche individuelle de position, il ne peut être considéré que comme l'un des éléments participant à une mission ayant un caractère collectif ; - lorsque, hors résidence, l'amplitude d'une vacation est égale ou supérieure à 12 heures, le code " MP " porté sur les documents d'enregistrement doit être transformé en " DP " (déplacement ponctuel) et simultanément une durée moyenne journalière (DMJ) de 7h48 doit être appliquée remplaçant les 7h53 exigées en " MP ", soit une différence de 5 minutes par jour à porter sur son compte d'heures supplémentaires ; - il est employé au quotidien hors résidence ; - il remplit les critères lui permettant de bénéficier des indemnités journalières d'absence temporaire (IJAT) et suppléments horaires depuis 2016 ; - pour la période allant du 1er mai 2016 à la date de son recours préalable, il n'a pas bénéficié du paiement de l'IJAT et des suppléments horaires, ce qui représente un total de 395 IJAT et 32 heures supplémentaires, soit 13 905 euros ; - la responsabilité de l'Etat est engagée en raison de l'illégalité fautive de la décision du 21 février 2021, dès lors qu'il a droit au paiement des IJAT et des suppléments horaires ; - la responsabilité de l'Etat est également engagée au titre des préjudices qu'il a subis du fait des dysfonctionnements du service ; - il subit un préjudice évalué à 13 905,97 euros depuis le 1er mai 2016, outre un préjudice moral et des troubles dans ses conditions de vie, à hauteur de la somme de 5 000 euros ; - sa demande n'est pas prescrite, dès lors qu'il ne sollicite pas l'annulation d'une décision mais l'indemnisation de son préjudice résultant du comportement fautif de l'administration. Par un mémoire, enregistré le 21 décembre 2021, le préfet de police informe le tribunal que la défense de l'Etat dans cette affaire relève du ministre de l'intérieur. Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2023, le ministre de l'intérieur et des Outre-mer conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - le requérant, qui exerce ses fonctions en binôme, ne remplit pas les conditions pour prétendre au versement de l'IJAT, qui vise à compenser les conditions de restauration et d'hébergement d'une équipe de douze agents au moins au titre d'une même mission ; - l'administration n'a donc pas commis de faute en refusant de faire droit à sa demande de versement de l'IJAT ; - s'agissant de la demande relative à l'indemnisation des heures supplémentaires, le requérant ne peut se prévaloir des dispositions du mémento des compagnies républicaines de sécurité, qui sont dépourvues de valeur réglementaire ; - en outre, si les missions des agents sont désormais fictivement codifiées sous le statut " MP " (mission ponctuelle), qui correspond en réalité à des missions collectives, ce positionnement, qui a été effectué à la demande des agents pour préserver leurs droits, ne saurait avoir pour effet de leur conférer plus d'avantages que leur statut réglementaire en " MI " (mission individuelle), lequel prévoit une durée moyenne journalière de 7h53 ; - le requérant n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il aurait dû être positionné en " DP " (déplacement ponctuel) avec une durée moyenne journalière de 7h48 ; - l'administration n'a pas commis de faute en refusant de faire droit à sa demande de paiement des heures supplémentaires ; - le requérant ne démontrant aucun dysfonctionnement du service, sa demande au titre du préjudice moral doit être rejetée. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 61-1066 du 26 septembre 1961 ; - le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ; - le décret n° 2000-194 du 3 mars 2000 ; - l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Caron, première conseillère, - et les conclusions de Mme Marc, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit

: 1. M. B A, brigadier de police, est affecté à la section de motocycliste d'escorte (SME) de la compagnie républicaine de sécurité (CRS) n° 1 de Vélizy-Villacoublay depuis le 1er mai 2016. Par un courrier du 21 décembre 2020, reçu le même jour, il a demandé le versement de la somme de 13 905,97 euros au titre du paiement de l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT) ainsi que des heures hors service (HS) liées à la différence d'amplitude des vacations propres aux positionnements administratifs " MP " (mission ponctuelle) et " DP " (déplacement ponctuel). Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur cette demande. M. A demande au tribunal l'annulation de cette décision, ainsi que la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 13 905,97 euros au titre des IJAT et suppléments horaires dus depuis le 1er mai 2016, ainsi que la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. La décision implicite de rejet née le 21 février 2021 du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur la demande indemnitaire préalable, adressée par M. A le 21 décembre 2020 et reçue le même jour, a pour seul effet de lier le contentieux. Son annulation ne saurait être utilement demandée. Par suite, les conclusions présentées par M. A tendant à l'annulation de cette décision ne peuvent qu'être rejetées. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne l'indemnité journalière d'absence temporaire : 3. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 26 septembre 1961 instituant une indemnité journalière d'absence temporaire en faveur des personnels des compagnies républicaines de sécurité se déplaçant en unité ou fraction d'unité dans les départements métropolitains et les départements d'outre-mer : " Les fonctionnaires de police des compagnies républicaines de sécurité se déplaçant dans les départements métropolitains et les départements d'outre-mer, en unité complète ou en fraction d'unité de douze hommes ou plus, en dehors de la commune de résidence de l'unité, reçoivent, à l'exclusion de toute indemnité de déplacement, une indemnité journalière d'absence temporaire ". L'article 2 de ce décret dispose : " Cette indemnité est due pour chaque période d'absence de vingt-quatre heures décomptée à partir de l'heure de départ jusqu'à l'heure de retour à la résidence de l'unité. Elle est due également pour toute période d'absence d'une durée minimum de douze heures consécutives se situant soit à la fin d'un déplacement de plus de vingt-quatre heures, soit à l'intérieur d'un déplacement de moins de vingt-quatre heures ". 4. Le décret du 26 septembre 1961 instituant une indemnité journalière d'absence temporaire en faveur des personnels des compagnies républicaines de sécurité se déplaçant en unité ou fraction d'unité dans les départements métropolitains et les départements d'outre-mer prévoit que cette indemnité est due, à l'exclusion de toute indemnité de déplacement, pour chaque déplacement collectif de l'unité, comprenant douze hommes au minimum sur une même mission, en dehors de la commune de résidence de l'unité pour une période de vingt-quatre heures décomptée à partir de l'heure de départ jusqu'à l'heure de retour à la résidence de l'unité, son paiement étant effectué soit à la fin de l'absence, soit mensuellement à terme échu, au vu d'états faisant apparaître le détail des déplacements de l'unité. 5. Il résulte de l'instruction que M. A exerce les missions de protection rapprochée de personnalités française ou étrangères qui lui sont confiées en binôme de deux ou quatre motocyclistes, chaque binôme comprenant un pilote et un agent d'intervention. Ainsi qu'il a été dit, l'indemnité journalière d'absence temporaire, qui vise à compenser les conditions de restauration et d'hébergement rendues plus précaires à raison de l'effectif, n'est due qu'en cas de déplacement de l'unité à laquelle appartient l'agent, en fraction de douze hommes ou plus, comptabilisés pour une mission et non au titre de différents déplacements. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que M. A remplissait la condition tenant à l'effectif de l'unité mobilisé prévue par l'article 1er précité du décret du 26 septembre 1961. En outre, les mentions relatives à la position administrative " DP " ou " MP " figurant sur les fiches individuelles de position de M. A et la circonstance que la durée de certaines missions dépasserait le seuil de déclenchement du versement de l'IJAT sont sans incidence sur son éligibilité à l'indemnité en cause. Il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que le ministre de l'intérieur a commis une faute en refusant de lui verser l'indemnité journalière d'absence temporaire. En ce qui concerne les heures supplémentaires : 6. Aux termes de l'article 22 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " Dans les conditions fixées par les règlements d'emploi pris par arrêté ministériel, les fonctionnaires actifs des services de la police nationale peuvent être appelés à exercer leurs fonctions, de jour comme de nuit, au-delà des limites fixées pour la durée hebdomadaire normale du travail. / Les services accomplis au-delà de la durée hebdomadaire normale du travail sont compensés par des repos égaux ou équivalents qui doivent être accordés dans les plus courts délais compatibles avec les besoins du service, ou dans des conditions définies par décret, par un régime indemnitaire adapté. ". L'article 1er du décret du 3 mars 2000 fixant les conditions d'attribution d'une indemnité pour services supplémentaires aux fonctionnaires actifs de la police nationale dispose que : " Les fonctionnaires actifs de la police nationale, à l'exclusion des fonctionnaires du corps de conception et de direction et du corps de commandement, peuvent, lorsqu'ils sont amenés à effectuer des services supplémentaires non susceptibles de donner lieu à récupération, bénéficier d'une indemnité pour services supplémentaires. ". Aux termes de l'article 113-34 de l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale : " Les services supplémentaires (permanences, astreintes, rappels au service, dépassements horaires de la journée de travail ou de la vacation) effectués au-delà de la durée réglementaire de travail ouvrent droit : / 1. Après prise en compte temps pour temps, à des repos égaux ou équivalents dans des conditions précisées par l'instruction générale relative à l'organisation du travail dans la police nationale. () / 2. Ou à une indemnisation forfaitaire dans des conditions fixées par décret. / Le paiement, en application des dispositions du décret n° 2000-194 du 3 mars 2000 modifié, d'indemnités pour services supplémentaires effectués sur une période donnée, exclut toute compensation horaire au titre de cette même période. / Le versement, en application des dispositions du décret n° 2002-819 du 3 mai 2002 modifié, de la rémunération d'une période d'astreinte exclut toute compensation horaire au titre de cette même période. () ". 7. M. A fait valoir qu'il aurait dû être placé, pour toutes les missions d'une durée égale ou supérieure à douze heures, en position administrative " DP " (déplacement ponctuel), dont la durée moyenne journalière s'établit à 7h48, et non en position administrative " MP " (mission ponctuelle), dont la durée moyenne journalière est fixée à 7h53 et, qu'en conséquence, il est fondé à solliciter l'indemnisation de la différence de cinq minutes par jour liée à ce positionnement erroné. 8. Il résulte de l'instruction que la position " DP " correspond, comme la position " MP ", à des missions collectives en unité complète ou par fraction de douze agents au moins et ouvre droit à la rémunération d'heures supplémentaires au-delà d'une durée moyenne journalière de 7h48 alors que cette durée est de 7h53 pour la position " MP ". Cependant, ainsi qu'il est dit au point 5, il résulte de l'instruction que les missions réalisées par M. A ne sont pas des missions collectives en unité complète ou par fraction de douze agents au moins. M. A ne pouvait ainsi prétendre au paiement d'heures supplémentaires résultant du placement en position " DP ". Par suite, quelles que soient les mentions portées sur sa fiche de position individuelle, M. A n'est pas fondé à soutenir que l'administration a commis une faute en rejetant sa demande d'indemnisation au titre des heures supplémentaires dont il aurait été privé, faute d'avoir été placé automatiquement en position " DP " lorsque ses missions excédaient une durée de douze heures. En ce qui concerne les dysfonctionnements du service : 9. M. A, en se bornant à faire état, en termes généraux, de dysfonctionnements du service et de l'absence de versement de l'IJAT et des heures supplémentaires, laquelle n'est pas de nature à engager la responsabilité pour faute de l'Etat ainsi qu'il a été dit, n'établit pas l'existence d'une faute qui serait à l'origine d'un préjudice moral ou d'un trouble dans ses conditions d'existence. 10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'exception de prescription quadriennale opposée en défense, que les conclusions indemnitaires de M. A doivent être rejetées. Sur les frais liés à l'instance : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que demande M. A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B A et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer. Copie en sera adressée pour information au préfet de police. Délibéré après l'audience du 7 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Grenier, présidente, Mme Caron, première conseillère, M. Connin, conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023. La rapporteure, signé V. Caron La présidente, sginé C. Grenier La greffière, signé G. Le Pré La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.