Cour d'appel de Versailles, 27 mars 2018, 17/00403

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Versailles
  • Numéro de pourvoi :
    17/00403
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Décision précédente :Tribunal de commerce de Nanterre, 17 novembre 2016
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/6253cda4bd3db21cbdd93f8e
  • Président : Monsieur François Leplat
Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Versailles
2018-03-27
Tribunal de commerce de Nanterre
2016-11-17

Texte intégral

COUR D'APPEL DE VERSAILLES DA Code nac : 62B 12e chambre

ARRET

No CONTRADICTOIRE DU 27 MARS 2018 No RG 17/00403 AFFAIRE : SA ENEDIS anciennement EDF C/ Olivier X... ... Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 17 Novembre 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE No Chambre : 03 No Section : No RG : 2016F00677 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : Me Bertrand Y... Me Anne-laure Z... RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE VINGT SEPT MARS DEUX MILLE DIX HUIT, La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : SA ENEDIS anciennement EDF No SIRET : 444 608 442 [...] Représentant : Me Bertrand Y... H... G...-F... A... AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - No du dossier 20170055 Représentant : Me Marine GUGUEN de l'AARPI ALMA MONCEAU, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0868 APPELANTE **************** Monsieur Olivier X... [...] Représentant : Me Anne-laure Z..., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - No du dossier 42083 Représentant : Me Catherine B... de la SCP MACL SCP d'Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0184 - substituée par Me C... Madame Marina D... [...] Représentant : Me Anne-laure Z..., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - No du dossier 42083 Représentant : Me Catherine B... de la SCP MACL SCP d'Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0184 - substituée par Me C... SA AVIVA ASSURANCES No SIRET : 306 522 665 [...] [...] Représentant : Me Anne-laure Z..., Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - No du dossier 42083 Représentant : Me Catherine B... de la SCP MACL SCP d'Avocats, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0184 - substituée par Me C... INTIMES **************** Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Février 2018 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur François LEPLAT, Conseiller F.F. Président, Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller, Mme Véronique MULLER, Conseiller, Greffier F.F., lors des débats : Monsieur James BOUTEMY , FAITS : Monsieur X... et Madame D..., propriétaires à [...] d'une maison équipée d'une centrale pour la production et la fourniture d'électricité à ERDF - devenue société ENEDIS -, ont vu le 11 mars 2013 nombre de leur équipements électriques endommagés en suite d'une surtension de leur installation provoquée par une rupture de neutre du coffret basse tension du distributeur d'électricité. Après avoir déclaré le sinistre à leur assureur multirisque habitation, la société Aviva assurances (l'assureur), celui-ci a désigné le cabinet Cunningham Lindsey qui a évalué la valeur à neuf de remplacement des matériels à 13 536,41 euros, et après application d'un coefficient de vétusté, retenu la valeur de 10 369,35 euros, la société ENEDIS offrant le 20 avril 2015 à l'assureur subrogé de verser la somme de 9 062,20 euros. Après avoir vainement saisi le 30 juin 2015 le médiateur de l'énergie, les époux X... et leur assureur ont assigné la société ENEDIS le 11 mars 2016 devant le tribunal de commerce de Nanterre en condamnation à payer aux assurés, la somme de 3 667,06 euros sur le fondement des articles 1147 et 1382 du code civil, et à l'assureur subrogé, la somme de 11 744,60 euros. PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES : Vu le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 17 novembre 2016 qui a : - condamné la société ENEDIS à payer : 3 167,06 euros à Monsieur X... et Madame D..., 11 744,60 euros à la l'assureur, - débouté Monsieur X... et Madame D... et leur assureur de leur demande de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive, - condamné la société ENEDIS à payer à Monsieur X... et Madame D... et leur assureur la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - ordonné l'exécution provisoire, - condamné la société ENEDIS aux dépens ; Vu l'appel interjeté le 13 janvier 2017 par la société ENEDIS ; Vu les conclusions transmises par le RPVA le 17 janvier 2018 pour la société ENEDIS au visa des articles 1386-1 et suivants et 1147 et suivants code civil dans leur rédaction alors applicable, à titre principal, - dire irrecevables les demandes formées par Monsieur X... et Madame D... et leur assureur au visa de l'article 1147 du code civil dès lors que la responsabilité de la société ENEDIS relève de la responsabilité du fait des produits défectueux (articles 1386-1 et suivants du code civil) - infirmer le jugement et débouter Monsieur X... et Madame D... et leur assureur de leurs demandes formées à l'encontre de la société ENEDIS, à titre subsidiaire, - dire mal fondées les demandes formées par Monsieur X... et Madame D... et leur assureur à l'encontre de la société ENEDIS sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, à défaut de faute imputable à la société ENEDIS distincte du défaut du produit, - infirmer le jugement et débouter Monsieur X... et Madame D... et leur assureur de leurs demandes formées à l'encontre de la societe ENEDIS, à titre très subsidiaire, - dire mal fondée l'indemnisation sollicitée au titre des dommages, dès lors que leur chiffrage ne prend pas en compte la valeur de remplacement, - dire mal fondée l'indemnisation sollicitée au titre de la note d'honoraires du cabinet Cunningham Lindsey - dire mal fondée l'indemnisation sollicitée au titre du découvert de garantie - dire mal fondée l'indemnisation sollicitée au titre du préjudice de désagrément - prendre acte de ce que Monsieur X... et Madame D... et leur assureur ne font plus valoir et renonce a leur demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive, si la cour condamne la société ENEDIS à indemniser Monsieur X... et Madame D... et leur assureur au titre des dommages subis du fait du défaut de qualité de l'électricité distribuée, - déduire du montant de l'indemnité allouée à Monsieur X... et Madame D... et leur assureur la franchise applicable aux dommages aux biens dans le cadre de la responsabilité du fait des produits défectueux de 500 euros prévue à l'article 1386-2 du code civil, en tout état de cause,. - infirmer le jugement en ce qu'il a statué sur l'article 700 du code de procédure civile et condamner Monsieur X... et Madame D... et leur assureur à payer à la société ENEDIS la somme de 5 000 euros, - condamner Monsieur X... et Madame D... et leur assureur aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Y... ; * * Vu les conclusions transmises par le RPVA le 10 janvier 2018 à vérifier pour Monsieur X..., Madame D... et la société Aviva assurances aux fins de voir, au visa des articles les articles 1383 et suivants du code de procédure civile (en réalité 1354 et suivants du code civil dans leur version en vigueur jusqu'au 1er octobre 2016), L. 121-12 du code des assurances, 1147 et 1382 anciens du code civil, - recevoir les appelants dans leurs écritures ; - confirmer le jugement en ce qu'il a reconnu la responsabilité contractuelle de la société ENEDIS et retenu le manquement de cette dernière à son obligation de résultat évalué le montant du préjudice matériel à la somme totale de 13 536,41 euros, - infirmer le jugement quant aux indemnités accordées à Monsieur X... et Madame D... d'une part et à leur assureur, d'autre part ; - condamner la société ENEDIS à verser la somme de 13 235,86 euros à l'assureur, - condamner la société ENEDIS à indemniser Monsieur X... et Madame D... à hauteur de 2 175,95 euros, - condamner la société ENEDIS à payer à la Monsieur X... et Madame D... et leur assureur la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, - débouter la société ENEDIS de ses demandes fins et conclusions dirigées à l'encontre de Monsieur X... et Madame D... et leur assureur, - condamner la société ENEDIS aux entiers dépens, dont le montant sera directement recouvré par Maître Z... conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. * * Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré, aux écritures des parties ainsi qu'aux rapports que chacune d'elles a fait réaliser comme que cela est prescrit à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

LA COUR, Considérant qu'aux termes des dernières conclusions qu'elle a transmises, la société ENEDIS ne soulève pas le défaut d'intérêt à agir de l'assureur, de sorte qu'il n'y a pas lieu de discuter ce chef d'irrecevabilité invoqué par les appelantes. 1. Sur le fondement de la responsabilité de la société ENEDIS Considérant qu'aux termes de articles 1386-1, 1386-3 et 1383-6 du code civil dans leur version antérieure au 1er octobre 2016, "le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime", "l'électricité est considérée comme un produit" et "est producteur, lorsqu'il agit à titre professionnel, le fabricant d'un produit fini, le producteur d'une matière première, le fabricant d'une partie composante" ; Considérant que pour voir confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société ENEDIS, s'opposer à l'irrecevabilité que la société ENEDIS prétend tirer de l'application exclusive aux faits de la responsabilité des produits défectueux tirée des articles 1386-1 et 1386-3 précités, et soutenir que la responsabilité est établie sur le fondement des articles 1382, 1383 et 1147 du code civil dans leur version antérieure au 1er octobre 2016, les intimés soutiennent que, de droit, la société ENEDIS ne fournit et ne produit pas d'électricité, mais se limite à la distribuer ainsi que cela résulte de la loi no 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, et que, de fait, la surtension à l'origine du sinistre est imputable au transport de l'électricité sur le réseau dont les structures et l'activité sont étrangers à la fourniture d'électricité ; Mais considérant que le principe de la séparation juridique, économique et matérielle sur le marché national et communautaire des activités de fourniture et de distribution d'électricité est indifférent dans la définition du produit, et tandis que les conditions de production de l'énergie électrique sont inséparables du réseau constitué des infrastructures permettant la transformation de la puissance et de la fréquence de l'énergie, ainsi que la maîtrise de sa tension et de son intensité pour la destiner aux consommateurs finaux, il convient d'accueillir la qualification de produit au sens des articles 1386-1 et suivants précités dûment invoquée par la société ENEDIS ; Et considérant, par ailleurs, qu'il est constant que depuis l'origine du sinistre, la société ENEDIS a reconnu le principe de sa responsabilité, et tandis qu'en application de l'article 12 du code de procédure civile, "Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée", il convient, en suite de la responsabilité de la société ENEDIS contradictoirement discutée, et retenue sur le fondement des produits défectueux, de déclarer recevable l'action de Monsieur X... et Madame D... et de leur assureur, et par substitution de motif, de confirmer la décision qui a retenu la responsabilité de la société ENEDIS. 2. Sur les préjudices réparables Considérant que la société ENEDIS s'oppose, en premier lieu, au jugement en ce qu'il a retenu l'indemnisation du sinistre à valeur à neuf pour 13 536,41 euros en application du principe de la réparation intégrale et dont elle soutient que celui-ci se limite au remboursement des frais de remise en état de la chose ou par le paiement d'une somme d'argent représentant la valeur de son remplacement, ainsi que l'avait par ailleurs retenu le médiateur de l'énergie ; Qu'au demeurant, la société ENEDIS n'établit pas la preuve que Monsieur X... et Madame D... ne pouvaient, sans coût supplémentaire, acquérir des matériels équivalents à ceux qui ont été endommagés avec une valeur dégrevée de celle de leur vétusté, en sorte que le jugement sera confirmé de ce chef ; Considérant en deuxième lieu, et ainsi que le revendique la société ENEDIS, qu'il convient d'appliquer au montant de l'indemnisation qu'elle doit aux époux, la franchise de 500 euros fixée à l'article 1 du décret no 2005-113 du 11 février 2005 pris pour l'application de l'article 1386-2 du code civil ; Considérant en troisième lieu, que le jugement a à bon droit écarté la demande d'indemnisation des frais d'expertise amiable pour 1 375,40 euros, alors qu'ils entrent dans la demande présentée au titre des frais irrépétibles ; Considérant en quatrième lieu, que la réclamation de Monsieur X... et Madame D... au titre du "découvert de garantie" de 1 675,65 euros resté à leur charge sera écartée, alors que l'indemnité que leur assureur leur a versée et le reliquat des dommages et intérêts qui leurs sont reconnus couvre cette charge ; Considérant en cinquième lieu, que Monsieur X... et Madame D... n'établissent pas la preuve d'un préjudice matériel distinct de celui qui est réparé par le remplacement de la valeur à neuf de leurs instruments électriques, et dont leur assureur a garanti l'essentiel, rapidement, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté leur demande de dommages et intérêts à ce titre ; Considérant en sixième lieu, que l'assureur justifie l'émission de quittances subrogatives pour la somme de 11 860,46 euros ; Que par ces motifs, il convient d'infirmer le jugement sur le montant des sommes allouées et de condamner la société ENEDIS à verser à l'assureur, la somme de 11 860,46 euros, et à Monsieur X... et Madame D..., la somme de 1 175,95 euros (13 536,41 - 11 860,46 - 500). 3. Sur les frais irrépétibles et les dépens Considérant que la société ENEDIS succombe à l'action, en sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens ; qu'en cause d'appel, elle sera condamnée à verser la somme de 1 500 euros à chacun des intimés, ainsi que les dépens.

PAR CES MOTIFS

: Contradictoirement, Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf sur le montant de l'indemnisation des préjudices ; Statuant à nouveau de ces chefs, Condamne la société ENEDIS à payer ; - 11 860,46 euros à la société Aviva assurances, - 1 175,95 euros à Monsieur X... et Madame D... ; Y ajoutant, Condamne la société ENEDIS à payer à la société Aviva assurances, Monsieur X... et Madame D..., chacun, la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne la société ENEDIS aux dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ; Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ; Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Monsieur François Leplat, Président et Monsieur Alexandre Gavache, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Le Président Le Greffier