Vu la procédure suivante
:
Procédure contentieuse antérieure :
M. B C a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 21 décembre 2017 du ministre des armées portant inscription au tableau d'avancement au grade de commandant pour l'année 2018 en tant qu'il n'y figure pas, ensemble la décision du
5 juillet 2018 par laquelle le ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre de la décision du 21 décembre 2017.
Par un jugement n° 1816185/5-3 du 10 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 12 avril 2021, M. C, représenté par la SCP Lyon-Caen et
Thiriez, avocats aux Conseils, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 10 février 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 5 juillet 2018 par laquelle le ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre de la décision du 21 décembre 2017 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision litigieuse est entachée d'erreur de droit ;
- ladite décision méconnaît le principe d'égalité et notamment le principe d'égalité de traitement des fonctionnaires d'un même corps.
Par un mémoire distinct, enregistré le 13 avril 2021, M. C, représenté par la SCP Lyon-Caen et
Thiriez, avocats aux Conseils, demande à la Cour de transmettre au Conseil d'Etat, en application de l'article
23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du II de l'article
L. 4136-4 du code de la défense.
Il soutient que :
- les dispositions législatives critiquées sont applicables au litige, dès lors que le ministre des armées en a fait application dans la décision contestée ;
- ces dispositions n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
- ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité entre les fonctionnaires d'un même corps, garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : elles conduisent à une différence de traitement en ce qui concerne l'avancement au choix dans la mesure où elles conditionnent l'accès au grade supérieur à une ancienneté maximale dans le grade inférieur.
Par un mémoire, enregistré le 17 mai 2021, le ministre des armées, conclut à la non-transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat.
Il soutient que la question soulevée est dépourvue de caractère sérieux.
Par une ordonnance du 2 juillet 2021, le président de la 6ème chambre de la Cour de céans a refusé de transmettre cette question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat.
Par une ordonnance du 21 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au
11 juillet 2022 à 12 heures.
Un mémoire a été déposé par le ministre des armées le 15 septembre 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution du 4 octobre 1958 ;
- le code de la défense ;
- le décret n° 2008-943 du 12 septembre 2008 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Weigel pour M. C.
Une note en délibéré présentée pour M. C a été enregistrée le 21 septembre 2022.
Considérant ce qui suit
:
1. M. C a rejoint l'armée de l'air le 1er juillet 1999 en qualité d'officier sous contrat dans la spécialité " renseignement ". Il a été promu au grade de capitaine le
1er juillet 2006. Le 1er janvier 2017, M. C a été intégré en tant qu'officier de carrière dans le corps des officiers des bases de l'air de la spécialité " officier renseignement " et a été affecté au sein du commandement de l'élément géographique air-marine du commandement des forces aériennes stratégiques situé sur la base aérienne de Vélizy-Villacoublay. Par une décision du
21 décembre 2017, la ministre des armées a procédé à l'inscription au tableau d'avancement au grade de commandant au titre de l'année 2018. M. C n'a pas été inscrit sur ce tableau. Il a alors contesté le 15 février 2018 devant la commission des recours des militaires la décision du 21 décembre 2017 en tant que son nom n'y figurait pas pour le grade de commandant. Par une décision du 5 juillet 2018, la ministre des armées a rejeté ce recours administratif préalable obligatoire. M. C a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 21 décembre 2017 de la ministre des armées portant inscription au tableau d'avancement au grade de commandant pour l'année 2018 en tant qu'il n'y figure pas, ensemble la décision du 5 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable formé à l'encontre de la décision du 21 décembre 2017. M. C relève appel du jugement du 10 février 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
2. D'une part, aux termes de l'article
L. 4136-1 du code de la défense : " () L'avancement de grade a lieu soit au choix, soit au choix et à l'ancienneté, soit à l'ancienneté. Sauf action d'éclat ou services exceptionnels, les promotions ont lieu de façon continue de grade à grade et nul ne peut être promu à un grade s'il ne compte dans le grade inférieur un minimum de durée de service, fixé par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article
L. 4136-3 du même code : " Nul ne peut être promu au choix à un grade autre que ceux d'officiers généraux s'il n'est inscrit sur un tableau d'avancement établi, au moins une fois par an, par corps. () ". Aux termes de l'article
L. 4136-4 du même code : " () II. - Au titre des conditions pour être promu au grade supérieur, les statuts particuliers peuvent prévoir : 1° Que l'ancienneté des militaires de carrière dans le grade inférieur n'excède pas un niveau déterminé. Dans le cas où des dérogations à cette règle sont prévues, les statuts particuliers en fixent les limites par référence au nombre de promotions prononcées chaque année dans les grades considérés ; () ".
3. D'autre part, aux termes de l'article
22 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier des corps des officiers de l'air, des officiers mécaniciens de l'air et des officiers des bases de l'air : " Sont nommés avec leur ancienneté de grade dans le grade de capitaine ou dans le grade de commandant, selon le cas, les officiers recrutés parmi les officiers sous contrat au titre du 2° de l'article 16. ". Aux termes de l'article 27 du même décret : " Pour les promotions au choix : () 2° La limite maximale d'ancienneté de grade s'apprécie au 1er janvier de l'année de promotion. ". Aux termes de l'article 29 du même décret dans sa rédaction applicable : " Sont promus au grade de commandant pour partie au choix lorsqu'ils ont au moins quatre ans de grade et pour partie à l'ancienneté à dix ans de grade les capitaines qui sont titulaires de l'un des diplômes de l'enseignement militaire supérieur du premier degré, désigné à cet effet par arrêté du ministre de la défense. () ". Aux termes de l'article 42 du même décret : " () II. ' Par dérogation aux dispositions prévues à l'article 29, les capitaines peuvent être également promus jusqu'au 31 décembre 2009 au grade de commandant au choix après dix ans de grade dans la limite de 5 pour 100, arrondis à l'unité supérieure, du nombre de nominations et de promotions effectuées chaque année à ce grade. () ".
4. En premier lieu, il résulte de ces dispositions que peuvent être promus au choix les capitaines ayant au moins quatre ans et au plus dix ans de grade ou à l'ancienneté ceux ayant dix ans de grade. Au-delà d'une durée de dix ans de détention du grade de capitaine, le militaire ne peut plus bénéficier d'un avancement au grade de commandant. M. C n'est donc pas fondé à soutenir que le ministre des armées a commis une erreur de droit en lui opposant la circonstance qu'il avait dépassé cette limite de dix ans et qu'il ne pouvait plus de ce fait bénéficier d'un avancement au grade de commandant.
5. En second lieu, si M. C entend exciper de l'inconstitutionnalité des dispositions précitées de l'article
L. 4136-4 du code de la défense, qui a posé le principe d'un plafond pour la promotion à l'ancienneté, dont l'article
29 du décret du 12 septembre 2008 fait application, pour méconnaissance du principe d'égalité et notamment du principe d'égalité entre les fonctionnaires d'un même corps, ce moyen a fait l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité qui a donné lieu à l'ordonnance susvisée du 2 juillet 2021 du président de la 6ème chambre de la Cour administrative d'appel de Paris refusant de transmettre ladite question au Conseil d'Etat, pour défaut de caractère sérieux. En tout état de cause les dispositions de l'article 29 du décret du
12 septembre 2008, qui se bornent à fixer à dix ans la durée maximale d'ancienneté dans le grade inférieur prévue par la loi, ne portent pas atteinte au principe d'égalité de traitement des fonctionnaires appartenant à un même corps.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B C et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 20 septembre 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 octobre 2022.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
T. CELERIER
La greffière,
K. PETIT
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.