CIV.3
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 30 mars 2017
Rejet
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 386 F-D
Pourvoi n° N 16-11.667
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
Statuant sur le pourvoi formé par
:
1°/ M. [Q] [I],
2°/ Mme [E] [W], épouse [I],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
contre l'arrêt rendu le 10 décembre 2015 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre, section AO1), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [B] [R], domicilié [Adresse 2],
2°/ à Mme [Y] [R], domiciliée [Adresse 1],
défendeurs à la cassation ;
M. et Mme [R] ont formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 février 2017, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Echappé, conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Echappé, conseiller, les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. et Mme [I], de Me Haas, avocat de M. et Mme [R], et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen
du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 10 décembre 2015), que M. et Mme [R] sont propriétaires d'une maison, voisine de la propriété de M. et Mme [I] ; qu'ils ont fait réaliser un mur de clôture, en retrait de trois centimètres de la limite séparative ; que M. et Mme [I] ont édifié un mur de clôture longeant le mur édifié par M. et [R] ; qu'invoquant un empiétement du mur de leur voisin, M. et Mme [R] les ont assignés en démolition, tandis que ceux-ci ont formé une demande reconventionnelle en démolition du mur de M. et Mme [R] ;
Attendu que M. et Mme [I] font grief à
l'arrêt de les condamner sous astreinte à démolir la partie de leur mur de clôture empiétant sur la propriété [R] ;
Mais attendu
qu'ayant retenu, par motifs propres et adoptés, qu'à la suite de la construction du mur de clôture de M. et Mme [I], le fonds de M. et Mme [R] subissait des empiétements et qu'aucun élément ne permettait de conclure qu'il était techniquement possible de les supprimer, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que la démolition du mur devait être ordonnée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deuxième, troisième et quatrième moyens du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES
au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [I], demandeurs au pourvoi principal.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné les époux [I] à démolir la partie de leur mur de clôture reposant sur la propriété des époux [R] sous astreinte de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la Cour rappelle qu'il résulte des dispositions de l'article
545 du Code civil que nul ne peut être contraint de céder sa propriété si ce n'est pour cause d'utilité publique et ce moyennant une juste et préalable indemnité ; que par voie de conséquence tout empiètement d'une construction sur partie de la propriété voisine peut donner lieu à démolition de l'ouvrage quand le propriétaire du fonds l'exige, aussi modeste que soit cet empiètement ; qu'en ce qui concerne la démolition du mur de clôture édifié par les époux [I] la Cour constate que le 1er juge a fait une exacte et complète appréciation des faits de la cause aussi bien en fait qu'en droit ; qu'en conséquence, la Cour confirmera la décision par adoption de motifs ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il ressort du rapport d'expertise judiciaire dressé par Monsieur [U] au mois de décembre 2008 que : - le mur de clôture réalisé sur la propriété des époux [I] n'a pas créé de dommage sur la construction des époux [R] ; - tout au plus certaines pierres maçonnées ou coulures de béton touchent le mur de clôture des époux [R] ; que les quelques empiètements difficiles à déterminer sont limités à quelques excroissances de pierre ou de béton qui partiellement touchent le mur des époux [R] ; - il existe également quelques empiètements très localisés en partie basse du mur dans une zone inaccessible (car comprise entre les deux murs) et très peu visible ; qu'à titre liminaire, il y a lieu de noter que dans leurs dernières conclusions signifiées le 20 octobre 2009, les époux [I] ont précisé que les excroissances pouvant dépasser la limite séparative des fonds litigieux avaient été abrasées ou sciées depuis l'expertise ; que face à de tels éléments et alors même que la clôture de l'instruction est intervenue le 23 juin 2010, les époux [R] n'ont pas déposé de nouvelles conclusions pour formuler la moindre observation sur ce point, de sorte qu'il convient de considérer en l'état des éléments portés à la connaissance de la présente juridiction, qu'il a été mis fin aux excroissances susvisées ; qu'il apparait en revanche que suite à la construction du mur de clôture des époux [I], le fonds des époux [R] a été affecté d'empiètements au niveau de la partie basse du mur ; qu'aucun élément ne permet de conclure que ces empiètements même minimes, auraient à ce jour disparus ou qu'il serait techniquement possible de les supprimer, sans avoir à démolir l'intégralité du mur édifié par les parties défenderesses au présent litige ; qu'il n'est pas versé aux débats la moindre pièce objective, claire et précise, permettant au Tribunal de considérer que ce mur pourrait être rétabli dans ses limites par une simple opération technique ; que les époux [R] ayant construit un mur de clôture et un mur de garage à 3 centimètres de la limite de propriété tandis que les époux [I] ont érigé leur mur de clôture dans la limite séparative, la possibilité de supprimer les empiètements litigieux n'apparaît pas réalisable - au vu des éléments soumis à l'appréciation de la juridiction - d'autant que ceux-ci sont situés dans la partie basse du mur ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient donc de condamner les époux [I] à démolir la partie basse de leur mur de clôture reposant sur la propriété des époux [R] sous astreinte de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 3 mois à compter de la signification du présent jugement ;
ALORS QU'il appartient au juge d'apprécier la proportionnalité d'une sanction en ayant égard à ses conséquences et aux intérêts et droits en présence ; qu'en se bornant à considérer, pour condamner les époux [I] à démolir l'intégralité de leur mur de clôture, à considérer que « tout empiètement d'une construction sur partie de la propriété voisine peut donner lieu à démolition de l'ouvrage quand le propriétaire du fonds l'exige, aussi modeste que soit cet empiètement » (arrêt page 5, al. 3), sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée si une telle sanction n'était pas disproportionnée eu égard au caractère très « minime » des quelques empiètements constatés, « difficiles à déterminer » et à l'absence de tout dommage sur la construction des époux [R], qu'elle avait expressément relevés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles
544 et
545 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné les époux [I], sous astreinte de 50 € par jour de retard, passé le délai de 3 mois à compter de la signification de l'arrêt, à remettre en conformité leur construction aux prescriptions du PLU de [Localité 1] ;
AUX MOTIFS QUE la Cour constate que selon l'article UH 11 du POS la volumétrie de l'étage de l'habitation des époux [I] ne devrait pas dépasser 40% de la SHOB ; que cependant à la lecture de leur permis de construire elle présente un reliquat de 3,68 m² au-dessus de la surface autorisée ; que la Cour constate aussi que les époux [I], en l'état de leurs dernières écritures ne font aucune remarque sérieusement étayée pour contredire les informations des époux [R] et les pièces produites à l'appui de cette demande ; qu'en conséquence la cour fera droit à cette demande et condamnera les époux [I] à remettre en conformité leur construction aux prescriptions du PLU de [Localité 1] et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 3 mois à compter de la signification de la présente décision ;
ALORS QU'une personne privée n'est fondée à solliciter la mise en conformité d'une construction aux règles d'urbanisme sur le fondement de la responsabilité civile que si elle démontre que la méconnaissance lui a causé un préjudice personnel ; qu'en condamnant les époux [I] à mettre leur construction en conformité avec le PLU de [Localité 1] (article UH 11) qui limitait la volumétrie de l'étage des habitations, à la demande des époux [R], sans relever l'existence du préjudice personnellement subi par ces derniers du fait de cette irrégularité, que ces derniers n'invoquaient d'ailleurs nullement, la Cour d'appel a violé l'article
1382 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné les époux [I], sous astreinte de 50 € par jour de retard, passé le délai de 3 mois à compter de la signification de l'arrêt, à remettre le sol de leur propriété au niveau naturel initial ;
AUX MOTIFS QUE la Cour constate aussi que les époux [I] ont procédé eux aussi à des remblaiements dans leur terrain de telle sorte qu'ils ont pu créer des plantations en espalier et cela sur une hauteur du sol naturel ainsi que cela ressort des pièces produites par les époux [R] ; que de plus les époux [I] ont procédé à un décaissement des parpaings du mur de soubassement des époux [R] de manière à créer un palier horizontal de plantation modifiant ainsi l'écoulement des eaux de pluie ; qu'en conséquence la cour condamnera les époux [I] à remettre le sol de leur propriété au niveau naturel initial et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 3 mois à compter de la signification de la décision ;
ALORS QU'une personne privée n'est fondée à solliciter la mise en conformité d'une construction aux règles d'urbanisme sur le fondement de la responsabilité civile que si elle démontre que la méconnaissance lui a causé un préjudice personnel ; qu'en condamnant les époux [I] à remettre le sol de leur propriété au niveau naturel initial conformément au PLU de [Localité 1] qui interdisait l'exhaussement des sols, sans relever l'existence du préjudice personnellement causé aux époux [R] du fait de cette construction, que ces derniers n'invoquaient d'ailleurs nullement, la Cour d'appel a violé l'article
1382 du Code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR débouté les époux [I] de leur demande tendant à voir condamner les époux [R] à démolir leur garage ;
AUX MOTIFS QUE la Cour, en ce qui concerne la demande faite par les époux [I] de condamner les époux [R] à démolir leur garage comme ils l'avaient déjà fait dans le cadre de leurs écritures de 1ère instance la cour rappelle que cette demande a été examinée par le 1er juge en ce qu'il a condamné les époux [R] à remettre leur maison et leur terrasse en conformité aux règles de hauteur prévues par le plan d'occupation des sols de [Localité 1] et ce sous astreinte ; qu'il n'y a pas lieu à condamnation complémentaire en l'état de la confirmation de cette condamnation ;
ALORS QU'en cause d'appel, les époux [I] sollicitaient la destruction du garage des époux [R] sur le fondement de la méconnaissance des règles de prospect du PLU de [Localité 1], le garage étant implanté à moins de 3 mètres de la limite séparative, causant ainsi aux exposants une perte d'ensoleillement et une perte de chaleur (conclusions pages 36 à 38) ; qu'en relevant, pour rejeter cette prétention, que celle-ci « avait été examinée par le 1er juge en ce qu'il a[vait] condamné les époux [R] à remettre leur maison et leur terrasse en conformité aux règles de hauteur prévues par le plan d'occupation des sols de [Localité 1] » de sorte qu'il n'y avait « pas lieu à condamnation complémentaire en l'état de la confirmation de cette condamnation » (arrêt page 6, al. 5), la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles
4 et
5 du Code de procédure civile.Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [R], demandeurs au pourvoi incident.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné, sous astreinte, les époux [R] à démolir la partie de leur mur de clôture empiétant sur la propriété des époux [I] ;
AUX MOTIFS QU'en ce qui concerne la démolition du mur de clôture édifié par les époux [R], le premier juge a fait une exacte et complète appréciation des faits de la cause aussi bien en fait qu'en droit ; qu'en conséquence la cour confirmera la décision par adoption des motifs ;
ALORS QUE la cour d'appel, tenue de motiver sa décision, ne peut se borner à adopter les motifs du jugement sans répondre aux conclusions de l'appelant faisant valoir des moyens nouveaux présentés pour la première fois en appel ou sans examiner des éléments de preuve produits pour la première fois devant elle ; qu'en se bornant, pour confirmer la condamnation des époux [R] à démolir la partie de leur mur de clôture qui empiétait sur le fonds des époux [I], à adopter les motifs du jugement, sans répondre aux conclusions des époux [R] et sans examiner leurs nouvelles pièces desquelles il ressortait, d'une part, que certains empiètements constatés par le jugement n'étaient, en réalité, pas avérés et, d'autre part, que pour les autres, les époux [R] les avaient d'ores et déjà supprimés, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article
455 du code de procédure civile.