Sur le moyen
unique :
Vu
les articles 68 et 69 de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République algérienne démocratique et populaire, d'autre part, signé le 22 avril 2002 et la décision 2005/690/CE du Conseil, du 18 juillet 2005, concernant la conclusion de cet accord euro-méditerranéen ;
Attendu qu'il se déduit de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJCE, 5 avril 1995, Krid, aff. C-103/94 ; CJCE, 15 janv. 1998, Babahenini, aff. C-113/97 ; CJCE (Ord.), 13 juin 2006, Echouikh, aff. C-336/05 ; CJCE (Ord.), 17 avril 2007, El Youssfi, aff. C-276/06) qu'en application de l'article 68 de l'accord euro-méditerranéen susvisé, d'effet direct, applicable aux prestations familiales en vertu des paragraphes 1 et 3, l'absence de toute discrimination fondée sur la nationalité dans le domaine d'application de l'accord implique qu'un ressortissant algérien résidant légalement dans un Etat membre soit traité de la même manière que les nationaux de l'Etat membre d'accueil, de sorte que la législation de cet État membre ne saurait soumettre l'octroi d'une prestation sociale à un tel ressortissant algérien à des conditions supplémentaires ou plus rigoureuses par rapport à celles applicables à ses propres ressortissants ; qu'il en résulte que les articles
L. 512-2,
D. 512-1 et
D. 512-2 du code de la sécurité sociale qui, en ce qu'ils soumettent le bénéfice des allocations familiales à la production du certificat médical délivré par l'Office français de l'intégration et de l'immigration à l'issue de la procédure de regroupement familial, instituent une discrimination directement fondée sur la nationalité, devait être écartée en l'espèce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué
, que M. X..., de nationalité algérienne, qui réside régulièrement en France depuis le 25 avril 2001, a sollicité, en décembre 2004 puis en août 2008, auprès de la caisse d'allocations familiales de Paris (la caisse), le bénéfice de prestations familiales pour ses enfants Rayane et Amina, nés en Algérie ; que celle-ci lui ayant opposé un refus, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que, pour rejeter la demande pour la période postérieure du 1er janvier 2006 au 1er mars 2009, l'arrêt retient que les accords bilatéraux invoqués n'interdisent pas aux Etats de subordonner l'attribution des prestations à la justification de la régularité du séjour en France de l'enfant au titre duquel les prestations sont demandées ;
Qu'en statuant ainsi
, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
:
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de prestations familiales pour la période du 1er janvier 2006 au 1er mars 2009, l'arrêt rendu le 14 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la caisse d'allocations familiales de Paris aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Gadiou et Chevallier ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille quinze et signé par Mme Flise, président, et par Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré la Caisse d'allocations familiales de PARIS recevable et bien fondée en son appel, infirmé le jugement entrepris en ce qu'il reconnaît à Monsieur X... le bénéfice des prestations familiales à compter de septembre 2004 jusqu'en mars 2009 et, statuant à nouveau, a débouté celui-ci de sa demande de prestations familiales en faveur des enfants Rayane et Amina pour la période du 1er janvier 2006 au 1er mars 2009 ;
AUX MOTIFS QUE les articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du Code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue respectivement de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 et du décret n° 2006-234 du 27 février 2006, subordonnent le versement des prestations familiales à la production d'un document attestant d'une entrée régulière des enfants étrangers en France et, en particulier pour les enfants entrés au titre du regroupement familiale ; qu'au regard de ces nouvelles dispositions, la détention du certificat de contrôle médical de l'enfant constitue une condition d'ouverture des droits à prestations familiales ; qu'en l'espèce, les enfants eu titre desquels les prestations familiales sont demandées, sont entrés en France en dehors de la procédure de regroupement familial ; qu'au jour du dépôt de la demande en paiement des prestations, ils ne disposent donc pas des certificats de contrôle précités ; que l'exigence des certificats de contrôle médical répond tant à l'intérêt de la santé publique qu'à l'intérêt de la santé de l'enfant et ne porte pas une atteinte disproportionnée à la vie familiale ; qu'un tel certificat permet, en effet, de vérifier que l'enfant disposera en France des conditions d'existence lui garantissant de mener une vie familiale dans les meilleurs conditions possibles et d'assurer sa protection ; que les dispositions de l'article
D. 512-2 sont objectivement et raisonnablement justifiées par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants ; qu'elles ne contreviennent donc pas au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne constituent pas une discrimination prohibée par l'article 14 de la même convention, qu'elles ne sont pas non plus contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant au sens de la Convention internationale des droits de l'enfant ; que les accords bilatéraux invoqués par Monsieur X... n'interdisent pas aux Etats de subordonner l'attribution des prestations à la justification de la régularité du séjour en France de l'enfant au titre duquel les prestations sont demandées ; que dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur les conventions internationales pour la période postérieure au 1er janvier 2006, date d'entrée en vigueur de la loi du 19 décembre 2005, malgré l'absence de délivrance de certificats ;
ALORS QUE l'article 68 de l'accord euro-méditerranéen CE/Algérie du 22 avril 2002, ratifié par la France par la loi n° 2003-1144 du 2 décembre 2003, dispose que les travailleurs de nationalité algérienne et les membres de leur famille résidant avec eux bénéficient, dans le domaine de la sécurité sociale, notion qui englobe les prestations familiales, d'un régime caractérisé par l'absence de toute discrimination fondée sur la nationalité par rapport aux propres ressortissants des Etats membres dans lesquels ils sont occupés ; qu'en décidant que Monsieur X..., de nationalité algérienne, ne pouvait prétendre au bénéfice des prestations familiales en faveur de ses enfants mineurs pour la période du 1er janvier 2006 au 1er mars 2009, au motif qu'il ne pouvait produire les certificats de contrôle exigés par les articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du Code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue respectivement de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 et du décret n° 2006-234 du 27 février 2006, la Cour d'appel a violé les dispositions susvisées.