TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS
JUGEMENT PRONONCE LE VENDREDI 27/04/2007
5EME CHAMBRE
RG 2004081209 26/11/2004
ENTRE : La société MAROTTE, Société anonyme, dont le siège social est [...],
PARTIE DEMANDERESSE : assistée de Maître Christian H, Avocat (E1219) et comparant par la SEP. M. S - Ch. CRESSON - E. RUELLE, Avocats (C267)
ET : 1°) La société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT, Société Anonyme, [...], prise dans le dernier état de la procédure en la personne de la S.C.P. DOLLEY, domiciliée [...], ès-qualités de liquidateur judiciaire, 2°) La société FILY'ING, [...], prise dans le dernier état de la procédure en la personne de la S.C.P. DOLLEY, domiciliée [...], ès-qualités de liquidateur judiciaire,
PARTIES DEFENDERESSES : assistées de Maître Bruno D de la SCP CADORE T- TOUS SAINT & DENIS, [...], Avocat au Barreau de NANTES, et comparant par Maître Pierre O, Avocat (D.897)
3°) SPIE SCGPM, [...] SAINT CHRISTOPHE, ci-devant et actuellement [...],
PARTIE DEFENDERESSE : assistée Maître Renaud D TINAYRE, Avocat (R 010) et comparant par la S.C.P. MOREAU-SIMON & Associés, Avocats (P73)
4°) La société ARKHITEKTON, [...], ayant un établissement [...],
PARTIE DEFENDERESSE : assistée de Maître Jean Christophe L, Avocat (J073) et comparant par la S.C.P. BRODU-CICUREL-MEYNARD, Avocats (P.240)
5°) La société DGLA, SARL d'architecture, RCS PARIS B 410 122 394, numéro régional de l'Ordre des architectes 01406, dont le siège social est [...], représentée par Monsieur Thierry de DINECHIN,
PARTIE DEFENDERESSE : assistée de Maître Antoine B de l'Association BEAUSSIER BEAUQUIER MARECHAL, Avocat (R 198) et comparant par la S.C.P. Véronique HOURBLIN - Mariam P, Avocats (J017)
CAUSE JOINTE ET JUGEE A :
ENTRE : La société MAROTTE, Société anonyme, dont le siège social est [...],
PARTIE DEMANDERESSE : assistée de Maître Christian H, Avocat (E1219) et comparant par la SEP. M. S - Ch. CRESSON - E. RUELLE, Avocats (C267)ET : 1°) La société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT, Société Anonyme, [...], prise dans le dernier état de la procédure en la personne de la S.C.P. DOLLEY, domiciliée [...], ès-qualités de liquidateur judiciaire,
2°) La société FILY'ING, [...], prise dans le dernier état de la procédure en la personne de la S.C.P. DOLLEY, domiciliée [...], ès-qualités de liquidateur judiciaire,
PARTIES DEFENDERESSES : assistées de Maître Bruno D de la SCP CADORET- TOUSSAINT & DENIS, [...], Avocat au Barreau de NANTES, et comparant par Maître Pierre O, Avocat (D.897)
3°) La société MOLLIBOIS, Les Roseaux 44330 VALLET,
PARTIE DEFENDERESSE : assistée Maître Guy L, Avocat au Barreau de NANTES et comparant par la S.C.P. LYONNET (L) BIGOT & ASSOCIES, Avocats (P.458)
CAUSE JOINTE ET JUGEE A :
ENTRE : La société MAROTTE, Société anonyme, dont le siège social est [...],
PARTIE DEMANDERESSE : assistée de Maître Christian H, Avocat (E1219) et comparant par la SEP. M. S - Ch. CRESSON - E. RUELLE, Avocats (C267)
ET : La S.C.P. DOLLEY, mandataire judiciaire, domiciliée [...], ès-qualités de liquidateur de la société FILY'ING,
PARTIE DEFENDERESSE : assistée de Maître Bruno D de la SCP CADORET- TOUSSAINT & DENIS, [...], Avocat au Barreau de NANTES, et comparant par Maître Pierre O, Avocat (D.897)
CAUSE JOINTE ET JUGEE A :
ENTRE : La société MAROTTE, Société anonyme, dont le siège social est [...],
PARTIE DEMANDERESSE : assistée de Maître Christian H, Avocat (E1219) et comparant par la SEP. M. S - Ch. CRESSON - E. RUELLE, Avocats (C267)
ET : La S.C.P. DOLLEY, mandataire judiciaire, domiciliée [...], ès-qualités de liquidateur de la société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT,
PARTIE DEFENDERESSE : assistée de Maître Bruno D de la SCP CADORET- TOUSSAINT & DENIS, [...], Avocat au Barreau de NANTES, et comparant par Maître Pierre O, Avocat (D.897).
APRES EN AVOIR DELIBERELES FAITS:
La Société MAROTTE qui exerce son activité dans la fabrication et la commercialisation de panneaux décoratifs en bois, dans le segment de marché « haut de gamme » a créé un modèle particulier de panneau décoratif sculpté qu'elle commercialise sous la référence « FOLD 31010 », caractérisé par la gravure de lignes ondulées irrégulières, ne se croisant jamais. La Société MAROTTE SA est propriétaire du modèle n°033677 déposé le 22 juille t 2003, qui protège, notamment, ce modèle particulier de panneau décoratif d'aménagement intérieur « FOLD 31010 » (modèle 6-6 publié sous le n°71815 0) qui a obtenu un vif succès auprès de la clientèle.
Au mois de juin 2004, SPIE SCGPM consultait la société FILY'ING pour la réalisation de travaux d'agencement dans le cadre de chantiers situés avenue des Champs-Elysées et rue de Ponthieu à Paris. La maîtrise d'œuvre était confiée au cabinet d'architectes ARKHl 1EKTON secondé par le cabinet DG LA. Les dossiers de plans et descriptifs établis par les maîtres d'œuvre prévoyaient des habillages muraux bois avec desseins de lignes de courbes verticales usinées dans le panneau. Le descriptif relatif à cette prescription d'habillage mural précisait le type de matériau souhaité, à savoir des panneaux en plaquage érable « FOLD MAROTTE » réalisés par la Société MAROTTE
Le 9 juillet 2004, SPIE SCGPM passait commande auprès de FILYTNG des travaux d'agencement pour un montant de 540000 €. Cette commande incluait la réalisation de « panneaux décor lignés ». La société FILY'ING prenait alors contact avec la société MAROTTE, en sa qualité de fournisseur référencé, et le 12 juillet 2004, cette dernière transmettait un devis à la société FILY'ING. Toutefois, la société MAROTTE ne pouvant fabriquer et livrer les matériaux souhaités, il fut demandé à la société FILY'ING de proposer d'autres produits se rapprochant du descriptif de l'architecte. La société FILY'ING faisait alors réaliser par la société MOINET et son fournisseur la société MOLLIBOIS, des échantillons de différents panneaux décoratifs lignés validés par la société ARKHITEKTON. Les panneaux de bois étaient ensuite fabriqués par la société MOINET.
La Société MAROTTE qui savait que les travaux d'aménagement de l'immeuble, conçus par les cabinets d'architectes ARKHITEKTON et DGLA, agissant en qualité de Maître d'oeuvre, et réalisés par la Société SPIE SCGPM, comprenaient, notamment, la pose des panneaux décoratifs d'aménagement intérieur, a appris que les panneaux décoratifs acquis et posés, reproduisaient semblait-il, les caractéristiques essentielles du modèle « FOLD 31010, no 033677 publié sous le no 718150.
La Société MAROTTE qui avait pris le soin d'adresser le 30 juillet 2004 à la Société MOINET MENUISERIE AGENCEMENT après l'envoi de son devis non suivi d'effet, une lettre pour attirer son attention sur ses droits privatifs sur le modèle «FLD », lui demandant de veiller « à ce que le produit de substitution qui sera installé sur ce chantier n'ait aucune similitude d'aspect avec le (sien) » considère que tel n'est pas le cas.
Selon le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé par Maître Michel C huissier de Justice, dans les locaux de l'immeuble, le 5 octobre 2004, les plans d'architectesremis à l'Huissier lors des opérations de saisie-contrefaçon portaient expressément les mentions « plaquage en érable MAROTTE type FOLD réf 31010 » ou « panneaux plaquage érable FOLD MAROTTE ».
Ainsi naît le présent litige.
PROCEDURE
C'est dans ces conditions dans le dernier état de leurs écritures du 29.09.2006 que par assignation des défenderesses des 14.15et20.10.2004 demandent au Tribunal de :
En application des dispositions des articles 100 et 101,
367 du Nouveau Code de Procédure Civile, -ordonner la jonction de la présente instance avec l'instance pendante devant le Tribunal de Commerce de Paris résultant de l'assignation signifiée à la requête de la Société MAROTTE SA par actes en date des 14, 15 et 20 octobre 2004.
En application des dispositions des articles L 11 1-1 et suivants, L5111 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle, de l'article
1382 du Code Civil.
- Dire que la Société MAROTTE SA bénéficie sur le modèle de panneaux de bois décoratif qu'elle commercialise sous la référence « FOLD 31010 » de la protection au titre des droits d'auteur et qu'elle a la propriété exclusive du modèle 033677 déposé le 22 juillet 2003 qui protège, notamment, le modèle particulier de panneaux décoratifs d'aménagement intérieur « FOLD 31010 » (modèle 6-6 publié sous le no7181S0). - Dire qu'en gravant, commercialisant et mettant en œuvre les panneaux décoratifs décrits dans le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé par Maître C le 5 octobre 2004, et dans le procès-verbal dressé par Maître S le 28 octobre 2004, les Sociétés défenderesses se sont rendues coupables d'atteinte aux droits d'auteur et de contrefaçon de modèle au préjudice de la Société MAROTIE SA. Dire que les agissements des défenderesses sont également constitutifs de concurrence déloyale au préjudice de la Société MAROTTE SA. - Interdire aux Sociétés défenderesses la gravure, la commercialisation et la mise en oeuvre de panneaux décoratifs contrefaisants, sous astreinte définitive de 100.000 € par infraction constatée et 10.000 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir. -En réparation du préjudice subi, condamner in solidum les Sociétés défenderesses à payer à la Société MAROTTE SA la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts, quitte à parfaire, -autoriser la Société MAROTTE SA à faire procéder à la publication du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues de son choix aux frais in solidum des Sociétés défenderesses, le coût global des publications ne pouvant excéder la somme de 20.000 (FIT.). - Condamner in solidum les Sociétés défenderesses à verser à la Société MAROTTE SA la somme de 20.000 € en application de l'article
700 du Nouveau Code de Procédure Civile. - Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant toute voie de recours et sans constitution de garantie, l'atteinte portée aux droits privatifs de la Société MAROTTE SA ne pouvant se perpétuer sans lui causer un préjudice irréparable. - Condamner in solidum les défenderesses en tous les dépens.La Société MOINET par conclusions des 04.03.05 et 09.12.05 demande au Tribunal de :
DEBOUTER la société MAROTTE tant de son action en contrefaçon que de son action en concurrence déloyale, DEBOUTER en conséquence la société MAROTTE tant de ses demandes indemnitaires que de ses demandes d'interdiction et de publication du jugement à intervenir, DIRE ET JUGER irrecevable la demande d'astreinte définitive formulée par la Société MAROTTE, LA DÉBOUTER en conséquence de cette demande,
SUBSIDIAIREMENT, - VOIR CONDAMNER les sociétés ARKHITEKTON, DG LA et SPIE SCGPM à garantir les sociétés MOINET et FILYTNG de toutes condamnations éventuellement prononcées contre elles. - CONDAMNER la société MAROTTE à verser aux sociétés FILYTOG et MOINET une somme de 5.000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du NCPC, - LA CONDAMNER en tous les frais et dépens de l'instance.
La société SPIE SCGPM par conclusions des 14.10.05, 17.02.06, et 29.09.06 demande au Tribunal de :
-A titre principal : Mettre hors de cause Spie SCGPM. Débouter Marotte de ses demandes à son encontre,
-A titre subsidiaire ; Sur la contrefaçon : Sur la protection au titre des dessins et modèles Dire et juger que les panneaux Fold sont dépourvus de nouveauté Dire et juger que les panneaux, réalisés par Fily'ing, Moinet et Mollibois produisent pour un observateur averti une impression visuelle d'ensemble manifestement différente, Dire et juger que Marotte n'est pas fondée à invoquer la Protection au titre des dessins et modèles.
En conséquence, -Débouter Marotte de sa demande de condamnation pour contrefaçon au titre des dessins et modèles.
Sur la protection au titre du droit d'auteur : -Dire et juger: que les panneaux Fold représentent des formes banales et sont dépourvus d'originalité, -Dire et juger que Marotte n'est pas fondée à invoquer la protection au titre du droit d'auteur, En conséquence. -Débouter Marotte de sa demande de condamnation pour contrefaçon au titre du droit d'auteur.Sur la concurrence déloyale : -Dire et juger que Marotte ne rapporte pas la preuve de faits distincts des faits de contrefaçon ; allégués, - Constater dès lors que le grief de concurrence déloyale n'est pas fondé,
En conséquence, - Débouter Marotte de sa demande de condamnation pour concurrence déloyale.
A titre plus subsidiaire, - Dire et jugez que Marotte ne justifie pas des préjudices qu'elle allègue,
En conséquence, - Débouter Marotte de toutes ses demandes,
Plus subsidiairement encore, - Condamner in solidum ou subsidiairement chacune pour sa part ou en tous cas l'une à défaut de l'autre, Fily'ing, Moinet et Mollibois à relever et garantir intégralement Spie SCGPM de toute les condamnations éventuellement prononcées à son encontre,
En tout état de cause. - Débouter Marotte de l'ensemble de ses demandes, - Condamner Marotte, Fily'ing, Moinet et Mollibois à payer à Spie SCGPM la somme de 7.500 € au titre de l'article
700 du Nouveau Code de Procédure Civile : - Ordonner I'exécution provisoire de la décision à intervenir sur les demandes de Spie SCGPM. - Condamner Marotte aux entiers dépens.
La société ARKH11EKTON par conclusions du 29.09.06 demande au Tribunal de : DEBOUTER la société MAROTTE tant de son action en contrefaçon que de son action en concurrence déloyale, - DEBOUTER en conséquence la société MAROTTE tant de ses demandes indemnitaires que de ses demandes d'interdiction et de publication du Jugement à intervenir DIRE ET JUGER irrecevable la demande d'astreinte définitive formulée par la société MAROTTE, LA DÉBOUTER en conséquence de cette demande,
SUBSIDIAIREMENT, - VOIR CONDAMNER les sociétés ARKHJTEKTON, DCLA et SPIE SCGPM à garantir les sociétés MOINET et FILY'ING de toutes condamnations éventuellement prononcées contre elles (sic) - CONDAMNER la société MAROTTE à verser aux sociétés FILYING et MOINET une somme de 5.000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du NCPC, - LA CONDAMNER en tous les frais et dépens de l'instance.La société DGLA par conclusions des 10.06.05 et 17.02.06 demande au Tribunal de :
A TITRE PRINCIPAL : -METTRE hors de cause le cabinet d'architectes DGLA ;
A TITRE SUBSIDIAIRE : -CONSTATER l'absence de contrefaçon ; CONSTATER l'absence de concurrence déloyale ;
EN CONSEQUENCE : DEBOUTER la société MAROTTE de l'intégralité de ses demandes. CONDAMNER la société MAROTTE à verser à la Société DGLA la Somme de 3000 € en application de l'article
700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La société MOLLIBOIS par conclusions des 01.04.055 et 14.10.05 demande au Tribunal de : Vu l'article
L.512-4 du Code de la Propriété Intellectuelle, - Déclarer nul l'enregistrement du modèle enregistré sous le numéro 033677 en date du 22 juillet 2003 (modèle particulier no6-6 no71 8150), - Débouter la Société MAROTTE de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions. Subsidiairement, - Condamner la Société MOINET à garantir la Société MOLLIBOIS de toute condamnation susceptible d'être mise à sa charge,
En tout état de cause, - Condamner la Société MAROTTE ou toute autre partie qui succombe à verser à la Société MOINET une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC (sic) -La condamner en tous les dépens de l'instance.
SCP DOLLEY & Associés Esq liquidateur de la STE VERT HABITAT demande au Tribunal de : DECERNER ACTE à la SCP DOLLEY de ce qu'elle intervient désormais en qualité de liquidateur de la société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT DEBOUTER la société MAROTTE tant de son action en contrefaçon que de son action en concurrence déloyale DEBOUTER en conséquence la société MAROTTE tant de ses demandes indemnitaires que de ses demandes d'interdiction et de publication du jugement à intervenir et aujourd'hui de sa demande en fixation d'une créance au passif de la société VERT HABITA T DIRE ET JUGER IRRECEVABLE la demande d'astreinte définitive formulée par la société MAROTTE
SUBSIDIAIREMENT, DIRE ET JUGER que la SCP DOLLEY s'en rapporte à justice sur les mérites de la demande de la société MAROTTECONDAMNER la société MAROTTE à verser à la SCP DOLLEY une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
2-Les SCP DOLLEY & ASSOCIES Esq liquidateur de la SAS FILYTNG et SCP DOLLEY & Associés Esq liquidateur de la STE VERT HABITAT venant aux droits de la Société MOINET, auraient en intervention forcée se constituent et bien que dûment convoquées, ne se présentent pas à l'audience du juge rapporteur et il sera statué par jugement contradictoire en premier ressort.
DISCUSSION
Sur la fusion des causes
Attendu qu'elle est demandée et que compte tenu de leurs objets évidemment connexes il y a lieu, elle sera prononcée.
Sur la demande principale
L'exposé des faits, les dispositifs de l'assignation et des conclusions des parties étant suffisamment explicites par eux même, des moyens des parties le Tribunal retiendra ce qui suit, renvoyant pour de plus amples précisions au corps du présent jugement ainsi qu'aux écritures des parties
-Attendu qu'à l'audience le Tribunal a eu l'occasion d'examiner les pièces dont la vente est accusée de constituer des agissements délictueux et déloyaux et les maquettes originales, qu'il a pu se faire une opinion sur les ressemblances et les différences des produits
-Attendu que les opérations de saisie contrefaçon n'ont pas été contestées par les défenderesses
Sur les droits de la Société MAROTTE la Société MAROTTE avance que : -Elle est propriétaire du modèle no033677 déposé le 22 juillet 2003, qui protège, notamment, le modèle particulier de panneau décoratif d'aménagement intérieur «FOLD 31010 » (modèle 6-6 publié sous le no718150). -elle détient les droits d'auteur sur le même panneau Les défenderesses font valoir que : -Le modèle No033677 serait nul car la Société MAROTTE aurait réalisé en 2002 des travaux dans l'hôtel « NORMANDIE » de Bordeaux, intégrant le modèle « FOLD 31010 » et que le modèle aurait donc été divulgué antérieurement à son dépôt. -ce modèle aurait été divulgué en novembre 2001 -la Société MAROTTE n'a aucun droits d'auteur sur le dit panneau au motif que celui- ci ne présente pas de caractère d'originalité la gravure mécanique de lignes courbes sur un panneau ne pouvant répondre à « l'empreinte de la personnalité de son auteur -elles fournissent différentes antériorités
Sur quoi attendu que :- selon la nouvelle législation sur les dessins et modèle, appliquant en France la directive CE 98/71 du 13.10.1998 à compter du 25.07.2001, il résulte de l'article L511-6 qu'un modèle divulgué plus d'un an avant son dépôt est nul -il résulte de factures à la SBMIM fournies par la Société MAROTTE, datée du 30.11.2001 qu'elle avait vendu à cette date des panneaux FOLD qu'en conséquence ceux-ci avaient été nécessairement divulgués à l'acquéreur même si ces panneaux n'étaient pas encore posés et donc mis à la vue du public antérieurement au 22.07.2002
-il n'est pas contesté par les défenderesses qui invoquent leur divulgation, à cette date, que les panneaux FOLD ont été créés avant le 30.11.2001 par la Société MAROTTE -le modèle MUQUET présenté par la Défense n'a ni date certaine le courrier établissant son existence étant postérieur à la date du 30.11.2001 et présente des différences notables avec le modèle FOLD -aucun des modèles présentés ne constitue par sa date certaine de création une antériorité du modèle FOLD et donc à sa nouveauté, qu'il en est ainsi du modèle de la société OBJECTILE DIFFUSION différent du modèle FOLD -la personne morale sous le nom de laquelle l'œuvre a été divulguée est présumée titulaire des droits sur ce modèle aucune autre personne physique n'ayant revendiqué la création -le modèle présente des caractéristiques suffisantes pour être protégeable non seulement par ses caractères propres constituées par la gravure de lignes verticales ondulées, irrégulières ne se croisant jamais sur un panneau de bois clair mais par le fait qu'il est parfaitement identifiable dans l'œil du professionnel averti que constitue celui d'un architecte qui l'a identifié par sa spécification
le Tribunal dira que le modèle FOLD 31010 NT033677 est nul, mais que le panneau FOLD est protégeable au titre de la propriété intellectuelle accordée par l'article L112-1 du CPI et que la Société MAROTTE détient les droits d'auteur sur le modèle de panneau FOLD.
Sur la contrefaçon
Les défenderesses avancent que : -il existe des différences entre les deux modèles à la fois dans la gravure technique et dans l'impact de celle-ci sur l'aspect visuel, qu'il en résulte une absence de ressemblances à la lumière -il n'y a pas de ressemblances caractéristiques
la Société MAROTTE répond que : - les différences techniques avancées sont soit fausses soit si minimes qu'elles ne peuvent être retenues et qu'elle n'influent pas à créer une différence suffisante entre les deux modèles pour pouvoir soutenir qu'un observateur averti n'aurait pas à la vue de ces deux modèles une même impression visuelle d'ensemble
Sur quoi, attendu que :-L'huissier a relevé dans son procès-verbal que les panneaux litigieux avaient été livrés et installés par Fily'ing et qu'il s'agit de « panneaux en bois clair décoratif sculpté, caractérisés par la gravure de lignes verticales ondulées, irrégulières ne se croisant jamais » donc identifiables comme des panneaux FOLD -qu'il a fourni dans son procès verbal un dessin présenté par la Société MOINET comme représentant la réalisation des gravures du panneaux litigieux après validation par l'architecte -sur ce dessin il est clairement visible que le modèle litigieux reprend les caractéristiques du modèle original pour en constituer une copie quasi servile, sans qu'il soit besoin de reprendre par le détail les points de ressemblance entre le modèle original et le modèle litigieux -la contrefaçon s'apprécie sur les ressemblances dans l'œil d'un observateur d'attention moyenne et non sur les différences Le Tribunal dira que le modèle de panneau fabriqué et posé par les Sociétés MOINET, FILY'ING et MOLLIBOIS constitue une contrefaçon du modèle FOLD de la Société MAROTTE
Sur la concurrence déloyale
la Société MAROTTE fait valoir que : -les plans établis par le Cabinet d'architectes ARKHITEKTON portent très clairement les mentions « placage en érable MAROTTE type FOLD référence 31010 » ou 'panneau placage érable FOLD MAROTTE ». -les Sociétés défenderesses ont très clairement pris comme référence la création de la Société MAROTTE, afin de la faire fabriquer par un tiers, dans une qualité leur permettant de réaliser une marge supérieure. -la Société SPIE SCGPM avait consulté la Société FIL'YIIN G pour la réalisation de travaux d'agencement, dès le mois de juin 2004, que les plans d'architectes désignaient comme produit celui de la Société MAROTTE mais que la Société FILY'ING a cependant attendu le vendredi 9 juillet 2004 pour prendre contact avec la Société MAROTTE, alors que différentes entreprises qui avaient répondu au même titre que la Société FILYING à l'appel d'offre de la Société SPIE SCGPM ont fait des demandes de devis à la Société MAROTTE, dès le mois de juin 2004 auxquelles la Société MAROTTE a naturellement répondu
Les Sociétés défenderesses soutiennent que : -C'est uniquement en raison de l'impossibilité d'intervention de la Société MAROTTE qui ne pouvait tenir les délais qui lui étaient demandés, qu'il a été fait appel aux Sociétés MOINET et MOLLIBOIS, fabriquant et fournisseur des produits litigieux
Sur quoi attendu que : -Les conclusions des parties montrent clairement que les sociétés défenderesses savaient toutes que le modèle demandé était celui de la Société MAROTTE -les délais de la Société MAROTTE ne dépassaient les délais prescrits que de quelques jours (première semaine d'août contre fin juillet) ne justifiant pas d'écarter le fournisseur désigné, alors que la Société FILY'ING avait mis un mois avant de la contacter -pour des raisons qui ne font pas parties du litige les sociétés défenderesses ont ensemble en toute connaissance de cause fait fabriquer un produit contrefaisant concurrent à un prix inférieur alors que le budget de la sous-traitance avait été fixé, acte différent de la simple contrefaçon qui caractérise une concurrence déloyale-de plus la Société MAROTTE avait prévenue la Société MOINET le 30.07.04 de la nécessité de créer un modèle différent du sien
le Tribunal dira que les sociétés défenderesses ont commis des actes de concurrence déloyale
Sur les mises hors de cause
La société SPIE SCGPM demande : - sa mise hors de cause au motif qu'elle a sous-traité le marché en cause -elle n'était pas informée qu'à la suite de l'échec des discussions de juillet 2004. Marotte avait mis en garde Fily'ing et Moinet sur la mise en œuvre de panneaux similaires aux panneaux Fold. et que dans le passé, Marotte avait déjà reproché à Mollibois de copier ses produits.
La Sociétés d'architectes DG LA sollicite sa mise hors de cause au motif que : - elle a validé un échantillon des nouveaux panneaux décoratifs lignés conçus par la Société MOINET et présentés par la société FILY'ING, elle n'avait pas à contrôler le choix du nouveau fabricant -elle n'avait pas l'initiative des décisions de la maîtrise d'œuvre. Sur quoi attendu que : -Société SPIE SCGPM ayant accepté le devis de la Société FILYIN G sur lequel était mentionné la mise en place d'un habillage mural de la Société MAROTTE, ayant accepté la fourniture d'une contrefaçon et ayant payé à la Société FILYTNG l'agencement des contrefaçons et fait procéder à leur installation, a participé aux faits de contrefaçon. -les panneaux décoratifs en bois ont été souhaités et prescrits par « l'architecte du propriétaire des locaux rénovés dans le cadre du chantier ». soit les Sociétés DG LA et ARKHITEKTON. Que ceux-ci ont accepté la pose de contrefaçon sans la dénoncer, -les sociétés défenderesses sont solidairement responsables des actes de contrefaçon qu'elles ont effectués, et des conséquences de ces actes de contrefaçon
le Tribunal les déboutera de leur demande de mise hors de cause et dira que les sociétés défenderesses sont in solidum responsables des actes de contrefaçon qu'elles ont effectués, et des conséquences de ces actes de contrefaçon
Sur le Préjudice
La Société MAROTTE fait valoir que : -sa marge brute étant de 150 € par m2 de panneaux de placage en bois vendus, son préjudice commercial s'élève à la somme de 150 x 400 = 60.000E. -elle consacre un budget très important d'une part à la recherche et au développement de nouveaux produits, ainsi qu'à la promotion, et la publicité des ses produits ce qui lui a d'ailleurs permis d'être référencée par les architectes que les agissements des sociétés défenderesses ont porté préjudice à ces investissements à une hauteur qu'elle estime à 40.000 €
les parties défenderesses répondent que : -la Société MAROTTE poursuit la réparation du préjudice commercial qu'elle aurait subi au titre de la marge brute perdue sur la commande de Fily'ing. Mais faute de disponibilité et ne voulant apparemment pas mobiliser de moyens supplémentaires laSociété MAROTTE n'a pas été en mesure d'exécuter la commande que voulait lui passer Fily'ing. Elle n'a donc pas subi de préjudice commercial
Sur quoi attendu que - conformément à la jurisprudence de la cour européenne il convient de priver les défenderesses d'un chiffre d'affaires qu'elles n'aurait pas dû réaliser soit 83.600 € HT - contrairement aux affirmations des défenderesses et au prix d'un retard de quelques jours elles auraient pu passer commande à la Société MAROTTE et qu'en s'abstenant elles l'ont privé d'une marge brute assurée - l'atteinte aux investissements publicitaires et promotionnels sera partiellement compensée par les mesures de publication qui seront accordées
le Tribunal fixera le montant du préjudice subi par la Société MAROTTE à 80.000 € et condamnera solidairement les défenderesses à payer cette somme à la Société MAROTTE toutes causes confondues.
Sur les mesures accessoires de destruction et de diffusion
Attendu que la Société MAROTTE ne demande pas la destruction des panneaux installés dans le cadre du chantier situé avenue des Champs-Elysées et rue de Ponthieu à Pans, qu'en conséquence de ce qui précède il convient de faire interdiction aux sociétés défenderesses de poursuivre la diffusion, et la vente des panneaux contrefaisants ce sous astreinte définitive de 10.000 euros, par infraction constatée à compter de la date de signification du jugement à intervenir, ainsi que de détruire les panneaux contrefaisants qui pourraient être en stock
Sur les mesures de publications Attendu que les produits concernés sont des produits visibles par le public dans les locaux agencés, le tribunal estimera que compte tenu de la nature des faits qu'il y a lieu à une information complémentaire du public et ordonnera la publication du présent jugement dans cinq publications au choix de la Société MAROTTE et aux frais in solidum des sociétés défenderesses, sans que le montant total des insertions dépasse 20.000 €
Sur la demande de garantie Attendu que la Société MAROTTE et subsidiairement la société SPIE SCGPM demande à ce que les sociétés Fily'ing, Moinet et Mollibois relèvent et garantissent intégralement Spie SCGPM de toutes les condamnations prononcées à son encontre, mais que le Tribunal qui a conservé la société SPIE SCGPM dans la cause compte tenu de ses responsabilités ne voit pas pourquoi cette société serait garantie par les sociétés Fily'ing, et Moinet d'ailleurs plus « in bonis » et représentées par leurs mandataires judiciaires, le Tribunal la déboutera de sa demande de garantie de la société SPIE SCGPM par les sociétés FILY'ING et MOINET
Et déboutera les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires Sur l'exécution provisoire, les frais irrépétibles et les dépens
Attendu que l'exécution provisoire apparaît nécessaire compte tenu de la nature de l'affaire et qu'ainsi elle sera ordonnée sauf en matière de publication.Attendu que compte tenu de la nature de l'affaire il sera fait application de l'article 700 du NCPC à hauteur demandée et les sociétés défenderesses devront payer in solidum à ce titre la somme de 10.000€ à la Société MAROTTE
Attendu que les Sociétés défenderesses seront condamnées in solidum aux dépens exposés à ce jour.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, Statuant par jugement contradictoire en premier ressort,
-prononce la jonction des causes, -dit que le modèle FOLD 31010 No033677 est nul, -dit que le panneau FOLD est protégeable au titre de la propriété intellectuelle accordée par l'article Ll 12-1 du CPI et que la Société MAROTTE détient les droits d'auteur sur le modèle de panneau FOLD, -dit que le modèle de panneau fabriqué et posé par les Sociétés MOINET MENUISERIE AGENCEMENT devenue VERT HABITAT, FILY'ING et MOLLIBOIS constitue une contrefaçon du modèle FOLD de la Société MAROTTE, -dit que les sociétés défenderesses (VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT, FILY'ING, SPIE SCGPM, ARKHITEKTON, DGLA et MOLLIBOIS) ont commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la Société MAROTTE -déboute les sociétés SPIE SCGPM et DGLA de leur demande de mise hors de cause, -dit que les sociétés défenderesses (VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT, FILY'ING, SPIE SCGPM, ARKHITEKTON, DGLA et MOLLIBOIS) sont in solidum responsables des actes de contrefaçon qu'elles ont effectués, et des conséquences de ces actes de contrefaçon, -fixe le montant du préjudice subi par la Société MAROTTE à 80.000 € toutes causes confondues condamne in solidum les défenderesses (la S.CP. DOLLEY ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT et de la société FILY'ING, les sociétés SPIE SCGPM, ARKHITEKTON, DGLA et MOLLIBOIS) à payer cette somme à la Société MAROTTE, -fait interdiction aux sociétés défenderesses de poursuivre la diffusion, et la vente des panneaux contrefaisants ce sous astreinte définitive de 10.000 €, par infraction constatée à compter de la date de la signification du présent jugement ; -ordonne la publication du présent jugement dans cinq publications au choix de la Société MAROTTE et aux frais in solidum des sociétés défenderesses (la S.C.P. DOLLEY ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT et de la société FILY'ING, les sociétés SPIE SCGPM, ARKHITEKTON, DGLA et MOLLIBOIS), sans que le montant total des insertions dépasse 20.000 €, - déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires ; -déboute la Société MAROTTE de sa demande de garantie de la société SPIE SCGPM par les sociétés FILY'IN et VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT ;- ordonne l'exécution provisoire sauf en matière de publication ; -condamne les sociétés défenderesses (la S.C.P. DOLLEY ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT et de la société FILY'ING, les sociétés SPIE SCGPM, ARKHITEKTON, DGLA et MOLLIBOIS) à payer in solidum à la société MAROTTE à la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du NCPC ; -condamne les Sociétés défenderesses (la S.C.P. DOLLEY ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société VERT HABITAT anciennement dénommée MOINET MENUISERIE AGENCEMENT et de la société FILY'ING, les sociétés SPIE SCGPM, ARKHITEKTON, DGLA et MOLLIBOIS) in solidum aux dépens exposés à ce jour, dont ceux à recouvrer par le Greffe liquidés à la somme de: 102,16 Euros TTC dont 15,49 euros de T.V.A.