AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de LAROSIERE de CHAMPFEU, les observations de Me GUINARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par
: - X... Henri,
- Z... Denise, épouse X..., parties civiles,
contre l'arrêt n 910 de la chambre d'accusation de la cour d'appel de LYON, en date du 26 septembre 1995, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée, sur leur plainte, des chefs de faux et usage de faux, et escroquerie, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen
unique de cassation pris de la violation des articles
150 à
153,
184,
405 du Code pénale,
441-1,
226-4,
313-1 et
432-8 du nouveau Code pénal,
6,
211,
212,
427,
485,
512,
591 et
593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre contre
quiconque des chefs d'escroquerie, faux et usage de faux en écriture privée, sur la plainte avec constitution de partie civile des époux X... en date du 10 avril 1990;
"aux motifs que l'action publique pour l'application de la peine s'éteint notamment par l'exception d'autorité de la chose jugée ;
que celle-ci peut être valablement retenue lorsqu'il existe une identité de cause, d'objet et de parties entre les deux poursuites;
"qu'en l'espèce, les époux X... ont déposé plainte le 1er avril 1990 en se constituant partie civile contre personne non dénommée des chefs de faux, usage de faux et escroquerie, mais en visant Guy Y..., notaire; que cette plainte en réitérait une précédente déposée contre ce même notaire et le maire de la commune de Gex;
"qu'en effet, le 12 août 1986, les époux X... avaient saisi le juge d'instruction de Bourg-en-Bresse d'une plainte des chefs de violation de domicile à l'encontre du maire de la commune de Gex et de faux et usage de faux à l'encontre du notaire et du maire à qui ils reprochaient d'avoir faussement fait figurer dans l'acte d'acquisition de leur propriété en date du 4 février 1964 une servitude de passage au profit des parcelles voisines;
"qu'à la suite de cette plainte, la chambre d'accusation de la cour de céans a, par décision en date du 13 mars 1992 aujourd'hui définitive, dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque des chefs de faux, usage de faux et violation de domicile;
"que cette décision précisait dans ses motifs que la mention figurant dans l'acte du 4 février 1964 aux termes de laquelle les époux X... souffriraient des servitudes passives et jouiraient de celles actives était loin de constituer une clause de style dénuée de toute portée juridique;
"que cette décision rappelait que les époux X... pouvaient d'autant moins ignorer l'existence d'une servitude de passage grevant le fonds qu'ils venaient d'acheter et dont celui-ci était débiteur au profit des parcelles voisines que, sur le plan annexé à l'acte du 4 février 1964 qu'ils ont certifié conforme, figuraient le départ de l'emprise de la servitude de passage initiale traversant en son milieu la parcelle vendue, l'emprise du chemin de desserte créé en remplacement de l'ancien, le tracé de ce nouveau chemin destiné à desservir les fonds contigus du fonds X..., en particulier les parcelles Julliard et Jaboulay, enclavées;
"qu'il apparaît ainsi que les deux poursuites entreprises par les époux X... présentent une parfaite identité de cause, d'objet et de parties;
"qu'enfin, les époux X... invoquent également un élément nouveau en visant un plan cadastral daté du 1er septembre 1963 sans toutefois préciser en quoi ce plan serait différent de celui annexé à l'acte du 4 février 1964 et alors que ce plan figurait déjà dans les documents produits à l'appui de leurs plaintes et comporte également en pointillé l'emprise de la servitude de passage traversant leur parcelle (arrêt, pages 4 et 5);
"1°/ alors qu'est dépourvue de l'autorité de la chose jugée à l'égard de quiconque l'ordonnance de non-lieu rendue à l'issue d'une instruction n'ayant comporté aucune mise en examen;
"que, dès lors, en se fondant sur l'arrêt du 13 mars 1992, rendu à l'issue d'une instruction dans le cadre de laquelle aucune mise en examen n'a été prononcée, pour en déduire que cette décision avait acquis l'autorité de la chose jugée et, partant, ne permettait pas d'entreprendre de nouvelles poursuites des chefs de faux et usage de faux à l'encontre de Me Y... et du maire de la commune de Gex, l'arrêt attaqué ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale;
"2°/ alors que l'autorité de chose jugée, susceptible de faire échec aux poursuites pour un motif affectant l'action publique elle-même et, partant, de justifier une décision de refus d'informer, implique une identité de parties, d'objet et de cause;
"qu'ainsi, encourt la censure l'arrêt attaqué qui, pour prononcer un non-lieu sur la plainte des demandeurs du chef d'escroquerie se fonde exclusivement sur un précédent arrêt de non-lieu du 13 mars 1992, rendu à l'issue d'une instruction ouverte des chefs de faux et usage de faux, ces deux dernières infractions caractérisant des faits distincts de ceux visés dans la plainte du 6 septembre 1990;
"3°/ alors que dans leur mémoire produit le 22 juin 1995, les demandeurs ont expressément demandé à ce que - à la lueur du plan cadastral du 1er septembre 1963, qui différait de celui annexé à la vente - soient à nouveau entendus le notaire rédacteur de l'acte ainsi que le maire de la commune de Gex;
"qu'ainsi, en laissant dépourvu de toute réponse ce chef péremptoire du mémoire des demandeurs, tendant à ce qu'une mesure d'instruction complémentaire soit ordonnée, la chambre d'accusation a violé l'article
593 du Code de procédure pénale";
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance entreprise, la chambre d'accusation, après avoir analysé les faits dénoncés dans la plainte, et répondu aux articulations essentielles du mémoire de la partie civile, a énoncé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les infractions reprochées;
Attendu que les demandeurs, qui se bornent à discuter les motifs surabondants de l'arrêt, lequel n'a pas déclaré l'action publique éteinte, ne justifient d'aucun des griefs que l'article
575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de la chambre d'accusation, en l'absence de recours du ministère public;
Que, dès lors, le moyen est irrecevable, et qu'il en est de même du pourvoi par application du texte précité;
Par ces motifs
;
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Culié conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. de Larosière de Champfeu conseiller rapporteur, MM. Roman, Schumacher, Martin, Pibouleau, Mme Chanet conseillers de la chambre, M. de Mordant de Massiac conseiller référendaire;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Ely ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;