Vu la procédure suivante
:
Par une requête et des mémoires enregistrés les 23 septembre 2019 et 28 février 2021, M. D A, représenté par Me Mairesse, demande au tribunal :
1°) de condamner la commune d'Argenteuil à lui verser la somme nette correspondant à une rémunération brute de 160 118,40 euros, en réparation des traitements non perçus depuis son licenciement, et de lui fournir un bulletin de paie justificatif de cette régularisation, en exécution de l'arrêt du 11 juillet 2019 par lequel la cour administrative d'appel a annulé son licenciement, ainsi que la somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices moral, matériel et corporel.
2°) d'enjoindre à la commune d'Argenteuil de régulariser ses cotisations sociales au titre de la retraite complémentaire durant la période où elle lui a assuré le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et de lui fournir les justificatifs nécessaires, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Argenteuil la somme de 1 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la commune d'Argenteuil n'a pas complètement exécuté l'arrêt du 11 juillet 2019, par lequel son licenciement décidé le 30 mars 2014 a été annulé, en ne régularisant pas les traitements dus et en ne lui fournissant pas de feuille de salaire prouvant la régularisation des cotisations sociales en 2015 et 2016 ;
- la commune a méconnu l'article
L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration en retirant la décision lui attribuant le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi jusqu'au 17 juillet 2017 plus de quatre mois après son édiction ;
- en application de l'article 19 de la convention relative à l'indemnisation du chômage, des cotisations d'assurance retraite devaient être versées durant la période où il était allocataire de l'aide au retour à l'emploi ;
- il subit des préjudices matériel, physique et moral, qui représentent la somme de 5 000 euros.
Par des mémoires en défense enregistrés les 25 septembre 2020 et 24 novembre 2020, la commune d'Argenteuil conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 800 euros soit mise à la charge de M. A au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A ne sont pas fondés et que les conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice né de sa perte de revenus sont contraires à l'autorité de la chose jugée.
En application de l'article
R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que le jugement est fondé sur un moyen qui, étant d'ordre public, doit être relevé d'office et tiré de ce que les conclusions tendant au versement de la somme de 5 000 euros en réparation de préjudices physique, matériel et moral n'ont pas été précédées d'une réclamation préalable, de sorte qu'elles sont irrecevables.
Par une décision du 2 décembre 2019, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 ;
- l'arrêté du 30 décembre 1970 relatif aux modalités de fonctionnement du régime de retraites complémentaire des assurances sociales institué par le décret du 23 décembre 1970 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C,
- et les conclusions de M. Camguilhem, rapporteur public.
Considérant ce qui suit
:
1. M. A a été recruté par la commune d'Argenteuil en 2008 par un contrat à durée déterminée en qualité " d'assistant auprès des élus ". Ce contrat a été régulièrement renouvelé puis transformé en contrat à durée indéterminée en 2012 en conservant le même intitulé et les mêmes fonctions. A la suite des élections municipales de 2014, le maire l'a informé, par deux décisions des 30 mars et 3 avril 2014, qu'il serait mis fin à ses fonctions le 30 mai 2014. Il a alors saisi le présent tribunal en demandant, d'une part, l'annulation de ces deux décisions et, d'autre part, la condamnation de la commune à lui verser diverses indemnités. Par un jugement n° 1409184 du 17 novembre 2016, le tribunal a rejeté ces conclusions. Il a alors porté le litige devant la cour administrative d'appel de Versailles qui, par l'arrêt n° 17VE00143 du 11 juillet 2019, a partiellement fait droit à sa demande en annulant le licenciement pour insuffisance de motivation, mais a rejeté ses conclusions à fin d'injonction et indemnitaires. Par une décision n° 438286 du 13 juillet 2021, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il avait rejeté les conclusions indemnitaires et a renvoyé dans cette mesure l'affaire à la cour. En parallèle, M. A a saisi la commune le 17 juillet 2019 pour réclamer, en exécution de l'arrêt du 11 juillet 2019, le versement de la somme nette correspondant à la rémunération brute non perçue de 160 118,40 euros pendant la période de son éviction illégale et l'édition d'un bulletin de paie. Par un courrier du 30 juillet 2019, la commune a rejeté ces demandes. Par sa requête, M. A doit être regardé comme concluant en premier lieu à la condamnation de la commune d'Argenteuil à lui verser cette somme en réparation des préjudices nés du non-versement de ses traitements après le 30 mai 2014, en deuxième lieu à ce qu'il soit enjoint à la commune de lui communiquer un bulletin de paie rectificatif, en troisième lieu à sa condamnation à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de ses autres préjudices, et en quatrième lieu à ce qu'il lui soit enjoint de régulariser le versement des cotisations sociales au titre de la retraite complémentaire durant la période où elle lui a assuré le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et de lui fournir les justificatifs nécessaires.
Sur les traitements non perçus après le 30 mai 2014 :
2. Un agent public irrégulièrement évincé a droit, non pas au versement du traitement dont il a été privé, mais à la réparation du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre.
3. Il résulte de l'instruction que M. A, né le 16 mai 1949, qui a atteint la limite d'âge de soixante-cinq ans qui lui était applicable le 16 mai 2014, a été radié des effectifs de la commune postérieurement à cette date. Par suite, ses conclusions indemnitaires tendant à se voir versées les sommes correspondant aux traitements qu'il n'a pas perçus après son licenciement, auxquels il n'avait en tout état de cause pas droit, ne peuvent qu'être rejetées. Il en va de même, pour les mêmes motifs et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, de ses conclusions relatives à la communication d'un bulletin de paie rectificatif.
Sur les conclusions tendant au versement d'une somme de 5 000 euros :
4. Aux termes de l'article
R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. "
5. M. A n'a pas adressé à la commune d'Argenteuil de réclamation tendant à se voir indemnisé de la somme de 5 000 euros, qui constitue un litige distinct de celui qui a été tranché par l'arrêt précité du 11 juillet 2019. Il en résulte que, en application des dispositions précitées, ses conclusions sont irrecevables.
Sur les conclusions relatives à l'aide au retour à l'emploi :
6. En premier lieu, la commune d'Argenteuil soutient, sans être contredite, qu'en application du décret du 23 décembre 1970 et du II de l'article 11 ter de l'arrêté du 30 décembre 1970, il ne lui incombait pas de verser de cotisations de retraite complémentaires au bénéfice de M. A durant la période où il bénéficiait de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, mais qu'il a en revanche bénéficié de l'attribution de points gratuits prévue par cette réglementation. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, les conclusions tendant à la régularisation de ses cotisations de retraite complémentaire ne peuvent qu'être rejetées.
7. En second lieu, le moyen tiré de ce que la commune d'Argenteuil aurait méconnu l'article
L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration en retirant la décision lui attribuant le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi jusqu'au 17 juillet 2017 plus de quatre mois après son édiction, qui ne vient au soutien d'aucune conclusion, est inopérant.
Sur les frais de l'instance :
8. Les disposition de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise sur leur fondement à la charge de la commune d'Argenteuil, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance. Par ailleurs il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de M. A sur leur fondement.
Par ces motifs
, le tribunal décide :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Argenteuil au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. D A et à la commune d'Argenteuil.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2022, à laquelle siégeaient
Mme Van Muylder, présidente,
Mme B et M. C, premiers conseillers,
assistés de Mme Lefebvre, greffière.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022.
Le rapporteur,
signé
G. CLa présidente,
signé
C. Van MuylderLa greffière,
signé
S. Lefebvre
La République mande et ordonne au préfet du Val-d'Oise en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.