LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 20-80.271 F-D
N° 00165
EB2
2 MARS 2021
CASSATION
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 MARS 2021
M. Y... O..., les sociétés [...] , Ambulances Urgences Sud Aisne, [...] et [...] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 14 octobre 2019, qui, pour travail dissimulé, a condamné le premier à douze mois d'emprisonnement avec sursis, à 10 000 euros d'amende et à cinq ans d'interdiction de gérer, les autres à 20 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire, commun aux demandeurs, et un mémoire en défense ont été produits.
Sur le rapport de M. Violeau, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. Y... O..., les sociétés [...] , Ambulances Urgences Sud Aisne, [...] et [...], les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Picardie, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 janvier 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Violeau, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article
567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Les sociétés [...] , Ambulances Urgences Sud Aisne, [...] et [...], représentées par M. O..., ont fait l'objet d'un contrôle de l'Urssaf de Picardie, qui a relevé à leur encontre le délit de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, consistant en l'emploi de conducteurs par une entreprise de transports sanitaires sous le faux statut d'auto-entrepreneur.
3. A l'issue de l'enquête, M. O... et ces quatre sociétés ont été cités de ce chef devant le tribunal correctionnel, qui les en a déclarés coupables.
4. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. O..., la société [...], la société [...] , la société Ambulances Urgence Sud Aisne et la Société [...] coupables de travail dissimulé, ainsi qu'à indemniser la partie civile, alors « que devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; que la méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief ; que l'arrêt attaqué, qui ne mentionne pas que M. O..., la société [...], la société [...] , la société Ambulances Urgence Sud Aisne et la société [...] auraient été informés de leur droit de se taire, a été rendu en violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les article
406,
512,
593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles
406 et
512 du code de procédure pénale :
6. En application du premier de ces textes, devant le tribunal correctionnel, le président ou l'un des assesseurs par lui désigné, après avoir constaté son identité et donné connaissance de l'acte qui a saisi le tribunal, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. La méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief.
7. Selon le second, ces dispositions sont applicables devant la chambre des appels correctionnels.
8. Si l'arrêt mentionne que les sociétés [...], [...] , Ambulances Urgence Sud Aisne et [...] n'ont pas comparu devant la juridiction mais qu'elles étaient représentées par un avocat, il résulte des énonciations de l'arrêt que ce dernier s'est exprimé dans l'intérêt de M. O..., à titre personnel et es qualité de représentant des personnes morales appelantes.
9. La Cour de cassation n'étant pas en mesure de lever cette contradiction à la lecture des notes d'audience, ces mentions contradictoires amènent à considérer, dans l'intérêt des demandeurs au pourvoi, que M. O..., qui a interjeté appel à titre personnel et en sa qualité de représentant des sociétés prévenues, a comparu, à l'audience de la cour d'appel du 13 mai 2019, en cette double qualité.
10. Il ne résulte pas de l'arrêt attaqué que ce dernier ait été informé du droit de se taire au cours des débats.
11. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé.
12. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
PAR CES MOTIFS
, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Amiens, en date du 14 octobre 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article
618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux mars deux mille vingt et un.