Cour d'appel de Pau, 2 février 2023, 22/01722

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Pau
  • Numéro de pourvoi :
    22/01722
  • Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
  • Décision précédente :tribunal de commerce de PAU, 4 mai 2021
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/63dcb5b1fea95005de85f47f
  • Président : Madame Jeanne PELLEFIGUES
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Pau
2023-02-02
tribunal de commerce de PAU
2022-05-31
tribunal de commerce de PAU
2021-05-04

Texte intégral

JP/CS Numéro 23/445 COUR D'APPEL DE PAU 2ème CH - Section 1

ARRET

DU 2 février 2023 Dossier : N° RG 22/01722 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IHYX Nature affaire : Appel sur les décisions relatives à la modification de la date de la cessation des paiements Affaire : S.A.S. KALIENTE [C] [H] C/ S.E.L.A.R.L. EKIP' Grosse délivrée le : à : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS A R R E T Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 2 février 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile. * * * * * APRES DÉBATS à l'audience publique tenue le 6 décembre 2022, devant : Jeanne PELLEFIGUES, magistrat chargé du rapport, assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l'appel des causes, Jeanne PELLEFIGUES, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Joëlle GUIROY et en a rendu compte à la Cour composée de : Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente Madame Joëlle GUIROY, Conseillère Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller qui en ont délibéré conformément à la loi. Le Ministère Public a eu connaissance de la procédure le 1er septembre 2022. Dans l'affaire opposant : APPELANTE : S.A.S. KALIENTE agit poursuites et diligences de son Président, Monsieur [C] [H], né le [Date naissance 1].1964 à [Localité 8] (47), de nationalité française, demeurant [Adresse 4] [Adresse 2] [Localité 9] Monsieur [C] [H] né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 8] (81) de nationalité Française [Adresse 4] [Localité 7] Représentés par Me Stéphane SUISSA de la SELAS SUISSA-KHERFALLAH, avocat au barreau de PAU INTIMEE : S.E.L.A.R.L. EKIP' Prise en la personne de Maître [V] [F], Prise en son établissement secondaire de [Localité 10] situé [Adresse 5], Prise en sa qualité de liquidateur de la SAS KALIENTE, fonctions à elle conférées par jugement du Tribunal de Commerce de PAU en date du 04 mai 2021. [Adresse 3] [Localité 6] Représentée par Me Camille ESTRADE, avocat au barreau de PAU sur appel de la décision en date du 31 MAI 2022 rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE PAU Par jugement du 31 mai 2022, le tribunal de commerce de PAU a : reporté et fixé définitivement la date de cessation des paiements de la société KALIENTE (SAS) au 31 décembre 2019, ordonné la publicité du jugement et toutes les mesures prescrites en pareille matière, dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure. Par déclaration du 20 juin 2022,la SAS KALIENTE a interjeté appel de la décision. Par déclaration du 3 octobre 2022 [C] [H] représentant légal de la SAS KALIENTE a interjeté appel de la décision. La société KALIENTE représentée par son président [C] [H] conclut : Vu les dispositions des articles L 631-1 et L 653-8 du code de commerce, 122 et 123 du code de procédure civile, - Dire et juger recevable et bien fondé l'appel de la SAS KALIENTE du jugement du tribunal de commerce de Pau du 31 mai 2022. - Infirmer la décision entreprise, Statuant à nouveau, - Constater que la SAS KALIENTE n'était pas partie à la procédure ayant donné lieu au jugement du tribunal de commerce de Pau du 31 mai 2022.

En conséquence

, - Mettre la SAS KALIENTE hors de cause. - Juger irrecevable pour défaut de qualité la procédure de la SELARL EKIP' ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS KALIENTE, engagée à l'encontre de Monsieur [C] [H], en l'absence à la procédure de la SAS KALIENTE. À titre subsidiaire, - Juger mal fondée l'action engagée par la SELARL EKIP' ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS KALIENTE, En conséquence, - Dire n'y avoir lieu à report de la date de cessation des paiements au 31 décembre 2019 ou à tout autre date que celle du 30 avril 2021, telle que fixée par le jugement du tribunal de commerce de Pau du 4 mai 2021. - Débouter la SELARL EKIP' ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS KALIENTE de l'ensemble de ses demandes. - La condamner au paiement de la somme de 2000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. - La condamner aux entiers frais et dépens de l'instance. La SELARL EKIP prise en la personne de Maître [V] [F] agissant es qualité de mandataire judiciaire à la liquidation de la SAS KALIENTE, conclut à : Vu les articles L631-1 et L631-8 du code de commerce, Vu la jurisprudence précitée, - Déclarer mal fondé l'appel interjeté par la société KALIENTE, - Confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, - Débouter la société KALIENTE de ses demandes, - Juger que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective. L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 novembre 2022. SUR CE Dans le souci d'une bonne administration de la justice, il y a lieu d'ordonner la jonction de la procédure N° 22/02658 à la procédure N° 22/01722. La SAS KALIENTE dont le président est [C] [H] et le siège social se situe à [Localité 9], exerce l'activité de vente par automates et autres commerces de détail, commerce de gros, fournitures et équipements. Suivant déclaration du 30 avril 2021, la société KALIENTE a effectué une déclaration de cessation des paiements et a sollicité l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire. Par jugement du 4 mai 2021, le tribunal de commerce de PAU a ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l'encontre de la SAS KALIENTE et a désigné la SELARL EKIP prise en la personne de Maître [V] [F] en qualité de liquidateur judiciaire. La date de cessation des paiements a été fixée provisoirement au 30 avril 2021. Par acte d' huissier du 4 janvier 2022, la SELARL EKIP prise en la personne de Maître [V] [F], a assigné [C] [H] en qualité de représentant légal de la SAS KALIENTE devant le tribunal de commerce de PAU, aux fins de voir reporter la date de cessation des paiements de la procédure de la SAS KALIENTE. Par jugement du 31 mai 2022 dont appel le tribunal a reporté et fixé définitivement la date de cessation des paiements de la SAS KALIENTE au 31/12/2019. Sur la mise hors de cause de la société KALIENTE et l'irrecevabilité de la procédure engagée par la SELARL EKIP : La société KALIENTE représentée par son président [C] [H] sollicite à titre principal l'infirmation de la décision et statuant à nouveau constater qu'elle n'était pas partie à la procédure et en conséquence la mettre hors de cause et juger irrecevable pour défaut de qualité la procédure de la SELARL EKIP es qualité de mandataire liquidateur de la SAS KALIENTE. L'article 954 du code de procédure civile dispose que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. La demande de l'appelante tendant à constater qu'elle n'était pas partie à la procédure ne saurait constituer une prétention au sens de l'article 542 du code de procédure civile et de l'article 4 du code de procédure civile prévoyant que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que l'appel tend à la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré à sa réformation ou son son annulation par la cour d'appel. En l'espèce il sera donc seulement statué sur la demande formulée à titre principal d'infirmer la décision entreprise en déclarant irrecevable pour défaut de qualité la procédure engagée par la SELARL EKIP en mettant hors de cause la société KALIENTE. Il résulte des termes de l'assignation du 4 janvier 2022 que la SELARL EKIP prise en la personne de Maître [V] [F] a assigné [C] [H] en qualité de représentant légal de la SAS KALIENTE aux fins de voir reporter la date de cessation des paiements de la procédure. L'appelante soutient que la procédure de première instance a été faite au contradictoire d'[C] [H] à l'exception de la société qui n'a pas régulièrement été attraite à la procédure et n'a pu faire valoir ses moyens de défense. Cette société devra donc être mise hors de cause. Elle fait remarquer qu'[C] [H], dont l'intérêt personnel à agir résulte d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation, comparaissait à titre personnel et était assisté de son conseil qui n'a conclu que dans son intérêt et non dans l'intérêt de la société qu'il n'a jamais représentée ni même assistée. L'article L641-9 du code de commerce prévoit que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de son bien. Cependant la Cour de cassation a jugé que la représentation d'une personne morale par une personne dessaisie n'est pas soumise au dessaisissement et que la signification d'une décision au débiteur pris en sa qualité de gérant d'une société est possible. Par conséquent l'assignation délivrée à une personne physique en qualité de représentant d'une personne morale permet d'assigner valablement cette dernière. C'est ce qui a été décidé notamment par un arrêt de la Cour de cassation du 10 juillet 2019. Ainsi l'assignation d' [C] [H] en qualité de représentant légal de la société a été valablement délivrée à la société et la procédure régulièrement diligentée à l'encontre de la société KALIENTE. Les chefs de contestation tenant à l'irrégularité de l'assignation délivrée à la société KALIENTE et à sa mise hors de cause seront donc rejetés. Au fond sur le report de la date de cessation des paiements : Aux termes de l'article L631-8 alinéa 2 du code de commerce, la date de cessation des paiements « peut être reportée une ou plusieurs fois, sans pouvoir être antérieure de plus de 18 mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure.» L'état de cessation des paiements est caractérisé dès lors que l'actif disponible ne permet pas de faire face au passif exigible suivant les dispositions de l'article L631-1 du code de commerce. La cessation des paiements est appréciée au jour où statue la juridiction même en cause d'appel. Pour contester le report de la date de cessation des paiements à la date du 31 décembre 2019, la SAS KALIENTE fait observer qu'à cette date la quasi-totalité du passif était constituée de dettes fiscales et sociales. Elle prétend qu'au 31 décembre 2019, la société ne savait pas qu'elle allait faire l'objet d'un contrôle fiscal puisqu'elle a été avertie par avis de vérification du 12 mars 2020 et la somme de 88 426 € sera donc à écarter pour la détermination du passif à la date du 31 décembre 2019. Par ailleurs elle soutient que le passif exigible fiscal doit correspondre aux titres exécutoires émis avant le 31 décembre 2019 soit des impositions qui ont été authentifiées par avis de mise en recouvrement à cette date puisque cet avis de mise en recouvrement constitue le titre exécutoire dont peut se prévaloir le trésor public pour réclamer le règlement de sa créance. Or à la date du 31 décembre 2019 seul l'avis de mise en recouvrement du 30 septembre 2019 lui avait été notifié. Les impositions émises avant le 31 décembre 2019 doivent donc être prises en considération pour leur montant sans pénalité et pour un total de 52 783,04 € et non 72 905,04 €. S'agissant des dettes sociales les inscriptions de privilèges prises avant le 31 décembre 2019 confirment un passif exigible pour l'URSSAF de 58 025 € en trois inscriptions dont il convient de déduire un règlement global de 48 298 € intervenu en décembre 2019 soit un solde de 9727 € et pour MALAKOFF un montant de 22 056,92 €. Le passif exigible serait donc à retenir à hauteur de la somme de 96 621,66 € dont 84 566,96 € de dettes fiscales et sociales pour lesquelles un moratoire a été requis à la fin du mois de janvier 2020 par le dépôt d'un dossier de saisine de la commission des chefs de services financiers sollicités dès avant la fin de l'année 2019 et en tout état de cause avant le 31 décembre 2019. Ce dossier a été présenté fin janvier 2020 et accepté par la CCSFCe qui implique que la société n'était pas en cessation de paiement à la date de fin janvier 2020. Dès lors elle considère que la majeure partie du passif fiscal et social au 31 décembre 2019 faisait l'objet d'un report d'échéance et que les créanciers concernés avaient renoncé tacitement en demander immédiatement le paiement le temps de mise en place de la conciliation au travers de la saisine de la commission des chefs de services financiers. Le 10 novembre 2020 la commission des chefs de services financiers a notifié l'accord d'un plan de règlement de l'arriéré. S'agissant de l'actif disponible elle invoque le solde global des comptes en banque d'un montant de 17 204,45 € à la date du 31 décembre 2019 ainsi qu'un découvert autorisé d'un montant de 15 000 €, la totalité de ces deux actifs disponibles permettant donc de couvrir les dettes non fiscales et sociales. Il devra également être tenu compte des recettes vente de recharges dont les montants sont récurrents et d'en moyenne 8000 € mensuels. Elle en déduit que la société ne se trouvait pas en état de cessation des paiements au 31 décembre 2019. Sur la notion de passif exigible : Les créances fiscales et sociales : Selon jurisprudence de la Cour de cassation la juridiction appelée à se prononcer sur l'existence de l'état de cessation des paiements n'a pas à rechercher si le passif exigible a effectivement été exigé dès lors que le débiteur n'a pas allégué qu'il disposait d'une réserve de crédit ou d'un moratoire de la part de ses créanciers lui permettant de faire face a son passif exigible. Il a été jugé que le report d'exigibilité ne supprime pas l'état de cessation des paiements si l'accord n'a été donné que plusieurs mois après l'exigibilité des créances Le fait que la dette fiscale soit contestée par le débiteur ne suffit pas d'exclure du passif exigible dès lors que les créances fiscales ne peuvent être contestées que dans les conditions prévues au livre des procédures fiscales et en particulier suivant la procédure prévue à l'article L277 du livre des procédures fiscales. La notion de passif exigible suppose l'existence de dettes certaines liquides et exigibles pour caractériser la cessation des paiements. Pour l'appréciation du caractère certain et liquide des dettes, leur couverture par un titre exécutoire n'est pas nécessaire dès lors qu'elles ne sont pas contestées. Ainsi l'argumentation de la société KALIENTE tenant à l'absence de titre exécutoire pour considérer que les dettes fiscales n'ayant pas fait l'objet d'un titre exécutoire ne doivent pas être prises en compte dans le passif exigible sera rejetée en confirmation du jugement déféré. S'agissant des arguments tenant à la demande de moratoire requis à la fin du mois de janvier 2020 par le dépôt d'un dossier de saisine de la commission des chefs de services financiers sollicités dès avant la fin de l'année 2019 et en tout cas avant le 31 décembre, cette argumentation n'est pas davantage opérante. En effet, le moratoire n'a fait l'objet d'un accord de la part de l'administration fiscale qu'après l'exigibilité des créances et l'existence d'un moratoire obtenu après la date de cessation des paiements retenue par le tribunal ne fait pas échec au maintien de cette date. En l'espèce, aucuneréclamation assortie d'une demande de sursis de paiement de nature à réduire le passif exigible n'a été formulée par la SAS KALIENTE durant cette période dans les formes prescrites par le livre des procédures fiscales. Dans ces conditions, les contestations émises quant aux créances fiscales seront rejetées et la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a retenu sur les pièces citées en matière fiscale une créance de 142 461 7,04 euros. En ce qui concerne la dette sociale le défendeur reconnaît une dette sociale de 31 783,92 € ainsi que d'autres dettes représentant un total de 11 712,21 €. S'agissant des recettes prévisibles de l'ordre de 8000 € mensuels, l'existence de tels encaissements n'est pas établie ni leur caractère certain et dans ces conditions ils ne peuvent être pris en compte au titre de l 'actif disponible. L' évaluation partielle du passif résultant des seules dettes fiscales et sociales met déjà en évidence un passif exigible de 185 963 € à comparer à un actif disponible de 32 386 € à la date du 31 décembre 2019. La cessation des paiements se définit comme l'impossibilité pour une société de faire face au passif exigible avec son actif disponible. Cette impossibilité étant caractérisée à la date du 31décembre 2019 le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a reporté et fixé définitivement la date de cessation des paiements de la SAS KALIENTE au 31 décembre 2019.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort. Ordonne la jonction de la procédure N° 22/02658 à la procédure N° 22/01722. Rejette les chefs de contestation de la SAS KALIENTE sur l'absence de mise en cause régulière de cette société à la procédure. La déboute de l'ensemble de ses demandes. Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions. Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective. Le présent arrêt a été signé par Madame PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile. LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,