COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88G
5e Chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 29 SEPTEMBRE 2022
N° RG 21/01444
N° Portalis DBV3-V-B7F-UQB5
AFFAIRE :
[S] [I]
C/
S.A.S. [4]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Avril 2021 par le Pole social du TJ de CHARTRES
N° RG : 19/00097
Copies exécutoires délivrées à :
la SCP IMAGINE BROSSOLETTE
la SELARL ORION AVOCATS ASSOCIES
SELARL KATO ET LEFEBVRE ASSOCIES
Copies certifiées conformes délivrées à :
[S] [I]
S.A.S. [4]
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [S] [I]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Valérie RIVIERE-DUPUY de la SCP IMAGINE BROSSOLETTE, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000034 - N° du dossier 2018406 substituée par Me Marc MONTI de la SCP IMAGINE BROSSOLETTE, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000034 - N° du dossier 2018406
APPELANTE
****************
S.A.S. [4]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Me Laure STACOFFE de la SELARL ORION AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000037
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Florence KATO de la SELARL KATO & LEFEBVRE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1901 substituée par Me Lucie DEVESA de la SELARL KATO ET LEFEBVRE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1901
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article
945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juillet 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvia LE FISCHER, Présidente chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvia LE FISCHER, Présidente,
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller,
Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Morgane BACHE,
EXPOSÉ DU LITIGE
Salariée de la société [4] (la société) en qualité d'agent d'entretien, Mme [S] [I] (la victime) a, le 29 avril 2016, été victime d'un accident pris en charge, au titre de la législation professionnelle, par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] (la caisse). La déclaration d'accident du travail précise que la victime a ressenti une douleur dans l'avant-bras alors qu'elle essorait un balai de nettoyage. Le certificat médical initial mentionne une épicondylite droite et une épaule douloureuse droite.
Par décision du 13 avril 2018, une indemnité en capital a été octroyée à l'intéressée pour cet accident sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 5 % à compter du 1er mars 2018.
La victime a, le 16 août 2016, déclaré un syndrome du canal carpien droit que la caisse a également pris en charge, le 13 octobre 2016, au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles, sur la base d'un certificat médical initial du 20 juillet 2016.
Par décision du 26 avril 2018, une rente lui a été octroyée pour cette affection sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 21 % à compter du 1er mars 2018.
La victime a, le 25 février 2019, sollicité la mise en oeuvre d'une tentative de conciliation préalablement à la reconnaissance de la faute inexcusable de la société avant de saisir, le 14 mars 2019, le tribunal de grande instance de Chartres.
Par jugement du 7 avril 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres a déclaré prescrit le recours introduit par la victime en reconnaissance de la faute inexcusable de la société tant en ce qui concerne l'accident du travail que la maladie professionnelle. Le tribunal a, par ailleurs, rejeté les demandes fondées sur l'article
700 du code de procédure civile et condamné la victime aux dépens.
Celle-ci a relevé appel du jugement.
L'affaire a été plaidée à l'audience du 7 juillet 2022.
Les parties ont comparu, représentées par leur avocat.
Par conclusions écrites déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, conformément à l'article
455 du code de procédure civile, la victime sollicite l'infirmation du jugement entrepris et la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur pour l'accident du travail et la maladie professionnelle, avec toutes conséquences de droit. Elle sollicite en particulier la mise en oeuvre d'une expertise médicale et l'octroi d'une provision d'un montant de 3 000 euros.
Par conclusions écrites déposées et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, conformément à l'article
455 du code de procédure civile, la société sollicite la confirmation du jugement entrepris. Elle conclut, à titre subsidiaire, au rejet des prétentions adverses.
La caisse considère, de son côté, que le point de départ de la demande en reconnaissance de la faute inexcusable afférente à l'accident du travail doit être fixé au 2 novembre 2016, date à laquelle les arrêts de travail ont pris fin, de sorte que la victime n'ayant formulé sa demande auprès de la caisse que le 25 février 2019, sa demande est prescrite.
Elle considère que le point de départ de la demande en reconnaissance de la faute inexcusable afférente à la maladie professionnelle doit être fixé au 28 février 2018, date de consolidation médicale, de sorte que la victime n'ayant formulé sa demande à ce titre que par conclusions déposées le 3 avril 2020, la prescription est également acquise.
Il est renvoyé aux conclusions écrites et soutenues oralement à l'audience par l'organisme pour l'exposé complet de ses moyens et des prétentions, conformément à l'article
455 du code de procédure civile.
En application de l'article
700 du code de procédure civile, la victime demande de condamner la société à lui payer la somme de 1 500 euros.
La société demande à ce que la victime soit condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en première instance, outre la même somme au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel.
La caisse ne formule aucune demande sur ce chef.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Selon l'article
L. 431-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2004-329 du 15 avril 2004, applicable au litige, les droits de la victime d'un accident du travail se prescrivent par deux ans à compter, notamment, de la cessation du paiement de l'indemnité journalière.
En l'espèce, il ressort des pièces produites par la caisse que celle-ci a versé des indemnités journalières à la victime, au titre de l'accident du travail survenu le 29 avril 2016, du 30 avril au 18 septembre 2016. Les arrêts de travail ont été maintenus sans interruption, pour l'épaule droite douloureuse, jusqu'au 20 juin 2016 et pour l'épicondylite du coude droit, jusqu'au 3 novembre 2016 inclus ; les soins sans arrêt de travail se sont ensuite succédé jusqu'à la consolidation fixée au 28 février 2018.
C'est donc à la date du 18 septembre 2016 qu'il convient normalement de se placer pour fixer le point de départ du délai de prescription.
La victime soutient qu'elle a perçu des indemnités journalières jusqu'au 21 mars 2018, mais le document qu'elle produit au soutien de ses dires fait état d'un accident du travail du 20 juillet 2016 (il s'agit en réalité, comme le relève la société, de la maladie professionnelle déclarée le 16 août 2016 et médicalement constatée par un certificat médical initial du 20 juillet 2016), et non de l'accident du travail du 29 avril 2016.
La saisine de la caisse aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur n'étant intervenue que le 25 février 2019, soit à l'expiration du délai de prescription biennal édicté par le texte susvisé, c'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu que cette demande était prescrite. La même solution doit être retenue quand bien même on retiendrait, comme point de départ de ce délai, la date plus favorable du 2 ou 3 novembre 2016 proposée par la caisse et la société.
Selon les articles
L. 431-2 et
L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, les droits de la victime ou de ses ayants droit au bénéfice des prestations et indemnités prévues par la législation professionnelle se prescrivent par deux ans à compter soit de la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle, soit de la cessation du travail en raison de la maladie constatée, soit de la cessation du paiement des indemnités journalières, soit encore de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.
En l'espèce, le canal carpien droit déclaré par la victime le 16 août 2016 a été pris en charge par l'organisme le 13 octobre 2016. Celle-ci a perçu des indemnités journalières à ce titre jusqu'au 21 mars 2018 (au-delà de la date de consolidation), ainsi qu'il ressort de l'attestation de paiement de ces indemnités versées aux débats par l'intéressée.
Aux termes de la lettre de saisine de la caisse aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, datée du 25 février 2019, cette démarche concerne exclusivement l'accident du travail, et non la maladie professionnelle du 20 juillet 2016. Il est en effet précisé en préambule de ce courrier, rédigé par le conseil de l'intéressée, que celle-ci « a été victime d'un accident du travail le 29 avril 2016 » et en conclusion, que la reconnaissance de la faute inexcusable est sollicitée « en raison des conséquences graves de cet accident. » Il n'est nullement indiqué que la demande porte sur la maladie professionnelle déclarée le 16 août 2016.
Les premiers juges constatent que la requête les saisissant, si elle vise la maladie professionnelle, se réfère expressément à la demande de tentative de conciliation adressée à la caisse et ne mentionne dans son dispositif que la reconnaissance de la faute inexcusable de la société au titre de l'accident du travail. Ils relèvent encore que la demande en reconnaissance de la faute inexcusable au titre de la maladie n'a été formulée pour la première fois devant eux que lors de l'audience du 3 avril 2020. La victime ne produit aucun élément à hauteur d'appel de nature à remettre en cause ces constatations.
La demande aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur au titre de la maladie professionnelle n'ayant été présentée que le 3 avril 2020, et ce, alors que les indemnités journalières afférentes à cette pathologie avaient cessé d'être versées le 21 mars 2018, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que cette demande était prescrite.
Le jugement sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
La victime sera condamnée aux dépens exposés en appel.
L'équité commande de rejeter toutes les demandes formées en application de l'article
700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe :
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne Mme [S] [I] aux dépens exposés en appel ;
En application de l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article
450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Sylvia LE FISCHER, Présidente, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.
Le GREFFIER, La PRESIDENTE,