Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 24 juin 2014, 13-15.565

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2014-06-24
Cour d'appel de Paris
2012-10-26

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que la société Association autonome de camionnage Globe express (la société AAC Globe express) est titulaire de la marque semi-figurative française "Globe express", déposée en couleurs à l'Institut national de la propriété industrielle le 22 décembre 1995, enregistrée le 7 juin 1996 sous le numéro 95 602 736 et renouvelée le 10 avril 2006, pour désigner les "services de transport" en classe 39 ; que la société Globe express logistics a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 19 juin 2008 et a pour activité l' "organisation et la gestion de tous types de transports" ; qu'après avoir vainement mis en demeure la société Globe express logistics de modifier sa dénomination sociale, la société AAC Globe express l'a, par acte d'huissier du 10 décembre 2008, fait assigner en contrefaçon par imitation de la marque susvisée ; que la société de droit américain Globe express services LTD, titulaire du nom de domaine "globeexpress.com" enregistré le 5 décembre 1997, est intervenue volontairement à la procédure ; qu'à la suite de la fusion opérée entre les sociétés Globe express services et Overseas group Ltd, la société Globe express logistics a pris la dénomination GES Logistics (Globe express services - Overseas group SAS) ;

Sur le moyen

unique, pris en sa première branche :

Vu

l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que pour rejeter

la demande en contrefaçon de marque, l'arrêt relève qu'un consommateur averti ne peut confondre l'activité de la société Globe express logistics avec celle de la société AAC Globe express ;

Attendu qu'en se déterminant par

de tels motifs, sans caractériser en quoi, au vu de leur nature, les services de transport désignés à l'enregistrement de la marque s'adresseraient à un public dont le niveau d'attention serait supérieur à celui qui caractérise le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé de la catégorie de services concernée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Sur le moyen

, pris en sa deuxième branche :

Vu

l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande en contrefaçon, l'arrêt retient

que la preuve de l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public n'est pas rapportée par la société AAC Globe express ;

Attendu qu¿en statuant ainsi

, alors que, dans ses conclusions, la société AAC Globe express invoquait notamment trois courriers et soutenait qu'il était donc avéré que la confusion n'était pas un simple risque mais existait, la cour d'appel, qui n'a pas examiné ces éléments de preuve régulièrement produits devant elle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le moyen

, pris en sa troisième branche :

Vu

l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande en contrefaçon de marque, l'arrêt retient

que la société AAC Globe express ne rapporte pas la preuve que l'usage de la dénomination sociale ou d'une partie de celle-ci par la société Globe express services LTD désigne directement des produits ou des services identiques aux siens ou puisse indirectement porter atteinte aux services spécifiques couverts par la marque "Globe express" ;

Attendu qu'en statuant ainsi

alors que dans leurs conclusions, les sociétés GES Logistics (Globe express services - Overseas group) et Globe express services reconnaissaient que le groupe Globe express services était un groupe de transport international jouissant d'une notoriété mondiale dans l'activité de la commission de transport et de la logistique et que la société GES Logistics (Globe express services - Overseas group) avait vocation à intervenir dans des opérations de transport international, activités identiques à celle exercée par la société AAC Globe express, comme celle-ci le soutenait, proposant des services de transport identiques aux services de transport désignés à l'enregistrement de la marque, la cour d'appel a dénaturé, par omission, les conclusions des parties et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS

et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société Globe express services logistics, venant aux droits de la société GES Logistics (Globe express services - Overseas group), et la société Globe express services LTD aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société AAC Globe express la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Association autonome de camionnage Globe express Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a dit qu'en utilisant les dénominations sociales Globe Express Logistics et Globe Express Services, la société Globe Express Logistics a commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque française Globe Express n°95602736 déposée le 22 décembre 1995 au préjudice de la société AAC Globe Express ; AUX MOTIFS QUE la société AAC Globe Express invoque les dispositions des articles L 716-1, L 713-3, L 713-6 du code de la propriété intellectuelle et l'enregistrement de sa marque semi figurative à l'Institut National de la Propriété Industrielle le 22 décembre 1995, régulièrement renouvelée, pour l'activité de transports ; Qu'elle considère qu'il existe un risque de confusion généré par l'usage fait par les sociétés appelantes des mots "Globe" et "Express" avec les mêmes termes encadrant, dans le signe déposé par elle, le dessin d'un planisphère à l'intérieur duquel sont représentés, de gauche à droite un bateau, un camion et un train, le tout surmonté par un avion et l'acronyme AAC ; Que, selon l'article L 713-3 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public, l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ; Mais qu'une dénomination sociale, un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine n'a pas, en soi, pour finalité de distinguer des produits ou des services mais d'identifier une société ou un fonds de commerce ; Qu'il incombe, dès lors, à celui qui agit en contrefaçon de rapporter la preuve qu'un tel signe, utilisé à titre de marque dans les relations avec la clientèle, désigne directement ou indirectement des produits ou des services identiques aux siens et que cet usage peut porter atteinte à sa marque ; Qu'en l'espèce, hormis les documents administratifs et comptables qui sont muets sur ce point, la société AAC Globe Express verse aux débats trois documents: - un extrait du site Les Pages Jaunes faisant apparaître, en réponse à la requête "Globe express" et "Roissy-en-France" deux noms, celui de la société Globe Express Logistics sans mention d'activités associées et celui de Transports Globe Express avec les activités associées de transport, coursier, logistique de transport. - une photocopie relative à Globe Express Logistics provenant du site Google Maps ; Que ce document fait apparaître la catégorie "commissionnaires en ... " sans autre précision ; - une photocopie de la page d'accueil de Globe Express Services Ltd qui énonce dans un français approximatif: « Au Globe Express Services Ltd (GES) notre mission est de fournir la logistique sur mesure des solutions intégrant le meilleur service à la clientèle et la dernière technologie d'un environnement professionnel enrichissant. Comme une entreprise privée, mi-marché de la logistique nous offrons un mélange unique de l'échelle de la planète, la technologie et les capacités nécessaires pour gérer votre chaîne d'approvisionnement. Au Globe Express Services Ltd (GES), nous ne sommes pas seulement répondre aux attentes. Nous offrons des solutions » ; Que ce portail porte les titres « Solutions, Global network, Technology, News & Media et Ressource Center » ; Qu'aucune de ces pièces ne caractérise un usage direct fait par la société Globe Express Logistics SAS de sa raison sociale ou d'une partie de celle-ci pour désigner les mêmes produits ou services que le société AAC Globe Express ; Qu'en effet, le mot "transport", caractéristique de l'activité de la société AAC Globe Express n'est jamais mentionné et l'activité de commissionnaire mentionnée dans le site Google Maps consiste à agir pour autrui en matière commerciale, dans les secteurs les plus divers ; Que, cependant, la logistique qui apparaît sur la page d'accueil de la société Globe Express Services Ltd, est un terme qui se réfère à l'activité de transport, dans la mesure où elle se combine avec le ravitaillement et le logement ; Que, preuve n'est donc pas rapportée, en l'espèce, par la seule présence du mot logistique sur la page d'accueil susmentionnée qu'un consommateur averti puisse confondre l'activité de la société Globe Express Logistics avec celle de la société AAC Globe Express; Que, dès lors, et plus généralement, preuve n'est pas rapportée par la société AAC Globe Express que l'usage de la dénomination sociale ou d'une partie de celle-ci par la société Globe Express Services Ltd désigne directement des produits ou des services identiques aux siens ou puisse indirectement porter atteinte aux services spécifiques couverts par la marque semi-figurative déposée Globe Express ; Qu'enfin, faute d'élément versé aux débats, preuve n'est également pas rapportée d'un usage du site www.globeexpress.com pour désigner directement ou indirectement les mêmes produits ou services exploités par la société AAC Globe Express ; Qu'un risque de confusion auprès du public n'est donc pas établi; Qu'il en résulte que la demande des sociétés appelantes tendant au débouté la société AAC Globe Express de sa demande de condamnation de la société Globe Express Services Group Overseas Group à rendre inaccessible en France le site www.globeexpress.com tantqu'elle n'aura pas elle-même apporté la preuve qu'elle a rendu son site www.aacglobeexpress.com inaccessible sur l'ensemble des territoires allemand, autrichien, bulgare, cambodgien, canadien, chinois, chypriote, danois, espagnol, estonien, des Etats-Unis, finlandais, grec, hongrois, indien, irlandais, italien, letton, libanais, lituanien, luxembourgeois, malais, maltais, néerlandais, polonais, portugais, tchèque, roumain, anglais, slovaque, slovène, suédois, taïwanais, vietnamien doit être rejetée; Que, d'autre part, c'est par des motifs pertinents que la cour adopté que les premiers juges ont déclaré irrecevable la demande des sociétés Globe Express Logistics et Globe Express Services Ltd, tendant à dire que la dénomination sociale Globe Express Services Ltd Logistics (Globe Express Services ¿ Overseas Group) SAS ne porte aucune atteinte au droit de la société AAC Globe Express; Que la décision querellée sera donc confirmée sur ce point et infirmée pour le surplus et la société AAC Globe Express déboutée de ses demandes au titre de la contrefaçon, d'interdiction de l'usage par les sociétés intimées de leur dénomination sociale, d'enseigne et de nom de domaine sur le territoire français, d'interdiction d'accès du nom de domaine www.globeexpress.com à partir du territoire français, de rappel à la société Globe Express Services Ltd Overseas Group qu'elle ne pouvait utiliser ni autoriser l'usage du nom commercial Globe Express Services sur le territoire français, de demande de réparation de ses préjudices et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile; 1) ALORS QUE la contrefaçon par imitation dépend d'un risque de confusion, dans l'esprit d'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif, entre des produits ou services désignés sous une marque régulièrement enregistrée et des produits ou services identiques ou similaires revêtus de la même marque imitée à l'insu des ayants-droit ; qu'en se bornant à affirmer qu'un « consommateur averti » ne peut confondre l'activité de la société AAC Globe Express avec celle de la société Globe Express Logistics, la Cour d'appel, qui a abusivement restreint le champ de la protection ouverte par le droit de marque en cause, a violé l'article L. 713-3 du Code de la propriété intellectuelle ; 2) ALORS QUE les juges du fond ont l'obligation de se prononcer sur l'ensemble des pièces versées aux débats ; qu'en l'espèce, pour établir que la réalité du risque de confusion entre les prestations fournies par elle et celles proposées par sa concurrente, la société AAC Globe Express produisait notamment une télécopie de la société Trans DJR Brousse qui la relançait au sujet d'une facture de transport dont le paiement incombait -en réalité- à la société Globe Express Logistics (Conclusions AAC Globe Express n°3, p. 23. ¿ Pièces n°38 et 39) ; Que la société AAC Globe Express produisait également le courrier d'un autre client qui contestait devant elle une prestation de transport en croyant répondre à la société Globe Express Services (Pièce n°45) ; qu'en ignorant les courriers régulièrement produits par la société AAC Globe Express à l'appui de ses conclusions d'où il résultait que, dans l'esprit de consommateurs moyens, une confusion existait entre les prestations fournies sous la marque de la société AAC Globe Express et les prestations offertes par la société Globe Express Logistics sous une marque imitée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 3) ALORS QUE le juge dénature les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les sociétés Globe Express Logistics et Globe Express Services Ltd reconnaissaient formellement « intervenir dans des opérations de transport international » (Conclusions d'appel, p.2 et 11), à l'instar de la société AAC Globe Express (Conclusions récapitulatives n°3, p. 21) ; qu'en jugeant dès lors que « preuve n'est pas rapportée par la société AAC Globe Express que l'usage de la dénomination sociale ou d'une partie de celle-ci par la société Globe Express Services Ltd désigne directement des produits ou des services identiques aux siens ou puisse indirectement porter atteinte aux services spécifiques couverts par la marque semi-figurative déposée Globe Express » (Arrêt, p. 7), la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 4) ALORS QUE les juges du fond ont l'obligation de se prononcer sur l'ensemble des pièces versées aux débats ; qu'en l'espèce, pour établir que la société Globe Express Logistics proposait des services identiques ou similaires aux siens, la société AAC Globe Express produisait des extraits K bis des deux sociétés établissant que les deux sociétés avaient une activité de transport au sens large (Conclusions AAC Globe Express n°3, p. 20 et 21 - Pièces n°4 et 8) ; qu'en affirmant que la preuve n'est pas rapportée par la société AAC Globe Express que la société Globe Express Services propose des produits ou des services identiques aux siens sans s'expliquer sur les extraits K bis régulièrement versés aux débats par celle-ci à l'appui de ses conclusions, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.