03/06/2010 OPP 09-4039 / MS
DECISION
STATUANT SUR UNE OPPOSITION
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LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE ;
Vu le
Code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L. 411-4, L. 411-5, L. 712-3 à L. 712-5, L. 712-7, L. 713-2, L. 713-3, R. 411-17, R. 712-13 à R. 712-18, R. 712-21, R. 712-26 et R. 718-2 à R. 718-4 ;
Vu l'arrêté du 31 janvier 1992 relatif aux marques de fabrique, de commerce ou de service ;
Vu l'arrêté du 24 avril 2008 modifié relatif aux redevances de procédures perçues par l'Institut national de la propriété industrielle.
I.- FAITS ET PROCEDURE
La société EARL PERISSE PERE ET FILS (société d’exploitation agricole à responsabilité limitée) a déposé, le 16 septembre 2009, la demande d'enregistrement n° 09 3 676 528 portant sur le signe complexe DOMAINE DE MALARTIC.
Ce signe est destiné à distinguer les produits suivants : « Vins d’indication géographique protégée « Vin de Pays des Côtes de Gascogne » issus de l’exploitation exactement dénommée « Domaine de Malartic » ».
Le 23 novembre 2009, la SOCIETE CIVILE DU CHÂTEAU MALARTIC-LAGRAVIERE (société civile) a formé opposition à l'enregistrement de cette marque.
La marque antérieure invoquée dans cet acte est la marque verbale LE SILLAGE DE MALARTIC, renouvelée par déclaration en date du 14 avril 2003 sous le numéro 93 468 332.
Ce renouvellement a été effectué pour les produits suivants : « Vins ».
L'opposition a été notifiée à la société déposante le 3 décembre 2009. Cette dernière a présenté des observations en réponse à l’opposition.
Le 22 avril 2010, l’Institut a adressé aux parties un projet de décision. La société déposante a contesté le bien-fondé de ce projet. La société opposante a répondu à ces dernières observations.
II.- ARGUMENTS DES PARTIES
A.- L’OPPOSANTE
La société SOCIETE CIVILE DU CHÂTEAU MALARTIC-LAGRAVIERE fait valoir, à l'appui de leur opposition, les arguments exposés ci-après.
Sur la comparaison des produits
Les produits de la demande d'enregistrement sont identiques et similaires à ceux de la marque antérieure.
Sur la comparaison des signes
Le signe contesté constitue l'imitation de la marque antérieure.
Dans ses observations faisant suite au projet de décision, la société opposante répond à l’argumentation de la société déposante.
B.- LE TITULAIRE DE LA DEMANDE D'ENREGISTREMENT
Dans ses observations en réponse à l'opposition, la société EARL PERISSE PERE ET FILS conteste la comparaison des produits, ainsi que celle des signes.
Dans ses observations faisant suite au projet de décision, la société déposante invoque à nouveau un jugement définitif du TGI de Auch du 15 juillet 2009, présente des arguments complémentaires quant à la comparaison des produits et des signes, fournit une liste de marques et cite de nouvelles décisions de justice.
III.- DECISION
Sur la comparaison des produits
CONSIDERANT que l’opposition porte sur les produits suivants : « Vins d’indication géographique protégée « Vin de Pays des Côtes de Gascogne » issus de l’exploitation exactement dénommée « Domaine de Malartic » » ;
Que la marque antérieure a été renouvelée pour les produits suivants : « Vins ».
CONSIDERANT que les produits précités de la demande d'enregistrement relèvent de la catégorie générale des produits invoqués de la marque antérieure ;
Qu’à cet égard, la société déposante ne saurait être suivie lorsqu’elle affirme que les produits précités de la demande d'enregistrement et de la marque antérieure ne seraient pas de même nature ;
Qu’en effet, contrairement à ce qu’elle soutient, aucune limitation dans le libellé de la marque antérieure ne permet d’en exclure expressément les vins d’indication géographique protégée ou issus d’une exploitation exactement dénommée, de sorte que ce libellé « Vins » inclut largement tous types de vins, quelle qu’en soit l’origine ;
Qu’il s’agit donc de produits identiques ;
Qu’est également inopérant l’argument de la société déposante relatif à la distance existant entre les lieux d’exploitation des produits désignés par les marques en cause ;
Qu’en effet, outre que le droit des marques a vocation à s’appliquer sur tout le territoire national, le bien-fondé d'une opposition doit uniquement s'apprécier en fonction des produits tels que formulés dans les actes de dépôt, indépendamment des conditions effectives d'exploitation des marques en présence, extérieures à la présente procédure.
Qu'il en va de même de son argument tenant au caractère déceptif de la marque antérieure, qui ne peut être pris en compte dans le cadre de la présente procédure, l’appréciation de la validité d’une marque enregistrée relevant de la seule compétence des tribunaux judiciaires.
Sur la comparaison des signes
CONSIDERANT que la demande d'enregistrement contestée porte sur le signe complexe DOMAINE DE MALARTIC, ci-dessous reproduit :
Que la marque antérieure porte sur le signe verbal LE SILLAGE DE MALARTIC.
CONSIDERANT que la société opposante invoque l’imitation de la marque antérieure par le signe contesté.
CONSIDERANT que l’imitation nécessite la démonstration d’un risque de confusion entre les signes, lequel doit être apprécié globalement à partir de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants.
CONSIDERANT qu’il résulte d’une comparaison globale et objective des signes que ceux-ci ont en commun le terme MALARTIC ; qu’ils diffèrent par la présence, dans le signe contesté, d’autres éléments verbaux ainsi que d’éléments figuratifs et, dans la marque antérieure, des éléments verbaux LE SILLAGE DE ;
Que toutefois, la prise en compte des éléments distinctifs et dominants de ces signes conduit à tempérer les différences relevées ci-dessus ;
Qu’en effet, le terme distinctif MALARTIC est l’élément dominant de la marque antérieure, dès lors qu’il y apparaît comme un nom propre désignant une personne ou un lieu, et que les termes LE SILLAGE DE qui le précèdent l’introduisent simplement en faisant porter l’attention sur lui ;
Qu’à cet égard, la société déposante, en vue de démontrer le caractère commun du terme MALARTIC, indique qu’il existerait 18 marques incorporant le terme MALARTIC en classe 33 ;
Que toutefois, elle fournit une brève liste de 10 marques, dont huit appartiennent à la société opposante et une est la demande d'enregistrement contestée en l’espèce, en sorte qu’il ne saurait aucunement en être déduit un caractère banal ou commun du terme MALARTIC ;
Qu’en outre, si le terme SILLAGE est distinctif, placé en attaque et connu comme signifiant « trace » ou « empreinte », il n’en reste pas moins qu’il n’est pas apte à retenir à lui seul l’attention du consommateur qui s’attachera davantage au terme MALARTIC en raison justement de son caractère peu commun ;
Qu’ainsi, le terme MALARTIC du signe contesté, loin d’apparaître comme un simple qualificatif du terme SILLAGE, est prépondérant au sein de la marque antérieure ;
Que le terme MALARTIC bénéficie d’une présentation dominante dans le signe contesté, dont il constitue le terme central, présenté en très grands caractères, les autres éléments verbaux, au demeurant dépourvus de caractère distinctif au regard des produits en cause, étant inscrits en caractères de nettement plus petite taille, revêtent ainsi un caractère accessoire ;
Qu’à cet égard, les mentions figurant sur l’étiquette et indiquant la localisation de la zone de production et de la commune d’origine ne sont pas de nature à écarter tout risque de confusion entre les signes en présence, dans la mesure où elles figurent en très petits caractères et qu’en tout état de cause, rien dans la marque antérieure n’exclut explicitement cette même localisation ;
Que l’élément figuratif ne permet pas de modifier cette impression, dès lors qu’il n’altère pas les caractères immédiatement perceptible et dominant du terme MALARTIC ;
Qu’à cet égard, si l’appréciation globale du risque de confusion inclut la présence de cet élément figuratif, elle n’exonère toutefois pas de l’examen des similitudes phonétiques et intellectuelles, et de la prise en compte des éléments distinctifs et dominants ;
Qu’enfin, intellectuellement, est extérieur à la présente procédure l’argument de la société déposante selon lequel la marque antérieure, « …toujours symbolisée par un bateau… », serait « …centrée sur la thématique maritime… » ;
Qu'en effet, le bien-fondé d'une opposition s'apprécie uniquement en fonction des signes déposés, indépendamment des conditions effectives d'exploitation des marques en présence ;
Qu'ainsi, en l’espèce, rien ne permet d’affirmer que les signes en présence possèderaient des évocations suffisamment distinctes pour écarter tout risque de confusion entre eux, dès lors qu’ils sont tous deux dominés par le terme MALARTIC.CONSIDERANT que le signe complexe contesté DOMAINE DE MALARTIC constitue donc l'imitation de la marque antérieure verbale LE SILLAGE DE MALARTIC, le public étant fondé à leur attribuer la même affiliation.
CONSIDERANT qu’est extérieur à la présente procédure l’argument de la société déposante selon lequel, depuis 2000, date de sa constitution, « …l’utilisation du vocable DOMAINE DE MALARTIC n’a suscité aucune confusion avec les marques de la (société) opposante… ».
Qu’en effet, le bien-fondé d'une opposition doit uniquement s'apprécier eu égard aux signes tels que déposés, toute autre considération relevant du pouvoir d'appréciation souverain des tribunaux.
CONSIDERANT que ne saurait davantage être retenu l'argument de la société déposante relatif au jugement du Tribunal de Grande Instance d’Auch du 15 juillet 2009, dès lors qu’il a été rendu pour des motifs différents, tenant à l’exploitation des marques ;
Qu’à cet égard, le litige portait effectivement sur l’interdiction ou non d’utiliser la dénomination DOMAINE DE MALARTIC, et non pas sur la demande d'enregistrement de marque faisant l’objet de la présente opposition.
CONSIDERANT enfin que sont sans incidence les autres décisions de justice citées par la société déposante, dès lors qu’elles sont rendues dans des circonstances différentes, non transposables au présent cas d’espèce.
CONSIDERANT par conséquent, qu'en raison de l'identité des produits en cause, et de l'imitation de la marque antérieure par le signe contesté, il existe globalement un risque de confusion sur l’origine de ces marques pour le consommateur concerné ;
Qu’ainsi, le signe complexe contesté DOMAINE DE MALARTIC ne peut pas être adopté comme marque pour désigner des produits identiques, sans porter atteinte aux droits antérieurs de la société opposante sur la marque verbale LE SILLAGE DE MALARTIC.
PAR CES MOTIFS
DECIDE
Article 1er : L'opposition n° 09-4039 est justifiée.
Article 2 : La demande d'enregistrement n° 09 3 676 528 es t rejetée.
Murielle SITBON, JuristePour le Directeur général del'Institut national de la propriété industrielle
Christine B Chef de Groupe