Vu la procédure suivante
:
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 mars 2023 et le 3 octobre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. A représenté par Me Barthélemy, demande au tribunal :
1°) d'annuler, à titre principal, l'arrêté du 1er février 2023 par lequel le préfet de police, a pris une mesure d'interdiction de pénétrer ou de se rendre aux abords d'une enceinte où se déroulent des manifestations sportives de différentes équipes de football et d'handball du Paris Saint-Germain, ou lors de retransmissions de celles-ci en public pour une durée de six mois,
2°) d'annuler, à titre subsidiaire, le seul article 2 de l'arrêté du 1er février 2023 par lequel il est tenu de répondre à la convocation que le préfet de l'Essonne lui fixera au moment des manifestations sportives relevant de l'article 1er de l'arrêté se déroulant sur le territoire national ou sur le territoire d'un Etat étranger ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet de police a commis une voie de fait ;
- l'arrêté a méconnu les dispositions de l'article
L. 332-16 du code du sport en ce que le préfet de police s'est fondé d'une part sur des faits matériellement inexacts et qui ne lui sont pas imputables personnellement et d'autre part, sur un acte isolé à l'occasion d'une seule manifestation sportive et non sur un comportement d'ensemble ;
- la mesure est disproportionnée au regard de sa durée et de l'obligation de pointage qui implique qu'il se rende au commissariat 4 ou 5 soirs par semaine et quasiment la totalité de la journée lors des week-ends.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés et sollicite une substitution de motifs.
Par ordonnance du 18 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 3 octobre 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du sport ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Deharo,
- les conclusions de Mme Benoit, rapporteure publique,
Considérant ce qui suit
:
1. Par un arrêté n° LD 2022-1608 du 1er février 2023, le préfet de police de Paris a interdit, à M. B A de pénétrer et de se rendre aux abords des enceintes où se déroulent les manifestations sportives des différentes sections du Paris Saint Germain, équipe masculine, féminine, U19 et handball, ou lors des retransmissions en public de celles-ci, pour une durée de six mois. Par l'article 2 de ce même arrêté, le préfet de police a ordonné à l'intéressé de répondre aux convocations du préfet de l'Essonne lors des manifestations des différentes sections du Paris Saint-Germain, sur le territoire national ou sur celui d'un État étranger. M. A demande l'annulation, à titre principal, de cet arrêté d'interdiction de stade ou, à titre subsidiaire, de son seul article 2 relatif à l'obligation de répondre aux convocations.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. D'une part, aux termes de l'article
L. 332-16 du code du sport : " Lorsque, par son comportement d'ensemble à l'occasion de manifestations sportives, par la commission d'un acte grave à l'occasion de l'une de ces manifestations, du fait de son appartenance à une association ou un groupement de fait ayant fait l'objet d'une dissolution en application de l'article L. 332-18 ou du fait de sa participation aux activités qu'une association ayant fait l'objet d'une suspension d'activité s'est vue interdire en application du même article, une personne constitue une menace pour l'ordre public, le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, prononcer à son encontre une mesure d'interdiction de pénétrer ou de se rendre aux abords des enceintes où de telles manifestations se déroulent ou sont retransmises en public. / L'arrêté, valable sur le territoire national, fixe le type de manifestations sportives concernées. Il ne peut excéder une durée de douze mois. ()Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent également imposer, par le même arrêté, à la personne faisant l'objet de cette mesure l'obligation de répondre, au moment des manifestations sportives objet de l'interdiction, aux convocations de toute autorité ou de toute personne qualifiée qu'il désigne. Le même arrêté peut aussi prévoir que l'obligation de répondre à ces convocations s'applique au moment de certaines manifestations sportives, qu'il désigne, se déroulant sur le territoire d'un Etat étranger. Cette obligation doit être proportionnée au regard du comportement de la personne. ".
3. Il ressort de l'arrêté du 1er février 2023 que l'interdiction de stade dont a fait l'objet M. A est fondée sur le fait que " par son comportement d'ensemble il constitue une menace pour l'ordre public et la sécurité des personnes et des biens à l'occasion des rencontres de football du Paris-saint-Germain ". Cette appréciation repose sur le constat que le 6 août 2022, à l'occasion de la rencontre de Ligue 1 de championnat de France de football entre les équipes du FC Clermont Foot 63 et le Paris-Saint-Germain, M. A, supporter du Paris-Saint-Germain et vice-président du " Collectif Ultras Paris " (CUP) a été interpellé pour avoir participé à l'agression d'au moins un agent de sécurité. Toutefois, aucun fait commis à l'occasion d'une autre manifestation sportive n'est reproché à M. A. Dès lors, en se fondant sur les faits commis à l'occasion de la seule rencontre de football du 6 août 2022 pour prononcer une interdiction de stade à l'encontre de M. A en raison de son comportement d'ensemble, le préfet de police a entaché sa décision d'une erreur de droit.
4. D'autre part, en faisant valoir que l'arrêté a été édicté en raison de la commission d'un acte grave à l'occasion d'une manifestation sportive et de son comportement d'ensemble, le préfet de police doit être regardé comme ayant entendu présenter une demande de substitution de motifs. Toutefois, le préfet de police, qui n'apporte aucun élément de nature à établir la matérialité des faits constitutifs d'un comportement d'ensemble, ne justifie pas que la décision d'interdiction administrative de stade aurait pu légalement reposer sur ce motif. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le préfet de police aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur le seul motif tiré de l'acte grave commis à l'occasion d'une manifestation sportive. Par suite, la demande de substitution de motifs doit être écartée.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 1er février 2023.
Sur les frais liés au litige :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A présentées sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : L'arrêté du préfet de police du 1er février 2023 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de M. A présentées sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié M. B A et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police et au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 20 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Rollet-Perraud, présidente,
Mme Milon, première conseillère,
M. Deharo, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 décembre 2023.
Le rapporteur,
signé
G. Deharo
La présidente,
signé
C. Rollet-PerraudLa greffière,
signé
K. Dupré
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent jugement.
N°2301967