Cour de cassation, Première chambre civile, 13 septembre 2017, 16-18.178

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2017-09-13
Cour d'appel de Paris
2016-05-10
Tribunal de commerce de Paris
2015-09-25

Texte intégral

CIV. 1 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 13 septembre 2017 Rejet Mme BATUT, président Arrêt n° 957 F-D Pourvoi n° Q 16-18.178 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

Statuant sur le pourvoi formé par

la société Banque Delubac et Cie, société en commandite simple, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 10 mai 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 1), dans le litige l'opposant à la société Saatbau Linz Egen., dont le siège est [...] ), défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 27 juin 2017, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Y..., conseiller rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Y..., conseiller, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Banque Delubac et Cie, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Saatbau Linz X..., l'avis de M. Bernard de La Gatinais, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen

unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 mai 2016), que les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi ont, en application de contrats d'affacturage conclus avec la société Banque Delubac et Cie (la banque), cédé à celle-ci des factures dues par la société Saatbau Linz Egen (la société) en vertu de deux contrats de vente qui contenaient chacun une clause compromissoire ; qu'après l'établissement de quittances subrogatives concernant les factures, la banque en a demandé le paiement, puis a assigné la société devant un tribunal de commerce en paiement de dommages-intérêts pour comportement déloyal ; que celle-ci a soulevé l'incompétence de la juridiction étatique en invoquant les clauses d'arbitrage ;

Attendu que la banque fait grief à

l'arrêt de renvoyer les parties à l'arbitrage, alors, selon le moyen : 1°/ qu'en considérant que le fait que la banque ait engagé une action à caractère délictuel ne suffirait pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, sans répondre au moyen péremptoire tiré de ce que l'action engagée par la banque en qualité de factor à l'encontre de la société, débiteur cédé, était fondée, non sur les contrats de vente conclus par la société avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi ou leur exécution, mais sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'encontre du factor, en l'absence de lien entre la convention d'affacturage et les contrats de vente, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ qu'une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle exercée dans le cadre d'une convention d'affacturage et fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, non sur le contrat la stipulant ou son exécution, en l'absence de lien entre ce contrat et la convention d'affacturage ; en considérant que le fait que la banque ait engagé une action à caractère délictuel ne suffirait pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, quand il résulte de ses propres constatations que l'action introduite par la banque était fondée, non sur les contrats de vente conclus par la société avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi stipulant la clause d'arbitrage ou sur leur exécution, mais sur le comportement déloyal de la société, débiteur cédé, à l'encontre de la banque, factor, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1448 du code de procédure civile ; 3°/ qu'une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle exercée dans le cadre d'une convention d'affacturage et fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, non sur le contrat la stipulant ou son exécution, en l'absence de lien entre ce contrat et la convention d'affacturage ; qu'en considérant que le fait que la banque ait engagé une action à caractère délictuel ne suffirait pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, sans caractériser de lien entre les contrats de vente conclus par la société et les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi, stipulant la clause d'arbitrage, et la convention d'affacturage conclue par la banque et les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1448 du code de procédure civile ;

Mais attendu

qu'après avoir constaté que les factures litigieuses étaient postérieures d'à peine quelques semaines aux contrats contenant la convention d'arbitrage et relevé qu'elles en étaient la mise en oeuvre, la cour d'appel, en retenant que la demande de la banque était en lien avec ces factures et que la nature délictuelle de l'action intentée n'était pas susceptible de rendre les clauses manifestement inapplicables, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Banque Delubac et Cie aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Saatbau Linz Egen. la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Banque Delubac et Cie Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le tribunal de commerce de Paris n'était pas compétent ; AUX MOTIFS QU' : aux termes de l'alinéa 1, de l'article 1448 du code de procédure civile, applicable en matière d'arbitrage international en vertu de l'article 1506, 1° du même code : « Lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'Etat, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable » ; Saatbau a conclu avec Laboulet et Tiwy deux contrats de vente de graines de tournesol qui stipulaient une clause compromissoire dans les termes suivants : « Tribunal arbitral : Hambourg - chez l'association des commerçants de céréales de la bourse de Hambourg » ; les factures litigieuses postérieures de quelques semaines à ces contrats ne peuvent qu'en être la mise en oeuvre ; ni la circonstance que la clause compromissoire soit stipulée par référence, ni le fait que Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffisent à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable ; il convient, infirmant le jugement, de constater que le tribunal de commerce de Paris est incompétent et de renvoyer les parties à se mieux pourvoir ; 1°) ALORS QU'en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffirait pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, sans répondre au moyen péremptoire tiré de ce que l'action engagée par la société Banque Delubac en qualité de factor à l'encontre de la société Saatbau, débiteur cédé, était fondée, non sur les contrats de vente conclus par la société Saatbau avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi ou leur exécution, mais sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'encontre du factor, en l'absence de lien entre la convention d'affacturage et les contrats de vente, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle exercée dans le cadre d'une convention d'affacturage et fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, non sur le contrat la stipulant ou son exécution, en l'absence de lien entre ce contrat et la convention d'affacturage ; en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffirait pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, quand il résulte de ses propres constatations que l'action introduite par la société Banque Delubac était fondée, non sur les contrats de vente conclus par la société Saatbau avec les sociétés Etablissements Laboulet et Tiwi stipulant la clause d'arbitrage ou sur leur exécution, mais sur le comportement déloyal de la société Saatbau, débiteur cédé, à l'encontre de la société Banque Delubac, factor, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1448 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QU'une convention d'arbitrage est manifestement inapplicable à une action de nature délictuelle exercée dans le cadre d'une convention d'affacturage et fondée sur le comportement déloyal du débiteur cédé à l'endroit du factor, non sur le contrat la stipulant ou son exécution, en l'absence de lien entre ce contrat et la convention d'affacturage ; qu'en considérant que le fait que la société Banque Delubac ait engagé une action à caractère délictuel ne suffirait pas à faire regarder la convention d'arbitrage comme manifestement inapplicable, sans caractériser de lien entre les contrats de vente conclus par les société Saatbau, Etablissements Laboulet et Tiwi, stipulant la clause d'arbitrage, et la convention d'affacturage conclue par les sociétés Banque Delubac, Etablissements Laboulet et Tiwi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1448 du code de procédure civile.