Chronologie de l'affaire
Cour d'appel de Lyon 08 avril 2013
Cour de cassation 18 mars 2014

Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 mars 2014, 13-83280

Mots clés société · fils · échafaudages · personne morale · montage · amende · SAS · procès-verbal · requis · incapacité · blessures · entraîné · coupable · pouvoir · délégation

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 13-83280
Dispositif : Cassation partielle sans renvoi
Décision précédente : Cour d'appel de Lyon, 08 avril 2013
Président : M. Louvel (président)
Rapporteur : M. Pers
Avocat(s) : SCP Bénabent et Jéhannin
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2014:CR00814

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Lyon 08 avril 2013
Cour de cassation 18 mars 2014

Texte

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société X... Fils,

contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, chambre correctionnelle, en date du 8 avril 2013, qui, pour blessures involontaires, l'a condamnée à 3 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 février 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Pers, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Leprey ;

Sur le rapport de M. le conseiller PERS, les observations de la société civile professionnelle BÉNABENT et JÉHANNIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen

de cassation, pris de la violation des articles 111-4, 121-2 et R. 625-2 du code pénal, R. 4323-74 du code du travail, 3 de l'arrêté du 21 décembre 2004 relatif aux vérifications des échafaudages, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société X... coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas trois mois ;

" aux motifs qu'il est constant et non contesté par la personne morale prévenue que l'échafaudage, monté les 17 et 18 juin 2011 par une équipe de la SAS X... Fils, n'a été ni arrimé à la façade ni doté de jambes de force comme cela est requis par l'article R. 4323-74 du code du travail qui dispose que les échafaudages fixes sont construits et installés de manière à supporter les efforts auxquels ils sont soumis et à résister aux contraintes résultant des conditions atmosphériques, notamment des effets du vent, qu'ils sont ancrés ou amarrés à tout point présentant une résistance suffisante ou protégés contre le risque de glissement et de renversement par tout autre moyen d'efficacité équivalente et que la surface portante a une résistance suffisante pour s'opposer à tout affaissement d'appui, défaut de fixation qui caractérise la négligence montrée par la SAS X... Fils dans l'exécution du contrat de sous-traitance qui la liait à l'entreprise Chanel et admise par le dirigeant de la SAS X... Fils dans sa lettre du 30 juin 2011 à l'inspection du travail, évoquant l'urgence dans laquelle le montage de l'échafaudage avait été effectué avant de faire état, dans le cadre de son audition par les services de police du 28 septembre 2011, de l'omission, par son équipe de montage, de la pose des équipements de sécurité requis ; qu'il est également constant et non contesté par la personne morale prévenue que le procès-verbal de réception du montage de l'échafaudage en cause a été dressé par la SAS X... Fils-également en urgence comme mentionné dans la lettre précitée du 30 juin 2011- par le responsable de la SAS X... Fils en charge des réceptions des échafaudages après montage, comme l'a déclaré M. Jacques X... dans son audition à la police, avant d'être remis à l'entreprise Chanel comme l'a déclaré M. Y..., conducteur des travaux de cette dernière société ; que ledit examen de montage et d'installation, requis par l'article 3 de l'arrêté du 21 décembre 2004 relatif aux vérifications des échafaudages en vigueur à la date des faits, ayant pour objet de s'assurer que l'échafaudage est monté et installé de façon sûre, conformément à la notice d'instructions du fabricant ou, lorsque la configuration de montage ne correspond pas à un montage prévu par la notice, en tenant compte de la note de calcul et conformément au plan de montage établi par une personne compétente ; qu'enfin, il est constant et non contesté par la personne morale prévenue, qui n'argue pas de la force majeure, que ces négligences et non-respect des règles relatives au montage et vérification du montage des échafaudages ont directement provoqué la chute de M. Z..., qui travaillait au bardage de la façade, installé sur cet échafaudage qui s'est alors détaché du mur, chute du plaignant qui a entraîné, chez ce dernier, une fracture articulaire du pilon tibial gauche et une luxation de l'articulation tibio-péronière distale comme cela ressort du certificat médical dressé par le service de chirurgie orthopédique de l'hôpital privé de l'Est Lyonnais à Saint-Priest, en date du 22 juin 2011, avec fixation d'une incapacité de trois mois ; que ces faits ont notamment été rendus possibles par la faute de l'agent de la SAS X... Fils, qualifié, en procédure, par M. Jacques X... fils, de responsable investi, au sein de sa société, de la réception des échafaudages après montage, qui, en dressant le procès-verbal de réception transmis à l'entreprise Chanel, a, ainsi, entériné le non-respect des règles de l'art par l'équipe de montage de cette même société ; qu'il n'est pas contesté par la SAS X... Fils que cet agent de contrôle a agi ainsi pour le compte de cette dernière, en tant que représentant de cette société, pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires pour assumer sa mission et titulaire d'une délégation de pouvoir de la part des organes dirigeants de la SAS X... Fils et qui n'a pas accompli les diligences normales compte tenu de la nature de ses missions et de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait alors que la SAS X... Fils a pour objet social de louer et monter des échafaudages dans le secteur du bâtiment et de l'industrie ; que, dès lors, il résulte de la procédure et des débats que la SAS X... Fils a effectivement commis les faits qui lui sont reprochés, à savoir, d'avoir, à Vénissieux le 21 juin 2011, par négligence et manquement à une obligation de sécurité imposée par le règlement, à savoir l'article R. 4323-74 du code du travail et de l'arrêté du 21 décembre 2004 relatif aux vérifications des échafaudages, involontairement causé à M. Z...une incapacité totale de travail d'une durée de trois mois ;

" alors que seul le salarié effectivement titulaire d'une délégation de pouvoirs consentie par les organes de la personne morale qui l'emploie peut engager la responsabilité pénale de cette personne morale à raison des infractions qu'il commet pour le compte de celle-ci ; qu'en retenant, pour déclarer la société X... Fils coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas trois mois, que l'agent de cette société qui avait dressé le procès-verbal de réception de montage de l'échafaudage litigieux attestant de ce que celui-ci était monté et installé de façon sûre, ce qui n'était pas le cas, était titulaire d'une délégation de pouvoirs après avoir seulement constaté qu'il était chargé, au sein de la société X... Fils, de procéder à la réception des échafaudages après montage, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer de l'existence effective d'une délégation de pouvoirs au profit de cet agent et, partant, n'a pas justifié sa décision " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 21 juin 2011, M. Z...a été victime d'une chute consécutive à l'effondrement d'un échafaudage depuis lequel il effectuait des travaux de ravalement et dont le montage et la vérification avaient été effectués par la société X... Fils ; que cette dernière a été poursuivie devant le tribunal de police du chef de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité n'excédant pas trois mois ;

Attendu que, pour confirmer le jugement ayant déclaré la société X... Fils coupable de cette infraction, l'arrêt attaqué retient qu'il n'est pas contesté par la société X... Fils que l'agent de contrôle a agi pour le compte de celle-ci en tant que son représentant pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires pour assurer sa mission et titulaire d'une délégation de pouvoirs de la part des organes dirigeants, n'a pas accompli les diligences normales compte tenu de la nature de ses missions et de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait alors que la société a pour objet social de louer et monter des échafaudages dans le secteur du bâtiment ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a caractérisé l'existence d'une délégation de pouvoirs donnée à un représentant agissant pour le compte de la société, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Mais

sur le second moyen

de cassation, pris de la violation des articles 111-3, 131-13 et R. 625-2 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué, après avoir déclaré la société X... Fils coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas trois mois, l'a condamnée à une amende de 3 000 euros ;

" aux motifs que les faits reprochés à la SAS X... Fils sont d'une particulière gravité dans la mesure où ils démontrent que soit par oubli, soit en raison de l'urgence, alors que le chantier était ouvert depuis plusieurs mois, ladite société a monté un échafaudage en violation des règles de l'art mais aussi attesté, de manière infondée, la conformité d'un tel échafaudage auxdites règles ; qu'il convient en conséquence de confirmer également le jugement déféré en ce qu'il a prononcé, à l'encontre de la société prévenue, une amende d'un montant de 3 000 euros ;

" alors que le fait de causer involontairement à autrui des blessures entraînant une incapacité totale de travail d'une durée inférieure ou égale à trois mois est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe, dont le montant est de 1 500 euros au plus ; que, dès lors, en condamnant la société X... Fils à une amende de 3 000 euros après l'avoir déclarée coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas trois mois, la cour d'appel a prononcé une peine excédant le maximum prévu par la loi et méconnu ainsi les textes ci-dessus mentionnés " ;

Vu l'article 111-3 du code pénal ;

Attendu que, selon ce texte, nul ne peut être puni d'une peine non prévue par la loi ;

Attendu qu'après avoir déclaré la société X... Fils coupable de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas trois mois, l'arrêt attaqué la condamne à 3 000 euros d'amende ;

Mais attendu qu'en prononçant une amende dont le montant excède le maximum prévu par les articles R. 625-2 et 131-13 du code pénal, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;

Par ces motifs

:

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à la peine d'amende prononcée à l'encontre de la société X... Fils, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon en date du 8 avril 2013, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

LIMITE le montant de l'amende à laquelle la société X... et fils a été condamnée, en raison de la contravention dont elle a été déclarée coupable, à 1 500 euros ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit mars deux mille quatorze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;