AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen
, après avis donné aux parties :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt attaqué (Angers, 1er février 2002) qui fixe les indemnités leur revenant à la suite de l'expropriation au profit du département de la Mayenne, de parcelles, situées en bordure de la rivière du même nom, appartenant en nue-propriété à M. Gérard X... et dont Mme Y... épouse X... était usufruitière, de rejeter leurs demandes en indemnisation de la perte de leur droit de pêche, alors, selon le moyen :
1 / que le droit de pêche ne cesse d'appartenir à un riverain que si un décret intervient qui fixe les parties du cours d'eau dans lesquelles ce droit sera exercé au profit de l'Etat et si le riverain perçoit une indemnité préalable ; que la cour d'appel a violé l'article 3, paragraphe 3 de la loi du 15 avril 1829 et l'article
545 du Code civil ;
2 / que le rapport établi en 1986 par la Direction départementale de l'équipement de la Mayenne, confirmant le rapport de l'ingénieur de la Navigation relaté au procès-verbal de la Session du Conseil Général du 18 août 1913, admettait la réalité du droit de pêche des riverains sur la portion de terrain en cause ; que l'arrêté ministériel du 16 novembre 1987 et l'arrêté préfectoral du 16 décembre 1998 faisaient état du même droit ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces documents déterminants, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 3, paragraphe 3 de la loi du 15 avril 1829 ;
3 / que la cour d'appel ne pouvait sans se contredire, admettre le bien-fondé de la réparation du préjudice subi par M. et Mme X... en raison de la perte des emplacements loués sur le chemin exproprié et refuser l'indemnisation du droit de pêche que ces locations impliquaient nécessairement ; qu'elle a violé l'article
455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'article 3 du 15 avril 1829 a été abrogé par la loi n° 158-346 du 3 avril 1958 ; qu'après avoir rappelé que l'article L 235-1 du Code rural (
L 435-1 du Code de l'environnement) dispose que le droit de pêche appartient à l'Etat et est exercé à son profit dans le domaine public fluvial, sous réserve des cas dans lesquels ce droit appartient à un particulier en vertu d'un droit fondé sur titre, ce qui n'est pas le cas des consorts X..., et relevé que, selon l'article 128 de la loi du 8 avril 1910, l'incorporation au domaine public fluvial résulte soit de l'inscription à la nomenclature des cours d'eau navigables et flottables, soit de la réalisation de travaux déclarés d'utilité publique, l'arrêt retient exactement que la Mayenne, dans sa partie concernée, est entrée dans le domaine public fluvial par l'effet de la loi de 1910, à raison des travaux effectués en 1846 pour la rendre navigable, qu'il n'apparaît pas que dans les dispositions de cette loi ou des lois postérieures, le transfert à l'Etat du droit de pêche soit, comme en matière d'expropriation, conditionné par le versement d'une indemnité préalable et que, ce droit ayant été transféré à l'Etat, il n'entre pas dans la consistance des biens et droits transférés au département par l'effet de la procédure d'expropriation ;
que, par ces seuls motifs et hors la contradiction alléguée, l'arrêt se trouve légalement justifié de ce chef ;
Sur le second moyen
, ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel ayant souverainement fixé l'indemnité de dépossession revenant aux consorts X... à un montant globalement supérieur aux offres de l'expropriant, selon la méthode qui lui est apparue la mieux appropriée ,en tenant compte de la situation privilégiée des terrains expropriés, et non de leur situation sur le territoire de communes différentes, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article
700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer au département de la Mayenne la somme de 1 900 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille trois.