Tribunal de grande instance de Paris, 27 janvier 2017, 2016/14554

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2016/14554
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE
  • Marques : CARAVANE
  • Classification pour les marques : CL03 ; CL11 ; CL16 ; CL18 ; CL20 ; CL21 ; CL24 ; CL25 ; CL27 ; CL42
  • Numéros d'enregistrement : 3783232 ; 1108112
  • Parties : CARAVANE SAS / ASTONA SAS

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 27 janvier 2017 3ème chambre 3ème section N° RG : 16/14554 Assignation du 27 septembre 2016 DEMANDERESSE Société CARAVANE, SAS représentée par son Président la société ATTITUDE'S [...] 75004 PARIS représentée par Maître Gabrielle ODINOT de la SELARL ODINOT & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #L0271 DÉFENDERESSE Société ASTONA, SAS [...] de Poissy 75005 PARIS représentée par Me Julie DE LASSUS SAINT-GENIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1007 COMPOSITION DU TRIBUNAL Béatrice F, Premier Vice-Président Adjoint Carine G, Vice-Président Florence BUTIN, Vice-Président assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier DÉBATS À l'audience du 13 décembre 2016 tenue en audience publique JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire en premier ressort La société CARAVANE fondée en 1992, ayant pour activité la création, l'édition, le négoce, sous toutes ses formes de tous tissus et papiers peints, tentures murales, tapis, canapés, meubles et en général, de tous produits de décoration de la maison, commercialise ses collections de tissus et de produits d'ameublement et de décoration sous la dénomination CARAVANE qu'elle exploite à titre de dénomination sociale, de nom commercial, d'enseigne et de marques, dans ses boutiques et points de vente situés en France, en Europe et dans le monde et sur son site internet accessible à l'adresse . Elle édite différents supports de communication (brochures, cahiers de dessins, dépliants papier, catalogues, dossiers de presse). Elle est notamment titulaire de : -la marque française verbale «CARAVANE» enregistrée à l'INPI le 19 novembre 2010 sous le n° 3783232, désignant notamment des produits et services en classe 24 : «Tissus et produits textiles pour l’ameublement et la décoration, coussins, abat-jours, couvre-lits, tissus d'ameublement, rideaux, tentures murales, plaids, jetés de canapés et de lits, linge de toilette et de bain, linge de maison, nappes et serviettes ». -la marque internationale verbale «CARAVANE» désignant l'Union européenne, la Norvège et la Suède enregistrée le 30 décembre 2011 sous le n° 1108112, désignant notamment des produits et services en classes 24. Ayant appris au début du mois de septembre 2016, l'usage de la dénomination «CARAVANE» dans le cadre d'une campagne de publicité, pour désigner des produits identiques à ceux couverts par les marques CARAVANE n°3783232 et n°1108112, par la société ASTONA anciennement dénommée MADURA qui comporte un réseau de 44 boutiques, dont 34 situées en France, faisant commerce de textiles d'ameublement, linge de maison et articles de décoration et exploitant un site internet , la société Caravane a fait établir des procès-verbaux de constat les 10, 12 et 16 septembre 2016 et a par acte d'huissier du 12 septembre 2016, mis en demeure la société Astona de cesser ces agissements. Estimant que la preuve de la cessation des actes précités n'était pas établie et ayant été autorisée à y procéder par ordonnance sur requête du 23 septembre 2016, la société CARAVANE a par acte du 27 septembre 2016 fait assigner la société Astona, à jour fixe, pour l'audience du 13 décembre 2016 en vue d'obtenir : Vu les dispositions du Livre VII du code de la propriété intellectuelle et notamment les articles L713-2, et L716-14 du code de la propriété intellectuelle, l'article Ll21-1 du code de la consommation et l'article 1382 du code civil : -Dire et juger qu'en reproduisant et utilisant sans autorisation les marques française et internationale n°3783232 et n°11 08112, la société MADURA a commis des actes de contrefaçon des marques n° 3 783 232 et n°1108112, -Dire et juger qu'en utilisant le nom CARAVANE pour une gamme de produits fortement similaires aux modèles commercialisés par la société CARAVANE sous la dénomination CARAVANE, la société ASTONA (exploitant sous le nom commercial de MADURA) a commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société CARAVANE, En tout état de cause, -Dire et juger qu'en utilisant les marques et signes d'identification de la demanderesse et de ses produits, la société ASTONA a commis des pratiques commerciales trompeuses et des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société CARAVANE, -Faire interdiction à la société ASTONA de reproduire, sous quelque forme que ce soit les marques française et internationale n°3783232 et n°11 08112 sur tout produit, support de communication et notamment sur son site accessible à l'adresse url : www.madura.fr, sur sa page Facebook (url : www.facebook.com/madura.fr) et l'ensemble des réseaux sociaux, sur toutes newsletters, sur les vitrines des magasins qu'elle exploite sous l'enseigne MADURA, directement ou indirectement dans le cadre de franchises, en France et dans l'Union européenne, -Ordonner la destruction, sous contrôle d'huissier et aux frais de la société ASTONA, de tous les supports de communication comportant la mention CARAVANE notamment les catalogues, dossiers de presse, PLV, bandeaux vitrines... -Condamner la défenderesse à payer à la société CARAVANE la somme provisionnelle de 250 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des actes de contrefaçon de marque, somme à parfaire dans l'attente des informations qui seront communiquées par la société ASTONA en application des dispositions de l'article L716-7-1 du code de la propriété intellectuelle, -Condamner la même à payer à la société CARAVANE la somme provisionnelle de 250 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des actes de concurrence déloyale et parasitaire distincts, somme à parfaire dans l'attente des informations qui seront communiquées par la société MADURA en application des dispositions de l'article L716-7-1 du code de la propriété intellectuelle, Subsidiairement et en tout état de cause, -Condamner la société ASTONA à payer à la société CARAVANE la somme provisionnelle de 500 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des actes de concurrence déloyale et des manœuvres trompeuses, somme à parfaire dans l'attente des informations qui seront communiquées par la défenderesse en application des dispositions de l'article L716-7-1 du code de la propriété intellectuelle, -Ordonner et ce à titre de complément de dommages et intérêts, la publication du jugement à intervenir sur les pages d'accueil du site internet www.madura.fr exploité par ASTONA et sur la page Facebook de la marque MADURA pendant une durée de 4 semaines ainsi que dans cinq journaux ou revues au choix de la société CARAVANE et aux frais exclusifs de MADURA sans que le coût de ces publications ne puisse excéder la somme de 10 000 euros HT pour chaque insertion, -Condamner la société ASTONA à payer chacune à la société CARAVANE la somme de 20 000 euros au titre des frais irrépétibles prévus par l'article 700 du code de procédure civile, -Condamner la société ASTONA en tous les dépens, en ce compris les frais de constats, -Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir. La société Caravane développe l’argumentation suivante : -les exceptions de nullité et fins de non-recevoir invoquées en défense sont dépourvues de portée, -il a été gravement porté atteinte aux droits de la société CARAVANE tant sur le terrain de la contrefaçon de sa marque, que de la concurrence déloyale et parasitaire, -les objections en défense de la société Astona sont privées de pertinence, justifiant de faire droit aux demandes de la société CARAVANE, -le préjudice subi par CARAVANE est considérable et justifie des réparations à la hauteur de celui-ci. Par conclusions signifiées par voie électronique le 09 décembre 2016, la société Astona sollicite du tribunal de :

Vu les articles

789 alinéa 1, 788 alinéa 2, 789 alinéa 2 du code de procédure civile Vu les articles 48, 74, 75 et 96 du code de procédure civile Vu l'article 16 du code de procédure civile Vu les articles 122 et 32 du code de procédure civile Vu les articles 58 et 56 du code de procédure civile ; Vu les articles L711-1 et L711-2 du code de la propriété intellectuelle Vu l'article 7(l)(c) et 52(1)(a) du Règlement (CE) n°207/2009 sur la marque communautaire Vu l'article L714-3 al. 1er du code de la propriété intellectuelle Vu l'article 10 § 2 de la directive (UE) 2015/2436 du 16 décembre 2015 Vu les articles L713-2 et L713-3 du code de la propriété intellectuelle Vu l'article 1382 du code civil Vu le principe de la liberté du commerce et de l'industrie Vu l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et notamment l'article 34 (V) Vu l'article L716-14 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle Vu les articles L 112-4 et L 123-1 du code de la propriété intellectuelle Vu l'article 32-1 du code de procédure civile Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile Vu l'assignation à jour fixe délivrée à la société Astona et les pièces jointes Vu les pièces versées aux débats IN LIMINE LITIS, au titre des exceptions de procédure : -Constater que l'absence de signification de la requête avec l'assignation à jour fixe fait grief à la société ASTONA,

EN CONSÉQUENCE

: -Prononcer la nullité de l'assignation à jour fixe délivrée le 27 septembre 2016 à la société ASTONA, -Constater que la violation des dispositions de l'article 789 al 2 du code de procédure civile par la société CARAVANE fait grief à la société ASTONA en ce qu'elle porte atteinte aux droits de la défense, EN CONSÉQUENCE : -Prononcer la nullité de l'assignation délivrée le 27 septembre 2016 à la société ASTONA, -Constater l'incompétence du tribunal de grande instance de Paris pour connaître des demandes de la société CARAVANE fondées sur la marque internationale désignant l'Union européenne n°1 108 112, EN CONSÉQUENCE, -Renvoyer la société CARAVANE devant le tribunal de grande instance saisi en qualité de tribunal des marques UE, -Constater que la société CARAVANE s'appuie sur des pièces incomplètement produites et des éléments non produits à titre de pièce, EN CONSÉQUENCE, -Ordonner que soient écartés des débats les pièces incomplètement produites et les éléments suivants non produits à titre de pièce : o document incomplet communiqué à la suite de la pièce 18-1 (non numéroté) ne comportant aucun numéro de page impairs non plus qu'une page 2 ; o pièce adverse n°24 dont il manque l'intégralité des pages paires ; o montage inséré dans le corps de l'assignation (page 18) non communiqué à titre de pièce AU TITRE DES FINS DE NON-RECEVOIR, -Constater l'absence de justification par la société CARAVANE de diligences accomplies en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, -Dire et juger que cette absence de justification de diligences accomplies en vue de parvenir à une résolution amiable du litige constitue une fin de non-recevoir, EN CONSEQUENCE : À TITRE PRINCIPAL, -Prononcer la nullité de l'assignation délivrée le 27 septembre 2016 à la société ASTONA, -Déclarer irrecevable l'action et les demandes de la société CARAVANE ; SUBSIDIAIREMENT, -Proposer aux parties une mesure de conciliation ou de médiation, -Dire et juger que la titularité de la marque française n°3 783 232 n'est pas démontrée par la société CARAVANE, EN CONSEQUENCE, -Déclarer irrecevable la demande de la société CARAVANE en contrefaçon de la marque française n°3 783 232 pour défaut de qualité à agir, -Constater que la société Astona est étrangère aux actes d'exploitation du terme « caravane» reprochés par la société CARAVANE, EN CONSEQUENCE, -Déclarer irrecevables les demandes, fins et conclusions de la société Caravane et mettre hors de cause la société Astona, -Constater les contradictions de la demanderesse relatives au prétendu « style "caravane"», à sa propre utilisation des marques de tiers, à sa «politique de protection de ses créations », EN CONSEQUENCE, -Déclarer irrecevables les demandes de la société Caravane. AU FOND, -Déclarer irrecevable et mal fondée la société CARAVANE en toutes ses demandes, fins, moyens et prétentions, -Déclarer recevable et bien fondée la société ASTONA en toutes ses demandes, fins, moyens et prétentions, SUR LES DEMANDES FORMEES AU TITRE DU DROIT DES MARQUES, À TITRE PRINCIPAL, -Dire et juger que la marque française n°3 783 232 et la marque internationale désignant l'Union européenne n°1 108 112 désignant en classe 24, les «Tissus et produits textiles pour l'ameublement et la décoration, à savoir, coussins, abat-jours, couvre-lits, tissus d'ameublement, rideaux, tentures murales, plaids, jetés de canapés et de lits, linge de toilette et de bain; linge de maison, nappes, serviettes » est dépourvue de caractère distinctif, EN CONSEQUENCE, -Prononcer la nullité de la marque française n°3 783 232 et de la marque internationale désignant l'Union européenne n°1 108 112 pour les produits suivants désignés en classe 24 : « Tissus et produits textiles pour l'ameublement et la décoration, à savoir, coussins, abat- jours, couvre-lits, tissus d'ameublement, rideaux, tentures murales, plaids, jetés de canapés et de lits, linge de toilette et de bain; linge de maison, nappes, serviettes », -Débouter la société CARAVANE de ses demandes, fins et conclusions, À TITRE SUBSIDIAIRE, -Dire et juger que l'usage du terme « caravane » reproché n'est pas imputable à la société ASTONA, -Dire et juger que l'usage du signe « caravane » reproché n'est pas un usage à titre de marque, EN CONSEQUENCE, -Débouter la société CARAVANE de ses demandes et conclusions. À TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, -Constater que les reproductions du terme « caravane » sur le site internet www.madura.fr, dans le catalogue Madura mis en ligne sur le site, sur la vitrine de la boutique de Rouen et dans la newsletter sont des reproductions par adjonction, -Dire et juger que les reproductions litigieuses du signe « caravane » ne sont pas des reproductions à l'identique, EN CONSEQUENCE, -Déclarer irrecevable et mal fondée la société CARAVANE en ses demandes et conclusions, SUR LES DEMANDES FORMEES AU TITRE DE LA CONCURRENCE DELOYALE ET/OU PARASITAIRE, -Dire et juger que la société ASTONA n'a pas porté atteinte à la dénomination sociale, au nom commercial non plus qu'à l'enseigne « CARAVANE », -dire et juger que la société ASTONA ne s'est pas placée dans le sillage de la société CARAVANE, EN CONSEQUENCE, -Dire et juger qu'aucun acte de concurrence déloyale ou parasitaire n'est démontré par la société CARAVANE, -Débouter la société CARAVANE de ses demandes, fins et conclusions, SUR LES DEMANDES FORMEES AU TITRE DES PRATIQUES COMMERCIALES TROMPEUSES, À TITRE PRINCIPAL, -Constater que les dispositions de l'article L121-1 du code de la consommation invoquées par la société CARAVANE ne sont pas en vigueur, EN CONSEQUENCE, -Rejeter les demandes formées par la société CARAVANE sur le fondement de l'article L121-1 du code de la consommation, -Débouter la société CARAVANE de ses demandes, fins et conclusions. À TITRE SUBSIDIAIRE, -Constater qu'aucune pratique commerciale trompeuse n'a été commise par la société ASTONA, EN CONSEQUENCE, -Débouter la société CARAVANE de ses demandes, fins et conclusions. À TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, SUR LE PREJUDICE, -Constater que la société CARAVANE ne démontre pas le préjudice qu'elle aurait prétendument subi, EN CONSEQUENCE -Débouter la société CARAVANE de ses demandes au titre du préjudice subi, À TITRE RECONVENTIONNEL, SUR LA PROCEDURE ABUSIVE, -Dire et juger que la procédure intentée par la société CARAVANE est abusive, EN CONSEQUENCE, -Condamner la société CARAVANE à payer à la société ASTONA la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts, EN TOUT ETAT DE CAUSE, -Condamner la société Caravane à verser à la société Astona la somme de 11.788 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, -Condamner la société Caravane aux entiers dépens dont distraction au profit de Me de Lassus Saint-Geniès, avocat au Barreau de Paris. À l'audience du 13 décembre 2016, la société Astona sollicite le rejet des dernières conclusions de son adversaire qu'elle estime tardives, ce que le tribunal après en avoir délibéré, a refusé autorisant néanmoins celle-ci à produire une note en délibéré. La présente décision susceptible d'appel est contradictoire. Par note en délibéré autorisée, signifiée par voie électronique le 06 janvier 2017, la société Astona reprend son argumentation contestant le bien-fondé de l'intégralité des prétentions de son adversaire. La société Caravane en réplique par note signifiée par voie électronique le même jour, demande que soit écartée la pièce n° 19 de son adversaire, nouvellement communiquée. MOTIFS DE LA DÉCISION Sur le rejet de la pièce n°19 de la société Astona La défenderesse a été, conformément aux dispositions de l'article 445 du code de procédure civile, autorisée à produire une note en délibéré, avec la pièce communiquée sous le n° 19, laquelle a été soumise au débat contradictoire, puisque la société Caravane en a eu connaissance et s'est trouvée à même d'en discuter la valeur et la portée dans sa note en délibéré en réponse, de sorte qu'il n'existe aucune cause légitime à voir écarter cette pièce, fut-elle datée d'avant l'audience de plaidoirie. IN LIMINE LITIS, SUR LES EXCEPTIONS DE PROCÉDURE La société Astona invoque la nullité de l'assignation sur le double fondement de l'article 789 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile et de l'article 56 du code de procédure civile, ainsi que l'incompétence partielle de la juridiction saisie. 1- nullité de l'assignation Il est reproché l'absence de signification, concomitamment avec l'acte introductif d'instance, de la requête et de l'ordonnance ayant autorisé l'assignation à jour fixe et l'absence de motivation de la requête quant à l'urgence, au mépris des dispositions de l'article 788 alinéa 2 et 789 alinéa 2 du code de procédure civile, ainsi qu'une incertitude sur le nombre de pièces communiquées et le rejet de certaines autres. Aux termes de l'article 788 alinéa 2 du code de procédure civile, "La requête doit exposer les motifs de l'urgence, contenir les conclusions du demandeur et viser les pièces justificatives'\ Contrairement aux affirmations de la défenderesse, la requête présentée au président afin d'obtention d'une autorisation d'assigner à jour fixe invoque l'ampleur des faits litigieux et l'urgence à les voir cesser et l'absence de preuve par la défenderesse de la cessation complète et effective des agissements, de sorte qu'est remplie la condition de fond de l'urgence, qui est au demeurant soumise à l'appréciation souveraine du signataire de l'ordonnance et ces motifs sont repris dans le projet d'ordonnance soumis à l'examen du président du tribunal de grande instance. En visant la requête qui évoque ces motifs, le président a caractérisé l'urgence. Les irrégularités affectant l'assignation relèvent des vices de forme et nécessitent la démonstration par celui qui les invoque, de l'existence d'un grief. L'article 789 alinéa 1 du code de procédure civile impose que "copie de la requête [soit] jointe à l'assignation". En l'occurrence, l'expédition de l'assignation, dont les mentions font foi jusqu'à inscription de faux, mentionne la remise au destinataire d'une "copie de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance le 23 septembre 2016», sans qu'il soit par ailleurs évoqué la remise à ce même destinataire, de "la copie de la requête". Toutefois, l'huissier confirme la remise au destinataire, simultanément avec l'assignation, de la copie de la requête et de l'ordonnance subséquente portant autorisation d'assigner à jour fixe (pièces demanderesse n°41 et 42). Et en tout état de cause, quand bien même la requête ne lui aurait pas été signifiée, la société Astona ne justifie pas de l'existence d'un grief. De même la défenderesse n'établit pas qu'elle a été destinataire lors de la signification de l'assignation et des pièces de la procédure, d'un nombre de pages supérieur à celui de 544 visés dans le procès-verbal de signification de l'assignation. Enfin, l'acte qui lui a été délivré n'informe pas son destinataire, au mépris des dispositions de l'article 789 alinéa 2 du code de procédure civile, "qu’ 'il peut prendre connaissance au greffe de la copie des pièces visées dans la requête ". Néanmoins, l'exigence de cette formalité n'est assortie d'aucune sanction et il n'est pas plus rapporté l'existence d'un grief, la défenderesse ayant pu consulter effectivement les pièces au greffe du tribunal et ayant pu développer son argumentation en défense. Les moyens tendant à la nullité de l'assignation et au retrait de certaines pièces, seront rejetés. 2-sur la violation de l'article 56 du code de procédure civile La société Astona reproche la violation des dispositions de l'article 56 alinéa 3 du code de procédure civile, aux termes desquelles: "L'assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige ". Cependant, cette disposition n'est assortie d'aucune sanction et en outre le texte même de cet article exclut cette condition, dans l'hypothèse d'une urgence, comme en l'espèce, ou de la matière considérée, de sorte que l'argumentation de la société Astona est inopérante. À titre subsidiaire la société Astona sollicite l'organisation d'une mesure de médiation, qui requiert néanmoins, un accord des parties et leur volonté conjointe de s'engager dans le processus décrit par les articles 131-1 et suivant du code de procédure civile, de sorte que le juge ne peut l'imposer. 3- sur l'incompétence partielle du tribunal saisi La société Astona soulève l'incompétence du tribunal de grande instance saisi, car l'action est fondée notamment sur une marque internationale désignant l'Union européenne et relève en conséquence, selon la défenderesse, du tribunal des marques communautaires. L'enregistrement d'une marque internationale désignant l'Union européenne produit les mêmes effets qu'une demande de marque de l'Union Européenne. En l'occurrence, le tribunal de grande instance de Paris effectivement saisi, a compétence exclusive, France entière, pour connaître des actions et demandes en matière de marques de l'Union, prévues à l'article 95 du règlement 207/2009, par application combinée des articles L717-4 du code de la propriété intellectuelle et L211-11 et R 211-7 du code de l'organisation judiciaire, de sorte que la juridiction saisie est exclusivement compétente, compte tenu des demandes, peu important que la juridiction ne soit pas désignée dans l'assignation, comme "le tribunal des marques de l'Union". Cette exception est rejetée. SUR LES FIN DE NON RECEVOIR 1- défaut de qualité à agir de la société Astona La société Astona sollicite sa mise hors de cause car elle soutient ne pas être à l'origine de l'utilisation litigieuse, la campagne de publicité ayant été conçue et réalisée par la société Decolicious et alors par ailleurs qu'elle n'exploite pas les boutiques de Paris (rue Tronchet), de Lyon, Rouen, Marseille (rue Paradis). Cette question ne peut toutefois être tranchée sans un examen au fond des demandes. 2-défaut de qualité à agir de la société Caravane La société Astona estime que les documents produits n'établissent pas la titularité des droits de la société Caravane, sur les marques revendiquées, car le bénéficiaire des cessions désignée est une S.A.R.L. Caravane, alors que la demanderesse est constituée sous la forme d'une SAS. La marque verbale française CARAVANE n° 103 783 232 déposée le 19 novembre 2010 par Françoise D a fait l'objet d'un transfert total de propriété enregistré au registre national des marques le 26 juillet 2011, au profit d'une S.A.R.L. CARAVANE (n° SIREN 388312696), laquelle a fait l'objet suivant procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2à septembre 2011 d'un changement de forme juridique, pour adopter la forme d'une SAS ( pièces demanderesse n° 5, 44, 45 et 46). La marque verbale internationale CARAVANE n° 1108112, désignant l'Union européenne, a été déposée par la S.A.R.L. Caravane, devenue comme mentionnée précédemment, une SAS. (Pièces demandeur n°6, 45 et 46). Ces documents établissent sans contestation possible la titularité des droits de propriété intellectuelle de la société Caravane demanderesse, sur les titres précités, de sorte que cette fin de non- recevoir doit être rejetée. 3- sur l'estoppel Il est enfin allégué que la société Caravane serait irrecevable en ses prétentions, en vertu du principe de l'estoppel, en raison des contradictions de son argumentation, développée au fil des procédures, notamment lorsqu'elle revendique successivement, un style "décontracté chic", puis de "pionnière d'un style nomade chic", alors que son style est selon la défenderesse "classique voire contemporain"; lorsqu'elle reproche à la défenderesse d'utiliser un nom commun pour désigner une thématique de collection, alors qu'elle fait de même; quand elle soutient de manière contradictoire, d'une part, "chiner dans le monde entier" et d'autre part, "réaliser des créations" et que son comportement qualifie une stratégie d'accaparement. Si comme le souligne la défenderesse, il est interdit de se contredire au détriment d'autrui, encore faut-il que la contradiction, pour être constitutive d'une fin de non-recevoir, d'une part concerne le même défendeur, et d'autre part, porte sur les argumentations juridiques successives, or les contradictions imputées à la société Caravane, telles que reprises ci-dessus, ont été opposées à des tiers autres que la société Astona et ne portent exclusivement que sur des éléments purement factuels et non juridiques, de sorte que cette argumentation est totalement inopérante. SUR LES ATTEINTES AUX DROITS DE LA SOCIETE CARAVANE Il est invoqué d'une part, des actes de contrefaçon de marques et d'autre part des actes de concurrence déloyale. 1- contrefaçon de marques La société CARAVANE est titulaire des marques suivantes : -la marque française verbale «CARAVANE » n° 103 783 232 déposée le 19 novembre 2010, pour désigner en classe 3, les "savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux, dentifrice"; en classe 11 les "appareils d'éclairage, lampes, lampadaires luminaires", en classe 16 les "produits en papier, carton pour la décoration, à savoir, boites classeurs, vases, cache-pots, porte-crayons, abat jours, pieds de lampes, photographies, papeterie; matériel pour les artistes; articles de bureau ; en classe 18 les "cuir et imitation du cuir; articles de bureau et de décoration en cuir à savoir, boites classeurs, vases, cache-pots, porte-crayons, abat jours, pieds de lampes, peaux d} animaux, malles et valises, parapluies, parasols et cannes, fouets et sellerie"\ en classe 20 les "meubles, glaces (miroirs), cadres; canapés, fauteuils, paravents"', en classe 21 les "ustensiles et récipients pour la cuisine non en matériaux précieux; peignes et éponges, verrerie porcelaine et faïence pour l9ameublement et la décoration, à savoir, boites classeurs, vaisselles bougeoirs, cache-pots, figurines, non en papier, non en métaux précieux, poignées de porte en porcelaine, flacons, poudriers, vaporisateurs de parfum, porte-serviettes, non en métaux précieux"; en classe 24:"tissus et produits textiles pour l'ameublement et la décoration à savoir coussins, abat jours, couvre-lits, tissus d'ameublement, rideaux, tentures murales, plaids, jetés de canapés et de lits; linge de toilette et de bain; linge de maison, nappes, serviettes"; en classe 25 les "vêtements, chaussures, chapellerie", en classe 27 les "tapis, paillassons, nattes, linoléum, tentures murales non en matière textile, papiers peints"; en classe 42 les "consultations et conseils en matière de décoration et d'architecture, services liés à l'architecture d'intérieur et à la décoration". -la marque internationale verbale «CARAVANE » désignant l'Union européenne, la Norvège et la Suède n° 1108112, déposée le 30 décembre 2011,visant en classe 3: les "savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux"; en classe 20 : les "meubles, glaces (miroirs), cadres; canapés, fauteuils, paravents"; en classe 24, les " tissus et produits textiles pour l'ameublement et la décoration à savoir coussins, abat jours, couvre-lits, tissus d'ameublement, rideaux, tentures murales, plaids, jetés de canapés et de lits; linge de toilette et de bain; linge de maison, nappes, serviettes". Le procès-verbal de constat du 16 septembre 2016(pièce demanderesse n°18-2) effectué sur le site internet , qui appartient à la société Astona (who is-pièce demanderesse n°15 et page 73 constat n°18-2) comporte une rubrique intitulée "invitation au voyage Caravane" (pages 34 à 36), qui reproduit sur plusieurs pages successives du site, ce même ensemble verbal. Le compte Facebook de la société Madura accessible à l'adresse www.facebook.com/madura.fr/ (pages 38-43) permet d'accéder à une nouvelle page à l'adresse www.madura. fr/fr fr/caravane .html (page 43) où il est proposé à la vente divers articles sous l'intitulé Caravane (pages 45à 48). Le procès-verbal de constat du 10 septembre 2016 (pièce demandeur n°18-1) réalisé dans l'établissement Madura de la rue Tronchet à Paris, relève que la vitrine de gauche qui contient en exposition divers coussins, tissus et canapés dans un décor à tonalité orientale, comporte en partie médiane à deux reprises l'indication Caravane, en lettres majuscules couleur lie de vin (pages 3 à 6). Les procès-verbaux de constat du 12 septembre 2016 réalisés dans la boutique Madura, rue de Paradis à Marseille (pièce demanderesse n°21), à Lyon (pièce demanderesse n°19), constatent l'inscription sur les vitrines de ces magasins, du mot Caravane en grosses lettres d'imprimerie rouges, tandis que la vitrine de la boutique à Rouen (pièce n°20), reproduit le mot caravane en grosses lettres d'imprimerie rouge, surmonté du mot Madura, en lettres majuscules grises de plus petite taille. Le procès-verbal du 16 septembre 2016 (pièce n°24) établit que le catalogue téléchargeable sur le site (page 37), accessible par l'onglet "inspirations" dans le menu (page 39), sous la rubrique "Collections"(page 41), permet d'accéder à la Collection CARAVANE du catalogue (pages 46 à 49). Ce site appartient à la société Astona (page 52). En application de l'article L713-2 a/ du code de la propriété intellectuelle, pour une marque française "Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l’usage ou l’apposition d'une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : formule, façon, système, imitation, genre, méthode", ainsi que l’usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement et de l'article 9 § 1 a/ du règlement CE n° 207/2009 du 26 février 2009, pour la marque de l'Union dispose que "la marque communautaire confère son titulaire un droit exclusif Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée". En l'espèce, l'élément verbal constituant les marques Caravane est reproduit à l'identique, pour désigner des produits et services similaires à ceux désignés aux enregistrements, ou similaires, en ce qu'ils se rapportent au même domaine, qui est celui de la décoration d'intérieur et de l'ameublement. La société Astona conteste toutefois l'imputabilité des faits qui lui sont reprochés, au motif qu'elle n'exploite pas certaines boutiques au sein desquelles les constats ont été opérés et qu'elle n'est pas à l'origine de la campagne publicitaire qui a été organisée par la société Decolicious; et que les agissements reprochés ont cessé immédiatement dès après la notification par huissier de la mise en demeure le 12 septembre 2016. Les boutiques dans lesquelles les constats ont été opérés appartiennent à des sociétés tierces (SARL Losca pour l'établissement rue Tronchet à Paris-pièces défenderesse n°2, SAS Axter's pour la boutique de Marseille -pièce n°3, SARL associé unique NOVARESCO pour la boutique de Rouen- pièces n°4, SAS Le Toucan, pour la boutique de Lyon), lesquelles quand bien même pour trois d'entre elles, ont le même dirigeant que la société Astona-Gil Bourgeois (pièce demanderesse n°13), constituent des entités juridiques distinctes et ne sont pas dans la cause, de sorte que la société Caravane ne peut se prévaloir des agissements au sein de ces boutiques. Toutefois, nonobstant les pièces de la défenderesse n°1-1 et les attestations n°1-4, 1-5 et 1-8, la société Astona (et non pas la société Decolicious, comme indiqué par la défenderesse) est titulaire du site internet et du compte Facebook sur lesquels les mises en ligne contestées sont apparues et se trouve en conséquence responsable des parutions, quand bien même celles-ci ont été conçues par la société Decolicious (laquelle a également le même dirigeant que les autres sociétés- pièce défenderesse n° 1-1). Dans ces conditions il n'existe aucune raison légitime à ordonner comme demandé la mise hors de cause de la société Astona. De même les attestations émanant des salariés de la défenderesse (pièces n° 1-4, 1-6 bis) et de l'attachée de presse ne permettent pas d'établir la cessation des faits litigieux, qui est seule constatée par le procès-verbal de constat du 27 septembre 2016 (pièce défenderesse n° 1-7). La société Astona invoque par ailleurs la nullité des marques Caravane, pour défaut de distinctivité et conteste en tout état de cause l'usage à titre de marque. Selon l'article L 711-2 du code de la propriété intellectuelle, "Le caractère distinctif d'un signe de nature à constituer une marque s'apprécie à l’égard des produits ou services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif: a/ Les signes ou dénomination qui dans le langage courant ou professionnel sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ; b/ Les signes ou dénomination pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l'époque de la production du bien ou de la prestation de service La distinctivité d'une marque s'apprécie par rapport aux produits et services désignés dans le dépôt de ladite marque, qui doit être capable d'identifier lesdits produits ou services de son titulaire par rapport à ceux de ses concurrents. Il est dit que le mot "caravane", appartenant au langage français courant, est issu du persan ou de l’arabe, où il désigne le négociant et le commerçant, de sorte que ce mot est un terme générique ou usuel pour désigner tout commerce. Néanmoins, cette origine et le sens initial sont ignorés du consommateur moyen, pour lequel le mot français a une double signification, d'une part, le véhicule et matériel de camping et d'autre part, la désignation d'un groupe de nomades, voyageurs, marchands, montés sur des bêtes de somme, traversant des régions désertiques ou du Moyen-Orient. Par extension, le terme évoque les itinéraires commerciaux transcontinentaux, de produits précieux et de provenance exotique et incite au voyage. Ainsi, contrairement à ce que soutient la société défenderesse, le terme au sens premier, dans son acception courante appréhendée par le consommateur ne désigne pas l’activité de commerce et il n'est donc pas générique ou usuel pour désigner des articles de décoration tels que ceux visés à l'enregistrement des marques, il est seulement évocateur des peuples nomades et des voyages dans le désert et de l'environnement dans lequel s'inscrivent les produits visés par les marques Caravane, lesquelles sont donc parfaitement valables. Toutefois, pour que la matérialité de la contrefaçon soit constituée, encore faut-il que le signe litigieux soit utilisé à titre de marque. Or en l'occurrence, la société Astona emploie le terme Caravane sur son site internet, associé à celui de "collection", de sorte qu'il n'est pas utilisé pour désigner l'origine des produits, mais pour faire référence, à l'instar d'autres maisons de décoration, à un univers tendance, à une ambiance dans laquelle s'inscrivent les marchandises offertes à la vente (et particulièrement les tissus, tapis en provenance d'Asie et du Moyen-Orient). La collection Caravane présentée, est une parmi d'autres (Collection Africa, collection sunny winter) et n'est pas particulièrement mise en avant. Et le monopole que la société demanderesse détient sur ses marques ne l'autorise pas à interdire l'usage comme en l'espèce du même signe, dans le sens commun du terme et il n'est pas établi que le consommateur du fait de l'utilisation du mot caravane dans les conditions qui ont été décrites, puisse sérieusement envisager un partenariat entre d'une part la société Caravane et d'autre part, la société Astona, dans le cadre de la commercialisation d'une ligne de décoration commune aux enseignes. Dans ces conditions, la matérialité de la contrefaçon n'est pas constituée et les réclamations à ce titre de la société Caravane seront rejetées. 2- sur la concurrence déloyale et parasitaire La société Caravane estime que l'exploitation de la dénomination "Caravane" porte atteinte à ses autres droits privatifs, constitués de sa dénomination sociale, son nom commercial et de l'enseigne de la société CARAVANE compte tenu du risque de confusion généré et que les agissements parasitaires sont caractérisés. Sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, devenu 1240, les comportements distincts de ceux invoqués au titre de la contrefaçon, fautifs car contraires aux usages dans la vie des affaires, tels que ceux visant à créer un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit ou ceux parasitaires, qui tirent profit sans bourse délier d'une valeur économique d'autrui procurant à leur auteur, un avantage concurrentiel injustifié, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissements. La société Astona soulève l'irrecevabilité des prétentions à ce titre de la société Caravane, dès lors que ne sont pas invoqués des faits distincts de ceux de la contrefaçon. Toutefois, non seulement il est visé des faits distincts constitués de l'atteinte à des droits privatifs, autres que ceux de propriété intellectuelle, mais dès lors que, comme en l'espèce, la matérialité de la contrefaçon n'est pas établie, une action en concurrence déloyale peut être fondée sur les mêmes faits que ceux allégués au soutien d'une action en contrefaçon de marque, dès lors qu'il est justifié d'un comportement fautif (Cass. corn., 10 déc. 2013, n° 11-19.872 ). Cependant le risque de confusion avec les signes appartenant à la demanderesse, généré par l'emploi du terme, n'est pas établi. En effet, la société Caravane exploite son activité sous ces dénomination sociale, nom commercial et enseigne, depuis une période récente (2011) et est connue d'un public d'initiés, contrairement à la société Madura créée en mars 1972, devenue Astona, (pièce demanderesse n° 13). Les articles litigieux sont offerts sur le site internet de Madura, où le signe éponyme utilisé à titre de marque est omniprésent. Le terme caravane n'est pas employé pour désigner des produits mais comme dénomination d'une collection, qui fait référence à l'univers du voyage et rien ne permet de laisser penser à l'internaute qui visite le site, qu'il existe une quelconque association entre la société Caravane et la société défenderesse. Enfin, malgré les sommes investies dont il est justifié pour assurer la promotion et la visibilité des produits distribués par la société Caravane, il ne peut être reproché à la société défenderesse de s'être inspirée et de s'être inscrite dans une tendance actuelle et devenue commune de bohème ou nomade chic et d'ethnique chic, en employant pour désigner une de ses collections, un terme à la mode évocateur de cet univers et d'avoir ainsi détourné la clientèle ou profité indûment de la notoriété de son concurrent. Les demandes à ce titre doivent être également rejetées. SUR LES PRATIQUES COMMERCIALES TROMPEUSES ET DELOYALES MISES EN ŒUVRE PAR MADURA Subsidiairement, la société Caravane impute à son adversaire des pratiques commerciales trompeuses, en identifiant un concurrent, qui propose une offre originale et appréciée et en décidant de l'emprunter sans vergogne, ce qui est exclusif d'une saine et loyale concurrence. Aux termes de l'article L 121-1 du code de la consommation, "une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes : 1° Lorsqu'elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial, ou un autre signe distinctif d'un concurrent ; 2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants : [...] b/ Les caractéristiques essentielles du bien ou du service à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou service". Suivant l'article L 121-3 du code de la consommation, "Une pratique commerciale est trompeuse si compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte". Toutefois, comme il a été dit précédemment, il ne peut être considéré comme illégitime ou trompeur, de s'inscrire dans une tendance du moment, la communication contestée relevant d'une stratégie commerciale répandue qui n'est pas de nature à tromper le public. SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE La société Astona sollicite sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts. L'envoi d'une lettre comminatoire, exigeant un paiement subséquent dans les 24 heures et l'introduction quasi immédiatement, d'une instance au fond en urgence, alors que la société Caravane ne pouvait ignorer la fragilité de sa position, caractérisent le comportement fautif de la demanderesse, qui a généré un préjudice pour la défenderesse qui s'est trouvée contrainte de modifier en urgence la campagne promotionnelle qu'elle avait initiée. La somme de 5000 euros à ce titre sera allouée à la société Astona. SUR LES AUTRES DEMANDES La société Caravane qui succombe supportera les dépens et ses propres frais. Sa demande pour frais irrépétibles sera rejetée. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, à payer à l'autre partie, la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, en tenant compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. La somme de 10 000 euros sera allouée à la défenderesse à ce titre, incluant les frais exposés au titre des constats effectués de sa propre initiative, et qui ne constituent pas des dépens. Aucune circonstance particulière ne justifie le prononcé de l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

, Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort, Dit n'y avoir lieu à écarter des débats la pièce n°19 de la société Astona, Rejette les exceptions de nullité de l'assignation et les demandes relatives à la communication des pièces, Rejette l'exception d'incompétence du tribunal, Rejette les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité à agir des parties et de l'estoppel, Déclare valables les marques française CARAVANE n° 3783232 et internationale désignant l'Union européenne, la Norvège et la Suède CARAVANE n° 1108112, appartenant à la société Caravane SAS, Déboute la société Caravane de son action en contrefaçon et de ses prétentions accessoires, Déboute la société Caravane de son action en concurrence déloyale et parasitisme et de ses prétentions accessoires, Rejette les demandes formées au titre des pratiques commerciales trompeuses. Condamne la société Caravane à payer à la société Astona la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la procédure abusive, Condamne la société Caravane aux dépens, Condamne la société Caravane à payer à la société Astona une indemnité pour frais irrépétibles de 10 000 euros, Autorise Me de Lassus Saint-Geniès, avocat, à recouvrer directement contre la société Caravane, ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision, Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.