Cour d'appel de Bordeaux, 9 mai 2012, 2010/04183

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
  • Numéro de pourvoi :
    2010/04183
  • Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
  • Numéros d'enregistrement : 005313
  • Parties : CLEE SARL / FLASHMER SAS
  • Décision précédente :Tribunal de commerce de Bordeaux, 5 juillet 2010
  • Avocat(s) : Maître Janick B, Maître Stéphanie L
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Bordeaux
2012-05-09
Tribunal de commerce de Bordeaux
2010-07-05

Texte intégral

COUR D'APPEL DE BORDEAUXARRÊT DU : 09 MAI 2012 DEUXIÈME CHAMBRE CIVILEN° de rôle : 10/04183 Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 juin 2010 (R.G. 2009F661) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 05 juillet 2010 APPELANTE :LA SARL CLEE, agissant en la personne de son représentant légaldomicilié en cette qualité au siège social[...]33127 SAINT JEAN D'ILLACreprésentée par la SCP Luc BOYREAU, avocats au barreau de BORDEAUX,assistée de Maître Janick B, avocat au barreau de BORDEAUX INTIMÉE :LA SAS FLASHMER, prise en la personne de son représentant légaldomicilié en cette qualité au siège socialZone Artisanale[...]50400 GRANVILLEreprésentée par la SCP Michel PUYBARAUD, avocats au barreau de BORDEAUX,assistée de Maître Stéphanie L, avocat au barreau de PARIS COMPOSITION DE LA COUR :En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 08 février 2012 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine Rouger, Conseiller, chargé du rapport, Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :Monsieur Jean-François BANCAL, Conseiller faisant fonction de Président,Madame Christine ROUGER, Conseiller,Madame Caroline F, Vice-Président placé, Greffier lors des débats : Monsieur H

ARRÊT

:- contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile. La SAS FLASHMER est une entreprise spécialisée dans le domaine de la création, fabrication et commercialisation d'articles et accessoires de pêche. Elle commercialise en particulier des leurres de pêche pour lesquels elle bénéficie pour trois d'entre eux, d'un dépôt de dessin ou modèle à l'INPI en date du 18 septembre 2000, parmi lesquels une 'turlutte' destinée à la pêche aux céphalopodes, dénommée 'KARIBA'. Le 9 juin 2006, la SAS FLASHMER a assigné la SARL CLEE, également spécialisée dans la commercialisation d'articles de pêche, devant le tribunal de commerce de Bordeaux pour avoir importé, offert à la vente et commercialisé des leurres de pêche identiques au modèle n°00 5313 reproduction n° 3-5 à 3-7, dénommé 'KARIBA' dont elle revendiquait la propriété intellectuelle. Par jugement du 5 février 2008 le tribunal a :- condamné la société CLEE pour atteinte portée aux droits d'auteur et de modèle de la SAS FLASHMER à lui payer la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts - fait interdiction à la société CLEE, sous astreinte de 50 € par infraction constatée à compter de la signification du jugement, de diffuser tous documents, prospectus, catalogues, tant sur support papier que par tout autre moyen, présentant des produits contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire à l'égard de la société FLASHMER, de présenter et exposer de tels produits, de les importer, de les offrir à la vente et de les commercialiser - ordonné le retrait du marché et la destruction, sous son contrôle et aux frais de la société CLEE, de tous les produits contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire à son égard, se trouvant entre ses mains, ainsi qu'en tous autres lieux et ce sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du jugement, à calculer pendant un mois, passé ce délai, il sera à nouveau fait droit - dit qu'au cas où la destruction ne pourrait être effectuée en tout ou en partie, il sera substitué une indemnité de 3 € à tout article manquant dans le stock existant à la date de la signification du jugement par rapport au stock constaté au jour de la saisie contrefaçon effectuée au siège social de la société CLEE se réservant la liquidation des astreintes prononcées, - débouté la société CLEE de toutes ses demandes - ordonné la publication du jugement in extenso ou par extraits dans cinq journaux ou revues au choix de la société FLASHMER et aux frais de la société CLEE dans la limite de 2.500 € par insertion - condamné la société CLEE à payer à la société FLASHMER la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile - ordonné l'exécution provisoire sous caution -débouté la société FLASHMER de toutes ses autres demandes - condamné la société CLEE aux entiers dépens, incluant les frais de constat et de saisie-contrefaçon La SARL CLEE a interjeté appel de cette décision puis s'est désistée de son appel, désistement constaté par ordonnance de dessaisissement de la Cour du 5 novembre 2008. Estimant que la SARL CLEE n'avait pas justifié du retrait du marché et de la destruction des produits contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale, par acte du 14 avril 2009, la SAS FLASHMER l'a de nouveau assignée devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins notamment de liquidation des astreintes et de dommages et intérêts. Par jugement du 10 juin 2010 le tribunal de commerce de Bordeaux a :- condamné la SARL CLEE à payer à la SAS FLASHMER la somme de 74.385 € au titre d'indemnités pour produits manquants ayant fait l'objet d'une condamnation de destruction - débouté la SARL CLEE de toutes ses demandes - condamné la SARL CLEE à payer à la SAS FLASHMER une indemnité de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile - débouté la SAS FLASHMER du surplus de ses demandes - ordonné l'exécution provisoire - condamné la SARL CLEE aux dépens. La SARL CLEE a interjeté appel de cette décision le 5 juillet 2010. Sa demande de suspension de l'exécution provisoire a été rejetée par ordonnance de référé du Premier président en date du 13 août 2010. La SAS FLASHMER a quant à elle formé appel incident. Vu les dernières écritures signifiées le 4 novembre 2010 par la SARL CLEE, appelante, Vu les dernières écritures signifiées le 11 mai 2011 par la société FLASHMER, intimée et appelante incidente, Vu l'ordonnance de clôture, intervenue le 25 janvier,

SUR CE,

LA COUR : 1°/ Sur la contestation de la protection juridique du modèle KARIBA Bien que reconnaissant au jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux du 5 février 2008 un caractère définitif, la société CLEE, pour solliciter le débouté des prétentions de la société FLASHMER dans le cadre du présent litige, soutient qu'elle serait fondée à soutenir que le leurre 'KARIBA' ne présente aucune originalité et n'aurait pas dû bénéficier d'une protection juridique par le dépôt des dessins et modèles du 18 septembre 2000 et ce, au vu d'un arrêt de la cour d'appel de Rennes rendu le 19 février 2008 qui aurait annulé le modèle 'CALMERO', cette annulation devant, selon elle s'étendre à l'ensemble des modèles déposés le même jour et en conséquence, aux 'turluttes' MULTIGRIP, CALMERO et KARIBA. Or précisément en l'espèce, le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 5 février 2008, définitif, dont seule l'exécution est l'objet du litige aujourd'hui soumis à la Cour, a jugé que le dessin de 'turlutte' déposé par la société FLASHMER, objet du procès (modèles couverts par les reproductions 3-5 à 3-7 du dépôt de modèle n°00-5313), dont il a apprécié les caractéristiques propres et la nouveauté, bénéficiait de la protection des Livres I, III et V du code de la propriété intellectuelle et que les modèles distribués par la société CLEE au nom de marque LUREN objets de la saisie contrefaçon du 4 mai 2006 en constituaient la contrefaçon et justifiaient la condamnation de la société CLEE à ce titre ainsi que pour concurrence déloyale et parasitaire. Dés lors, la société CLEE, au prétexte d'une décision de la cour d'appel de Rennes rendue le 19 février 2008 dans une instance à laquelle elle n'était pas partie et qui a annulé le modèle déposé à l'INPI le 18 septembre 2000 sous le n°005313 uniquement en ce qu'il concerne le modèle leurre dit 'CALMERO' reproduit sous les n°1-1, 1-2, 2-3 et 2-4, modèle étranger au litige l 'ayant opposée à la société FLASHMER ayant donné lieu au jugement susvisé, ne peut pas remettre en cause l'autorité de la chose définitivement jugée à son encontre par le jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 5 février 2008. Il s'en déduit nécessairement que le moyen de défense soutenu par la société CLEE, tendant à ce qu'il soit considéré que le leurre KARIBA ne présente aucune originalité et n'aurait pas dû bénéficier d'une protection juridique par le dépôt des dessins et modèles susvisé, pour solliciter le débouté des demandes formulées par la société FLASHMER à son encontre en exécution du jugement du 5 février 2008 est inopérant comme se heurtant à l'autorité de la chose définitivement jugée à son égard. 2°/ Sur la demande d'indemnité pour produits manqua nts n'ayant pu faire l'objet de la destruction ordonnée Les premiers juges ont fait une exacte appréciation de la portée de l'obligation mise à la charge de la société CLEE par le jugement définitif du 5 février 2008 quant au retrait du marché et la destruction des produits contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire sous astreinte. Par des motifs circonstanciés, adaptés aux faits de l'espèce et au cadre juridique applicable que la Cour adopte, ils ont justement apprécié qu'en ayant retourné à son fournisseur le 24 juillet 2006 le solde des 24.795 produits saisis, manquants à la date de la signification du jugement susvisé par rapport au stock inventorié dans le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 2 juin 2006, la société CLEE avait par ses agissements rendu impossible la destruction des produits ordonnée par le jugement du 5 février 2008, à ses risques et périls, compte tenu de la saisie-contrefaçon opérée le 2 juin 2006 et de l'assignation délivrée le 9 juin 2006 et, par la même occasion, rendu possible une commercialisation des dits produits par d'autres circuits de distribution. C'est en outre par de justes motifs que la Cour adopte que les premiers juges ont estimé que les deux dispositions du jugement du 5 février 2008 concernant l'une, l'astreinte journalière pour exécution du retrait du marché et destruction des produits contrefaisants, et l'autre, l'indemnité de 3 € par article manquant au cas où la destruction ne pourrait être effectuée, ne sont pas cumulatives et, qu'à défaut de justification du maintien des produits incriminés sur le marché, seule devait être liquidée l'indemnité de 3 € pour 24.795 produits manquants, sans qu'il y ait lieu à liquidation de l'astreinte provisoire de 500 € par jour de retard pendant un mois ni au prononcé d'une astreinte définitive. La société CLEE ne peut par ailleurs s'exonérer de l'obligation personnelle de destruction qui lui incombait en affirmant que 'selon toute vraisemblance ' les produits ont été 'détruits par le fournisseur espagnol après leur retour', sans justifier de cette destruction effective, tout contrôle sur ce point ayant été rendu impossible par sa seule attitude. Enfin, l'obligation de faire mise à sa charge s'appliquant tant au retrait du marché qu'à la destruction des objets contrefaisants saisis, elle ne peut soutenir devoir être déchargée de l'indemnité mise à sa charge au seul motif que du fait du retour chez le fournisseur les articles litigieux n'auraient pas été remis en circulation, alors que la destruction sous contrôle a été ordonnée par le jugement définitif susvisé afin précisément d'assurer la certitude de cette non remise en circulation. Compte tenu des circonstances de l'espèce et de l'attitude de la société CLEE telle que rappelée ci-dessus, rien ne justifie que l'indemnité prévue par le jugement définitif susvisé dans l'hypothèse, avérée, où la destruction des produits contrefaisants ne pourrait être effectuée soit réduite. Le jugement entrepris doit donc être confirmé en sa disposition condamnant la SARL CLEE à payer à la SAS FLASHMER la somme de 74.385 € à titre d'indemnités pour produits manquants et ayant fait l'objet d'une condamnation de destruction et en ce qu'il a débouté la SAS FLASHMER de ses demandes tendant à la liquidation, en sus, de l'astreinte provisoire de 500€ pendant un mois au titre de l'obligation de retrait du marché et de destruction des mêmes produits ainsi qu' au prononcé d'une astreinte définitive. 3°/ Sur les demandes de la société FLASHMER relativ e aux catalogues La société FLASHMER soutient que la société CLEE n'aurait pas respecté l'interdiction faite par le jugement du 5 février 2008 de diffuser tous documents et notamment, catalogues, présentant des produits contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire à son égard sous astreinte. Elle relève que, dans le catalogue 2009, la société CLEE offrait à la vente et vendait des produits reproduisant, selon elle, l'ensemble des caractéristiques nouvelles et originales de son modèle KARIBA. Il ressort néanmoins du catalogue CLEE 2009 que les leurres incriminés par la société FLASHMER sont des articles de marque japonaise YAMASHITA, dénommés 'EGI SUITE', articles dont le caractère contrefaisant n'a pas été soumis à l'appréciation du tribunal de commerce de Bordeaux lors de l'instance ayant donné lieu au jugement définitif du 5 février 2008 lequel n'a concerné que les articles objets de la saisie-contrefaçon du 2 juin 2006 commercialisés par la société CLEE auprès de la société DECATHLON sous marque LUREN et acquis par la société CLEE de la société espagnole SUMINISTROS EVIA. Le juge ne pouvant statuer que dans le cadre du litige qui lui a été soumis, l'interdiction sous astreinte prononcée quant à la diffusion de tous documents, notamment catalogues, présentant des produits contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire, ne peut concerner que les articles soumis à l'appréciation du tribunal lors de l'instance ayant donné lieu au jugement du 5 février 2008, mais non, de manière générale, tout objet présentant une apparente similitude sur photographie. En l'absence de preuve de ce que les modèles japonais YAMASHITA distribués dans le catalogue CLEE 2009 sous le nom 'EGI SUITE' sont en réalité les mêmes modèles que ceux, jugés contrefaisants, qui avaient été vendus par la société espagnole SUMINISTROS EVIA à la société CLEE en 2006, objets du procès ayant donné lieu au jugement du 5 février 2008, c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté la société FLASHMER de ses demandes tendant à voir enjoindre à la société CLEE de communiquer le nombre de catalogues présentant les 'turluttes' figurant au catalogue 2009 ainsi que le nombre de produits détenus et vendus depuis le 18 février 2008 aux fins de liquidation de l'astreinte de 50 € par infraction constatée prévue par le jugement du 5 février 2008. Le jugement entrepris doit donc être aussi confirmé sur ce point. 4°/ Sur les autres dispositions La disposition du jugement entrepris ayant débouté la société CLEE de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive n'est pas contestée. Le jugement entrepris étant confirmé en toutes ses dispositions principales il doit aussi être confirmé quant à ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Succombant en appel, la société CLEE supportera les dépens d'appel et se trouve redevable de ce fait d'une indemnité dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

: La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement et contradictoirement : Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions Y ajoutant, Condamne la SARL CLEE à payer à la SAS FLASHMER une indemnité de deux mille euros (2.000 €) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel Condamne la SARL CLEE aux dépens d'appel avec autorisation de recouvrement direct en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.