Cour administrative d'appel de Paris, 2ème Chambre, 20 juin 2018, 17PA03341

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
  • Numéro d'affaire :
    17PA03341
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Décision précédente :Tribunal administratif de Paris, 7 février 2014
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000037089091
  • Rapporteur : M. Franck MAGNARD
  • Rapporteur public :
    M. CHEYLAN
  • Président : Mme APPECHE
  • Avocat(s) : SELARL JTBB AVOCATS
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Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Paris
2018-06-20
Conseil d'État
2017-10-11
Cour administrative d'appel de Paris
2015-05-26
Tribunal administratif de Paris
2014-02-07

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Procédure contentieuse antérieure : La société Régie nationale de publicité et d'organisation (RNPO) a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 ainsi que de l'amende qui lui a été assignée sur le fondement des dispositions du I de l'article 1737 du code général des impôts. Par un jugement n° 1304451/1-3 du 7 février 2014, le tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté sa demande. Par un arrêt n° 14PA01520 du 26 mai 2015, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société RNPO contre ce jugement. Par une décision n° 392121 du 11 octobre 2017, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 26 mai 2015 et renvoyé l'affaire à ladite Cour. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 avril 2014, 31 octobre 2014, 5 mai 2015 et 12 janvier 2018, la société Régie nationale de publicité et d'organisation (RNPO), représentée par la SELARL JTBB avocats, demande à la Cour : 1°) de réformer le jugement n° 1304451/1-3 du 7 février 2014 du Tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a partiellement rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 ainsi que de l'amende qui lui a été assignée sur le fondement des dispositions de l'article 1737-I du code général des impôts ; 2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ainsi que de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1737-I du code général des impôts ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que les premiers juges comme l'administration ont considéré que les factures établies par LVNH Conseil, M. A...et AX'CD au cours des années en litige constituaient des factures de complaisance et a refusé pour ce motif, la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée y afférente ; - l'administration n'apporte pas les éléments permettant de penser qu'elle n'ignorait pas la nature de complaisance de ces factures ; - l'amende qui lui a été infligée sur le fondement des dispositions de l'article 1737-I du code de général des impôts n'est pas justifiée dès lors que la matérialité des faits n'est pas établie et qu'elle n'a pas eu d'intention frauduleuse. Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 août 2014 et 30 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé. Par ordonnance du 15 janvier 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 9 février 2018. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ; - le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Magnard, rapporteur, - les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public, - et les observations de MeB..., représentant la société Régie nationale de publicité et d'organisation. 1. Considérant que la société Régie nationale de publicité et d'organisation (RNPO) a pour activité la vente d'espaces publicitaires à des annonceurs, dont elle confie la prospection et le démarchage à des agents commerciaux indépendants assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2006, 2007 et 2008 à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a adressé une proposition de rectification portant notamment sur des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; que la société RNPO relève appel du jugement du 7 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2007 et 2008 du fait du refus par l'administration de déduire la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures établies par les agents commerciaux LVNH Conseil, M. A...et AX'CD ainsi que de l'amende qui lui a été assignée sur le fondement des dispositions du I de l'article 1737 du code général des impôts ;

Sur le

bien fondé des impositions : 2. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui n'est pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée ; que dans le cas où l'auteur de la facture est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés, assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et se présente comme tel à ses clients, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y est mentionnée, d'établir qu'il s'agit d'une facture de complaisance et que le contribuable le savait ou ne pouvait l'ignorer ; que si l'administration apporte des éléments suffisants en ce sens, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur cette opération, sans qu'il ne puisse être exigé de lui des vérifications qui ne lui incombent pas ; 3. Considérant que pour remettre en cause les factures émises par la société LVNH, par M. A...et par la société AX'CD, le ministre fait valoir que les prestations auxquelles elles se rapportent n'ont pas été réalisées par les émetteurs de ces factures mais par des tiers ; qu'en revanche il n'établit ni même n'allègue que le contribuable savait ou ne pouvait ignorer que les factures en cause étaient des factures de complaisance ; qu'en outre, il ne conteste pas les affirmations de la société requérante selon lesquelles elle avait établi des contrats avec les signataires des factures prévoyant la possibilité de sous-traiter les prestations et que les prestations réalisées par des tiers ont pu lui apparaitre comme s'inscrivant régulièrement dans le cadre de telles relations de sous-traitance ; qu'il s'ensuit que l'administration n'était pas fondée à rappeler la taxe sur la valeur ajoutée que la société requérante avait déduite à raison desdites factures ; Sur l'amende : 4. Considérant, qu'aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I. Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom " ; 5. Considérant que pour les mêmes motifs qu'indiqués au point 3, le ministre, qui se borne à affirmer que les factures ont été émises par des sociétés qui n'avaient pas réalisé les prestations, ne peut être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de l'intention frauduleuse de la société RNPO ; 6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que la société RNPO est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande ; qu'il y a lieu de prononcer l'annulation de l'article 5 dudit jugement et d'accorder à la société requérante la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée maintenus à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 ainsi que de l'amende qui lui a été assignée sur le fondement des dispositions du I de l'article 1737 du code général des impôts ; qu'il y a également lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La société RNPO est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle reste assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 ainsi que de l'amende qui lui a été assignée sur le fondement des dispositions du I de l'article 1737 du code général des impôts. Article 2 : L'article 5 du jugement n° 1304451/1-3 du 7 février 2014 du Tribunal administratif de Paris est annulé. Article 3 : L'Etat versera à la société RNPO la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Régie Nationale de Publicité et d'Organisation (RNPO) et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France. Délibéré après l'audience du 6 juin 2018, à laquelle siégeaient : - Mme Appèche, président, - M. Magnard, premier conseiller, - Mme Jimenez, premier conseiller. Lu en audience publique le 20 juin 2018. Le rapporteur, F. MAGNARDLe président assesseur, En application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative S. APPECHE Le greffier, P. LIMMOIS La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 17PA03341