Chronologie de l'affaire
Tribunal judiciaire de Versailles 23 juin 2020
Cour d'appel de Versailles 24 novembre 2022

Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 24 novembre 2022, 20/04202

Mots clés Demande en réparation des dommages causés par des véhicules terrestres à moteur · préjudice · société · accident · offre · temporaire · déficit · préjudice d'agrément · procédure civile · rapport · esthétique · expert · permanent · poignet

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro affaire : 20/04202
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Versailles, 23 juin 2020
Président : Madame Florence PERRET

Chronologie de l'affaire

Tribunal judiciaire de Versailles 23 juin 2020
Cour d'appel de Versailles 24 novembre 2022

Texte

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 60A

3e chambre

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 24 NOVEMBRE 2022

N° RG 20/04202

N° Portalis DBV3-V-B7E-UA3I

AFFAIRE :

[S] [Z]

C/

[L] [O] épouse [B]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juin 2020 par le TJ de VERSAILLES

N° Chambre : 4

N° RG : 19/00020

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Jean NGAFAOUNAIN

Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [S] [Z]

né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentant : Me Jean NGAFAOUNAIN, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 434 - N° du dossier [Z]

APPELANT

****************

1/ Madame [L] [O] épouse [B]

née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 8]

2/ MAIF

N° SIRET : 775 709 702

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représentant : Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 019675

INTIMEES

3/ CPAM DES YVELINES

[Adresse 10]

[Localité 6]

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Octobre 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

FAITS ET PROCÉDURE



Le 2 mars 2011, à [Localité 13] (78), M. [S] [Z] a été victime d'un accident de la circulation dans lequel est impliquée Mme [L] [O] épouse [B], assurée auprès de la société MAIF.

Un expert judiciaire a été désigné par ordonnance de référé du 29 avril 2014 afin d'examiner la victime.

Par actes des 17, 19 décembre 2018 et 7 janvier 2019, M. [Z] a fait assigner Mme [B], la société MAIF et la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines aux fins d'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement du 23 juin 2020, le tribunal judiciaire de Versailles a :

- dit que Mme [O] est impliquée dans l'accident de circulation dont M. [Z] a été victime le 2 mars 2011,

- jugé que Mme [O] et son assureur la 'MACIF' sont tenues à indemnisation,

- évalué comme suit les préjudices subis par M. [Z] :

au titre des pertes de gains professionnels actuels.............................8 705,56 euros,

au titre du déficit fonctionnel temporaire................................................3025 euros,

au titre des souffrances endurées..........................................................20 000 euros,

au titre du préjudice esthétique temporaire.............................................1 500 euros,

au titre du préjudice sexuel.....................................................................1 500 euros,

- condamné Mme [O] et la MAIF in solidum à payer à M. [Z] la somme de 30 230,56 euros,

- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil,

- fixé la créance de la CPAM des Yvelines au titre des indemnités journalières ainsi :

7 278,18 euros du 6 mars au 31 décembre 2011,

8 849,88 euros du 1er janvier au 31 décembre 2012,

3 651,18 euros du 1er janvier au 31 mai 2013,

- condamné la MACIF à payer à M. [Z] les intérêts de la somme de 34 230,56 euros au double du taux de l'intérêt légal à compter du 2 novembre 2011 jusqu'au 13 janvier 2020,

- condamné Mme [O] et la MAIF in solidum à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamné Mme [O] et la MAIF in solidum aux dépens comprenant les frais d'expertise

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Par acte du 27 août 2020, M. [Z] a interjeté appel.

Par courrier reçu au greffe le 15 mars 2021, la CPAM a indiqué que le montant de ses débours s'élevait à la somme de 2 459,09 euros, selon le détail suivant :

- frais médicaux du 02/03/11 au 11/05/11....................................................................517,27 euros,

-frais pharmaceutiques du 03/03/11 au 10/05/11......................................................168,61 euros,

-frais d'appareillage du 03/03/11 au 03/03/11.............................................................27,07 euros,

- franchises du 03/03/11 au 11/05/11........................................................................... 19 euros,

-indemnités journalières :

du 03/03/11 au 05/03/11.................................................................................0 euro,

du 06/03/11 au 17/05/11....................................................................1 765, 14 euros,

Par ordonnance du 21 mars 2022, le conseiller de la mise en état a :

- rejeté les demandes tendant à ce que soient déclarées irrecevables les conclusions signifiées le 3 février 2021 par Mme [O] et la société MAIF et les conclusions signifiées par M. [Z] le 29 septembre 2021,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que le sort des dépens de l'incident suivra celui des dépens de l'instance au fond.

Par dernières écritures du 7 septembre 2022, M. [Z] demande à la cour de :

- le juger recevable et bien fondé en ses demandes,

Y faisant droit,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

dit que le véhicule conduit par Mme [B] et assuré par la société MAIF est impliqué dans l'accident du 2 mars 2011 dont M. [Z] a été victime,

jugé que Mme [B] et la société MAIF sont tenues à indemnisation,

évalué les préjudices subis par M. [Z] à :

au titre de la perte de gains professionnels actuels...............8 705,56 euros,

au titre des souffrances endurées............................................20 000 euros,

au titre du préjudice esthétique temporaire................................1 500 euros,

condamné Mme [B] et la société MAIF in solidum à payer à M. [Z] les intérêts de la somme de 34 230,56 euros au double du taux de l'intérêt légal à compter du 2 novembre 2011 jusqu'au 13 janvier 2020,

ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil,

condamné Mme [B] et la société MAIF in solidum à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

condamné Mme [B] et la société MAIF in solidum aux dépens comprenant les frais d'expertise et avec recouvrement direct,

- confirmer sur le principe, le jugement frappé d'appel, en ce qu'il a accordé à M. [Z] une indemnité au titre du déficit fonctionnel temporaire, du préjudice esthétique temporaire, du préjudice sexuel, mais réformer sur le quantum en accordant à M. [Z] les sommes suivantes:

au titre du déficit fonctionnel temporaire.........4 050 euros (au lieu de 3 025 euros),

au titre du préjudice sexuel.............................18 000 euros (au lieu de 1 500 euros),

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [Z] de ses autres demandes tendant à voir condamnés in solidum Mme [B] et son assureur la société MAIF à réparer ses préjudices pour les postes suivants :

frais divers dont l'assistance à tierce personne,

perte de gains professionnels futurs,

incidence professionnelle,

déficit fonctionnel permanent,

préjudice d'agrément,

préjudice d'établissement,

Et statuant à nouveau,

- condamner in solidum Mme [B] et la société MAIF à réparer les préjudices de M. [Z] par le versement des sommes suivantes :

Préjudices patrimoniaux temporaires :

au titre des frais divers dont assistance tierce personne.........................4 797 euros,

Préjudices patrimoniaux permanents :

au titre de la perte de gains professionnels futurs................................548 048 euros (PGPF ramenée à 519 746,89 euros après imputation de la pension d'invalidité et des indemnités journalières), qui correspondent à :

arrérages échus au jour de la décision.....................................291 600 euros,

arrérages à échoir....................................................................256 448 euros,

au titre de l'incidence professionnelle.................................................510 000 euros,

Préjudice extrapatrimoniaux permanents :

au titre du déficit fonctionnel permanent..............................................11 100 euros,

au titre du préjudice d'agrément...........................................................10 000 euros,

au titre du préjudice d'établissement.....................................................20 000 euros,

- juger opposable à la CPAM des Yvelines la décision à intervenir,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamner Mme [B] et la société MAIF à verser à M. [Z] la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- admettre le recouvrement direct des dépens, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières écritures du 1er septembre 2022, Mme [B] et la société MAIF demandent à la cour de :

- juger leur appel incident recevable,

- les juger bien fondées en leurs demandes, fins et prétentions,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

alloué à M. [Z] la somme de 1 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

condamné Mme [B] et la société MAIF à payer la somme de 34 230,56 euros au double du taux de l'intérêt légal,

ordonné la capitalisation des intérêts,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- débouter M. [Z] de l'ensemble de ses autres demandes,

- fixer en conséquence le préjudice de M. [Z] à hauteur de 33 230,56 euros, en deniers ou quittances, se décomposant comme suit :

au titre de la perte de gains professionnels actuels............................8 705,56 euros,

au titre du déficit fonctionnel temporaire...............................................3 025 euros,

au titre des souffrances endurées...........................................................20 000 euros,

au titre de son préjudice sexuel...............................................................1 500 euros,

- donner acte que la société MAIF a déjà payé une somme totale de 51 852,56 euros à M. [Z], se décomposant comme suit :

à titre de provision.................................................................................4 500 euros,

au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré....................47 352,56 euros,

- condamner M. [Z] à payer à la société MAIF la somme de 18 622 euros en restitution du trop-perçu,

- juger en tout état de cause que la société MAIF et Mme [B] s'approprient les motifs du jugement déféré, dont elles sollicitent la confirmation,

- condamner M. [Z] à payer à Mme [B] et à la société MAIF la somme de 3 000 euros concernant la procédure d'appel,

- condamner M. [Z] aux entiers dépens, avec recouvrement direct,,

- juger l'arrêt commun à la CPAM.

M. [Z] a fait signifier la déclaration d'appel et ses conclusions à la CPAM, par actes des 2 novembre 2020 et 17 février 2021 remis à personne habilitée. Cette intimée n'a pas constitué avocat.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 septembre 2022.

SUR QUOI

Les postes de préjudice qui font l'objet de l'appel principal sont les suivants :

- les frais divers

- les pertes de gains professionnels futurs

- l'incidence professionnelle

- le déficit fonctionnel temporaire

- le déficit fonctionnel permanent

- le préjudice d'agrément

- le préjudice sexuel

- le préjudice d'établissement.

Les intimés ont quant à eux interjeté appel incident au titre du préjudice esthétique temporaire et de la sanction du doublement des intérêts au taux légal.

Selon l'expertise et le dossier médical, M. [Z] avait subi deux accidents et deux interventions chirurgicales du poignet en 2000 et 2009 entraînant une incapacité permanente partielle de 12%. Après son accident de circulation, il s'est plaint, dans un premier temps, de douleurs au poignet droit. Il a été opéré le 18 mai 2011 d'une arthroscopie, occasionnant une cicatrice. Selon l'expert judiciaire, cette opération portait sur des lésions anciennes. Il a été immobilisé par une attelle et fait de la rééducation, souffrant essentiellement de douleurs au poignet droit. Il a de nouveau été opéré le 11 avril 2012 puis a subi une nouvelle infiltration en 2013. Selon l'expert judiciaire, cette opération portait sur des lésions anciennes. Les éléments médicaux du docteur [K] qui l'a soigné font état d'une intervention en lien avec un traumatisme ancien du poignet droit chez un patient multi-opéré du poignet. La rééducation s'est arrêtée en septembre 2015.

Devant l'expert judiciaire, M. [Z] s'est plaint de la persistance de douleurs au poignet, de difficultés motrices, de troubles du sommeil.

Dans un premier temps, l'expert a considéré que l'accident avait exacerbé les phénomènes arthrosiques préexistants et provoqué des douleurs et que les séquelles actuelles n'étaient pas la conséquence de l'accident. Le sapiteur psychiatre a relevé que depuis l'accident M. [Z] avait été suivi par son médecin traitant pour ses douleurs, qu'il a souffert d'un syndrome post-commotionnel avec sensations vertigineuses et céphalées pendant une durée de 18 mois entraînant un déficit fonctionnel permanent de 3%. Il n'a pas relevé d'élément en faveur d'une dépression.

L'expert judiciaire a finalement conclu que l'accident de circulation était 'à l'origine d'une perte de chance de voir la pathologie du poignet droit rester stationnaire pendant au moins trois ans ce d'autant plus que le métier pour lequel Monsieur [Z] était en création ne demandait pas d'efforts manuels intenses'.

Ainsi ses conclusions sont les suivantes :

"L'accident de la circulation dont a été victime M. [Z] le 2 mars 2011 a eu pour conséquences :

- une période de gêne fonctionnelle temporaire partielle du 3 mars 2011 au 2 septembre 2012 en classe II en faisant abstraction des périodes d'hospitalisation pour la chirurgie du poignet qui ne sont pas imputables à l'accident.

- la consolidation des lésions est fixée au 2 septembre 2012

- un déficit fonctionnel permanent de 6%

- un préjudice de la douleur évalué entre moyen et assez important (4,5/7)

- un préjudice esthétique temporaire pendant la période de classe II évaluée à 2/7

- le préjudice esthétique définitif n'est pas en relation avec l'accident, il est lié aux interventions réalisées pour traiter l'arthrose du poignet

- un préjudice d'agrément : en l'absence d'accident, M. [Z] aurait pu faire encore du vélo pendant trois ans

- un préjudice sexuel

- un retentissement professionnel.

M. [Z] est né le [Date naissance 1] 1977 et était âgé de 35 ans à la date de consolidation, fixée au 2 septembre 2012.

M. [Z] qui évoque des dépenses de santé restées à sa charge de 100,60 euros dans les motifs de ses écritures et n'a pas repris cette demande dans son dispositif, n'en a pas saisi la cour. Il n'y a donc pas lieu de statuer de ce chef.

L'assistance par tierce personne

M. [Z] demande l'indemnisation d'une aide par une tierce personne qui lui aurait été nécessaire jusqu'à la consolidation à raison de 3h par semaine, et sur la base de 20,50 euros de l'heure pendant 78 semaines.

Il prétend qu'il a eu besoin d'être assisté pour effectuer certaines tâches ménagères et surveiller ses jeunes enfants.

La réalité d'un préjudice n'est pas caractérisée, M. [Z] se contentant d'affirmer qu'il a eu besoin d'une aide extérieure sans produire la moindre pièce en attestant et alors que l'expert n'a pas retenu de besoins de ces chefs.

C'es donc à raison que le tribunal n'a pas fait droit à cette demande.

Pertes de gains professionnels futurs

De la comparaison entre les moyens soulevés par M. [Z] devant les premiers juges tels qu'exposés dans le jugement entrepris et les moyens soulevés devant la cour, il résulte que ces derniers ne font que réitérer, sans justification complémentaire utile et sans la moindre critique ceux dont les premiers juges ont connu .

A l'exception de la référence à la pension d'invalidité (dont il sera vu plus loin qu'elle ne doit pas être prise en compte), et aux indemnités journalières perçues avant la consolidation le 2 septembre 2012, c'est aux termes d'une exacte analyse de la situation de M. [Z] (qui ne fonde sa demande que sur l'impossibilité de réaliser son projet professionnel) que le tribunal a jugé qu'il ne prouvait pas qu'il aurait avec certitude créé son entreprise de restauration rapide et perçu un revenu net mensuel de 2 770 euros et qu'il ne justifiait donc pas que les séquelles de l'accident lui ont ôté toute chance d'exercer ce métier et lui ont occasionné sans doute aucun une perte de revenus.

Le jugement qui a rejeté ce chef de demande sera ainsi confirmé.

Incidence professionnelle

S'agissant du montant de la somme allouée par le tribunal de ce chef (15 000 euros), M. [Z] ne fait que reprendre les moyens soulevés devant les premiers juges, auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents que la cour adopte sans réserve, la somme sollicitée de 510 000 euros étant totalement excessive eu égard aux séquelles permanentes retenues.

M. [Z] reproche au tribunal d'avoir déduit de la somme de 15 000 euros la pension d'invalidité capitalisée alors qu'il ne percevait plus cette pension depuis plus d'un an au jour où le juge a statué. Il ajoute que cette pension est sans rapport avec l'accident ici en cause et qu'en conséquence elle n'a pas à être déduite de l'incidence professionnelle.

Les intimées font valoir que le tribunal a statué en fonction des pièces alors versées aux débats dont il ne résultait pas que la pension était attribuée à titre temporaire.

M. [Z] indique à raison que la pension d'invalidité de 4 788,70 euros/an lui a été attribuée 'à titre temporaire' le 14 juin 2013. Il l'a perçue jusqu'en juillet 2019.

Interrogée par la cour sur ses débours en lien avec l'accident en cause, la CPAM a répondu le 5 mars 2021 que l'accident avait été pris en charge 'en droit commun' et qu'aucune pension d'invalidité n'avait été réglée 'pour ce sinistre'. Interrogée par le conseil de M. [Z], elle lui a répondu le 22 août 2022 que la pension d'invalidité allouée n'était pas en rapport avec l'accident du 2 mars 2011.

Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de déduire de la somme allouée au titre de l'incidence professionnelle les arrérages de la rente invalidité temporairement allouée à la victime.

C'est également à tort que le tribunal a déduit de ce préjudice la somme de 6601,14 euros correspondant aux indemnités journalières perçues par la victime à compter de septembre 2012, ces indemnités ne pouvant s'imputer que sur les PGPF à les supposer établies.

M. [Z] est donc fondé à percevoir la somme de 15 000 euros, le jugement étant infirmé sur ce point.

Déficit fonctionnel temporaire

Le tribunal a alloué de ce chef à M. [Z] la somme de 3 025 euros. M. [Z] sollicite réparation à hauteur de 4 050 euros, considérant que son déficit temporaire doit être indemnisé sur la base de 900 euros par mois.

L'expert a retenu une gêne fonctionnelle de classe 2 du 3 mars 2011 au 2 septembre 2012 en classe II en faisant abstraction des périodes d'hospitalisation pour la chirurgie du poignet qui ne sont pas imputables à l'accident. Il a indiqué que M. [Z] avait été opéré une première fois le 18 mai 2011, le chirurgien traitant alors des lésions anciennes osseuses et articulaires. Il a ensuite été opéré le 11 avril 2012 pour traiter du carpe avec lésions arthrosiques.

La période de gêne est donc de 550 jours (du 3 mars 2011 au 2 septembre 2012), au cours desquels M. [Z] a supporté de manière continue une gêne de 25%.

La réparation doit s'effectuer sur la base de 23 euros par jour, parfaitement adaptée, soit pour une gêne de 25%, une indemnisation à hauteur de 3 162,50 euros.

Le jugement sera donc infirmé s'agissant du montant de la somme allouée au titre du DFT.

Préjudice esthétique temporaire

Le tribunal a alloué à M. [Z] la somme de 1 500 euros de ce chef. Les intimées considèrent qu'aucun préjudice esthétique n'est caractérisé contrairement à ce qu'a retenu l'expert.

Dans son rapport du 16 février 2016 l'expert avait noté que le préjudice esthétique était nul. Toutefois, suite à un dire du conseil de M. [Z], il a modifié le 10 juillet 2017 ses conclusions en précisant que l'accident avait eu pour conséquence 'un préjudice esthétique temporaire pendant les périodes de classe II évalué à léger (2/7)', confirmant qu'il n'y avait pas de préjudice esthétique définitif imputable à l'accident de mars 2011.

Il est exact que les intimées n'ont pas eu la possibilité de s'exprimer sur cette modification des conclusions qui a eu lieu hors leur présence et dont elles n'ont pris connaissance que lors du dépôt du rapport. Elles peuvent toutefois développer leurs critiques dans le cadre de l'instance.

L'expert a exposé que l'accident avait eu pour conséquence une exacerbation et une décompensation des phénomènes arthrosiques préexistants (consécutifs aux deux accidents de travail de février 2000 et d'octobre 2009), provoquant des douleurs intenses au poignet droit.

Si la cicatrice au poignet n'est pas imputable à l'accident mais à des interventions ayant eu lieu postérieurement en lien avec la pathologie préexistante, le port de l'orthèse dans les suites immédiates de l'accident avait bien pour but de soulager les douleurs de M. [Z].

Le préjudice esthétique résultant du port de cette attelle est léger et a justement été indemnisé par le tribunal à hauteur de 1 500 euros.

Le déficit fonctionnel permanent (DFP)

C'est aux termes d'une exacte analyse que le tribunal, dans les motifs du jugement, a évalué ce préjudice à la somme de 11 000 euros et cette estimation n'est pas discutée par M. [Z].

C'est en revanche à tort que les premiers juges ont déduit de cette indemnité la rente invalidité reçue de la CPAM puisque comme il a été dit ci-dessus, cette rente n'a aucun lien avec l'accident en cause.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef , Mme [B] et la MAIF étant condamnées in solidum à payer à M. [Z] la somme de 11 000 euros au titre du DFP.

Le préjudice d'agrément

Le tribunal a rejeté la demande de ce chef au motif que les seules déclarations de la victime ne permettait pas de faire la preuve d'un tel dommage.

L'expert s'est en effet contenté des dires de M. [Z] pour retenir un préjudice d'agrément du fait de l'arrêt de la pratique du vélo.

M. [Z] n'a manifestement pas tiré partie du délai généré par son appel pour compléter son dossier en tenant compte des termes du jugement puisqu'il ne verse aux débats aucune pièce justifiant de ce qu'il faisait du vélo avant l'accident et a dû cesser d'en faire.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef, faute de preuve.

Le préjudice sexuel

Le tribunal a alloué à M. [Z] la somme de 1 500 euros de ce chef. M. [Z] sollicite la somme de 18 000 euros, imputant son divorce en novembre 2017 aux troubles sexuels subis à la suite de l'accident.

L'expert a considéré qu'il existait un préjudice sexuel par baisse de la libido induite par la prise de médicaments anti dépresseurs et anxiolytiques, directement imputable à l'accident de mars 2011.

Le sapiteur psychiatre a précisé dans son rapport que M. [Z] ne présentait aucun signe de dépression et que le traitement par Laroxil, anti dépresseur, était utilisé également comme anti douleur.

Il est intéressant de noter que devant ce sapiteur, M. [Z] n'a pas évoqué le moindre problème de libido, attribuant sa séparation récente (novembre 2015) d'avec sa femme par le fait qu'il était devenu un poids pour elle car il n'était plus capable de l'aider dans les tâches quotidiennes concernant les enfants.

Dans ces conditions, il apparaît que le préjudice sexuel n'a pas été durable et qu'il n'est pas à l'origine du divorce.

Il en résulte qu'il a été justement indemnisé par le tribunal à hauteur de 1 500 euros.

Le préjudice d'établissement

Le tribunal a rejeté la demande de ce chef. M. [Z] sollicite une somme de 20000 euros.

Comme justement rappelé par le tribunal ce préjudice correspond à la perte de l'espoir de réaliser tout projet personnel de vie, comme fonder une famille, élever des enfants, en raison de la gravité du handicap.

C'est donc aux termes de justes motifs que les premiers juges, constatant que M. [Z] avait été marié, avait deux enfants et une activité professionnelle, ont considéré qu'il n'était pas établi que les séquelles de l"accident, source d'un déficit fonctionnel permanent de seulement 6%, lui avaient fait perdre tout espoir de réaliser tout projet personnel.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

Sur le doublement des intérêts

Le tribunal a jugé que la MAIF n'avait formulé aucune offre, même provisionnelle, dans le délai de huit mois à compter de l'accident et qu'elle n'a pas non plus adressé d'offre dans le délai de cinq mois après avoir été informée, le 16 février 2017, par le pré-rapport d'expertise, de la date de consolidation. Considérant que seules les conclusions de l'assureur du 13 janvier 2020 constituaient une offre valable, il l'a condamnée à payer sur la somme offerte de 34 230,56 euros des intérêts au double du taux légal du 2 novembre 2011 (huit mois après l'accident) jusqu'au 13 janvier 2020.

La MAIF conteste cette sanction.

L'article L. 211-9 du code des assurances fait obligation à l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur, de présenter à la victime d'un dommage, quelle que soit sa nature, une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée lorsque la responsabilité n'est pas contestée et le dommage, entièrement quantifié. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Lorsque l'accident a causé un dommage corporel, une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris du préjudice matériel, et indiquant les créances de chaque tiers payeur (article R. 211-40 du code des assurances) doit être faite à la victime dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident. Cette offre peut être provisionnelle lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime et l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis par l'article L 211-9 du code des assurances, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit, en vertu de l'article L 211-13 du même code, des intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

Il est de principe que l'offre incomplète, c'est-à-dire celle ne comprenant pas tous les éléments indemnisables, n'est pas considérée comme valable, car équivalant à une absence d'offre et que l'offre manifestement insuffisante est assimilée à une absence d'offre.

La victime doit, afin de permettre la présentation d'une offre, communiquer à l'assureur, à la demande de ce dernier, faite dans les conditions de l'article R. 211-39 du code des assurances, les renseignements énumérés par les articles R. 211-37 et R. 211-38 du même code. Si la victime ne répond pas, ou incomplètement, dans le délai de 6 semaines à compter de la présentation de la demande de renseignements faite par l'assureur, le délai pour présenter une offre est suspendu de l'expiration du délai de 6 semaines jusqu'à la réception des renseignements demandés (article R. 211-31 et R. 211-32 du même code).

L'accident s'étant produit le 2 mars 2011, la MAIF aurait dû formuler une offre provisionnelle au plus tard le 2 novembre 2011, soit dans le délai de 8 mois, ce qu'elle n'a pas fait.

Elle se devait par ailleurs de faire une offre définitive d'indemnisation dans un délai de cinq mois après le 18 mars 2016, date à laquelle le conseil de la MAIF a reçu la réponse suivante, datée du 17 mars 2016, de l'expert: 'je vous adresse la réponse à votre dire. Ce dire ne modifie pas les conclusions du pré-rapport qui devient le rapport définitif'. C'est donc à compter du 18 mars 2016 que la MAIF a été informée de la date de consolidation définitivement fixée.

L'assureur indique avoir fait une offre conforme à ses obligations le 23 août 2016, mais la cour constate que celle-ci est intervenue postérieurement à l'expiration du délai de 5 mois courant à compter du 18 mars 2016, qui expirait le 18 août suivant.

Dans cette offre du 23 août 2016, la MAIF proposait le versement d'indemnités qui étaient adaptées, et qui, en toute hypothèse, n'étaient pas manifestement insuffisantes, au titre des PGPA (7 688,18 euros), du DFTP (3 025 euros), du DFP (12 000 euros dans l'attente de connaître le montant détaillé de la pension d'invalidité susceptible de s'imputer sur ce poste) des souffrances endurées (12 000 euros) , du préjudice sexuel (1 500 euros). La MAIF avait légitimement demandé à M. [Z] s'agissant des dépenses de santé actuelles, du DFP et du préjudice professionnel de produire des justificatifs (bordereaux CPAM et mutuelle, montant de la pension d'invalidité susceptible de s'imputer sur les postes DFP et IP).

Par ailleurs, il n'est pas contesté par M. [Z] qu'il n'a pas adressé à la MAIF les justificatifs qu'elle sollicitait.

Il convient de rappeler en outre :

- que l'expert a tergiversé sur certains postes de préjudice puisque dans son 'pré-rapport' daté du 16 févier 2016, il a exclu les préjudices esthétique et d'agrément, en sorte qu'il ne saurait être reproché à la MAIF de ne pas avoir fait d'offre de ces chefs

- que le quantum de l'offre du 16 février 2016 était de 36 213,18, et que le tribunal a finalement évalué le préjudice à la somme de 34 730,56 euros.

Compte tenu de la carence de M. [Z] dans la production d'éléments justificatifs, le délai de formulation d'une offre complète s'est trouvé suspendu, en sorte que la MAIF sera condamnée à payer sur la somme de 36 213,18 euros les intérêts au double du taux légal du 2 novembre 2011 au 23 août 2016.

Les intérêts sur les sommes allouées par le cour seront capitalisées dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

Succombant à titre principal en appel, Mme [B] et la MAIF seront condamnées aux dépens y afférents.

Elles verseront en outre une somme de 2 000 euros à M. [Z] au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Le présent arrêt sera déclaré commun à la CPAM des Yvelines.

PAR CES MOTIFS



La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme [B] et la MAIF à payer à M. [Z] la somme de 3 025 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, en ce qu'il a rejeté les demandes au titre du déficit fonctionnel permanent et de l'incidence professionnelle et condamné la MAIF à payer sur la somme offerte de 34 230,56 euros des intérêts au double du taux légal du 2 novembre 2011 jusqu'au 13 janvier 2020,

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

Condamne in solidum Mme [B] et la MAIF à payer à M. [Z] les sommes de :

- 3 162,50 euros au titre du déficit fonctionnel partiel

- 11 100 euros au titre du déficit fonctionnel permanent

- 15 000 euros au titre de l'incidence professionnelle,

Condamne la MAIF à payer à M. [Z], sur la somme de 36 213,18 euros, les intérêts au double du taux légal du 2 novembre 2011 au 23 août 2016,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Déclare le présent arrêt commun à la CPAM des Yvelines,

Condamne Mme [B] et la MAIF à payer à M. [Z] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [B] et la MAIF aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Florence PERRET, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,