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Tribunal administratif de Poitiers, 25 avril 2024, 2400467

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Poitiers
  • Numéro d'affaire :
    2400467
  • Nature : Ordonnance
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête enregistrée le 26 février 2024, la société Kéolis représentée par le cabinet Joffe et Associés demande au juge des référés sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : 1°) d'annuler la procédure de passation du contrat de concession de service public pour l'exploitation du service de mobilité de l'agglomération de Saintes ; 2°) à titre subsidiaire, d'ordonner à la communauté d'agglomération de Saintes de se conformer à ses obligations de publicité et de mise en concurrence, en reprenant sa procédure de passation du contrat de concession au stade de l'analyse des offres ; 3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Saintes la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa requête est recevable en ce qu'elle a déposé une offre dans le cadre de la procédure de passation contestée et que sa requête a été déposée après l'analyse des offres et avant la signature du contrat ; - l'acheteur a commis un manquement à ses obligations de mise en concurrence pour ne pas avoir rejeté l'offre de la société RATP Dev qui est irrégulière ; à cet égard, l'article 7 du règlement de consultation relatif au jugement des offres prévoyait un critère n°3 lié à la " Relation voyageurs et politique commerciale " et l'annexe 2 du règlement de consultation imposaient notamment aux candidats de fournir des engagements de fréquentation du réseau exprimés en hypothèse de " validation par titre " ; l'attributaire pressenti, RATP Dev, mais aussi l'autre candidat, la société Transdev, ont exprimé leurs engagements de fréquentation en " voyages comptables " alors qu'elle a remis une offre en exprimant les engagements de fréquentation du réseau en hypothèse de " validation par titre ", soit 8,4 millions de validations ; or, l'expression des engagements de fréquentation donnés par " voyages comptables ", est nécessairement beaucoup plus favorable que celle de la " validation par titre " ; l'offre présentée par RATP Dev est contraire aux exigences formulées par l'annexe 2 du règlement de consultation ; - elle a nécessairement été lésée, dès lors que l'égalité de traitement des candidats a été viciée par le fait que soit retenue une offre ne respectant les prescriptions imposées par les documents de la consultation, empêchant ainsi tout examen comparatif utile et tout classement sincère des offres ; - son offre a été dénaturée sur plusieurs critères de sélection ce qui a conduit à l'abaissement de sa note finale ; ainsi la communauté d'agglomération de Saintes a omis dans son analyse la proposition de livraison des vélos à domicile ou en points retrait ; s'agissant du critère n°1 " Pertinence de l'offre, qualité de l'exploitation, degré d'innovation, qualité de service ", la communauté d'agglomération n'a pas pris en compte la mise en place d'un outil " CRM " dans l'appréciation de son offre, elle a omis de tenir compte de la mise en place de l'outil Mobireport dans son offre, alors même que celui-ci est signalé pour l'attributaire pressenti ; enfin, s'agissant des moyens humains proposés pour assurer le dispositif d'exploitation courante, la communauté d'agglomération de Saintes affirme qu'elle n'a donné aucun détail sur la composition du service exploitation alors qu'au contraire, dans son offre, elle a présenté l'ensemble des moyens humains chargés du pôle exploitation ainsi qu'un organigramme de synthèse de l'organisation proposée ; s'agissant de la qualité du service, elle a fourni un développement précis sur les études et les enquêtes qui seront réalisées ; elle proposait ainsi de mettre en place quatre types d'enquêtes : les enquêtes de satisfaction client, origine-destination, tables rondes et fraudes ; la méthode de réalisation de ces enquêtes, leur fréquence et le public interrogé étaient également détaillés ; sur le critère n°3 " relation voyageurs et politique commerciale ", s'agissant du projet marketing devant être mis en œuvre par les candidats, son offre a été dénaturée ; en effet, elle a développé le point concernant la conquête de nouvelle clientèle ainsi que les mesures de sensibilisation et les mesures permettant d'assurer la fidélisation des usagers au réseau de transport et la contribution à l'animation du réseau de commercialisation ; dans son offre, elle propose une formation des dépositaires actuels et des visites régulières du service commercial pour s'assurer de la qualité de l'accueil de ces derniers auprès des usagers ; - la dégradation de sa note l'a empêchée d'être sélectionnée alors qu'elle a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse ; son offre, classée deuxième par la communauté d'agglomération de Saintes, aurait dû arriver en première position si les critères n°1 et 3 n'avaient pas été systématiquement dégradés concernant son offre ; elle aurait dû obtenir une note maximale sur les critères n°1 et n°3 ; le cumul des notes aurait dû aboutir à lui attribuer la note de 86,25/100 alors l'offre de RATP Dev a obtenu 85/100 ; la lésion qu'elle supporte est donc certaine et justifie l'annulation de la procédure ; - le critère n° 4 " Politique sociale et environnementale " est illégal ce qui entraînera l'annulation de la procédure d'attribution. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2024, la communauté d'agglomération de Saintes représenté par la SELARL Pintat Avocats conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société Kéolis à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est, en l'état, de nature à remettre en cause la procédure d'attribution du contrat, en ce que : - l'offre remise par la société RATP développement n'est pas irrégulière ; - l'offre de la requérante n'a pas été dénaturée ; - le critère " RSE " retenu dans l'analyse des offres est un critère légal et pertinent. Par un mémoire en défense enregistré le 11 mars 2024, la société RATP Développement (Dev) représentée par Me Delelis et Barthelemy conclut à ce que la requête de la société Kéolis soit rejetée et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société requérante. Elle soutient que : - Son offre était régulière ; - l'offre de Kéolis n'a pas été dénaturée ; - la société Keolis soutient à tort que le critère n° 4 " Politique sociale et environnementale " est illégal. La société Kéolis a produit de nouvelles écritures par des mémoires des 11 mars et 12 mars 2024 où elle tend aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens. La communauté d'agglomération de Saintes a produit un nouveau mémoire le 12 mars 2024 où elle maintient ses conclusions et ses moyens. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ; - le code de justice administrative. Le président du tribunal a désigné M. A en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique qui s'est tenue en présence de Mme Bompas, greffière d'audience : - le rapport de M. A, - les observations de Me Mallet du Cabinet Joffre et Associés pour la société Keolis qui reprend ses conclusions et ses moyens en insistant sur les points suivants : l'offre remise par la société RATP Dev était irrégulière ; toutes les prescriptions impératives du dossier de consultation des entreprises (DCE) sont obligatoires ; le " guide des réponses des candidats " étant partie intégrante du DCE était donc aussi obligatoire et ce guide mentionnait l'obligation d'exprimer les données de fréquentation en " validation par titre ", ce qui est une donnée essentielle ; la société attributaire a exprimé son offre de fréquentation en " voyages comptables " qui reposent sur des hypothèses théoriques surestimées alors qu'elle-même a respecté la " validation par titres " prévue par le document de consultation et qui repose sur l'expérience en renvoyant à une fréquentation réelle ; elle a accepté cette contrainte à la différence des autres candidats ; les hypothèses présentées dans les différentes offres ne sont pas comparables : l'attributaire désigné a pu ainsi mettre en avant 13,4 millions de voyages alors qu'elle-même n'a fait état que 8,4 millions de voyages ; aucunE comparaison sérieuse n'a pu être réalisée dans de telles conditions ; la communauté d'agglomération a dénaturé le contenu de son offre sur le critère financier qui a été jugé " satisfaisant[e] " alors qu'elle était plus performante tant sur l'engagement au niveau des recettes que sur le taux de couverture des dépenses par les recettes ; le critère n°4 portant sur la " Politique sociale et environnementale " est illégal au regard des dispositions de L. 3124-5 du code de la commande publique ; il doit exister un lien entre l'exécution du contrat et les critères de sélection des offres aboutissant à son octroi ; la communauté d'agglomération a choisi un critère très vague et général ; aucun lien n'est fait avec les prestations techniques spécialement recherchées au titre du contrat de concession que la communauté d'agglomération de Saintes entend octroyer, ni indication quant à la traduction matérielle et au lien fonctionnel de ces éléments avec les prestations attendues des candidats ; les propositions des candidats sur ce critère sont générales et le rapport n'a pu tirer des offres soumises que des appréciations vagues. - Les observations de Me Mestres de la SELARL Pintat Avocats représentant la communauté d'agglomération de Saintes qui maintient ses écritures et ses moyens et précise que la notion d'offre irrégulière dans le cadre d'un contrat de concession dont la procédure est plus souple n'est pas la même que celle du code de la commande publique en matière de marché public ; l'offre de la société attributaire respecte l'ensemble des prescriptions fixées par la communauté d'agglomération ; l'acheteur public a fixé les conditions et les caractéristiques minimales à peine d'irrecevabilité des offres en les identifiant de manière spécifique par un surlignage ; l'annexe 2 du règlement de consultation c'est-à-dire " le guide de réponse des candidats " fixait le cadre formel de la remise des offres ; il ne s'agissait pas d'un document prescrit à peine d'irrecevabilité de l'offre ; les candidats devaient détailler les hypothèses retenues pour dimensionner les charges et les recettes du service, le cas échéant sur la base de validations par titre, mais ces orientations n'étaient pas prescrites à peine d'irrecevabilité ; si la société RATP Dev a fait état d'engagements de fréquentation en " voyages comptables ", cela ne constitue aucunement un élément de nature à caractériser une irrégularité de l'offre de la société ; il s'agit d'une présentation différente des offres de fréquentation ; l'offre de la RATP Dev n'est donc pas irrégulière au sens de la commande publique de ce seul fait ; la société pressentie a remis une offre complète répondant aux prescriptions imposées par le règlement de la consultation et comprenant notamment toutes les pièces exigées par la nomenclature du " guide de réponse aux candidats ", et c'est à juste titre que son offre a été jugée régulière ; le taux de couverture des dépenses par les recettes ne constitue pas un élément de l'appréciation des offres sur ce critère ; le rapport sur le choix du concessionnaire retient que sur la durée totale du contrat, l'offre de la RATP Dev est l'offre financière la plus avantageuse pour la collectivité ; si la société Kéolis s'engage sur un niveau de recettes plus important que celui présenté par la société attributaire, le niveau des charges en contrepartie est également beaucoup plus important pour la collectivité, de sorte que la requérante propose sur la durée du contrat un coût net plus important ; sur l'ensemble des cinq éléments d'appréciation, l'offre de la société RATP Dev apparait plus avantageuse ; la société requérante ne démontre aucunement qu'une éventuelle dénaturation de son offre sur le critère 2 serait susceptible de l'avoir lésée dès lors que l'écart de points sur ce critère est de 6,75 points, alors que l'écart global entre l'offre de la société Kéolis et l'offre de la société pressentie est de 10 points ; le critère n°4 RSE n'est nullement un critère novateur dans ce type de contrat de concession ; les engagements sociaux et environnementaux sont au cœur de la mobilité durable : la pénurie de conducteurs routiers nécessite de mettre en place une politique sociale pertinente, tout au long de l'exécution du contrat et la réduction de l'impact environnemental des transports constitue un élément central au cœur de la politique de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, et plus généralement pour la protection de la santé publique. - Les observations de Me Barthélémy du cabinet Jones Day, représentant la société RATP Développement qui reprend ses écritures en précisant que son offre était régulière ; que le code de la commande publique dispose pour les marchés publics que " l'autorité concédante écarte les offres irrégulières ou inappropriées " tandis qu'en matière de concession, le code définit comme irrégulière l'offre qui " ne respecte pas les conditions et caractéristiques minimales indiquées dans les documents de la consultation " ; qu'en matière de passation des contrats de concession, seules les offres ne respectant pas les caractéristiques minimales, nécessaires pour apprécier l'offre au regard du cahier des charges, doivent obligatoirement être rejetées par l'autorité concédante ; que le moyen tiré de ce qu'elle aurait présenté ses engagements de fréquentation du réseau en " voyages comptables " et non en " validations de titre " ne vaut pas ; qu'en matière de passation des contrats de concession, seules les offres ne respectant pas les caractéristiques minimales, nécessaires pour apprécier l'offre au regard du cahier des charges, doivent obligatoirement être rejetées par l'autorité concédante ; que la communauté d'agglomération n'a pas fait de l'information de la fréquentation en validation de titres une caractéristique minimale de l'offre ; que s'agissant de l'annexe 2 qui s'intitule, " guide de réponse des candidats ", seule la " nomenclature [] s'impose au candidat " ; qu'il ne ressort pas des documents de la consultation que la communauté d'agglomération aurait exigé, à peine d'irrégularité, que les candidats justifient et détaillent les hypothèses retenues pour dimensionner les charges et les recettes du service à partir d'hypothèses de fréquentation en " validation par titre " ; en présentant les hypothèses de fréquentation en " voyages comptables ", son offre était conforme aux prescriptions des documents de la consultation ; seule, la société Kéolis, précédent exploitant, disposait des données de validation par titre ; il convenait d'apprécier la progression de la fréquentation au regard de la méthode ayant permis de la déterminer et le pourcentage de fréquentation, l'unité choisie pour l'exprimer est sans impact sur l'analyse des offres et ne peut avoir entraîner l'irrégularité de son offre ; le critère n°4 est lié aux conditions d'exécution de la concession et il ne s'agit pas d'un critère général. La clôture de l'instruction a été différée au 14 mars 2024 à 12h00. Une note en délibéré a été produite par la société Kéolis le 13 mars 2024. Une note en délibéré a été enregistrée le 14 mars 2024 pour la communauté d'agglomération de Saintes.

Considérant ce qui suit

: 1. La communauté d'agglomération de Saintes est l'autorité organisatrice de la mobilité sur un ressort territorial comprenant 36 communes et représentant près de 62 000 habitants. Elle dispose d'un réseau de transports en commun actuellement exploité par le groupe Keolis via sa filiale Keolis Saintes, dans le cadre d'un contrat de concession de service public négocié en 2017 et signé en mai 2018, qui arrive à échéance le 8 juillet 2024. Le 13 février 2023, elle a lancé une procédure de passation pour le renouvellement du contrat de concession pour une durée de 7 ans à compter du 9 juillet 2024. Ce contrat inclut l'exploitation des services urbains et périurbains, de transports scolaires et à la demande, ainsi que des services à destination des personnes à mobilité réduite et des services de mobilité active et partagé. A l'issue de la procédure de sélection, la communauté d'agglomération a décidé l'attribution de cette concession de service public à la société RATP Développement. Par une requête enregistrée le 26 février 2024, la société Kéolis saisit le juge du référé précontractuel d'une demande tendant à l'annulation de la procédure de passation du contrat en soutenant que l'offre de la société RATP Développement est irrégulière, que son offre a été dénaturée et qu'un critère relatif à la responsabilité sociale et environnementale pris en compte dans l'analyse des offres est illégal. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : 2. Aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : " Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l'exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d'exploitation () / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat ". Et, aux termes de l'article L. 551-2 de ce code : " I. Le juge peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s'il estime, en considération de l'ensemble des intérêts susceptibles d'être lésés et notamment de l'intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l'emporter sur leurs avantages. Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations () ". Et, aux termes de l'article L. 551-10 du même code: " Les personnes habilitées à engager les recours prévus aux articles L. 551-1 et L. 551-5 sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par le manquement invoqué () ". 3. En vertu de ces dispositions, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles susceptibles d'être lésées par de tels manquements. Il appartient dès lors au juge des référés précontractuels de rechercher si l'entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte, en avantageant une entreprise concurrente. En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de l'offre remise par la société RATP Développement, attributaire pressenti : 4. Aux termes de l'article L. 3124-2 du code de la commande publique : " L'autorité concédante écarte les offres irrégulières ou inappropriées. ". Aux termes de l'article L. 3124-3 du même code : " Une offre est irrégulière lorsqu'elle ne respecte pas les conditions et caractéristiques minimales indiquées dans les documents de la consultation. ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité concédante doit éliminer les offres qui ne respectent pas les exigences formulées dans les documents de la consultation. 5. La société requérante soutient que l'offre de la société RATP Développement est irrégulière en ce que les engagements de fréquentation du réseau de transports y sont exprimés en " voyages comptables " et non en " validations de titres " ainsi que le prévoyait de manière obligatoire l'annexe 2 du règlement de consultation " guide des réponses des candidats " dont les prescriptions sont impératives. Elle ajoute que cette présentation n'a pas permis de mener une comparaison réelle entre les offres, l'attributaire ayant annoncé un engagement de fréquentation de 13,4 millions de voyages contre 8 millions pour son offre exprimée conformément au règlement de consultation en " validations de titres " et que cette comparaison s'est traduite aux termes du rapport sur le choix du concessionnaire par une dégradation de son offre. 6. Le règlement de consultation relatif à la procédure d'attribution du contrat de concession en son article 2.03 intitulé " conditions et caractéristiques minimales du règlement de consultation " prévoit que le dossier de consultation des entreprises, dont fait partie le " guide de réponse des candidats " comporte des conditions et des caractéristiques minimales à satisfaire à peine d'irrecevabilité des offres qui sont matérialisées par un surlignage vert. Si le " guide de réponse des candidats " dans sa rubrique " Dossier C - dossier financier et contractuel " fait effectivement apparaître, comme l'indique Kéolis, que les prévisions de recettes exposées dans l'offre sont exprimées en " validations de titres ", ces indications ne sont pas surlignées en vert. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, le guide de rédaction ne prescrivait pas à peine d'irrecevabilité des offres la présentation des engagements de fréquentation " en validations de titres ". Et si l'article 4.03 du règlement de consultation demande la production d'un mémoire technique et financier " comprenant l'ensemble des pièces listées à l'annexe 2 ", l'exigence ainsi posée doit être lue comme ne portant pas sur le contenu des pièces versées mais sur la complétude du mémoire. Par suite et alors qu'il est constant que la société RATP Développement a transmis à la communauté d'agglomération ses engagements de fréquentation et à supposer même que cette donnée telle qu'elle a été renseignée sous forme de fréquentation en " voyages comptables " ait eu un impact sur l'analyse des offres ce qui n'est pas démontré, le moyen tiré de l'irrégularité de l'offre de la RATP Développement ne peut qu'être écarté. En ce qui concerne le moyen tiré de la dénaturation de l'offre de Kéolis sur les critères n° 1 " pertinence de l'offre, qualité d'exploitation, degré d'innovation et qualité d'exploitation ", n°2 " niveau des engagements financiers ", et n°3 " relation voyageurs et politique commerciale " : 7. Il n'appartient pas au juge du référé précontractuel, qui doit seulement se prononcer sur le respect, par le pouvoir adjudicateur, des obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation d'un contrat, de se prononcer sur l'appréciation portée sur la valeur d'une offre ou les mérites respectifs des différentes offres. Il lui appartient, en revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le pouvoir adjudicateur n'a pas dénaturé le contenu d'une offre en en méconnaissant ou en en altérant manifestement les termes et procédé ainsi à la sélection de l'attributaire du contrat en méconnaissance du principe fondamental d'égalité de traitement des candidats. 8. La société Kéolis soutient que la communauté d'agglomération de Saintes a dénaturé le contenu de l'offre qu'elle a présentée conduisant à une diminution non fondée de sa note finale et a ainsi méconnu le principe d'égalité de traitement. 9. Il résulte de l'instruction que sur le critère n°1 et sur le critère n°3, les offres des sociétés Kéolis et RATP Développement ont, toutes deux, été jugées " satisfaisantes " avec pour le critère n°1 la note de 18,75/25 et pour le critère n°3, la note de 15/20. Sur le critère n°2, la société Kéolis a vu son offre jugée " satisfaisante " et notée 18,75/25 alors que la société RATP Développement a obtenu 25/25. S'agissant du critère n°1 : 10. Il résulte de l'instruction que sur l'appréciation de la conformité et de la pertinence de l'offre de mobilité au regard des objectifs de dessertes, l'offre de la société Kéolis répondait aux attentes avec une bonne prise en compte du contexte local. Toutefois, les services transports à la demande, transport des personnes à mobilité réduite et VLS ont été estimés peu attractifs et les fréquences seulement " globalement maintenues ". Le rapport d'analyse des offres ne laisse pas apparaitre une dénaturation de l'offre de la société requérante sur ce point. Il résulte encore de la lecture du rapport de synthèse des offres que, contrairement à ce qui est soutenu par la requérante s'agissant des services de location longue durée de vélos, la proposition de livraison des vélos à domicile qu'elle a formulée a bien été examinée par la collectivité alors même qu'il apparaît que la société Kéolis n'a pas fourni d'engagement précis sur les modalités opérationnelles de création d'un réseau de partenaire en mairie avant la mise en place de ce service et qu'elle n'a pas remis la note synthétisant les objectifs du candidat en matière de développement de la fréquentation et leur formation relative aux services vélos qui était attendue. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que les termes de l'offre de la société Kéolis aient été manifestement altérés sur cet élément non plus. Pour ce qui est de la capacité à faire évoluer et à optimiser le réseau pendant la durée du contrat, il résulte de la synthèse de l'analyse que l'offre de la société Kéolis, présente une approche générale et sans spécificité. Contrairement à ce que prétend la société requérante, la mise en place de l'outil " custumer relationship management " a été prise en compte et son absence n'a pas été retenue en défaveur de Kéolis. Enfin, il résulte de l'instruction que les trois offres en concurrence ont été jugées équivalentes sur ce point. Concernant la pertinence des autres investissements pour le renouvellement et la maintenance des infrastructures et du patrimoine, il ressort de la synthèse de l'analyse que tous les éléments de l'offre de la société Kéolis ont été pris en considération, l'offre de Kéolis ayant été jugée " très complète ". Sur la qualité de service présentée dans l'offre technique du candidat, il ressort de la synthèse de l'analyse que l'offre proposée par la requérante a été jugée classique et satisfaisante. Il a cependant été relevé qu'aucune enquête spécifique à la qualité du service fourni aux usagers n'était proposée par la requérante. Si la société Kéolis indique prévoir des enquêtes dans son mémoire technique, ainsi que le fait observer justement la communauté d'agglomération de Saintes en défense, l'enquête de satisfaction proposée ne porte pas en tant que telle sur la qualité du service mais sur le réseau proposé. Le pouvoir adjudicateur n'apparaît pas s'être mépris sur la teneur de l'offre soumise à son appréciation. Par suite, la société Keolis n'est pas fondée à soutenir qu'en accordant la note jugée " satisfaisante " de 18,75/ sur 25 à son offre sur le critère n°1, le pouvoir adjudicateur aurait dénaturé cette offre en en altérant manifestement les termes. S'agissant du critère n°2 : 11. La société requérante fait valoir que son offre a été dénaturée en étant jugée seulement " satisfaisante " alors qu'elle était plus performante que l'offre de l'attributaire sur l'engagement du niveau de recettes et sur le taux de couverture des dépenses par les recettes. Toutefois, il résulte de l'instruction que, certes, la société Kéolis s'est engagée sur un niveau de recettes plus important que la société attributaire, mais qu'en contrepartie, le niveau de charges proposé était également plus important pour la collectivité et que le coût net sur la durée du contrat était au final plus important aussi. Ainsi, et eu égard aux autres éléments d'appréciation de ce critère qui ne sont pas contestés, et alors qu'elle ne peut utilement, eu égard à l'office du juge du référé précontractuel, contester l'appréciation portée par la communauté d'agglomération sur les mérites respectifs des offres, la requérante n'est pas fondée à soutenir que sa note de 18,75/25 reposerait sur une dénaturation des offres. S'agissant du critère n°3 : 12. Il résulte de l'instruction que sur l'élément d'appréciation relatif à la pertinence du plan d'actions commerciales et de la politique marketing et d'animation du réseau de commercialisation, l'offre de la société requérante était insuffisamment développée sur plusieurs aspects, et notamment sur la conquête de nouvelle clientèle, la sensibilisation, la fidélisation et la contribution à l'animation du réseau de commercialisation. Les éléments produits par la société requérante sur ces points dans son mémoire technique ne sont pas ajustés aux spécificités du réseau. Dès lors, l'offre de la société Kéolis a pu sans dénaturation être jugée seulement " satisfaisante " sur le critère 3. Par suite, la société Keolis n'est pas davantage fondée à soutenir qu'en accordant la note de 15/20 à son offre sur ce critère, le pouvoir adjudicateur a dénaturé cette offre. 13. Il résulte de ce qui précède que la société Kéolis n'est pas fondée à soutenir que son offre a été dénaturée. En ce qui concerne l'imprécision du critère n°4 d'analyse des offres " responsabilité sociale et environnementale " : 14. Si l'autorité concédante peut, pour sélectionner l'offre économiquement la plus avantageuse, mettre en œuvre des critères comprenant des aspects sociaux, c'est à la condition, notamment, qu'ils soient liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. A cet égard, des critères à caractère social, relatifs notamment à l'emploi, aux conditions de travail ou à l'insertion professionnelle des personnes en difficulté, peuvent concerner toutes les activités des entreprises soumissionnaires, pour autant qu'elles concourent à la réalisation des prestations prévues par le marché. Ces dispositions n'ont, en revanche, ni pour objet, ni pour effet de permettre l'utilisation d'un critère relatif à la politique générale de l'entreprise en matière sociale, apprécié au regard de l'ensemble de son activité et indistinctement applicable à l'ensemble des marchés de l'acheteur, indépendamment de l'objet ou des conditions d'exécution propres au marché en cause. 15. L 'article L. 3111-1 du code de la commande publique dispose que " La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale. " Aux termes de l'article L. 3114-2 du même code : " Les conditions d'exécution d'un contrat de concession peuvent prendre en compte des considérations relatives à l'économie, à l'innovation, à l'environnement, au domaine social ou à l'emploi, à condition qu'elles soient liées à l'objet du contrat de concession. " L'autorité concédante peut légalement prévoir d'apprécier les offres au regard d'un critère relatif aux performances sociales et environnementales notamment, dès lors que ce critère n'est pas discriminatoire et lui permet d'apprécier objectivement ces offres. 16. Il résulte de l'instruction et notamment du règlement de la consultation que les candidats étaient invités à présenter leur offre au regard notamment du critère de sélection relatif à " la politique sociale et environnementale ". Si la société Kéolis soutient que ce critère de sélection est imprécis, inadéquat et sans lien réel avec l'exécution du contrat, il était demandé, cependant, aux candidats de décrire leur politique de ressources humaines y compris la reprise du personnel, le recrutement, la formation des agents, l'insertion et l'égalité homme-femme dans le cadre de la délégation de service public. De même, les informations demandées aux candidats relatives à la " qualité des mesures environnementales " portaient sur la délégation de service public litigieuse. Le dossier de consultation contenait ainsi des précisions sur les attentes de l'établissement public en matière de responsabilité sociale et environnementale des candidats qui peuvent être jugées suffisantes. Ce critère qui ne peut ainsi être regardé comme étranger aux conditions d'exécution de la délégation de service public, ne confère pas à l'autorité concédante une marge de choix indéterminée et ne crée pas de rupture d'égalité entre les candidats. Par suite, la société Kéolis, qui n'expose pas en quoi ce critère aurait été susceptible de la léser, n'est pas fondée à soutenir que la communauté d'agglomération aurait mis en œuvre un critère illégal de sélection des offres basé sur des aspects sociaux et environnementaux sans lien avec l'exécution des prestations de la délégation de service public. 17. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la requête de la société Keolis présentées sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. 18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE

Article 1er : La requête de la société Kéolis est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté d'agglomération de Saintes et celles de la société RATP Développement tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Kéolis, à la communauté d'agglomération de Saintes, à la société RATP Développement et à la société Transdev. Fait à Poitiers, le 25 avril 2024. Le juge des référés Signé P. A La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour le greffier en chef, La greffière, Signé N. COLLET

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